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Pofezl’or en pleine feuille fur les parties ou vous
jugez que l’or doit s’arrêter , en appuyant tres-
légérement & fans haleter, comme on fait a la dorure
, ce qui feroit prendre l’or par-tout.
6°. Avec une brofle de poil neuf, nette & douce
, nettoyez l’or très - légèrement dans toutes les
hachures , de façon qu’il n’en refie qu’aux endroits
où on a pofé l’or couleur.
7°. L ’or épouffeté, prenez fur la palette un peu
de flil de grain, de jaune de Berry | broyés tres-nn
à l’huile, & mêlez-les enfemble en détrempant le
pinceau dans le godet où doit fe trouver 1 huile
gralïè , coupée moitié d’effence.
8°. PafTez légèrement de cette teinte, pour faire
un glacis fiir toutes les parties où il n’y a point
d’or : il y a de certains endroits où, fur le bord
des hachures, on fait des glacis pour adoucir de
trop grands éclats de lumière, qu’il faut modérer
pour faire valoir des parties brillantes.
pot L ’opération finie & sèche, faites des ^teintes
brunes avec de la terre de Sienne , terre d’Italie ,
ochre de rue broyées à l’huile, Sc détrempées a
l ’huile coupée d’effence.
Ces fortes de couches doivent être très-ménagées
& placées à propos, pour donner des reflets & de
la correâion à l’euvrage, & produire le plus grand
éclat.
Manière de glacer les couleurs.
Glacis, en terme de peinture, lignifie l’effet que
produit une couleur tranfparente qu’on applique
üxr une .autre qui eft déjà sèche, de maniéré ^ue
celle qui fert à glacer laiflfe appercevoir la première,
à laquelle elle donne feulement un ton ou plus
brillant, ou plus léger, ou plus tranfparent : les
glacis fervent à l’union des teintes & a l’harmonie
des différens tons.
Ainfî, glacer efl mettre une couleur qui a peu
de corps, ou une teinture qui laifle appercevoir le
fond fur lequel elle «il couchée.
On ne glace ordinairement qu’avec des couleurs
tranfparentes, telles que les laques, les flils de
grain, &c.
La terre d’ombre 8c la terre dé Cologne fervent
à glacer les bruns pour leur donner plus de force ;
le Diane de plomb, pour les parties claires auxquelles
on veut arrêter des coups de lumière , faire
des jours très-vifs & éclatans, & qui le font toujours
beaucoup plus que fi la même couleur étoit
peinte à l’ordinaire avec toutes fes différentes
teintes»
Marbrure. .
Lorfque les peintres veulent marbrer les cheminées
ou les lambris, ils commencent par faire la
maße ou le fond du marbre qu’ils doivent imiter.
Dès que cette première couche efl bien seche, ils
lui appliquent les nuancés qui font propres a chaque
efpèce de marbre.
Noüs ne pouvons terminer plus heureufèment cet
article de peinture d impreßion, que par un excellent
mémoire fur les couleurs, & en particulier fur
le blanc , lu à l’académie de Dijon, par M. de
Morveau, ancien avocat-général au parlement de
Bourgogne, fàvant académicien, & profond chymifte.
Ce mémoire efl intitulé:
Recherches pour perfeStionncr ■ la préparation des
couleurs employées dans la peinture.
Rien n’efl plus décourageant pour l’homme de
génie qui afpire à laiffer fur la toile les monumens
durables de fes fiiblimes conceptions, que 1 infta-
bilité des couleurs dont il efl oblige d’emprunter
l ’expreffion : tel efl cependant encore aujourd hui
le fort de la peinture, de cet art fi anciennement
cultivé , fi juftement honoré, & maigre les^ efforts
de tant d’artifles jaloux de leur gloire^ qui n’ont
confié leurs penfees qu’aux matières qu ils avoient
eux-mêmes préparées.
Il efl certain que plufieurs peintres célèbres ont
eux-mêmes préparé leurs couleurs ; quelques - uns
ont probablement été affez heureux pour parvenir
à les rendre plus belles & plus fixes, ou a les tirer
de matières moins fujettes à s’altérer.
Ceux qui ont le plus comparé de tableaux anciens
& modernes, m’ont aflfuré qu’il n’etoit pas poffible
: d’en douter : mais ces procédés ont été tenus fêcrets ;
la tradition en efl peut-être perdue ; c’eft a la chymie
à les retrouver ou à les remplacer.
Ce n’eft donc pas feulement parce que le peintre
a négligé d’acquérir les connoiflances chymiques qui
dévoient le guider en ce travail, c’eft bien plus
parce que la chymie a elle-même ignoré, jufques
dans ces derniers temps, la plus grande partie de
fes reffources. Mais j’ai cru qu’elle pouvoir enfin
puifèr dans le tréfor de fès nombreufès decouvertes,
des procédés pour créer , pour aflurer les nuances
'que defire là peinture ; j’ai entrepris de les déterminer
par l’expérience, je m’empreffe d’annoncer
le réfultat de ces premières recherches.
On a dit bien fouvent que les arts Ce dévoient
mutuellement des fècours ; mais ou l’a-t-on mieux
fènti que dans cette provfiice?
Le chef de notre école naifîante, M, de Vofge,
directeur de l’école gratuite de defïin , dont les
élèves ont déjà remporté la palme des concours ,
jufques dans cette ville fameufe où l’on ne marche,
pour ainfi dire, que fur des modèles du goût ; ce
digne profefTevir vient encore de nous prêtes ty11
•crayon élégant & fidèlé, poiir animer les types dun
nouveau fyftême de botanique.
Vous ne me demandez pas, meffieurs, qui efl-ce
quia produit, qui efl-ce qui entretient cette union
des fciences & des arts : croiffant enfemble fous les
. aufpices d’un prince qui leur partage une proteéhon
éclairée , fous une adminiftration paternelle qui
mefure fès bienfaits à leur utilité, il efl bien naturel
qu’ils aient l’émulation de fè fèrvir en freres,
puifqu’ils ne compofent qu’une même famille.
Le blanc efl de toutes les couleurs de la peinture
la plus importante : ce fèroitpeu de dire quelle
fert à adoucir les nuances de-toutes les autres, qu’elle
i leur communique ainfî les altérations qu’elle reçoit.
; Le blanc eft fur la palette du peintre, comme la
matière de la lumière qu’il diftribue avec intelligence
pour rapprocher les objets, pour leur donner
i du relief, & qui fait la magie de fès tableaux : a
mefiire que cette lumière s’affoiblit ou s’éteint, les
apparences changent, le preftige ceffe, & la toile
ne préfente enfin que des plans chargés de couleurs
| ternes & fans expreffion.
C’eft fur lui que j’ai en conféquence porté principalement
mon attention ; c’eft la feule couleur
dont je m’occuperai aujourd’h u i, réfèrvant a un
autre temps- les vues que j’ai recueillies de mes
expériences , pour fournir aux artiftes les autres
couleurs qu’ils font dans le cas de défîrer.
Examen des blancs connus.
Le premier blanc qui ait été connu » le fèul dont
on faffe encore ufage, eft celui que donne la chaux
de plomb ; la fimple théorie cnymique auroit du
la-faire proferire, parce que c’eft, après les métaux
parfaits , la fubftance métallique qui reprend le plus
aifément le feu fixe ou phlogiftique ; & la maladie
-terrible connue fous le nom de colique des peintres ,
ou colique de Poitou, à laquelle font expofés ceux
qui manient habituellement la terre du plomb ,
auroit bien dû , ce me ïèmble, engager à la recherche
d’une matière moins dangereufè.
Mais on n’a pas fèulement imagine qu il fut poC-
fible de remplacer la chaux de plomb ; &. moins
occupé du péril de l’artifte que de la perfedion de
l’art, on s’eft borné à en varier les préparations pour
eflayer de la rendre moins fiijette a s altérer.
De là la diftinCtion de blanc de Crems en Autriche,
On peut voir ce que dit à ce fujet le. célébré
auteur du dictionnaire de chymie, article plomb, 1
& l’extrait du primâ menfis de la faculté de médecine
de Paris; dans le journal de médecine;, du
mois de juin I78l. On y fait mention ; d’après le
rapport de M. Desbois, d’un peintre qui avoit efluyé
cinq fois en douze ans la colique de Poitou ; &
M. Doublet y donna l’obfèrvation d?un jeune homme,
qui étant entré bien portant:dans la boutique d’un
peintre , & s’y étant arrêté pour déjef.ndr, fut faifî,
une heure après, de convulfions qui àuroient fait
penfer qu’il étoit épileptique, & qui n’avoient d’autre,
caufè que la Colique dés peintres. Malgré tous les
fècours qu’on lui adminiftra, il ne reprit connoif-
fance que dix-huit heures après,
de blanc de plomb en écailles, de blanc de
cêrufe , que l’on trouve dans le commerce.
On fait que le fond de toutes ces couleurs efl la
chaux de plomb, plus ou moins pure, plus ou moins
chargée de craie ; ainfî, elles participent toutes es
qualités effentielles à cette terre métallique : ceux
qui en pourroient douter, en verront/la preuve par
l’expérience fûivante.
Expérience pour déterminer & démontrer Valtérabilité
des couleurs par la vapeur phlogiftique.
Je verfe dans un grand bocal de verre, ^ du foie
de fouffre ( à bafe d’alkali fixe ou volatil, il ^importe
) ; j’y ajoute quelques gouttes de vinaigre
diftillé, & je couvre auffi-tôt le bocal avec un carton
découpé, fur lequel j’ai difpofe différens échantillons
d’impreflion de Crems, de blanc de plomb & de
cérufe, foit à l’huile, foit en détrempe; je place un
fécond difque de carton furie premier, & par-deffus
le tout une veflie ficelée fur la gorge du bocal.
Il eft évident que je ne fais qu’emprunter ici les
moyens que m’offre la chymie, de dégager fur-le-
champ une grande quantité de phlogiftique, de produire
inftantanément l ’effet de plufieurs années; en
un mot d’appliquer à la toile d’épreuve lesmêmes
vapeurs auxquelles le tableau fèra neceflairement
expofé, feulement plus accumulées ou plus con-,
centrées.
Je dis les mêmes vapeurs, & cela n’a pas befoin
de preuves : tout le monde fait préfèntement que
la fumée des chandelles, les-exhalaifôns animales
de tout genre , la fimple refpiration , les odeurs
alkalefcentes, les effluves^ électriques , & même la
lumière, fouroifTent continuellement une quantité
plus ou moins confîdérable de matière, non pas
feulement analogue, mais identique avec le principe
neutralifànt de l’acide vitriolique dans le fbufre.
S’il arrive donc que les échantillons placés fur
le carton découpé de notre appareil, foient altérés
fènfiblement par la vapeur^ phlogiftique dégagée du
foie de fouffre par le vinaigre, on pourra conclure
avec aflurânee que la matière de ces couleurs a une
grande affinité avec .le phlogiftique, & puifqu’il n’efl
pas poffible de les préferver .entièrement de fon
contaâ, qu’elles éprouveront, avec le temps, des
variations plus ou moins fenfîbles, fuivant les cir-
éonftances.
.Après quelques minutes de féjour dans7a*V!fpeur
du foie de foufre, j’ôbferve les échantillons fournis
à cette épreuve; je trouve qu’ils font tous alttrds,
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