
cinquièmes d’eau avant que ce fel commence à
s’élever. Notre phyfîcien a éprouvé qu’en trouvant
l’art de conduire dans l’alambic un courant d’air
perpétuel a travers la liqueur d’eau bouillante, on
en diftilioit le double plus qu’on ne fait d'ordinaire.
M. Appleby a propofé de mettre dans l’eau de la
mer avant de la diftiller , une certaine quantité
d’une pâte faite d’un mélange de chaux vive & de
cendre de farment ; fa propriété eft de fixer les
parties falines bitumineules, & de procurer une eau
bonne à boire.
Il faut prendre quantité égale de cendres de farment
& de chaux vive, verfèr de l’eau ffir ce mélange,
décanter cette leffive, la réduire-à un quart
par l’évaporation, & pendant que la liqueur eft
bouillante, y jeter allez de chaux vive pulvérifée,
pour l’amener à l’état d’une pâte que l’on conferve
dans une bouteille bien bouchée. On en met une
certaine quantité dans l’eau de mer qu’on veut diftiller,
&on en obtient les trois quarts d’eau bonne à
boire. Gomme on emploie ici un cauftique violent,
cette méthode demande à n’être pas reçue légèrement.
M. Chervain, habitant de Saint-Domingue, a
annoncé 1 un nouveau procédé fort fimple pour défia- er l’eau de la mer. Ce procédé confifte à diftiller
l’eau de la mer .dans un alambic ordinaire. Après
avoir mélé dans cette eau une petite quantité d’huile 1
d’olive, cette huile vient nager à la furface de l’eau,
& l’auteur penfe qu’elle fert comme d’un philtre
très-lin, qui lailfe un libre palfage à la partie la plus
fubtile de l’eau; mais qui empêche en même tems
la partie falitie & bitunaineufe de s’élever pendant la
diftillation.
L ’eau, de mer que M. Chervain a loumile à
cette expérience, s’eft trouvée fans falure & fans ,
amertume après l’opération ; mais elle avoit acquis
une faveur d’huile qu’on lui a enlevée en la filtrant
dans un morceau de drap. Ne pourroit-on pas Amplifier
encore davantage cette méthode, en fuppri-
mant l’huile, dont l’addition exigé une fécondé
opération.
Nous favons que d’habiles chimiftes, après-avoir
analyfé l’eau de mer avec le plus grand foin, n’y ont
trouvé nul indice de matière bitumineufe, & que ces
mmêemnte ps octhaibmlei fftaenss l ’aounct urnen idnuteer tmrèès-ddeo, upcaer &un pea Arfmaiptele
diftillation bien ménagée. L ’efpèce de faveur amère
qu’on a remarquée dans l’eau de la mer, & qu’on
attribue à du bitume, lui vient d’une certaine quantité
de fel marin à bafe terreufe qui s’y rencontre.
En 1769 3 M. Ourfel a lu dans une féance de
l’académie de Rouen un mémoire dont le’but étoit
de conflater la'poflîbilité de rendre l’eau de la mer
potgble pa» la Ample filtration > çe qu’il a appuyé
d’expériences faites avec beaucoup de précautions en
préfence de M. Thiroux de Crofne, intendant de
Rouen : voici le procédé. On plaça deux vafes^ qui
côntenoient deux filtres compofés par M. Ourfel, &
après qu’il fe fut retiré, un des afiftans prit deux
autres vafes de foixante à foixante-dix pots, qu’il
remplit d’eau de mer aux deux tiers, & où l’on mêla,
pbur la colorer, un tiers de cidre. On prit quatrfe
pintes d’eau de la mer ainfî colorée, qu’on mêla
avec deux de cidre dans l’un des vafes filtrans. Apres
avoir fcellé lés vafes & l’appartement on fe retira.
Le lendemain, les fcellés levés, on trouva dans le
récipient du vafe la quantité d’environ deux pintes
d’eau de mer parfaitement colorée du cidre, &
filtrée de manière qu’il ne lui reftoit aucun goût de
fel ni des autres principes contenus dans l’eau marine
ordinaire. On remit encore une certaine quantité
d’eau de mer colorée dans le vafe avec les mêmes
précautions, & après la filtration les réfultats furent
les mêmes. Si cette utile découverte foütenoit les
épreuves en grand, elle feroit infiniment fupérieure
à toutes les machines & à toutes les diftillations
qu’on a pu faire jufqu’içi.
Au milieu des dange rs des mers glaciales ; la nature
y préfente des refiources. Samuel RehyeV, dit
que l ’eau de mer perd fon fel en fe glaçant : on prétend
que les braffeurs d’Amfterdam emploient l’eau
de la mer lorfqu’élle a été gelée & dégelée, à la
place d’eau douce, pour faire leur bière. 11 réfulte
des expériences de M. Rehyer, que les morceaux de
glace d’eau de mer font parfaitement doux ; que l’eau
voifine & fur laquelle la glace eft portée, n’eft point
falée : enfin, que l’eau tirée de défions la glace, au
moyen d’un fîphon & à un pied & demi de profondeur,
étoit médiocrement falée; que quatre livres
de cette eau, après fon évaporation par le moyen du'
feu, donna une once & un fcrupule & demi de fel.
En 1768, M. Rigaud, phyAcien & chimifte de la
marine du roi, profitant des obfervations de Walle-
rius & de Rehyer fur le delfalement que la congélation
peut procurer à l’eau de la mer, fit l’examea
& l’analyfe des glaces formées fur la furface de la
mer, afin de connoître fi l’on pourroit en boire fans
danger dans un cas de néceflité.
Après avoir pendant quelques heures laififé égouter
l’eau falée des glaçons, il les fit fondre & filtrer,
reconnut par l’épreuve de l ’aréomètre que l ’eau
avoit à-peu-près la pefanteur fpécifique des: bonnes
eaux de fource, fans odeur ni faveur ; qu’elle difîol-
voit le favon & cuifoit les légumes farineux ; il la
fournit à l’analyfe.
Huit livres de cette eau évaporée rendirent
trente-deux grains de réfidu fec , favoir quatorze
grains de terre calcaire, nou diffoute, deux grains de
félénite , douze grains de fel marin à bafe alkaline,
deux grains de fel marin à bafe tesreufe, converti
Spayrlv li’uads,d i&tio nd eduex la’aultkreasl i gvréagiéntsa ld een ffuebl fftéabnrciefu fgael indee gplearudbueer .dans les filtres. 11 n’y eut aucun indice de fel
Suivant le rapport fait par un officier revenant du
port Egmont, & inféré dans les papiers publics
d’Angleterre, les habitans du Pérou, lorfqu’ils font
le voyage de Buénofaire ou du Chili, portent toujours
avec eux une plante du Paraguay, appellée par
les Elpagnols ÿerva. canieni, & n’héfitent jamais de
boire l’eau qu’ils trouvent dans la route après l’y
avoir fait infufer pendant quelques minutes. Cette
plante a, dit-on, la rare vertu de purifier toutes les
feoaiuexn,t .quelqu’amères, falées ou corrompues qu’elles
51 De tous les dîfférens moyens ci-delfus rapportés , paroît que le plus avantageux & le plus certain eft
la diftillation; mais la difficulté de diftiller l’eau de
la mer en grand fur les vailfeaux vient ;'i°. de la
dépenfe qu’occafionne la matière combuftiblej
z°. de ce qu’en lailfant aller la diftillation à trop
grand feu, comme il arrive fôuvent quand l’opération
eft confiée à des manouvriers, il peut fe faire
qu’il s’élève avec l’eau une petite quantité de ma- ,
tière faline qui en altère la.qualité; 30. de ce que
par le roulis du vaiffeau, fur-tout dans les gros
tems, l’eau de l’alambic s’élance quelquefois dans
le chapiteau, & tombe en partie dans le récipient.
Voilà les obftacles qu’il faut vaincre en opérant fur
la mer.
M. Gauthier, médecin de Nantes, avoit imaginé
en 1717 une machine diftillatoire, au moyen de
laquelle on pouvoit diftilleravéc économie l’eau de la
mer en qualité fuffifante pour la confommation de
l’équipage d’un navire. Ce vailfeau diftillatoire, tout
excellent qu’il étoit, ne pouvoit fervir que fur terre,
comme un alambic ordinaire Sur mer, il arrivoit
que l’eau de lacucurbite étoit lancée dans le chapiteau
de l’alambic par le roulis du navire, & gâtoit
l’eau qui étoit déjà diftillée.
Le capitaine Néelland, dans les tranfadions
philofopbiques pour l’année 1772,, indique la conf-
truftion d’une efpèee d’alambic pour delïaler auffi
l’eau de la mer,' mais elle paroît d’un ufage'bien
inférieur à celle imaginée par M. Poifïonnier ; c’eft
pourquoi nous nous contenterons de donner ici une
idée de celle imaginée par ce médecin François.
Son. alambic a quelque rapport avec les alambics-
ordinaire , exceptée qu’elle eft quarrée, & qu’il y a
quelque petite différence dans la difpofition-du fourneau,
qui tend- à l’économie delà matière combustible.
Pour empêcher que le mouvement du navire ne
lançat des flaques d’eau dans le chapiteau pendant
Je roulis, qui auroient gâté l’eau déjà diftillée , il a
placé dans le haut 4e la cucurbite une platine *
d’étain ronde, & du diamètre de l’ouverture dur
chapiteau. Cette platine eft percée de trente-fept
trous ronds, de Ax lignes de diamètre, femblable à
un crible fans rebords; fur chacun des trous on
foude un tuyau d’étain de mêjne diamètre, & de fept
pouces de hauteur : ces tuyaux font maintenus par
leur partie fupérieure, dans leur fituation verticale,
par une fécondé platine d’un moindre diamètre,
percée d’autant de trous que la première , qu’on
foude à l’extrémité des tuyaux.
Au moyen de cette pièce qu’oit place dans l.e
chapiteau de l’alambic, les lames d’eau qui peuvent
etre lancées dans le chapiteau fe brffent contre la
platine, & il ne s’échappe jamais d’eau falée par
l’extrémité des tuyaux ; fi par hafard fl s’en échappe
un peu, elle retombe le long des tuyaux dans le
vcaennatrl ed ed el al ’dailfatimllabtiico,n ..& ne peut jamais enfiler le
De cette manière, on obtient une eau très-
bonne à boire, faine, & dégagée de toute l’âcreté
: occafionnée par le fel marin a bafe terreufe ; & cette
eau eft pure& falubre, pourvu cependant qu’on ne
la diftille pas jufqu’à ficcité ; car alors le fel marin
a bafe terreufe qu’elle contient, feul principe de fon
acreté, recevant immédiatement l’adion du feu,,
fe décompofeen partie, & fournit à l’eau allez d’acide
bmraitréin. pour lui donner un goût, & lui ôter fafalu-
M. Poiflbnnier eft allez bon phyAcien, dît
M. Beaumé, pour être bien perfûadé de l’inutilité
d’ajouter de l’alkali fixe à l’eau de mer qu’on veut
diftiller; mais comme on ne peut pas trop compter
fur l’exaétttude des matelots chargés de diftiller l’eau
de mer à bord, il recommande d’ajouter fix onces
d’alkali marin par chaque barique d’eau de mer qu’on,
veut diftiller. Ce fel décompofe tout le fel marin à
bafe terreufe , & forme en place autant de fel marin
qui ne peut point fe décompofer par l’adion du feu.
Au moyen de cette addition , fi, par négligence, les
matelots diftilloient jufqu’à ficcité feau de mer,
les demieres portions qui pafferoient, ne feroient
.pcooimntm ednifcfeémreenntet sd ed el’ ocpeélrlaesti oqnu.i 1o n. t été diftillées ait
On afait ufage avecfuccès de cette machine diftillatoire
fur les vailfeaux dans les voyages de long,
cours ; & M. de Bougainville, dans la relation de fon
voyage autour du monde, dit, d’une manière formelle,
qu’il doit à l’ufage de l’eau diftillée par cette
machine le falut de fon équipage;
Cette machine joint à fa grande utilité l’économie
de la matière combuftible; car des expériences
réitérées ont démontré qu’avec une barique de charbon
de terre de bonne qualité, & bien combuftible ,
qui pèfe à peu-pres le même poids, d’une, barique
d’eau douce, on peut obtenir depuis cinq jufqu’à
J