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Pour les fontaines qui font au milieu des cours,
les plombiers conduifentle jet au haut de la pyramide
, & le font fortir en gerbe par le moyen d’un
ajoutoir ; quelquefois ils enveloppent ce jet d’un
globe de plomb ou de pierre de taille , qui eft en
deux parties cimentées dans «leur joint. Ils l’enferment
hermétiquement & le rendent invifîble : alors
ils flanquent quatre petits tuyaux de fonte dans le
globe, & en font fortir quatre jets.
Ces fontaines font allez communes dans les provinces
: c’eft un avantage qu’elles ont fur Paris.
Il eft quantité d’autres formes qu’on peut donner
aux fontaines ., & qu’on ne peut pas rappeller
toutes : nous nous contenterons de ce que nous
en avons dit.
Des jets d'eau.
On entend par jetrd'eau, un grand baflïn de
pierre ou de marbre , qui eft horifontal à la terre,
& d’où il fort une gerbe d’eau plus ou moins forte,
qui retombe dans ce même baflïn. Elle s’élève a
une hauteur plus ou moins grande, félon la hauteur
de fa fource.
Il y en a une quantité prodigieufe aux environs
de Paris , dans les jardins & promenades publiques.
De la manière de faire les jets-d'eau.
Il faut que le plombier ait avec lui un maçon,
& qu’il lui falfe creufer un baflïn dans
la terre y au milieu duquel on fait un petit folle
où l’on pofe la petite boule d’ôü doit fortir le jet
ou la gerbe d’eau , & dans laquelle on doit déjà
avoir mis un bout de tuyau de conduite : on entend
par-là qU’il faut que cette boule ', qui eft ordinairement
de pierre, foit creufe en dedans.
Onfoude enfuiteun autre tuyau au premier, pour
le faire fortir hors du baflïn.
On pofe un autre tuyau avec foupape , pour
faire fortir les eaux du baflïn quand on voudra le
nettoyer.
On pave enfoite le baflïn , & on le cimenté
de telle manière que les eaux n’en puilfent point
s’écouler.
De la maniéré de fonder tajoutoir du jet-deau.
On entend par ajoutoir, ce morceau de cuivre
par où la gerbe d’eau palfe, & qui eft à l’ëxtrémité
du tuyau de conduite.
On fuppofe qu’on veuille fouder l’ajoutoir ; on
fait à ce fujet ce qu’on a fait par rapport aux robinets,
c’eft-à-dire , on le lime & on l’étame de
même ; on y verfe enfuite la foudure, qui y prend
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ainlî que fur du plomb gratté , & l’attache au tuyau
de conduite.
On remarquera ici qu’il ne faut pas que le tuyau
entre dans l’ajoutoir, comme cela devroit fe faire
fi on ne vouloit pas gêner le cours de l’eau ; il
faut au contraire faire entrer le bout de l’ajoutoir
dans l’orifice du tuyau, par la raîfon que plus l’eau
trouve de difficulté à fortir d’un vafe où elle eft
vivement preiïee , plus elle jaillit avec force &
rapidité.
C ’eft pour cette raifon qu’on fait l’orifice des
ajoutoirs même fi étroit.
De la continuation du foitdage des tuyaux de
. conduite.
■ On reprend la conduite au bas du baflïn , c’eft-
à-dire , on foude un tuyau à celui qu’on a déjà
pofé, toujours en faifant un noeud de foudure entre
les deux , & faifant entrer le tuyau qui doit donner
l’eau , dans celui qui la reçoit.
On continue ainfî jufqu’à l ’endroit où l ’on veut
prendre l ’eau.
Cela peutfe faire de deux manières, ou en con-
duifant le tuyau jufqu’au réfervoir , en telle forte
qu’il n’ait point de communication avec les autres
conduites, & qu’il en foit féparé, ou en l ’embranchant
à la première conduite de la fontaine dont
nous avons parlé plus haut : alors il faudra fe fer-
vir d’un robinet à une eau, l ’embranchement des
tuyaux en fera plus aifè.
Des nappes deau.
On entend par nappe d'eau, un jet ou plu-
fîeurs jets de fontaine, dont la chute eft brifée.
Il y en a de plufîeurs façons : les unes forment
un éventail, les autres tombent en forme ovale.
On peut en former une troifième partie de dif-
tribution.
Le travail eft le même que celui des fontaines
/ ordinaires & des jets-d’eau, quant à ce qui regarde
la pofe des tuyaux; toute la différence qu’il y a,
c’eft qu’on fait tomber le jet ou la gerbe d’eau fur
un baflïn peu profond & prefque plat, que les
plombiers jettent quelquefois en moule , lorfqu’il
n’y a perfonne pour les faire dans l’endroit, &
qu’ils font en plomb ; ils les font faire quand ils
font Amplement en pierre ou en marbre.
L ’eau brifée par ce baflïn , jaillit tout autour
dans un baflïn inférieur, qui la rend dans un
troifième baflïn par deux endroits.
Ce troifième baflïn doit avoir tfn trop plein qui,
toujours ouvert, donne paffage à une quantité d’eau
égale à celle qui tombe dans le baflin.
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L ’avantage que les baflïns de plomb ont fur les
baflins de marbre, c’eft qu’ils peuvent être bronzés
& enrichis d’une croûte d'or qui leur donne un
éclat infiniment fupérieur à celui du marbre : c’eft
de cette façon que font travaillés quantité de baflïns
& de ftatués qui décorent le fuperbe parc de Ver-
failles* Mais un mélange de l’un 6c de l’autre
fait un très-bon effet.
Des cafcades.
On entend par cafcade, une grande quantité
d’eau qui defcend du haut d’une élévation un peu
confîdérable avec rapidité , & qui tombant fur plu-
fieurs petits rochers ou efcaliers de maçonnerie, eft
brifée en une infinité d’ endroits.
Il faut que le plombier monte fes tuyaux à la
hauteur du lieu où, la cafcade- qu’on veut faire doit
être établie ; enfuite il doit les couvrir par un bafo
fin de marbre ou de plomb qu’il pourra jetter dans
des moules faits exprès ; ce baflïn doit etre perce
dans le milieu & plat, afin que l’eau fortant par
le tuyau, fe répande de coté & d’autre fur des degrés
de pierre de taille ou de marbre, & fuive la
chute qu’on lui prefcrit peur opérer l ’effet dont nous
venons de parler.
Quant à la manière de faire jouer ces jets & de ,
faire ces chûtes d’eau , il faut favoir premièrement
fi toutes ces pièces d’eau doivent aller à la fois ,
ou fi on ne veut en faire aller qu’une feule , & les
autres tour à tour, quand on le juge a propos.
Si on a une fuffifante quantité d’eau pour qu’elles
aillentv toujours, il n’y aura rien affaire, finon
qu’à laiffer couler l’eau qu’on a deftinee a chacune
d’elles.
Si au contraire on n’a qu’une eau , 8c qu’on veuille
Ta faire aller, tantôt à la fontaine, tantôt aux jets-
d’eau & tantôt à la cafcade, il faudra avoir recours
à des robinets dont le bouchon foit fait de telle
façon qu’il ferme le paffage à l’eau d’un cote , &
le lui ouvre !en même temps de l’autre.
Lorfqu’on voudra l ’eau à la fontaine , on donnera
l’eau au tuyau qui l’y conduit, en tournant le
bouchon du robinet d’un certain feus, & de meme
par rapport aux jets-d’eau & à la cafcade.
On fera cette opération toutes' les fois qu on
voudra changer le cours de fon- eau : c’eft, fafis
contredit, le plus gran d avantage que puiflent procurer
les robinets.
De la réparation des tuyaux de conduite.
Quelqu’attention qu’on apporte à: réparer tous les
défauts qu’on apperçoit aux tuyaux avant de les
mettre en place , il ne laide pas, d’arriver de
temps en temps qu’il fe fait des ouvertures par
où. l ’eau s’échappe ; elles, font quelquefois occa-
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données par la gelée, d’autres fois parce qu il fe
trouve aux tables dont on fait les tuyaux , ou^ a
ceux qui font jettes dans les moules , des parties
minces qui ne peuvent fuppbrter la charge de 1 eau qui
fort desréfervoirs fort élevés; enfin il fe rencontre
des défauts de foudure & des engorgemens de corps
durs qui percent les tuyaûx.
Dans tous ces cas, on s’apperçoit que les jets-
d’eau & les fontaines ne fourniflent plus la quantité
d’eau qu’ils donnoient auparavant; on eft alors
obligé, i° . de vifiter les conduits pour découvrir
où font les fradures & les pertes d’eau, & y remédier,
2°. D’y faire les réparations qui font néceffaires
pour les mettre en état.
Des moyens de découvrir les endroits des pertes
d'eau.
Il y a plufîeurs moyens de le faire, foit par le
fecours des gargouilles, foit par les regards , foit
par les fouilles.
On nomme proprement gargouilles, des conduites
de pierres de taille qu’on met au haut des ba-
timens pour recevoir l’eau des grands combles ;
mais les plombiers ont encore donné ce nom a un
- cordon.fouterrein de pierres de taille, qui eft creufc
en forme de gouttière, & cimente dans fes joints
pour recevoir leurs tuyaux.
Tous les tuyaux qui viennent de la pompe du
pont Notre-Dame, & qui entrent dans les différentes
conduites des fontaines de Paris , font pôles
fur ces fortes de gargouilles , pour empêcher l’eau
de percer dans les caves & la faire jaillir entre les
pavés. '
En effet, ne lui donnant aucun paffage en def-
fous , elles l’obligent à monter : ce qui eft très-'
propre à faire appercevoir les endroits des pertes-
d’eau , quand il arrive quelques fradures aux
! tuyaux.’
X,e plombier n’a befoin qüe de lüivre & examiner
avec attention le chemin ou les rues fous
lefquelles les conduites paflent ; il trouve bientôt
i où elles font en, défaut ; calots il doit s’y arrêter
& les réparer, comme nous le dirons dans la
l fuite.
Mais il eft plus difficile de découvrir le lieu.de
i la'fradure , Torfque l ’eau pouvant couler dans l’in-
terieur de la terre, ne fe manifefte pas à la fu-
perficie ; alors il faut avoir recours à un fécond
expédient.
Quand on ne fauroit appercevoir les lieux où les
tuyaux fuient, il faut vifiter les^regards : c’eft le
fécond moyen qu’ont les plombiers de découvrir
les endroits du défaut de leurs tuyaux.