
Des tables coulées fur fable.
Il faut i° . commencer par fe procurer les uften-
fîles qui font néceflaires à cette opération*
i° . Préparer le moule.
3°. Difpofer le plomb à être coulé*
4°. Le couler.
$°. L ’enlever de defïus le moule.
Ufienfiles nécejfaires.
Il faut premièrement avoir ce qu’on nomme le
moule avec la poêle.
2°. Un arrofoir.
3 °. Un labour.
4°. Un rable.
j° . Une plane.
Une truelle.
7°. Plufieurs cuillers.
8®. Une feipette. .
5>°. Enfin un levier.
Nous allons les détailler plus particulièrement
afin de marquer leur différens ufages.
L e moule dont fe fervent les ^.plombiers pour
couler des tables de plomb, forme une cailfe de
feize à dix-liuit pieds de long, fur quatre à cinq
pieds de large : elle a ordinairement huit pouces
de profondeur ; elle eft aflife fur plufieurs trétaux
de charpente, qui l’enlèvent de terre environ de
trois pieds, pour la commodité des ouvriers; le
tout eft de chêne , comme étant le bois le plus
lolide.
On met dans cette cailfe une couche de fable
d’environ fïx pouces d’épaifîèur, fur laquelle on
doit couler le plomb pour le réduire en tables.
L e fable qu’on emploie à Paris, & le plus propre
à cette opération, eft celui que l’on trouve
dans les fablonnières de Bellevîile, vers le Pré-
Saint-Gervais : il eft *d’une belle couleur; il n’eft
pas feulement propre à couler le plomb , les fondeurs
en cuivre en font ufage; il fert aux potiers
de terre pour allier avec la glaife.
Les plombiers’s’en fervent un an entier fans le
changér ; après ce tems-là , ils font en ufage de le ,
xenouveller , parce qu’alors il- efl»trop calciné', &
«’eft plus bon à aucun ufage.
Les plombiers qui ne feront point à portée de
s’en procurer , doivent s’étudier à découvrir dans
ieur voifînage le fable qui peut le plus leur cou- I
• venir. En général il faut fe fervir du fable le plus
doux & le plus fin qu’on puiflè trouvér.
La caiffe de ce moule qui contient la couche
de fable eft fermée , lorfqu’on ne s’en fert pas ,
d’une grande couverture de charpente, divifée en
plufieurs pièces portatives, afin d’avoir la facilité
de l’enlever quand on veut y couler quelques
tables.
Cette couverture efl faite pour empêcher la poi;£-
. fîère d’y entrer.
< Ce moule ne laifle pas que d’être utile lorfqu’on
n y coule pas: étant fermé avec'fa Couverture,
il forme un long & large établi qui peut fervir à
plufîeurs choies.
§ Les plombiers en font un endroit de décharge
ou ils mettent tantôt des rouleaux de tables qui
peuvent embarraffer l ’attelier, tantôt quantité
d’ autres uflenfîles qui ne les empêchent pas d’y
rouler en même temps leurs tuyaux & de les y
fouder, d’y tracer leurs cuvettes , de les couper,
&c. comme on le verra dans les chapitres qui. concernent
ces fortes d’ouvrages, où nous en avons
fait la defcription.
La poêle qui efl au bout de ce moule, & dans
laquelle on tranfporte le plomb de la chaudière pour
le couler fur le fable, efl de cuivre ; elle efl éva-
fée par-devant comme un éventail ouvert : fon fond
eft rond ainfi que fes côtés; par-devant elle a un
pied quatre pouces de large ; fon talon n’a qu’un
pied ; le pourtour de fes côtés eft fait en formé de;
bourrelet, & vient fe terminer en mourant vers le
devant de la poêle ‘ : elle reflèmble affez exaâe-
ment a un van a vanner le bled , excepté qu’elle
efl moins large. Elle efl enfermée dans un chaffis
de fer qui a une queue de deux pieds de long
pour aider les compagnons à la lever plus aifé-
ment. J, _
Cette poêle avec' fon chaflis fe place toujours air
haut du moule : elle efl foutenue fur un tréteau fait
de bois de charpente, dreffê à cet eftèt, que'‘la
plupart des plombiers couvrent d’une plaque de
plomb , pour la garantir de la chaleur que commu--
nique à la poêle & à fon chaflîs- le plomb qu’on,
ÿ met.
Ce qu on nomme Varrofoir efl véritablement un.
entonnoir de fer-blanc, femblable à celui dont on. *
fe fert pour^ remplir les bouteilles ; toute la différence
qu’il y a , c’eft qu’il efl un peu plus
grand.
Le labour efl un outil fait comme les bêches:
dont les jardiniers fe fervent pour labourer la terre.
L e rable eft une règle de bois d’un pouce d’é-
pailfeur, & de toute la largeur dû moule : il a aux
deux bouts deux petites entailles, dans lefquelles-
entrent les deux bords du moule, fur lequel on
l'appuie dans le milieu : il a un manche d’environ
trois pieds de long, pour donner la facilité
de le faire couler d’un bout du moule à l ’autre.
La plane eft une plaque de cuivre qui a environ,
un pied en quarré ; l’une de fes furfaces eft
polie , 9c l ’autre porte une poignée qui lui eft attachée*
La truelle eft femblable à celles dont les maçons
fe fervent pour leurs ouvrages.
La cuiller eft un vafe rond , qui a huit pouces
de diamètre fur deux de profondeur : elle a une
queue de neuf pouces de longueur, & elle reffem-
ble à une çaflèrole de cuifîne : elle contient environ
vingt-cinq ou trente livres de plomb ; c’eft
de cette cuiller dont fe fervent les ouvriers pour
tranfporter le plomb fondu & purifié, de la chaudière
dans la poêle.
La ferpette efl femblable à celle des vignerons ;
le manche a environ quatre pouces de long fur un
pouce de diamètre ; fa lame eft recourbée & tranchante
: il y a une petite élévation fur le dos ; de
cette ferpette, fur laquelle on frappe pour la faire
entrer plus aifément dans les corps que l ’on veut
divifèr.
Les plombiers s’en fervent pour féparer la table
coulée fur le fable , de fes rejets , comme nous le
dirons dans la fuite.
Enfin le levier .efl un morceau de bois rond ,
d’environ fîx pieds de long : on s’en fert à enlever
chaque table de defïus le moule, afin d’avoir
la commodité d’en couler une nouvelle : le milieu eft plus gros que fes extrémités ; fes deux boijts
forment une petite poignée qui empêche la main
de glilfer.
De la préparation du. moule.
Cette préparation^demande quatre différentes opérations.
i° . Il faut en arrofer le fable.
2°. Le labourer,
3°.. L e rabler.
4°. Enfin le planer.
Pour l’arrofçr, il faut commencer par enlever
la table qui couvre le moule 5 enfuîte on prend
l’arrofoir qu’on remplit d’eau , après en avoir bouché
l’orifice avec lé pouce ; on le porte de cette
manière fur le moule : on retire le doigt qui re-
tenoit l ’eau ; on la laifle couler fur le fable , dont
Ôn arrofe toute la furface en affez grand,e quantité
, pour que l’eàu puiffe pénétrer .& détremper
toute la profondeur de fa couche : il faut enfuite
la labourer.
Manière de labourer le fàble.
On entend par labourer le fable qui efl dans le
moule , le bécner : on prend, à cet effet, l ’outil
qui eft propre à cette opération ; on l’enfonce dans
le fable comme un jardinier enfonce fabeche dans
une terre qu’il veut préparer à quelque plantation ;
toute la différence qu’il y a , c’eft que l ’un fait
fon ouvrage avec le pied, au lieu que l ’autre ne
le fait qu’avec la main : du refte, il s’enfuit le
même effet.
Toute la furface du fable eft couverte de mottes
qu’on amoncèle les unes contre les autres, pour
les faire fécher.
Manière d'ecrafer les mottes.
Après avoir retourné la couche de fable, on la
nivelle : on fe fert, pour cet effet, du rable qu’on
fait couler d’un bout du moule à l ’autre ; par fon
moyen , on pulvèrife lès mottes, & on rend la couche
de fable , unie autant qu’elle peut l’être après
cette première opération. Cela ne fuffit pas; il faut
encore la planer.
Manière de préparer la plane•
i° . On la fait chauffer. Il eft une façon de l’avoir
chaude dans le moment ; au lieu de la laifler
une demi-heure devant le feu , & de perdre fon
temps à attendre , on ne fait que la pofer légèrement
fur la furface du plomb qui efl en fonte
dans la chaudière & dans l’inftant elle efl brûlante.
Il efl pourtant bon d’obferver que cette façon
| de faire chauffer la plane, qui eft la plus prompte ,
: n’eflpas la meilleure, & qu’il vaudroit mieux qu’elle
1 fut préfentée à la chaleur immédiate du feu : les
, ouvriers en conviennent ; mais comme ils préfèrent
le moyen le plus expéditif, ils choifîffent ordinairement
le premier expédient.
Soit qu’on la fafle chauffer en la préfentant au
feu, ou en la pofant fur la furface du plomb qui
eft dans la chaudière , il eft aifé de- fentir qu’il
faut avoir la précaution de fe garnir les mains avant
de la prendre ; pour cet effet, les ouvriers ont coutume
de fe faire une poignée de vieux chapeau ,
ou de prendre quelqu’autre chofe femblable, capable
de les empêcher de fe brûler.
2°. Avant d’appuyer cette plane fur le fable , il
faut avoir l’attention de frotter le côté qu’on y
; doit appliquer, avec de la graifle, pour la rendre
, plus douce.
"Les plombiers font en ufage d’en faire un petit
fachet qui fert à plufîeurs fois ; c’eft-à-dire , qu’ils en
renferment dans un linge un morceau de la groffeuç
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