
Lorfqu’on compare les lèvres, la langue, l’oefo-
pliage , l’eftomach & les inteftins entr'eux , la
ftru&ure de toutes ces parties paroît entièrement
femblable, étant toutes revêtues de cette efpèce de
cuticule qui eft attachée à la partie charnue par le
moyen d’un tiflu cellulaire, dans lequel fe trouvent
logés un grand nombre de nerfs, de vaiffeaux 8c
de glandes.
•Cette tunique cellulaire paroît fous la forme de
rides ou de valvules dans les endroits où elle fe
trouve épaifle & lâchement attachée, ou bien elle
le montre comme une fine membrane dans ceux
ou elle eft mince & tendue.
Il n’y a point d’organes dans tout le corps dont
il loit plus difficile de donner une idée bien nette
aux étudiaris en anatomie, que des organes de la
déglutition. \
Dans les fujets frais, il n’eftpas poflible de les
leur faire tous voir a la fois en fi tuât ion. Dans les
préparations humides , il n’eft guère poffible de
les placer de la manière qu’il convient pour leur
en faire prendre une notion exade. Ce qui réuffit
le mieux, eft de démontrer d'abord les parties les
plus frappantes fur une préparation sèche , laquelle
demandé beaucoup de patience pour être bien faite.
Si î’on fe propofe de garder les vifceres fecs, il
faut les préparer d'une manière particulière pour
en conferver la forme & pour en faire voir la ftruc-
ture du côté de la furface interne. Il faut pour cela
les remplir de quelque matière convenable;
Les propriétés que doit avoir cette matière font
de pouvoir réfîfter à la contraction des fibres de ces
vifceres, d’en remplir également les cavités, &
de les laiffer nets lorfqu’bn voudra l ’ôter. G’eft
pourquoi le coton , la laine , lé fable’ & autres matières
fémblàblès ne conviennent pas; tout ce qui
peut ferait mieux en pareil easj, c’eft lé v if argent
& la cirelfondue.
Il ne faut fe fervir de la cire qpe quand on a feulement
le dejléin de voir la furface externe ; auquel
cas on peut en pouffer dans la cavité des vifceres ;
mais dans les autres cas , il faut fe fervir de Pair
ou du v if argent.
Lorfque l’air pourra fuffire , il fera préférable
au vif-argent, parce qu’il diftend d’une manière uniforme
; au lieu que, ce dernier pèfe davantage fur
les parties inférieures, pair defféche les vifcères en
une vingtième partie du tems qu’il faut au vif-argent
pour cela; & il n’y lalïTe ni couleur, ni rien autre,
ce que fait toujours ce .fluide métallique.
Il eft vrai auffi que l’air ne diftend pas fuffifam-
ment certaines parties, qu’il eft impoffible de, le
retenir; & qu’il y a telles parties au travers def-■
quelles il s’échappe , & qu’il laifie aflaifler à mefure
qu’elles fe sèchent. Le vif-argent n’eft pas fujet aux
mêmes inçoiwénieus,
Il eft évident, par tout ce qui vient d’ctre dît,
que l’air eft néceffaire , ou qu’il eft de beaucoup
préférable au vif-argent pour faire des préparations
sèches de l’oefophage , de l ’eftomac , des inteftins,
de la véfîcule du fiel avec les conduits biliaires, &
de la veffie avec les uretères.
D’un autre coté, il eft également vifîble que le
péricarde&l'ucérus ne peuvent conferver leur forme
naturelle que par le moyen du vif-argent.
Ce fluide eft encore préférable lorfqu’il faut def-
fécher & diftendre le coeur & fes vaiffeaux fanguins,
& le baffinet du rein avec l ’uretere , parce que
toutes ces parties ont de petites ouvertures par le f
quelles s’ échappe l’air, qui ne fauroitd’ailleurs réfîfter
à la forte contraction de leurs fibres.
Les corps caverneux de la verge Sc les véfîcules
féminales retiennent également l ’air & le v i f
argent ; mais ce dernier laiffe dans les corps caverneux
quelque chofe de luifant qui empêche qu’on
ne puiffe voir à fouhait leur ftruéture interne & leurs
vaiffeaux.
On a auffi quelque difficulté à introduire le vif-
argent dans les véfîcules féminales , parce qu’on ne
fauroit l’injeCter par les ouvertures qui fe trouvent
dans le canal de l’uretre , au veru-monfànum ; &
lorfqu’on le pouffe par l’un des. vaiffeaux déférens,
l’humidité de ce conduit étroit eft propre à l’arrêter
dans fon paffage.
D’ailleurs , fuppofê qu’on vienne à bout de l’introduire
dans ce vaiffeau, il forcera par fon poids
l’ouverture d’un petit conduit commun au vaiffeau
déférent Sc à la véfîcule féminale, appelle conduit
éjaculateur; de'forte .qu’il ne psflera pas dans la
véfîcule féminale qu’il n’ait auparavant rempli la
cavité de l’urêtre. Au lieu que la confàâion naturelle
de l’extrémité du ; conduit éjaculateur s’op-
pofe à la fortie de l’air lorfqu’on fôufle tout doucement
, de manière qu’il paffe alors plus librement
dans le (tiffu cellulaire de la véfîcule féminale. Il
réfiïlte 'de toutes ces raifons , que. lorfqu’on veut
préparer les corps caverneux & les véfîcules féminales,
l’air eft préférable au vif-argent.
Ori rencontre rarement des fujets dont les poumons
& la rate retiennent l’air ; 8c ce fluidë s’échappe
ordinairement lorfqu’on l’introduit dans le
tiflu fpongieux du gland ; c’èft pourquoi on eft
obligé pour l’ordinaire de fe fervir du vif-argent
pour la préparation de ces parties. Ce fluide cependant
les gâte ordinairement, mais fur-tout les
poumons & ;le gland, dont les cellules font plus
petites que celles de la rate.
Quand on eft déterminé par les règles précédentes
für lè choix * de l’un ou de l’autre de ces
fluides , il faut exprimer tout le fang de la partie
qu’on fe propofe de préparer , & enfuite en lier toutes
les ouvertures, excepté celle par laquelle on doit
introduire le fluide néceffaire pour la diftendre : &
fi on en découvre quelqu’une par laquelle l’air ou
le vif-argent s’échappe dans le tems qu’on pouffe
l’un ou l ’autre dans la partie, ,on y fait une ligature.
Il faut toujours fe fervir d’un tuyau lorfqu’on
veut pouffer de l’ait dans quelque partie. Le meilleur
à cet ufage eft celui à la petite extrémité duquel
il y a une coche ou enraillure, & un robinet
un peu au-deffus.
Il faut introduire le petit bout du tuyau dan.s un
conduit propre à le recevoir 3 8c lier ce conduit fur
le tuyau avec un fil ciré qui doit entrer dans i’en-
taillure.
Dès qu’on s’apperçoit que le vîfcère eft fuffifam-
ment diftendu, on tourne Ie robinet pour empêcher
que l’air n’en forte; s’il vient à s’en-échapoer quelque
peu, on yfupplée facilement en fouffiantdans
le tuyau qui doit être foutenu par quelque cordé,
afin d’empêcher qu’il ne preffe ou -ne tiraille la
partie préparée dans le tems qu’elle sèche,
Lorfqu’on. fe fert du mercure ; il faut que l’ou-
verture par laquelle on l'introduit foit plus élevee
qu’aucune autre partie de la préparation,,; _8c lorfque
cette ouverture eft petite, il faut y ajufter un petit
tuyau ou un entonnoir de verre.
Ce tuyau doit être long dans le cas où l’on ne 1
fauroit avOjir une colonne de mercure affez. haute
pour que le poids le fa (Té pénétrer jufque dans les'
plus petits vaiffeaux, fî la partie préparée le permet.
Il faut lier fortement le canal par lequel on a
introduit le vif-argent ; ou autrement avant que d’y
en verfer une goutte, il faut que l’ouverture par
laquelle on le fera entrer foit âffurée, de manière
qu’elle fe trouve toujours en haut pendant tout le
tems que la préparation fera à fécher.
Les règles qu’on vient de donner ferviront pour
préparer la plupart des vifcères ; mais les' poumons 8c la rate, dont les membrane? retiennent difficilement
le vif-argent ou l’âir, & fur-tout ce dernier,
demandent plus de foin. Il ne faut pas prendre ces
vifcères indifféremment dans-toutes fortes de fujets;
on doit toujours choifîr ceux dont les membranes
extérieures font fortes & épaiffes; - •
Dès qu’on les a foufflés de la manière qu’il a été
dit ci-deffus, il faut les expofer au foleil ou les
tenir auprès du feu , afin de les faire fécher promptement
, & introduire de tems a autre de nouvel
air pour fuppléer à celui qu’ils perdent en peu de
tems.
Lorfque la furface extérieure fera sèche, on les
trempera dans un fort vernis de térébenthine, de
manière que leur furface. en foit toute couverte;
parce qu’après cette préparation j l’air s’en échapper
a bien plus difficilement: on continuera à les
expofer dans un endroit où ils puifient fécher 4e
plus promptement que faire fe pourra , en obfer-
vant de pafîer du vernis avec une plume aux endroits
où il en manquera * & de continuer à, y
pouffer de nouveau vent à mefure qu’ils s’affqif-
feront.
Lorfqu’on eft parvenu à avoir la rate humaine
diftendue par le moyen du vif-argent ou de irai t a
jufqu’à ce qu’elle foit defféchee, elle paroît entièrement
formée de cellules qui communiquent les
unes avec les autres, & fur les parois defquels on
voit un grand nombre de ramifications d’artères ,
fî on les a auparavant injectées.
Il refte à parler des moyens de conferver les parties
préparées •: c’eft de les expofer à l ’air jüfqu’àce
que toute leur humidité foit diffipée; alors elles deviennent
sèches, dures, & ne font pas fujettes à fe
Corrompre ; ou bien il faut les plonger dans* une
liqueur propre à les conferver. .
Il faut encore , principalement lorfque les parties
préparées font épaiffes & groffes, & que le tems
eft chaud, empêcher les. mouches d’en approcher &
d’y dépofer leurs oeufs, qui, transformés en peu de
tems en vers, y attireroient la corruption 8c les détruiraient.
On peut enfin les préferver des fouris & des in-
feéles, fî l’on trempe la préparation quelque tems
avant de la mettre fécher dans une diffolution de
fublimé corrofif faite avec Fefprit de vin ; & dans
le tems qu’elle sèche, il faut la mouiller de tems
en tems avec la même liqueur.
On peut par ce moyen & fans craindre aucun inconvénient
faire deffëcher des cadavres diffequés
d’enfans affez grands dans le milieu de l’été, pendant
lequel lés préparations sèchent en bien moins
de teins que dans l’hyver.
. Lorfque la préparation eft sèche , elle eft encore
expofée à fe réduire en poudre, à devenir caf-
fante, à fe gerfer & à avoir une furface inégale ;
c’eft pourquoi il eft néceffaire de la couvrir par1-
tout d’un vernis épais, dont oh mettra autant de
couches qu’il faudra pour qu’elle foit lui faute ; il
faut toujours auffi la préferver de la pouffière & de
l'humidité.
Les préparations sèches font utiles en, plufîeurs
cas ; mais il y en a beaucoup d’autres où il eft néceffaire
que les préparations anatomiques foient
flexibles 8c plus approchantes de l’état naturel, que
ne font ces premières. La difficulté a été jufqu’à
préfent de trouver une liqueur qui puifle les conferver
dans cet état approchant du naturel.
Les liqueurs aqueufes n’empêchent pas la pourriture
, & elles difiolvent les parties les plus dures
du corps*