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long-temps. On lui donne jufquà douze pouces eti
quarré, & pour épaifleur, on lui laiffe toute celle
de la couche, c’efl-à-dire , trois ou quatre pouces
communément. Avec ces dimenfîons , on ne peut
le placer que de champ , pofîtion qui, à la vérité
, le rend affez rude aux chevaux, mais de laquelle
réfulte une très-grande folidité.
Du rabot.
Le rabot mince comme le blocage, le prépare
& s’arrange comme lui. Dans le refie, tous rapports
eeffent entr’eux. Le liais , ou les plaquieres^
qui fourniflent le rabot, n’égalent point en dureté
la pierre meulière. Ces. (ubfiances font d’ailleurs
fujettes à fe fendre ; auffi , les règlemens en inter-
difent-ils l’ufage dans la capitale.
Du cailloutage.
Dans, les. cantons ou les cailloux font mis en
oeuvre "pour pavés, on a l’attention de ne recueillir
que les plus forts, & fpécialement ceux qui
figurent, une poire. Cet allongement aide à les contenir.
Remarquons, en outre, que le caillou puifé
dans la terre efl fupé rieur au caillou qu’on ramaf-
ferort indiftin&ement çà & là. Toute dure qu’efl
cette matière , l’air , à la longue , l’attendrit & la
détériore. Un caillou , dont la fùrface blanchit , n’efl
déjà plus un caillou parfait; il tend à fe décom-
pofer , a reprendre lés propriétés de l’argile ,
dont il efl forme. Mais n’empiétons pas fur
l’Hifloire naturelle ; je revieiis à mon 'objet,, en
ajoutant qtj^ les cailloux, ainfî viciés, font à rë-
jetter.
Des differentes pentes a donner au terrain , avant
’ de pavef.
L ’établiffement des pentes fùppofe la connoif
fance du nivellement. C’efl la partie de l’ingénieur
ou.de celui qui dirige l’ouvrage. V o y e lle Dictionnaire
de Mathématiques, tome z , page 456 8c
fuivantes. j’obferverai feulement ici, que les rues des
villes, toujours accompagnées d’édifices ou de murs,
exigent indépendamment d’une première pente latérale,
par-tout néçêffaire , & par-tout d’un pouce
par. pied , une autre'. , pente appellée courante ,
moins rpide que la ’pënte latérale, mais qui fuiye
toute la longueur dès rues & déBarraffe les eaux.‘_ J
Si la fiiperficie du pavé prcfentoit un poli régulier
, & que les eaux ne raflent jamais ni fura-
bp.ndantes. ni chargées de .matières épaiffes, une
ligne d’inc-linaifoiV par toifé .ferait plus que fùffi-
fante pour la pejitè'; courante. L ’hydraùüque, en
bien des-,-cas, fe consente, de là moitié ; mais ici ,
jamais les eaux, ne ./font . pures,, & l’inegamé.^dù
plan oppôfe encore.;un frottement , une réhftançè
ponfîdérable. On augmente'donc là'pèntVcbüràrité,
& s’il efl poffible,, on la porte par toile , jufqu’à
cinq ou fîx lignes.
Cette pente efl tellement indifpenfable pour les
villes, que dans celles où le fol offre un niveau
trop parfait, on efl forcé, pour évacuer les eaux,
de leur procurer une fuite fouterreine , à l’aide de
tuyaux condufteurs qui, réunis & convenablement
inclinés, aboutiffent ou dans des égouts, ou juff-
qu’au-delà de l’enceinte.
Au refie, il n’efl pas ordinaire que la pente
courante d’une ville amène de nouvelles opérations,
à moins de quelqu’agrandiflement récent, le paveur
la trouve établie, & l’intérêt commun demande
qu’on la refpede. Le plus léger, changement,
un redreffement de caprice , peut çonflkuer
en frais les habitans de plufîeurs rués', les contraindre,
ou de rehaufler, ou de rabaiffer, & l ’entrée
de leur maifon & l ’aire de tous les Bâtimens
qu’elle renferme. U ne adminiflration fàge rejettera
donc toute innovation qui ne fera point ordonnée
par la néceflké.
Des voies en chauffées, des voies a doubles revers
& des accôtemens.
On entend par voies en chauffée, celles qui,
fous une forme bombée, ont leur plus grande élévation
dans le milieu.
Les voies à double revers ont au contraire cette
élévation fur les ailes. Le milieu en efl le point
le plus creux, & coriféquemment le point d’écoulement.
Le double revers raffemble dope fes eaux ,
tandis que la chauffée rejette les fiennes, à-peu-
près comme le feroit un toit.
Le ruifleau , dans le double revers, efl unique,
mais il efl de rigueur. Il n’en efl pas ainfî des
1 chauffées. En ville , toute chauffée demande deux
ruiffeaux : hors des villes, les ruiffeaux aux chauffées
deviennent inutiles , & ces différences ont un
fondement raifonné. Dans les villes , en effet, les
accôtemens ne font pas moins hauts que le milieu
de la chauffée. S’ils étoient plus bas , 1e moindre
orage , une pluie forte inonderait les habitans. Les
accôtemens ici doivent fervir de remparts aux eaux,
en garantir les cours, les fbupiraux des caves, &c.
Or chaque ligne, qui fépareune chauffée de tout
accotement élevé , forme un véritable ruifleau. En
pleine campagne, les accôtemens ont pour niveau le
point inférieur de la . chauffée. Que par fois, ils
: foient inondés , ces fubmerfions momentanées - n’entraînent
pas'd’inconvéniens : aucune demeure n’en
fouffre. Il fiiffit que les eaux n’y fë joliment:, point
& qu’à l’aide d’une inclinaifon douce elles puiffent
gagner les foffés ou les terres, voifînes:, & peu importe
que dans cette marche elles traverfent :un
fol toujours battu , toujours affez confolidé , pour
que jamais il ne fôit entamé par leur paffa'ge.
Les deux ruiffeaux dans les villes ne fervent
oas feulement à l’écoulement de la rue. Ils déchargent
encore les maifons , & des eaux ^ qui s y
emploient, & de celles que leur fuperficie reçoit
de l’atmofphère.
Cequi vient d’être dit des accôtemens m’exempte
de les définir. On voit qu’en ville , l’accotement
efl l’efpace qui s’étend depuis chaque ruifleau dune
chauffée, jufqu’à l’alignement des habitations ;• &
dans les campagnes, depuis chaque lifîère de la
chauffée jufqu’auxN foffés, s’il en exifte , & s’il
në s’en trouve pas, jufques à trois ou quatretoifes
de diftance. Dans les villes, les accôtemens font
payés ; dans le dehors, on fe borne à lès revê-. :
tir de gravier, & fouvent on les laiffe en terre.
Gauthier, dans fbn Traité de h conflrudton des
Chemins, pages 5* & 56, examine les effets des
charrois tant fur les chauffées que fûr les doubles
[ revers. Ses obfervations une fois' conçues me paroif-
fent intéreffantes : rapportons le texte même , en
\ élaguant pourtant ce qu’il y a d’obfcur.
« Les deux difpofitîons de ces pavés étant toutes
f » contraires, ont auffi dés effets tous différons. Le
! » premier, (celui eii chauffée), pouffe, toujours vers
• » les bordures les terres & tout ce qui le retient
| » parle poids des voitures, qui affaiffe fâns ceffe
L » la ligne convexe ,#enforte que bien fouvent le
I » pavé perd entièrement la première forme, en
I » acquiert une toute plattë , qu’il faut pour lors
I V relever tout-à-fait à bout, afin de le remettre
I » en fbn premier état, à caufe qu’il fe définit fi
| » on le laiffe ainfî ; au lieu que le dernier ; ( ce- .
» lui à revers double) réunit toute lapouffée vers
» le ruifleau de fbn milieu ».
Gauthier conclut de là qu’ori doit rejetter lés
pavages en chauffées , quand on a lieu d’appréhender
le reculement des bordures, fbit parce que les
pierres deftinéës à ces bordures, trop ramafleès &
fans queue, ne prendraient point affez avant dans |
le terrain,- fbit que le terrain manquant de con-
fiffance, ne les retiendrait -pas fuffifàmment,quelque
fut leur longueur ; & ces remarques font juffes. Elles
ne peuvent concerner toutefois que les chemins en
plein pays , puifqu’en v ille , les chauffées ont pour
point d’appui des accôtemens rendus foliées en
deffus par un pavé, & foutenus en flanc par des
.murs, dont la réfîfiance efl inébranlable.
Ainfî, généralement parlant, on a le choix dans
les villes, ou des chauffées , ou des doubles revers.
La forme des revers efl cependant à préférer , s’il
efl queflion de rues étroites. Deux' accôtemens &
deux ruiffeaux occupent au moins quatre à1 cinq
pieds, & quand une rue fe trouve déjà refferrée ,
quatre à cinq pied deviennent précieux.,
Dans les rues plus ouvertes, il efl fans înçon-
veniens de fàcrifier aux accôtemens Une demi-
toifè, ou davantage. C ’efl alors que fur l’adop-
Arts & Métiers. Tcm. F I .
tioti des. formes, il efl permis, en quelque forte j
de ne confiilter que la fantaifie.
Le même auteur fait mention de rues à deux
chauffées, renfermées entre trois ruiffeaux. De telles
rües fùppofent un grand efpace, & fans doute auffi la
décharge forcée d’autres rues fupérieurès, qui pour
l ’enfèmble de leurs eaux , exigent au-dela des ecou-
lemens ordinaires. Cette complication n’efl pourtant
jamais de néceflité : fans multiplier les ruiffeaux ,
on leur donne plus. de profondeur, & les eaux af-
fluentes s?évacuent également. Les chauffées doubles
n’étoient point inconnues aux. anciens : voyez B ri*
dault, Coutumes des Romains, tome fécond.
Marfeille , dans fa ville neuve, a fu former des
rues , dont les capitales même afirorent droit d’être
jaloufes. La ru.e du Cours , bordée d’édifices fuper-
bes & parfaitement pavée, le long de ces édifices,
offre, dans fbn milieu, toute’la"beauté, tout l’enchantement
d’une campagne foignée. D’immenfes
rangées d’arbres touffus y font régner une ombre perpétuelle;
& le fo l, couvert d’un gravier menu , ne
retient que les eaux qui fervent à le raffraichir.. ^ ’
Londres ne préfente point cette rianté image
des champs : mais fes trottpirs commodes , & répandus
avec profufîori dans fa vafte enceinte, ne mé;
ritent pas moins 8cla reconnoiflance des habitans,
& le fûffirage de l’étranger. A Londres , l ’homme
fans fortune , & l’homme fîmple , qui ne dédaignent
point de marcher à pied,"foulent un ÿavè toujours
fec. Elevés fur cette terraffe de falut, ils n’ont rien
à redouter du tourbillon menaçant des voitures>
Que les courfiers qui-ies enlèvent redoublent d’im-
l pétuQfité : qu’ils méconnoiffent ou qu’ils rompent
leur frein ; le citoyen tranquille & remparé,. ne
hâte , ni ne détourne, fa marche paifible.
J’ai prefqu’à me repentir d’avoir ici rappelle des
avantagés ? d’exception , impofîibles à fe procurér
:dans les villes déjà formées/ Mais, fans chercher,
je citerais du moins plùfîeurs de ces. villes où i’é,-
tabliffement d’une promenade publique & champêtre
trouverait dix emplàcemens propices. Je vou-
■ drois, par exemple , que tout marché fpacieux
renfermât une plantation régulière. Je n’héfîterois
pas d’entourer une grande place, ou de tilleuls,
ou de maronièrs ; je doublerais , je triplerais même
le cordon fi le terrain m’en laiffoit la marge. Les
frais, d’entretien n’égaleraient certainement point la
dépenfe d’un aride pavé qu’on épargnerait alors ;
& ees lieux métamorphôfés prendraient, dans la fai-
fon où la nature fourit par-tout, un coup-d’oeil de
verdure & de gaieté.
Fitruve -& Palladio prétendent que, dans les
climats chauds , les rues , doivent être étroites
& les bâtimens élevés. « C ’efl un .bien, difent-
- » ils , que les -rues ne reçoivent point le foleil :
» la chaleur fe fait moins fentir , & les habita-
» tions en font plus faines », Malgré tout mon ref-
N