
Quand ces toiles (ont bien sèches, on les enduit
avec un couteau d’une couche d’impreflion faite
avec du blanc de plomb, broyé fin, & de l ’huile
d’oeillet ou de pavot, la plus blanche qu’on puilfe
trouver.
Cette première couche étant fuffifamment sèche
pour qu’on puifle la racler uniment , on en met .
plufîeurs s’il eft néceflaire.
Comme il eft très-important pour; -la çonfèrvation
de cette peinture, que ces diverfes couches foient
purgées d’huile autant que faire fe peut, pour
qu’elles puiflent emboire celle des couleurs qu’on
doit y appliquer, il faut que leur fîiperficie fbit
très-unie, très-sècbe & très-dure.
On prend enfîiite un cercle de cuivre d’environ '
vingt lignes de diamètre, de trois ou qftatre lignes,
de hauteur, d’une demi-ligne d’cpaifleur, tourné;
à angle droit, & peint en noir en dedans.
Ce cercle fert à contenir fur la fîiperficie du tableau,
de l’eau difiillée de pluie ou de neige.
On'doit donner la préférence à cette dernière,
parce que l’eau ordinaire , par la nature des tels
qu’elle contient, eft nuifîble à la peinture dont nous
parlons.
Il faut obferver aufli que les couleurs doivent
être broyées entre deux agathes d’orient, & miles
à l’abri de la pouflière, de la manière la plus fcru-
puleufè , & mêlées avec de l ’huile de pavot ou
d’autres graines fîcatives, extraite fans feu & aufli
blanche que l’eau.
Toutes'les couleurs étant bien broyées; on les
met en petits tas fur un petit morceau de verre qu’on
tient fous l’eau diftillée, dans une boîte d’étain.
Qand on a préparé les matériaux, on trace fur
une des petites toiles dont il a été queftion, & on
defline très-légèrement le fujet avec la mine de
plomb.
On prend de ces petits tas de couleurs , qui font
fous l’eau, on en forme des teintes fur la palette,
on la place enfîiite fur la main gauche, en faifànt
à l ’ordinaire pafler le pouce par fon ouverture.
On prend le tableau entre le pouce & le fécond
doigt, on le fbutient avec celui du milieu, on met
quelque^ pinceaux entre le quatrième & le petit
doigt, on s’appuie contre le doflier de la chaifè, & on
travaille en l’a ir , afin d’avoir la liberté d’approcher
ou de reculer fon ouvrage de l’oeil. .
Pour nettoyer fès pinceaux, il faut les tremper
dans l’efîènce de térébenthine reétifiée.v
Après avoir ébauché fon tableau avec des couleurs
encore fraîches, on applique horizontalement
fur la furface du tout, le cercle de cuivre qui dçit
entourer le tableau?
On verfè dans l’intérieur une ligne Si demie
d’eau diftillée; on penche un peu le corps en avant,
afin que la vue porte perpendiculairement fur le
tableau.
On appuie le quatrième doigt de la main droite
fur l’angle droit interne du tableau.
On parcourt avec un pinceau ferme & fin fon
ébauche , pour charger de couleur les endroits foi-
bles, adoucir, ceux qui paroiflènt trop forts, travailler
& empâter.
Dès que l’huile fùrnage, on jette' l’eau, on couvre
le tableau avec un verre de montre , on l ’enveloppe
exactement, & on le met fécherdans une
! boîte, à une chaleur douce.
Quand il eft aflez fèc pour être raclé prefqu’à plat
avec le couteau , on recommence l’opération ci-
■ defliis , jufqu’à ce qu’on fbit content de fon ouvrage.
C’eft dans ce dernier travail que l’artîfte fent
tout l’avantage de cette nouvelle méthode pour le
fini.
Le vernis d’eau qu’on verfè fur le tableau, met
à découvert tous les défauts du pinceau, & donne
la facilité de fouiller dans le fond des ombres,
pour corriger, perfectionner, &ç.
Lorfque la peinture eft finie, on la met fous
un crÿftal, en interceptant l ’air, & la renfermant
exactement par le moyen d’un mordant fans couleur,
paffé. à une chaleur douce.
P e i n t u r e sur e s t a m p e . -
C’eft' moins un art qu’un amufèment de peindre
fur verre d’après une eftampe.
L e procédé en -eft fîmple .& facile.
Faites tremper l’eftampe que vous voulez copier
& colorier. Lorfqu’elle eft bien •détrempée , appli-
quez-la fur un verre blanc bu une glace que vous
aurez frottée de térébenthineaprès quoi pafîèz légèrement
la main fur l’eftampe, jufqu’à ce qu’il n’y
refte plus que Pâme, ç’èft-a-dire, la gravure 8c
l ’impreflion.
Lorfque vous aurez aînfî les traits, lés ombres
& les clairs de l’image, fixés fur le verre , il fera
facile de la colorier v & d’y diftribuer, à la manière
des énlumineufès, les couleurs de carnation , de dra*
peries , de fabriques , dé verdure , &c.
Mais pour fâtisfaire entièrement lesperfonnes qui fê
font une occupation de ce genre de peinture aufli
prompt que facile ; il faut encore rapporter ici les
procédés que M. Watin enfèigne dans fbn trajté dç
l’art du peintre-dorçur-vçrniiteur»
i.
AJfortiment néeeff,aire pour ce genre de peinture.
Tout l’aflortiment fè trouve chez M. Watin dans
une-grande boîte qui en contient dix-huit petites,
toutes étiquetées. .
Dans chacune d’elles , font les couleurs nécef-
faires pour faire les tons & nuances dont fe fert
la peinture. En voici le détail, >
Blanc deplomb.
Carmin fiiperfin. .
Laque carminée.
Vermillon.
Bleu de Pruflè.
Noir d’ivoire.
Stil de grain de Troies.
Jaune d’ochre clair.
Ja'.me de Naples.
Jaune de Ruflie.
Jaune de Roi.
Rouge d’Angleterre.
Une veîfie de blanc de cérufe broyé à l ’huile fi-
cative.
Un fiacon d’huile fîcative.
Un flacon d’huile de pavot.
Un flacon d’eflènee reétifiée.
Douze pinceaux avec leurs, hampes.
Deux brofles de Lyon.
Un pinceau monté en fer-blanc. Un couteau .à palette.
Un couteau d’ivoire, qui fert à broyer les jaunes.
Une palette de- verre.
Une palette de bois, i •
Un godet de fer-blanc. Rouge de Pruflè.
Ochrè de rue.
Terre d’ombre.. -
Terre d’ombre calcinée.
Terre, verte.
Verd-de-gris cryftallifé.
Un pinceliér.
Une bouteille de vernis.
Une petite éponge.
Les portraits du roi & de" la reine.
Deux chaflis.
Plufîeurs cadres pèints.
Cet aflortiment complet fe vend 48 livres.
I I .
Préparatifs & préceptes.
La boîte offre deux eftampes , dont l’une re-
pre fente Louis X V I , & l’autre , fbn augufte époùfè.
|; ujLe des deux eftampes ' eft déjà appliquée fur le
chaflis, & prête,à recevoir le 1 eft pas. vernis; l’autre ne
C ’eft fur les eftampes qu’on peint. Ce qui fait
, le charme de cette maniéré , c’eft qu’il n’eft pas
; Ppflihle de découvrir que c’eft fur une eftampe
qu on a travaillé lorfqu’elle eft finie, à moins qu’on
n’en convienne ou qu’on n’ait été découvert, fur-
tout fî 1 on a foin de fîipprimer l’impreflion qui fè
trouve au bas des gravures. On indiquera le teins
de cette fuppreflion.
Préparation de Veftampe.
Les eftampes qu on veut peindre doivent être
en manière noire j les angloifes font plus chères
mais préférables.
1°. Etendez 1 eftampe , la face tournée fur une
ferviette propre, pofée fur une table.
/ ,7'° ' R^bibéz-la d’eau claire avec une éponge
légèrement, laifl’ez-la s’humeéter ; les eftampesan-
gloifès, dont lepapier eft ordinairement plus fort
fbnt plus difficiles à fe mouiller.
3 °. Ayez un chaflis de la grandeur de votre e f tampe
; quand elle eft prefque sèche, mais néanmoins
encore un peu humide , collez - y l ’eftampe
fur ies rives externes , & de manière que la gravure
le voie en entier dans le quarré du chaflis, la face
en dehors.
4 • Tournez le chaflis de façon que vous ayez
leftampe en face devant vous ;* & avec les deux
pouces, étendez-la fur les rives du chaflis. Laiflèz-
ia fecher.
1°. Quand elle eft seche , elle doit être tendue
& ferme comme la peau d’un . tambour; alors elle
eft préparée & prête à recevoir le vernis.
L ’eftampe du roi, collée fur le chaflis , fera
mieux entendre ce que nous voulons expliquer. Retirez
de ce chaflis le fécond chaflis garni d’une-toile
qui s’y. trouve emboîté.
Application du vernis.
J*. Ne mettez jamais de vernis ni de couche de
couleur que la précédente couche ne foit sèche , ce •
.que vous reconnoîtrez lorfqu’en pofant le dos de la-
main il ne s’y attachera point.
Etendez uniment & le plus également poffible,
le. vernis.
‘2°. Quand vous aurez verni ou peint votre eA
rampe, coucliez-la toujours à plat, la face recio fur
une.table, propre, de-peur que le vernis ou la cou-
leur. ne coule le long du tableau.
N. B. Quand nous parlerons de l’eflampe, pour