
L a raquette ordinaire a la tête de huit pouces
de long, de cinq pouces de large vers fon milieu;
le manche, y compris fon étançon, quinze pouces
de long ; le bois de toute la raquette a un demi-
pouce d’épais, fur un pouce.
La demi-paume n’eft autre chofè qu’une raquette,
dont le bois eft moins épais, ce qui la rend plus
légère.
La raquette en battoir eft une raquette toute
droite, imitant le battoir, & plus étroite que
la raquette ordinaire.
Les inßrutnens font entièrement de bois de (aule,
collés, nervés, recouverts de parchemin. Ils font
au nombre de quatre : le battoir, le demi-battoir ^
le triquet, le demi-triquet.
Le battoir eft compofé de trois pièces, qui forment
fa tête : celle du milieu prolongée fait le
manche; la tête a huit pouces de long, cinq pouces
de large; le manche a un pied de long.
Le triquet n’eft que d’une piece ; il a huit pouces
& demi de tête, laquelle a deux pouces trois
quarts de large ; le manche a quatorze pouces de
long.
Le demi-triquet n’eft aufti que d’une pièce ; fa
tête n’a que deux pouces & demie de large ; le
refte des proportions comme au triquet.
Les meilleurs de tous ces inftmmens de bois
fe font à Liancourt,' près de Clermont en Beau-
voifîs.
Quant à la conftrudion de la raquette, on choi-
fît d’abord le meilleur bois de frêne.
Les billes du tronc de cet arbre qu’on y deftine',
doivent être les premières coupes fur la racine de
frêne âgé de dix ans , & avoir cinq pieds de long.
Celles d’au-defliis de cette première coupe n’y valent
rien ; elles font caflfäntes.
On les refend en échalas, qu’on met en bottes pour
les vendre; mais parmi les maîtres, ceux qui. s’adonnent
aux raquettes, font toujours mieux dé choifîr la
bille entière & bien faine, de la refendre eux-
mêmes avec le coutre de bûcheron, de bûcher les
échalas avec la hachette , pour enfuite les planer
fur leur chevalet. C ’eft à cettê dernière façon que
commence le métier.
Le bois de, tilleul, ou autre bois blanc, ne fert
que pour Fétançon , dont on parlera bientôt*
Quand l ’échalas du frêne eft taillé gro(fisrenient
, il s’agit de le rendre égal d’un bout à
l ’autre.
Pour cet effet, le paumier s’afleoit fur le banc
du chevalet -, & pouffant èn avant avec fon pied la
pièce mobile, il en amène ta tête contre la planchette.
Cette tête, garnie èn-deffous de quelques '
pointes, ferre l’échalas & l’empêche de glffTer*
Alors il le plane fucceffivement & quarrément d’un
bout à l’autre , à i’épaiffeur d’un pouce fur un demi-
pouce.
Les échalas étant planés , on prend le milieu
de chacun, que l’on marque d’un trait de crayon
rouge. On choifît enfuite le milieu de chaque moitié
qu’on marque de même. Ces traits divifent hç-
chalas en quatre parties égales. § On porte cès'
échalas ainfï marqués, à la chaudière qu’on remplit
d’eau.
La chaudière eft de cuivre rouge , de forme
quarrée ; elle a cinq pieds de long, neuf pouces de
large & un pied de profondeur , pofee fur fès pieds
dans une cheminée. On met une pierre par-déffus
.les échalas * de peur qu’ils ne furnagent, & on
les laifîe tremper ainfi à froid pendant plufîeurs
jours.
Lorfqu’on. veut commencer le travail de la raquette
, on fait grand feu fous la chaudière ,. pour
faire bouillir les échalas pendant une bonne heure ;
& lorfqu’on les juge fuffifamment pénétrés. & amollis,
on les prend l’un après l’autre pour les façonner.
On porte d’abord l’échalas tout chaud furie moule
à raquettes. '
Le moule à raquette eft un morceàu de planche
de chêne, épais d’un pouce & demi, taillé en tête
de raquète aflez grofliérement, pofé fur (un établi ,
auquel il eft fermement attaché par une greffe vis
de fer à tête plate & quarrée, qui le traverfe ainfi
que l’établi, & fe ferre en-deflous avec un écrou.
Ce moule eft accompagné de trois greffes, chevilles
de bois rondes , qu’on fait entrer & (ortie
par le bas, comme fi c’etoit des bouchon! , dans
autant de ^ trous faits à l’établi. La première entre
environ à un demi-pouce du haut du moule ; les
deux autres font placées à un bon pouce du bas du
moule. Vis-à-vis de l’intervalle qui eft entre ces
deux dernières chevilles , à trois ou quatre pouces
en avant, eft une cheville de fer debout.
On commence par lever la première cheville :
on applique le milieu de l’échalas marqué de crayon
rouge fur fon coté large, contre le milieu du haut
de-la tête du moule; on renfonce tout de fuite la
cheville qui, le ferrant contre le moule, l’eiiipê-
che de fe. déranger. Alors on le ploie le long, des
cotés du moule, & on examine fi les deux autres
traçes de crayon rouge fe rencontrent au bas du
moule, vis-à-vis l’une de l’autre.
Cela étant, on, lève les deux autres chevilles,
l’une après l ’autre ; & , quand chaque coté a été
nmené , on les renfonce; ce qui contraint les, parties
baffes de l’échalas de s’appuyer contre la cheville
de fer.-
I es chevilles , iemifes en leur place , ferrent &
s rapprochent l’une de l’autre les deux portons qui
[doivent devenir par la fuite le manche de la ra
I quette.
On entoure cet étranglement entre les chevilles
U le bas du moule, avec plufîeurs tours de ficelle
I que l’on ferre bien.
I ' Alors la raquette eft moulée. Le haut fe nomme
lia tête; les deux côtés , les jambes-, le bas a l ’en-
1, droit ficelé , le collet , & les bouts retiens , le
\ manche.
fi • Une dés pièces les plus néceffaires aux raque-
[ tiers lorfquils travaillent la raquette, eft ce qu ils
! nomment la poitrine de liege , parce que, foit qu’ils
l.foientdebout ou affis, ils ont tres-fouvent quelque
[ partie de la raquette appuyée contre l’eftomac.
I Cette poitrinière eft une petite planche d’envi-
iron fix pouces en quarré , fur laquelle- eft collé un
! morceau de liège de la même étendue. On y at-
I tache des courroies qui fe bouclent fur les rems.
! Auffi-tot que la ligature eft faite, Féchalas étant
I encore chaud, on r’enlève de deffiis le moule , &
Kpn porte, fans tarder, cette raquette ébauchée au
I banc à drefler ; & l à , à force de pefées & en la
contraignant de différentes maniérés entre les fers,
[le marteau, les .crochets & 'crampons dont l'ébahc
| eft garni, on la d r e f fe e ’eft-à-dire , on parvient à
i lui donner le biais qu’il faut que la tete ait pour
être bien à main.
I Après que la raquette eft à fon point, 8c de peur
K qu’en refroidiffant, les jambes de la raquette ne
■ fe rapprochent , fur-tout .vers le collet, on les
[/maintient dans leur écartement par le moyen de
| deux, règles , l’une de fe r , l’autre de; bois, qu’on
fait entrer vers le bas des jarabes : on les nomme
Y des cabillets, On pofe d’abord celui de fer , & au-
[deffus celui de bois, qui eft un peu plus long :
j on laiffe en cet état la raquette fe.refrdidir. :
Tout manche de raquette eft garni de fon étan-
con. Ce qu’on appelle 'étançon èft] une tringle
plate de bois de tilleul, bu de quelque- autre bois
i blanc.
On la plane d’un pouce, fur un fens-, & d’un
;demi-pouce de l’autre ; mais ,.: comme un des bouts
doit être évafé en éventail, l’ouvrier fe fert d’une
efpèce de chevalet fait exprès , au moyen duquel,
en pofànt & ferrant fa tringle dans les'entailles &
taiïaux, il la travaille fur'tout fens pour la figurer
comme il convient.
, Cet étançon fe pofe entre les deux bouts delà
raquette deftinés à en faire le manche , & il en
remplit le collet. On lui donne ordinairement
qumze pouces de long.
; Pour Continuer le travail de la raquette qu’on a
'iai&é refroidir, on la réprend dans l’état où on Fa
quittée, c’eft-à-dire , ficelée au collet St appuyé«
en dedans par les deux cabillets.^ On la porte au
billot, vis-à-vis duquel on s’affeoit.
Le billot eft une efpèce d’établi quarré , bas &
maffif, dont la table a fix pouces d’épais ; quatre
pieds à l’avenant font folideinent arrêtes • au
plancher avec des pattes, & même à la muraille
quand on le peut.
Il eft garni fur fa table de plufîeurs crochets 8c
crampons ; & fur fon épaiffeur , de plufîeurs enfon-
' cemens en rond & en long : le tout pour, affeoif
r fblidement la raquette en^ la travaillant.
L e crampon le plus proche du bord fert à rete-
I nir ce qui fe nomme la cheville. Elle eft de. bois :
le raquetier fait lui-même fes chevilles de différentes
formes, fuivant qu’ elles lui conviennent ;
; elles fervent à appuyer la raquette : tout cet appareil
fert à en planer Je contour.
L ’ouvrier étant donc aflîs vis-à-vis du billot &
■ armé de fa poitrinière , appuie fà raquette contre
l ’entaille de la cheville, tantôt par la tête, puis
par le manche, &c. & la plane en 1 a ir , abattant
& adouciffant les, vives arêtes extérieures dans'tout
le pourtour.
Il en redreffe aufti les portions qui auroient pris
un peu de cambre en roidiffant. Les crochets &
crampons lui aident à forcer un peu à droite nu-à
gauche. Enfin i l i a tourmente jufqu’à ce. quelle
foit devenue également à plat cj’un bout à l’autre.
Le : contour de la tête en dedans ne fe plane
pas : on fe fert d’un gros.. étau de bois à mâchoires
ferrées , fèmblable à celui des ébéniftes , dans
lequel on arrête la raquette, & on 1 arrondit avec
une râpe a bois. ,
Tout,cela étant fa it, l’ouvrier met Fétançon en
place., c’eft-à-dire, qu’il le fait entrer entre les
deux côtes du manche, & l’ajufte avec la râpe s
de manière qu’il joigne par-tout, & qu’il rempliffe
exadement le collet de la raquette : alors il s’arme
de la poitrinière de buis.
Cette féconde poitrinière eft compofee d une pe-
' tite planche quarrée avec fa ceinture, femblable a
: c^lle de liège ci-deiïus ; mais au lieu- de liè g e ,
| eft cloué un morceau de buis rond & élevé enfor-
i me de mamellè , au centre de laquelle eft un petit
creux fait pour recevoir le bout d un vilebrequin
, à l’autre bout duquel il place d abord \ e-
,gravoir, outil de fer terminé par une pointe qui
s’élève entre les deux eoupans , reflemblant en
petit à un pareil inftrument, dont les tonneliers fe
fervent pour percer les tonneaux, qu’ils appellent
un perçoit|
Il remet & ferre la ficelle au collet ; puis, appuyant
la raquette contre: le billot, il commence
avec- cet outil qu’il pointe au-deflous de la ficelle ,