
Cette machine eft conftruite comme un pied de
table quarré, beaucoup plus étroit par le haut que
parle bas.
Le canon eft fufpendu au centre par une verge
de fer, & cette verge eft foutenue par le haut lur
deux pivots très-mobiles.
A la partie fupérieure de ce chaflis eft arrangé
un demi-cercle gradué, avec une aiguille.
Lorlqu’on met le feu , l’effet de la poudre eft
d’occafionner un recul au canon ; un petit lévier
qu’on a pratiqué à la verge de fer qui (ulpend le
canon poulie l’aiguille qui fixe l’endroit ou le canon
la fait aller, & qui marque le nombre des
degrés de recul.
On juge par-là de la force de la poudre,
EJfai graduel de la poudre.
& de même les poudres faites fuivant'îes proportions
les plus en ufage en Europe & en Chine.
Celle d’Europe , compofée de deux onces cinq
gros un tiers charbon & deux onces cinq gros un
tiers foufre fur une livre de falpêtre n’ayant donné
que onze degrés.
Et celle de Chine compofée de trois onces de
charbon & de deux onces de foufre fur la livre de
falpêtre, que quatorze degrés.
Ces effais fur la poudre ont été faits avec du charbon
de bois de coudre* dont on fait ufage en Allemagne.
En France on préfère le charbon de bois de
bourdaine, & en Chine le charbon de faule.
Ces trois efpèces diffèrent peu entr’elles pour la
qualité, & c’eft moins à l’efpèce de charbon qu’à
la dofe de cette matière que l’on doit attribuer le
plus ou le moins de force des différentes poudres.
On a cherché à connoître la meilleure proportion
des matières pour compofer la poudre , & l ’on a fait
des effais graduels, ' où partant du premier degré
de force que le charbon feul & le charbon joint au
foufre peuvent donner au falpêtre , julqu’au terme
où la force de la poudre commence à diminuer par
la trop grande quantité de ces matières. Ces effais
ont donné les réfultats ci-après.
i °. Le charbon feul & fans foufre étant joint au
falpêtre, en augmente la force jufqu’à quatre onces
de charbon de bois tendre fur une livre de falpêtre ;
& la poudre faite dans cette proportion donne à
l ’éprouvette neuf degrés.
Elle s’enflamme affez fubitement dans le baffinet
du fufîl, pour faire juger que le foufre ne contribue
point ou contribue très-peu a l’inflammation
dans la poudre ordinaire.
Si cette poudre , comme on lé préliime, avoit
affez de force pour l ’ufage de l’artillerie, elle auroit
. l ’avantage de donner beaucoup moins de fumée que
la poudre ordinaire, & de ne caufer aucune altération
à la lumière des canons ; le foufre étant ce
qui produit ces deux mauvais effets, la fumée &
l’évafement des lumières.
z°. Du foufre ayant été ajouté par degrés aux
dofes de falpêtre & de charbon ci-defîùs, les effais
qui ont été faits ont augmenté en force jufqu’à une
once , & à cette dofe la poudre a donné quinze
degrés.
3°. La dofe du charbon ayant été diminuée d’autant
pefant qu’on y a ajouté de foufre ; c’efl-à-dire ;
cette poudre compofée de falpêtre , une livre ;
charbon , trois onces ; foufre , une once ; a donné
dix-fept degrés.
4°. Ayant comparé cette poudre à dix-fept degrés
avec des poudres faites-dans les proportions qui
en approchent le plus, elle les a furpaffées en force ;
T A B L E des ejfais qui ont indiqué la meilleure
proportion p&ur compofer la poudre.
N n m M a t i è r e s Degrés
dont on a compofé les poudres d’efiàis,
d e s
de force à
Sa l p l t r e . I C h a r b o n . J So u f r e .
Effais. l’éprouvetce.
EJJais pour connoître ' fi Von peut faire de la poudre
fans foufre, & quelle eft la quantité de charbon qui
peut donner le plus de force au falpêtre.
liv. one. gr. liv. one. gr. liv. one. gr.
r hH E U h u y y V explol.
T m m g 2 « ^ ( çxplo C.
4. .
j « n i J
T s n „ g
Le °, f ayant donné le degré le plus fort, on
a ajouté du foufre à la dofe de ce n°. pour connoître
fi cette matière peut en augmenter la force, & jufqu’à
quelle quantité.
8 ..
.0
v-
0
9 . . 0 ..4 . .0 . . i f
IO. . .14 m. 1 0. . 4 . . 0.
Le n°. 9 ayant donné le degré le plus fort, on a
effayé de retrancher du charbon fans diminuer le
foufre, jugeant que la poudre en feroit plus forte, &
il s’eft trouvé qu’elle a augmenté de force jufqu’au
n°. 13.
IZ . .
1 3 ..
14 ..
I J .. 10
Comparaifon du n°. 13 avec les proportions qui
en approchent le plus, pour s’affurer que la dofe de
ce h°. eft la plus forte.
16 . 1 . . 0. . 0. 17- S
18..
Autre comparaifon du n°. 13 avec les poudres
faites-fuivant les proportions les plus en ufage en.;
Europe & en Chine.
Poudre d’Europe,
10 .. j i . .0. .ô . Jo. i . . 5t |o. . i . . $t I . 11
Poudre de Chine.
11. .|i..0..0.|o..3..0.|o..z..0.J.14
II a été fait, le n février 1 7 , au moulin à
poudre d’Effonne des épreuves fur les poudres numéros
$ , 13 & 10, qui y avoient été fabriquées la
veille. Ces épreuves ont été faites avec l’éprouvette
d’ordonnance qui eft un mortier de fept pouces , lequel
avec trois onces de poudre , doit jetter a cinquante
toifes un globe de cuivre de foixante livres,
pour que la poudre fuit recevable , & leur produit
moyen a été, favoir :
A trois onces.
Poudre ordinaire de' guerre, prife dans le ma-
gafln......... .................. 7 6 toifes 1 pieds.
N°. 10 fait dans la même
proportion des matières que la
poudre ci-deflùs................. 74 4
N°. 13.V................................. 78 4
N?«..*.......... r ............7 5 I
A deux onces.
Nÿ;?........................ 3 5 î
N ® . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • • $9 1
N°. 1 3 . , ................................. 41 3
Il réfulte de ces épreuves que la poudre n°, 13
{ qui eft celle que les effais mentionnés en la table
ci-deffus ont indiqué pour être la meilleure proportion
des matières) eft plus forte que celle n°. zo,
dont on fait ufage en France.
Et que la poudre fans foufre, rf°. f , augmente
de force à proportion qu’on en augmente la quantité
par comparaifon à une pareille quantité d’autre
poudre, puifqu’à trois onces elle a furpaffé les poudres
de comparaifon auxquelles à deux onces & au-
deffous elle étoit inférieure.
A juger de ces poudres par les épreuves ci-deffùs,
il paraît que celle n°. 13 , qui a confervé, dans les
épreuves en petit comme en grand la fuperiorite fur
le n°. z o , fera très-propre pour le fufil, & que celle
n°» y , qui gagne dans les épreuves en grand, conviendrait
mieux pour l’artillerie que la poudre ordinaire,
puifqu’avec une plus grande force elle donne
moins de fumée, & qu’elle ne cauferoit point ou
trcs-peu d’altération à la lumière des canons.
Comme il y a aufli un maximum à atteindre pour
le temps que la poudre doit être battue , relativement
à la pefanteur des matières que contient le
mortier, & à la pefanteur du pilon -au-deffus & au-
deffous duquel la poudre eft moins forte, il eft très-
nécelïaire de le connoître, & de porter les attentions
fur beaucoup d’autres objets qui , quelque
petits qu’ils paroiffent, ne laiffent pas de contribuer
à la bonté & perfeâon de la poudre.
Manière de garantir la poudre à canon des effets
du feu dans les petits magafins, tirée de■ la Philofofia
Pratica, traduction ae M. Pingeron.
Ce moyen confifte à diviler le magafin en plu-
fîeurs petites cafés, capables de contenir chacune
cinq à fîx barrils ; les murs de féparation doivent
être en briques : on met enfuite un lit de fable
bien fec dans les cafés, & lés barils par-deffus. J On
remplit en même temps tous les intervalles, & l’on
enterre le barril dans le fable. Il faut avoir foin que
le toit foît léger, & qu’il n’y ait aucune pièce de
clouée ni d’affemblée.
Dans le cas où le feu du ciel viendrait à tomber
fur une café, & -à pénétrer le fable, la poudre enflammée
ne communiquerait point avec les barils
qui font dans les cales voifines, & l’explofion feroit
peu de ravage, ne trouvant aucune réfiftançe dans
le toit.
On peut encore conferver de la poudre a canon
en la tenant mêlée avec du fable très-fec, que l ’on
en fépare aved des tamis lorlqu’on veut s’eu fervir.
Depuis l’accident qui arriva à Venife, par l’em-
brâfement du magafin à poudre, les vénitiens ne
tiennent que peu de poudre amoncélée ils ont de
vaftes magafins de? matières qui la compofent, &
qui font prêtes à être employées au premier ordre.
Cet accident s’eft renouvellé à Brefcia, & la gazette
de France a fait mention dans ce temps des
précautions que l’on prenoit à Gênes pour éviter un
pareil malheur.
Poudre muette,
C ’eft une erreur de croire qu’ il y ait de la poudre
vraiment muette , ceft-à-dire qui ne faffe aucune
détonation, lorfqu’elle prend feu dans un lieu renfermé
, comme dans un canon ou ailleurs, de.forte
qu’elle s’ouvre un paffage & chaffe par exemple un
boulet fans faire aucun bruit 3 car tout le monde fait