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Peur, & que fon talon ne foît pas endommagé î
a l’endroit de l’étampeux qui eft fixé pour la longueur
de la tête de la pipe', le mouleur attache
folidement un morceau de cuir qui lui fert d’arrêt.
L a pipe étant fortie du moule , on la perfectionne
avec VeJîriqueux, ou infiniment de fer qui
emporte les bavures, ou petites irrégularités qui
fe trouvent fur la pipe ; quand elle a acquis une
certaine confîftance , on la reprend de nouveau
pour en ôter avec un couteau les bavures de la
tête , & en arrondit les arêtes avec un petit boulon
de cuivre ou de corne.
L a pipe étant affez affermie, pour fupporter
le dernier p oli, la marque de l’ouvrier & la dentelle
, on la frotte avec deux pierres de torrent,
ou deux cailloux dans lefquels on a creufé des
calibres de la groffeur du tuyau & de la tete de
la pipe.
La marque de l’ouvrier , ou de la manufacture,
s'imprime fur le tuyau, à deux ou trois pouces
de difiance du talon , avec une efpèce de lame de
fer où font gravés différentes cifelures & caractères.
La dentelle fe fait en parcourant le pourtour de
la tête avec une petite fcie, & en mettant le
boulon dans lé"fourneau ou godet de la pipe pour,
lui fervir de foutien.
Lorfque le moule porte dans fon creux quelques
ornemens, l’ouvrier les répare à la main avec un
poinçon de fer , & enlève les bavures qui auroient
pu former.
En Hollande ce font des filles qui font prefque
toutes ces dernières opérations : on leur donne le
nom de tramaffeufes.
Cuijfon des pipes.
Ce feroit inutilement qu’on prendroit autant
d’attention pour donner beaucoup de blancheur
aux pipes , fi on les expofoit à la moindre fumée
lorfqu’on les met cuire aü four.
Il y a des fours de deux efpèces ; le petit four,
ou fourneau qui eft fait en efpèce de tourelle ,,
de cinq à fix pieds de hauteur fur trente - deux
pouces de largeur.
L e grand four, dont le fervice efi plus facile
& qui économife beaucoup de b o is e f t quarré &
affez femblable à ceux où l ’on cuit les tuiles &
les briques.
Comme ces grands fours n’ont point, comme
les petits, de chambre ou de pot 3 dans lequel on
renferme les pipes à couvert de la fumée, on. y
fupplée en les renfermant1 dans des colonnes de
terre cuite , compofée de divers boijfeaux ou petits
pots de .terre „qui n’ont point de fond.
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On pofe enfuite au milieu un chandelier, du
petit pilier de terre > on remplit chaque boifTeau
de pipes qu’on élève 'l’une fur l’autre, jufqu’à ce
qu’on ait formé une colonne qui eft compofée de
trois boiffeaux lutés enfemble, & mis l’un fur l’autre.
On met dans chaque four jufqu’à neuf de ces
colonnes fur lefquelles on forme une pyramide de
tuiles creufes & gironnées.
On maçonne la porte, après quoi on allume un
feu qu’on fait d’abord fort doux, qu’on augmente
peu-a-peu, & qui dure près de feize heures.
Le feu s’étant éteint de lui-même, on ouvre la
porte qu’on avoit maçonnée, & on ne vuide les
boiffeaux que lorfqu’ils font prefque froids & qu’il
n’y a plus de fumée dans le four.
Tout bois n’eft pas propre à chauffer ces fours*,
parce que lorfqu’il chauffe trop fubitement , les
pipes fe brifent.
Les bois , ou les tourbes qui prennent feu moins
vite, valent mieux; c’eft pourquoi on préfère à
Gouda, ville de Hollande , faméufe par fes manu-
faâures de pipes, les tourbes de Frife à celles de
Hollande.
Vernis & autres qualités des pipes.
Pour que les pipes communes^ ne s'attachent
point aux lèvres quand elles font réfroidies , après
les avoir tirées du pot , on les détrempe dans une
efpèce de lait qu’on fait avec une terre fine détrempée
dans beaucoup d’eau ; en féchant, cette
terre augmente la blancheur des pipes, & forme
fur elles une efpèce de vernis quand on les polit
avec un morceau d’étoffe, un peu rude.
Lorfqu’on veut leur donner un Vernis plus beau
que celui dont nous venons de parler', on fait
bouillir pendant trois ou quatre minutes, dans
quatre pintes d’eau , mefure de Paris, un quarteron
de favon blanc ou noir, deux onces de cire
blanche & une once, de gomme arabique.
Pendant que ce mélange fe refroidit, on l’agite
avec quelques brins de balai, afin que la cire qui
ne fe diffout pas dans ce mélange, foit divifée
en parties fi fines , qu’elle ne reffemble pas à la
furface de l’eau.
Il y en a qui, à la place de la gomme arabique
, préfèrent la colle de parchemin.
Lorfqu’on veut donner aux pipes cet émail ou
vernis qui diftingue lës fines d’avec les communes ,
on les trempe à froid dans la compofîtion ci-deflus :
on les frotte enfuite avec un morceau de flanelle.
A .chaque greffe qui fe vend dans les manufactures
de pipes , on y en ajoute une que les Hol-
landois nomment la pipe du nouveau marié, dont
le tuyau & la tête font chargés d’ornemens en relief,
& qu’on fabrique dans des moules particuliers.
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En Hollande où l’économie eft une Vertu parti- ’
Culière au peuple qui conftitue cette république,
& ou l’on fe pique de beaucoup de propreté, on
fait blanchir les pipes qui ont fervi, en les mettant
fur des grilles au-deffous defquelles il y a un
feu de charbons non fumans, fur lequel on les
laiffe jufqu’à ce qu’elles deviennent rouges & reprennent
ainfî leur première blancheur.
Quoique cette opération les rende plus caftantes,
leur fafle perdre leur vernis, & qu’étant ainfî
préparées , elles s’attachent aux lèvres , dans toutes
les villes des Etats - Généraux, il y a des gens
qui gagnent leur vie à brûler & blanchir ainfî les
pipes.
En place de pipes ordinaires, les américains j fe fervent de cigales , qui font des feuilles de tabac
roulées comme un tuyau de pipe , arrêtées par
les"extrémités au moyen d’un fil qu’on tient par
un bout dans la bouche, qu’on allume par l’autre,
& dont on fe fert pour fumer.
Les belles pipes doivent être droites , d’une terre
bien blanche , fines, luftrées ; la tête doit avoir une
forme régulière.
Les pipés de Hollande ont un bel émail ou
vernis qu’on leur donne, fuivant le rapport de
M. Allamann, en les trempant à froid dans une
eau préparée, & en les frottant enfuite avec un
morceau de flanelle.
Cette eau eft compofée d’une diflolution de
favon d’Efpagne, & de cire blanche dans de l’eau
bouillante. On laiffe cuire ce mélange pendant une
demi-heure, & quand il eft réfroidi, on le verfe
dans une cuve pour s’en fervir à froid.
On a tâché d’imiter en Flandres ce vernis avec
du favon, de la cire & de la gomme, ou de la
colle de parchemins fondus & cuits dans de l’eau.
On allume le tabac; la fauge oü tel autre ingrédient
dans le fourneau de la pipe , & on en
afpire la fumée en fuçant l’extrémité du tuyau
qu’on a dans la bouche.
Quand le tuyau de la pipe fe remplit de fuligi-
nofités du tabac , on confomme cette fuie qui fe
réduit en cendre, & qu’on emporte enfuite aifé-
ment avec un fil de fer.
Il faut toujours éprouver, en achetant une pipe ,
fi l’air pafîe du fourneau ou de la tête dans le tuyau
ou la queue de la pipe.
Explication des planches pour la fabrication des
pipes a fum er , Tome I V des Gravures.
PLANCHE PREMIÈRE.
F ig. i , maillet à écrafer .les terres.
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F ig , i , manne d’ofîer pouï le tranfport des
terres.
Fig, 3 , cuve où l’on met les morceaux de terre
à pipes.
Fig, 4, écumette.
Fig. y, palette pour remuer la terre dans la cuve.
Fig, 6 , cuve.
F ig. 7 , dame ou étampe»
Fig, 8 , autre cuve pour mettre la terre étampée.
Fig. 9 , battoir.
F ig. io,piqueron.
Fig. n , établi.
Fig, 1 z , broffe ; AA, poignée.
Fig. 13, barreau ; B, le dos ; C , le plat.
F ig, 14, razette.
Fig. 15 , mafTe de matière.
F ig. 16 y moulin dont on fe fert en Hollande
pour préparer la terre à pipes , & la rendre entièrement
homogène.
F ig. 17 , coupe verticale du moulin.
PLANCHE I Ie.
Fig, 18 , rouleau de terre auquel on donne à
peu-près la forme d’une pipe.
Fig. îp, poignée de quinze rouleaux ; A , pre-^
mier rang; B, fécond rang; C , troifième rang.
Fig. 20, broche de fer à percer le rouleau.
F ig. 21 , la broche dans le tuyau.
F ig. 22, la pipe & la broche dans le moule
de cuivre.
F ig. 23, les deux pièces du moule l’une fur
l’autre,
F ig. 24, preffè dans laquelle eft le moule.
F ig. 25 , gouttière de fer.
Fig. 2 6, coupe de la preffe.
Fig. 27, étampeux.
Fig. 28, pipe dont la broche fait communication
du tuyau avec la tête.
Fig. z 9 , eftriqueux.
F ig. 30, pipes mifes à fécher.
Fig. 31 , pipes redreffees & arrangées fur des
; planches.
Fig. 32 , infiniment dont on fe fert en Hollande
pour polir & arrondir la tête.