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742 ZOOLOGIE,
célèbres dans l'auliqiiilé, s'étaient successivement éteintes
bien avant l'envaliissement de cette contrée par les tribus
turques, et qu'à l'époque de cette immigration il n'existait
plus que la race à grosse queue, race très-ancienne
dans la péninsule, puisque Hérodote lui-même la signale
dans la Cappadoce. En leur qualité de peuple pasteur, les
tribus turques furent bien loin de négliger l'élève du mouton,
vu que cet animal constituait l'élément principal de
leur richesse', mais à cause de leur état de civdisation peu
avancée elles ne peuvent avoir en vue que la quantité et
non la iiualilé. De cette manière, les tribus turques comblèrent
le vide qui déjà se faisait sentir dans le pays, par
des troupeaux, soit amenés avec elles, soit tirés successivement
de l'Asie centrale ; o r , comme la majorité de ces
nouvelles recrues appartenait à la race à grosse queue,
celle-ci finit par devenir exclusivement dominante dans
la province anatolique et s'y conserva sans subir aucune
de ces modifications et transformations que la science et
l'art de l'Europe savent si bien fait naître.
Quand ou considère d'un côté la réputation dont l'Asie
Mineure jouissait dans l'antiquité à cause de ses nombreuses
races do moutons à laine fine, et de l'autre côté
l'extrême variété que présente cette contrée sous le double
rapport de son relief et do ses zones climatériques, on
acquiert la conviction qu'il est peu do pays au monde qui
1. Le mouton est peut-être de tous les animaiix domestiques celui C [ u i est le piu-s
propie à pourvoir largement à la subsistance de l 'homme, car non-seulement sa
chair contient aut-ant de principes alimentaires i[ne celle de tout autre animal de
bonclierie, mais encore le lait de la brelils est lieauceup plus l'iclie que celui de la
vache, de la chèvre, de finesse et de la cavale en substances azotées (caséine,
albumine, etc.) et en m.aticres grasses {Voy. A. Payen, Des substances aiimoilaires,
etc., p. G6). C'est ce qui explique la prédileclion de tous les peuples nomades
pour le mouton, toutes b-s fois iiue les conditions locales en favorisent l'élève.
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se prêtent autant que cette péiiinsule au développement de
la race ovine. L'exemple de l'Angleterre, où l'élève du
mouton a atteint le plus liant degré de perfection connu,
fait ressortir la vérité do cette assertion, puisque, pour
obtenir ces admirables races, elle a dû créer artificiellement
une foule de conditions que la nature a toutes réunies
en Asie Mineure. Les agronomes anglais, comme l'observe
AI. L. de Lavergne dans son excellent ouvrage sur
l'économie rurale en Angleterre, se sont convaincus que
dans un pays placé dans les conditions climatériques de
la Grande-Bretagne, le mouton pouvait oifrii' plus de valeur
comme animal de boucherie que comme producteur
de laine ; en conséquence, tous leurs efforts se dirigèrent
vers ce but , et bientôt les mérinos se trouvèrent remplacés
par les races de Leicester et de liakewell, tandis que
le Royaume-Uni chargea ses colonies d'Australie, du
cap de Bonne-Espérance et des Indes orientales du soin
de s'occuper do la production de laine fine. Rien ne peut
égaler les résultats brillants que lui procura l'application
du i)rincipe fécond (jui prescrit do ne forcer chaque pays
de produire que ce qu'il peut produire le mieux, et de
concentrer dans le développement de la spécialité marquée
par la nature elle-même tous les elforts de la science
et de l'art. Aussi, tandis qu'un nomlire de moutons égal à
celui que possèile la France donne en Angleterre presque
trois fois plus de viande et tout autiiut de laine que dans
ce premier pays ' , les colonies britanniques, exclusivement
vouées à la production de laine fine, en fournissent à elles
seules, à |ieu de chose près, autant que la France tout en-
I . L. do Lavergne. Essai sur Vèconomic ruyale de i'Aiiglelerre, etc., p. 30. Î-i