1 -t
11
rage'
ZOOLOGIE
arbuste. Daus uu autre eudroit de son célèbre ouv:
Varron émet les théories les plus puériles sur la physiologie
et l'anatomie de la chèvre, et soutient que cet animal
est constammeut travaillé par la fièvre, fait qui, selon
lui, est tellement constaté et de notoriété si universelle,
qu'aucun homme de bon sens n'oserait [¡arler d'une chèvre
saine : Quod capras sanas samis iiemo promilHl 2. Pline ' et
yElien'» prétendent que les chèvres respirent par les oreilles
et les yeux, et non par les narines; de plus, Varron,
ainsi que tous les agronomes cités dans les Geoponica,
prête à la chèvTe une nature extrêmement frileuse. Or,
c'est précisément aux chèvres à laine fine que ce trait est
le moins applicable, car elles habitent presque toutes des
contrées plus ou moins exposées à une température hivernale
très-basse, témoin la chèvre d'Angora, et bien plus
encore celle du Thibet ^ dont la station, selon M. de Ilum-
1. De re ritslica, il, 3.
2. Cette singulière doctrine, professée par Pline {Wst. nal., xxvm, 10), Florentinns
{Geoponica, xïiii, (9) et leanconp d'antres antenrs grecs ou romains,
parait s'être maintenue jusqu'à une époque voisine de la nôtre, car le célèbre
Gessner rapporte tort sériensement l'anecdote suivante : « A Nimes, nn enl'ant
dont tous les parents aTaient été enlevés par la peste de 1629 fut allaité par une
elevre, ce qui lui fît contracter des alicctions fébriles dont il ne put se débarrasser
de tonte sa vie. » Il est curieux de voir tine, dans plusieurs régions de
l'Orient, et sm'toitt en Asie ¡Uincure, une opinion diamétralement opposée à celle
des anciens prévaut aujourd'hui :à l'égard de la chèvre ; car j'ai été plus d'uno
fois dans le cas d'observer que les Turcs, les Arméniens et les Grecs attribuent
une vertu fébrifuge au lait de la chèvre, et que, pour couper les accès de lièvre
intermittente, maladie si répandue dans ces contrées, ils avalent de fortes doses
de hit caillé, connu sous le nom de yaourt, en y ajoutant quelquefois de
3. Hist, anim., VTIl, 50, 7e.
i. Hist, anim., i, 53.
5. I,a laine de la chèvre du Thibet était, dès les temps les plus reculés, l'objet
d'un commerce étendu. Ainsi, dans .son classique ouvrage sur l'état erimmerei.il
et industriel des peuples de l'antiquité, neereu («ce», etc., 1 ter Theil Pliouczier,
p. 215) dit que les llabjlojiiens tiraient ilu eachciuire des l'dnlfcs de laine
C t l A P l T B l î IV. 713
bodit s'élève à l'énorme altitude de plus de 3182 mètres,
et par conséquent à une hauteur inférieure d'environ
140 mètres seulement à celle de la sommité de l'Etna.
Au reste, si comme nous l'avons vu, aucun des auteurs
anciens ne parle de la Galatie (Phrygie) à propos des
pays les |)lus connus dans l'antiquité par l'élève de la
chèvre en général, Varron peut être considéré comme le
seul qui mentionne à celte occasion la région habitée aujourd'hui
par la race d'Angora : cependant rien dans son
ouvrage ne fait allusion à une laine remarquable par sa
finesse; tout au contraire, après avoir observé qu'on
avait l'habitude de tondre la chèvre eu Phrygie, il ajoute
que les tissus qu'on y faisait de celte laine portaient le
nom de cilica, parce que c'est de la Cilicie que vient la
pratique de tondre les chèvTcs. Or, nous avons déjà démontré
que cette pratique ne supposait nullement une
qualité supérieure dans la laine, et qu'au contraire les
tissus connus sous le nom de cilice ou éloffes de Cilicie,
ne devaient se recommander que par des qualités opposées.
Il devient donc probable que les chèvres de la
Phrygie (Galatie) étaient, du temps de Varron, identiques
avec celles de la Cilicie, et appartenaient à la même
race îles chèvres communes, si répandues aujourd'hui
dans toute l'Asie Mineure; aussi n'en ai-je point observé
d'antres, ni en Lycie, ni daus les deux Cilicies. Ces régions
auraient sans doute conservé quelques vestiges
teintes en cochenille, et que la Syrie et l'Araliie fournissaient aux Phénieions
des laines également tres-cstimécs. Or, si la race d'.lugora avait existé dans
un pays aussi civilisé et aussi fréqtrenlé que l'était h cette époque l'Asie Mineure,
on raurait, dans tous les cas, mentionnée, et ou se serait même peutêtre
dispensé d'aller chercher une laine semblable daus les coiitrées lointaines de
l'Asie centrale.
I, Aitsichicn lier Nalur., v. I. p. toi.
" 1 , '.j
M
: jj:.