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lions morbides, c'est rinllueuce d'une longue série de siècles
pendant lesquels tous les agents destructeurs de la nature
ont pu se développer sans contrôle. Mais indépendamment
des agents physiques, dont l'action ne devient funeste que
parce qu'ils sont abandonnés à eux-mêmes», l'état de
déchéance dans lequel est tombée l'organisation sociale et
politique eu Orient, a dû faire naître sans cesse de nouvelles
sources d'aiïections morbides. Ainsi, le plus ou moins
d'aisance, des habitudes de propreté plus ou moins développées,
l'action gouvernementale plus on moins prononcée
dans l'élahlissement de mesures de salubrité, etc.,
exercent sur la santé publique une énorme influence. Or,
l'Orient est précisément la contrée où les agents sociaux
destinés à combattre ceux de la nature, ont le moins de
puissance, tandis qu'en Europe ils ont acquis un haut
degré de développement. Avant que la société européenne
possédât son organisation actuelle, elle éprouvait sous
ce rapport les mêmes inconvénients auxquels l'Orient est
soumis; en effet, c'est au moyen âge que la peste et les
maladies de toute nature faisaient le plus de ravages en
Europe. M. D'lsraél!= cite un curieux passage d'Érasme,
1. Outre l'imiuenSL' quanlile de pliéuomèiies phy'sic[ucs qui, abandouaés sans
contrôle à leur développemeiît indéfini, sont de nature à engendrer des maladies
endémiques, l'Orient connaît plusieurs agents destructeurs qui paraissent s'y développer
et y sévir avec une intensité toute particulière. Ainsi en Egypte l'énorme
accumulation de cadavres de sauterelles contribue au développement de maladies
pestilentielles. M. Light ( Travers in Egypt and Palestina ) nous apprend que
loiuqu'on voit apparaître les sauterelles à Philaï on peut être presque certain de la
prochaine apparition de la peste au Cake. D'ailleurs M. Sclmurrer rapporte des
e.xemples remarquables ( Chron. der Seuchen, v. I, p. 6îj) de pestes causées par
l'accumulation de sauterelles mortes. Ce phénomène est d'airtant plus vraisemblable
que moi-même j'eus l'occasion d'apprécier l'inflnencc de cette particularité,
que je mentionnerai en pcirlant des sauterelles dans la partie zoologitiue de eu
travail.
i . r'uriosHies o( liflerahirp, v. il, p. 3H.
C H A P I T R E X.
i[ui décrit la saleté des habitations et des rues en Angleterre,
et qui attribue à cette absence complète de propreté
les maladies contagieuses qui ne cessaient de ravager ce
pays au xV siècle; et si les écrivains contemporains ne
nous avaient pas laissé de semblables tableaux de Paris et
des villes de beaucoup d'autres pays de l'Europe, nous aurions
pu le supposer, rien qu'à en juger par l'état où se
trouvait alors la Grande-Bretagne, dont les moeurs et les
habitudes ont acquis une réputation proverbiale dans le
sens contraire.
Au reste, les nombreux témoignages des historiens et
des annalistes du moyen âge, constatent la liaison intime
qu'offrait en Europe l'existence d'une foule de maladies,
avec l'absence des mesures de propreté publique introduites
depuis dans le code de l'ordre social. Pour ne citer
qu'un seul exemple, lequel nous emprunterons à l'excellente
Histoire des invenlions et des découvertes, par M. Beckman,
rappelons que, lorsqu'à la fin du xiv" siècle la ville
de Dijon fut pavée et soumise aux règlements de police
qui à cette époque étaient presque aussi peu observés en
Europe qu'ils le sont aujourd'hui dans l'Orient, un remar-
(]uable changement s'opéra dans l'état sanitaire de cette
ville; les dyssenteries, les fièvres, etc., qui y régnaient
jusqu'alors, disparurent peu à peu.
De tout ceci il résulte que, sous le rapport sanitaire,
l'Asie Mineure doit nécessairement subir les conditions défavorables,
tant physiques que sociales qui, dans ce sens,
assignent à l'Orient une place à part, et expliquent en
[lartie au moins, non-seulement la fréquence de certaines
alfections morbides, mais même la raison pourquoi c'est
plutôt là que dans l'Occident européen qu'elles prennent