— I l —
ans dans la Haute-Éthiopie, et après y avoir été mêlé,
comme témoin ou comme acteur, aux événements qui
ont attiré sur ce pays l’attention de l'Europe. Dès
,won retour en France, sous Vinfluence des impressions
reçues à l’étranger, et pour complaire à un
ami, j ’ai donné à cette relation une forme écrite.
Mais pour avoir le droit de parler d’un pays si dissemblable
du nôtre, il ne suffit pas d’y avoir séjourné
un long temps et de s’être dénationalisé en. quelque
sorte, afin’de voir de plus près les hommes et les
choses que l’on se propose de faire connaître; lorsque
l’on est rentré dans soji milieu natal,. il faut encore,
pour se soustraire à to u t. engouement et épurer ses
jugements, écarter, pour un temps, les opinions et les
idées dont on s’est imbu à l’étranger, et, reprenant
les points de' vue ses compatriotes, s’habituer de nouveau
à leur manière de penser, avant de leur offrir
les fruits d’une expérience acquise dans des conditions
si différentes de celles qui nous régissent. Ma
relation écrite, j ’ai donc laissé passer un certain
temps.
Aujourd’hui, par suite du. redoublement d’activité
que les nations européennes mettent à étendre leurs relations
avec les peuples les plus reculés de l’Orient, et
par suite du retentissement qu’ont eu les derniers rapports
de l’Angleterre avec Théodore, j ’ai pensé que mon
travail ne serait pas sans utilité. Je viens de le reprendre,
et je l’offre avec la confiance que donne une tâche fidè-
ment remplie, et avec la réserve qui convient à celui
qui, comme moi, entreprend de produire un ensemble
de faits et de caractères propres à faire juger de tout un
peuple.
Paris, 2 juin 1868.