leur démarche, la perfection de leurs formes et la
mobilité de leur caractère justifient, du reste, la
jalousie proverbiale de leurs maris.
Les femmes des deugas, plus grandes, plus fortes,
sont moins avenantes, moins gracieuses, moins fécondes,
dit-on, mais plus laborieuses, plus économes,
moins fantasques et plus soumises; belles
plutôt que jolies, elles passent pour exercer des
séductions moins entraînantes que les femmes des
kouallas, mais elles conquièrent dans la famille une
prépondérance plus durable. .
Comme les libertés communales ont survécu à
tous les bouleversements politiques, la famille est
encore assez forte; la constitution du mariage
civil dissoluble semble peu faite, il est vrai, pour
la conserver dans cet état; aussi les us et coutumes
ont-ils renforcé la puissance du père jusqu’au
point de lui permettre, comme à Rome, de
disposer de la vie de ses enfants. Au dire des indigènes,
les familles des contrées kouallas, quoique
fréquemment les plus nombreuses, se perpétuent
moins, et les liens de famille sont moins forts que
sur les hauts plateaux. Le père permet à l’enfant
de développer sa personnalité de bonne heure, et,
sinon en droit, en fait du moins, l’émancipation a lieu
bien plus tôt; la mère exerce moins d’empire dans
la maison ; les allurés et les. moeurs domestiques ont
un caractère indépendant et moins respectueux.
En contrée deuga, au contraire, le père et la
mère jouissent d’une autorité durable; on y remarque
plus fréquemment le type de la matrone, siégeant
depuis longtemps à l’arrière-plan de la vie, ou
de l’aïeul conseillant et dirigeant la conduite des
petits-fils.
On attribue cette différence à la pétulance et au
peu de gravité des natifs du koualla, dispositions
peu favorables à l’obéissance filiale comme au prestige
de l’autorité paternelle; on l’attribue également,
et avec plus de raison peut-être, à l’instabilité. du
foyer domestique. En effet, les contrées kouallas
sont d’une fécondité prodigieuse; souvent elles rapportent
plus de 400 pour 1 ; mais leur production
est sujette à deé " retours désastreux causés par les
sécheresses, les sauterelles, les épizooties, les animaux
sauvages, enfin, par la mortalité qui suit la
recrudescence des fièvres du printemps et de l’automne,
et qui arrête quelquefois, en quelques semaines,
la prospérité d’une maison ou de tout un
district; aussi, les habitants des kouallas sont-ils
souvent réduits à l’émigration. Comme je l’ai dit
ailleurs, leur attachement à leurs terres est tel, que
ce n’est qu’à la dernière extrémité qu’ils les abandonnent.
Souvent ils vivent dispersés durant plusieurs
années; quelquefois même leur génération
s’éteint à l’étranger, mais leurs enfants guettent le
moment où ils pourront se rétablir dans le district
paternel, et, tra it' digne de remarque, lorsqu’ils en
reprennent possession, la tradition locale est assez
vivante et assez précise, pour qu’à la première assemblée,
la hiérarchie communale soit réinstituée
d’après les règles qui auraient été suivies si la
population n’avait jamais quitté le district. La délimitation
des propriétés est rétablie avec une exactitude
qui prévient habituellement les procès ; les
alliances et les démêlés avec les communes voisines
sont renouvelés, et, si les premières récoltes,
J ’état de la politique et les conditions sanitaires
sont favorables, la ' commune redevient riche, mais