eux enrôlent pour leur compte des serviteurs ou
doublures. Ils interviennent pour un tiers dans les
fonctions de bouchers qu’exercent les bûcherons; ils
coopèrent à l’abattage, au dépeçage de ce tiers, et
ils se réservent sur cette portion tous les droits que
ces derniers prélèvent sur la viande. Si la peau d’une
timbale vient à être crevée, ils fonctionnent de
droit sur la première bête à abattre et ils en prennent
la peau pour réparer la timbale. Chaque timbalier
a deux instruments qu’il sangle sur une mule,
et il chevauche sur la croupe en exécutant les batteries;
sî la mule vient à mourir, il doit porter lui-
même ses timbales un jour durant. Un des timbaliers
porte un vaste parasol en étoffe rouge fixé à une
longue hampe; ce parasol ne sert presque jamais à
garantir le Dedjazmatch, et pourrait bien avoir été
adopté en imitation des princes souverains de l’Inde et
du Japon. Un autre timbalier porte un gonfanon en
étoffe rouge dont la hampe est terminée par une boule
en cuivre surmontée d’une croix de même métal. Ce
gonfanon n’est point, comme chez nous le drapeau,
l’emblême de l’honneur militaire; en Ethiopie, on a
choisi pour symboliser ce sentiment une timbale maîtresse,
la plus grande de toutes, et sur le champ de
bataille, le soldat qui prend cette timbale est considéré
comme ayant pris le drapeau de l’armée ennemie, et
le corps entier des timbaliers lui appartient, dans le
cas où la victoire reste à son parti. Le chef des timbaliers
désigne un de ses hommes pour faire l’office
de bourreau du Dedjazmatch; il doit recevoir lui-
même le condamné des mains du chef des gardes, le
remettre à l’exécuteur et surveiller l’exécution. A l’exécuteur
revient de droit l’habillement du supplicié.
Tout boeuf, âne ou cheval provenant d’une razzia, et
ayant la queue coupée, revient de droit au chef des
timbaliers.
C’est ordinairement parmi les timbaliers, et suc la
présentation de l’Alaka des timbaliers, que le Dedjazmatch
nomme le Tchohaï-Tabbaki, ou gardien
des crieurs qui réclament justice; l’Alaka prélève
un léger droit sur chacun de ces plaignants, et il
jouit de plusieurs autres droits secondaires. Il répartit
ses différents profits parmi ses timbaliers et
nomme ses officiers subalternes. Il est investi d’un
petit fief et il est aussi revêtu d’une cotte d’armes en
soie. Il commande, mais n’exécute point les batterj.es,
et doit être à cheval, en tête de ses hommes. On choisit
pour ce poste un soldat courageux, car souvent il
laisse sa vie sur le champ de bataille pour n’avoir
point voulu faire tourner bride à ses timbaliers ou
suspendre la batterie de la charge, à la sommation
de l’ennemi. On choisit aussi un homme énergique
pour timbalier de la timbale maîtresse, car la perte
de cette seule timbale prive le chef de l’armée du droit
de se faire précéder de ces instruments jusqu’à son
investiture du Gouvernement d’une autre province
qui comporte le droit de faire battre des timbales, ou
jusqu’à ce qu’il en ait conquis d’autres par les armes.
Les timbaliers touchent une paye relativement importante,
mais ne jouissent d’aucune considération. Leur
grossièreté, leur gourmandise et leur ivrognerie sont
passées en proverbe. En marche, leur chef donne également
le signal de jouer aux trompettes, au tambourin
et aux flûtistes. Les joueurs de flûte, pris ordinairement
parmi les'fusiliers, et qui reçoivent alors double
paye, varient depuis quatre jusqu’à quinze. Leurs flûtes,
longues de deux pieds environ, sont faites en bambou
de calibres gradués, et ne rendent chacune que cer