dèfënt l’un après l’autre devant l’entrée de la maison,
en débitant leur thème dé giierre et jetant sur le seuil,
qui des boucliers, qui dés cèiritures, des javelines ou
des baguettes, dont le nombre indiquait le nombre dès
efiüëttiiS tués ou faits prisonniers, ou céiüi des javelines
qui Ieür âvàient été lancées durant le combat.
Cette bruyante paradé dürâ longtemps. Le Prince
voyant que le Lidj Don, toujours a là môme place,
était à bout dé forces, l’enVùya chez sa mère.
Il me dit que je devais désirer mé reposer et me
fit conduire dafis une jolie tenté dresséé à côté de
sa maison. Elle était blanche et coquette ; une épaisse
bouché dé jôncs frais èfi récoüvrait le Sol; un petit
alga garni d’un tapis était au fond ; afin de me soustraire
âüx curieüx, deüx èunuques gardaient ma porte.
Bientôt unê suivante de la Waïzoro Sahalou, femme
du Prince, vint me souhaiter la bienvenue de la part de
sa maîtresse, demander si je gardais ie jeûne et quels
étaient lés mets que jè préférais. Je répondis que je
fie jeûnais point, et qUe toüt cë qu’elle daignerait
m’envoyer sèfait bien reçu; et plusieurs de ses Suivantes
më servirent bientôt ufi repas parfaitement
préparé. Lé Prince, â son tour, me fit inviter à venir
rompre le jeûne-avec lui. Comme j’achevais à peine,
jé m’excusai ; mais il me fit dire que, dussé-je, malgré
l’abstinence rigoureuse qu’ils observaient, demander
des viandes à' sa table, il ne voulait faire son premier
repas, depuis qu’il était mon hôte, qu’en ma compagnie.
Ôn m’attendait pour le Benedicite. Le Prince m’indiqua
nn tabouret à la tête de Son alga ; je sus plus
tard que deux personnages jouissaient seuls de cette
faveür. Le plus grand silence régna pendant qu’on
mangeait; les causeries à demi-voix s’établirent dès
qu’on Sêrvit l’hydromel, et se prolongèrent durant une
couple d’heures. Lës restes de lâ table furent distribués
pàf jointéeS à dë nombreux soldats qui, debout,
avâiefit assisté au repas ; quelques-üfis étaient en
loques ; ils reçurent cette pitance eii S’inclinant et la
dévorèrent Sur place. Assister aifiSi au repas du ihaîtf ë,
est pour ces homifiës une grande marque dë faveur ;
on ieS appelle compains ou commensaux ; ils ofit 1 espoir
de gagher un jour par leurs services le droit de
.s’asseoir à cette même table, et de devenir ainsi les
compagnons oü côrnites du Prince, dans l’acception
usitée au Moyen-Age. Enfin, un prêtre Se leVa et dit
lës grâces ; les femmes du service de l’hydrOmel enlevèrent
leürs amphores vides; on emporta la table, et
l’huissier fît évacuer la maison, a 1 exception de quelques
convives favoris, formant le Cerclé intime. Les
pages prennent alôrs le service ; un huissier reste à
l’intérieur, mais chargé seulement de la porte ; une
femmë de confiance tient l’amphprë d’hydromel qu elle
né verse plus que pour la soif du maître ou de ceux
à qui il accorde nominativement un pareil honneur.
La conversation devient familière, les rafigs Sont
oubliés, et d’ordihaire règne la plüS franche gaîté.
Malgré un certain désordre apparent, les repas
sont conduits d’après une étiquette rigoureuse qui ne
sübit que des modifications légères, imprimées par les
habitudes particulières dü maître. Prendre sa nourriture
est pour l’Éthiopien ufie grosse affaire, et, comme-
nous aurons occasion de le voir dans la suite, de la
façon dofit il envisagé tout ce qui peut ÿ avoir trait,
résultent les coutumes, les usages, les moeurs de soû
pâyS et leUr identité ou leur analogie aVec Ceux de la
Judée, de la GrèCé antique et du moyen-âge en Europe.
Mon drogman fut mandé; jë devins naturellement
le centre de l’attention. Mais, avec son tact parfait, le