de blocs de roches qui conduisait au plateau couronné
par l’armée ennemie. A mi-chemin, un large ressaut
formait-une plaine moitié couverte de moissons d’orge,
et bornée sur notre gauche par un petit bois qui s’étendait
jusqu’au plateau.
Monseigneur monta à cheval, et suivi seulement de
son servant d’armes, de deux autres cavaliers et de
moi, il parcourut notre frùnt de bataille.
Ymer Sahalou commandait notre aile gauche, Birro
l’aile droite et Monseigneur le centre. Les fusiliers disposés
en tirailleurs se tenaient à une dizaine de mètres
en avant du front de bandière, composé de rondeliers,
formés sur une profondeur qui variait de douze à vingt
hommes. Les cavaliers, selon la nature du terrain devant
eux, se tenaient en pelotons ou en ligne, mais sans
ordre régulier; les chefs et les notables étaient presque
tous au premier rang. Notre aile gauche comptait environ
sept mille hommes ; supposant que l’ennemi profiterait
du bois pour le prendre par. son flanc gauche,
Ymer Sahalou avait formé son infanterie en trois corps
échelonnés ; les deux derniers avaient ordre d’obliquer
à gauche et de façon à s’assurer du bois, pendant qu’avec
le premier corps il irait .droit à l’ennemi. Il avait
massé'sa cavalerie, forte d’environ huit cents chevaux,
sur sa droite, en arrière, afin qu’elle pût au besoin appuyer
notre centre, séparé de l’aile gauche par une distance
d’environ cent vingt mètres.
Notre centre était composé de deux masses profondes
d’infanterie, à environ quatre-vingts' mètres l’une
devant l’autre, flanquées sur la droite d’un millier de
chevaux. Une réserve d’environ six cents fantassins et
d’autant de cavaliers, sous le commandement du premier
Sénéchal, avait ordre de suivre en se maintenant
à une portée de fusil. L’aile droite, distante de notre
centre d’environ trois cents mètres, se composait d’environ
cinq mille lances. Birro avait formé ses rondeliers
en un seul corps et âisposé ses seize ou dix-sept cents
cavaliers de façon à en- dissimuler une bonne partie
derrière l’infanterie et derrière des broussailles, où plus
de quatre cents attendaient pied à terre qu’il vînt prendre
leur commandement, et tenter avec eux de tourner
la gauche ennemie. On voit que notre cavalerie de
l’aile gauche, du centre et de l’aile droite était placée
de façon à agir en oblique: cette disposition avait été
prise dans la prévision que le bois permettrait à l’aile
droite ennemie une résistance tenace. En conséquence,
Ymer avait ordre de prendre l’offensive en même temps
que nous, mais l’offensive prise, de chercher seulement
à se maintenir sur son terrain, pendant que toute notre
cavalerie, à l’exception de la réserve, chargerait en
écharpe le centre ennemi et sa.gauche, où l’on supposait,
d’après la présence des timbaliers, que se tenait le
Lidj lima avec l’élite de ses troupes. J’estimai notre
armée à vingt-sept mille hommes ; personne, du reste,
ne s’inquiéta d’en connaître le chiffre exact. Au dire du
Prince, nous devions avoir plus de six mille cavaliers
et dix-sept cents fusiliers; quant au nombre des fantassins,
il n’avait pas de données plus certaines que les
miennes.
Le Dedjazmatch passa rapidement sur le front de
bataille, en faisant de brèves-recommandations, et saluant
amicalement quelques hommes d’élite. Nous
trouvâmes Ymer Sahalou gai et expansif; Birro, lui,
* était en colère; c’est à peine s’il fit accueil à son père.
Le Dedjazmatch se plaça ensuite entre les deux corps
du centre, où l’attendaient ses timbaliers et trois cents
cavaliers environ, chargés de veiller sur sa personne.
Les fusiliers, entremêlés de rondeliers, s avancèrent