de son inobservance- Pose ta main sur ma- cuisse,
et engage-toi, par la mort de Monseigneur Guos-
eho et par la mienne, à revenir auprès de moi ou
de mon père; sauf la volonté contraire de Dieu.
Je promis.. - ^
— Et si tes projets venaient à changer, ajouta»-
t41, dis que le pain se tourne pour toi en venin et
te corrode les entrailles, et que--tout ce que tes lèvres
pourront boire ne serve qu’à enflammer ta soi!;;
’dis que les hommes n’éprouvent pour toi que de. la
haine; dis que les désirs que tu formeras s'accomplissent
pour d’autres et sous tes yeux; dis que ton
passage sur la terre, comme dans le coeur de ceux
que tu aimes, ne laisse pas plus de trace que n en
laisse le serpent maudit qui rampe sur un ror
cher nu !
Je répétai ces paroles après lui.,
— Quant à moi, mon frère, reprit-il, dicte-moi
le serment que tu voudras.
* Comme je refusais :
— Si je trahis le premier notre amitié, dit-il, que .
mes chairs se déchirent et flottent en lambeaux le
long de mes ossements , avant que mon âme ait
quitté la terre; que tous .ceux en qui je me confie
se tournent contre moi et m’imputent ma , confiance
à crime; que mon cheval, mes armes et jusq.uà
l’herbe des champs, que tout se dresse contre moi;
que Dieu fasse un exemple hideux de mon corps sur
la terre et de mon âme dans l’éternitéî Maintenant,
tqçri frère, ditril en fermant les yeüx, clos mes
paupières de ta main, avec la pensée que c est la
mort qui me les scelle, si tu trahis ton serment.
Je lui obéis. Et à son tour, il me .ferma les yeux
fié sa main, en disaqt : p - . . .
— Que mon frère meure, si je n’accomplis pas
ce que je dis!
Il me fit quelques recommandations relativement
à Oubié, m’offrit un sachet contenant de l’or natif,
que je refusai, et nous nous quittâmes après une
accolade.
Après une journée de route, j’arrivai à Gondar.
Le Lik Atskou parut peu satisfait lorsque je lui
racontai comment je venais de quitter le Dedjadj
Birro. La nature droite, judicieuse et toute magistrale
de mon hôte s’accommodait mal des allures
impétueuses de ce jeune prince, et il ne se gênait
nullement pour rappeler publiquement sa descendance
équivoque du Dedjadj Guoscho et pour improuver
sa conduite.
— On peut bien conduire les hommes à coups
de hache, disait-il, et• échafauder ainsi un semblant
de puissance, mais un jour tout cela croule sous le
souffle de Dieu. Si j’étais plus jeune, ajouta-t-il,
c’est en France que je t’engagerais à retourner, afin
d’y aller avec toi ; mais je suis trop vieux, et puisque
tu dois revenir à Gondar, tu pourras au moins me
fermer les yeux. Triste temps que le nôtre!
Il m’engagea à resserrer ma confiance à la cour
d’Oubié; et, selon son habitude, il me congédia sur
le seuil de sa maison, en me donnant sa bénédiction.