sont insuffisantes à comprimer ce double mouvement.
Il n’y a pas encore quinze années que les
hernes produites par les guerres s’étendaient sur
l’un et l’autre versant de la chaîne à l’ouest de
Moussawa, occupée par les Akala-Gronzaï. La rivière
Béchelo, et même l’Abbaïe ou fleuve Bleu, n’empêchent
point les adversaires de l’un et l’autre bord de chercher
à s’étendre en faisant le désert,au delà de l’un
ou de l’autre bord de ces rivières. Il importe aussi de
ne point,perdre de vue qu’en Éthiopie, la population
étant moins dense qu’en Europe, ses déplacements,
par suite de famine, de guerre ou pour d’autres
motifs, sont bien plus fréquents. Le sentiment patriotique
de l’Européen tient plus du sol, celui de
l’Ethiopien, de la race; et si, en Europe, on a pu
dire qu’on emportait la patrie à la semelle de ses
chaussures, cette image est bien plus vraie, appliquée
aux Africains et même aux Asiatiques. En
Ethiopie, un des désespoirs du voyageur, qui croit
connaître le pays, est d’apprendre, quelquefois à
l’improviste, que telle petite communauté ' comprenant
une famille, une portion de village, un village
entier ou même un district, est d’une origine distincte
de la population qui les entoure. Cette communauté,
débris quelquefois d’une race lointaine ou
disparue, du jour où elle a pris racine aux lieux
où on la trouve, - s’est conformée aux lois et manières
d’être de ses nouveaux voisins, en tout ce
qui est nécessaire pour la relier politiquement et
civilement avec eux^mais comme pour ne point se
dégrader en reniant complètement ses pères, elle a
depuis des générations conservé précieusement quelques
traits de leurs moeurs ou de leurs coutumes,
qui témoignent de sa descendance. Les Éthiopiens
ont une aversion instinctive pour pour l’uniformité
civile ou administrative; ils la regardent comme un
moyen et aussi un effet de la tyrannie. La configuration
et la disposition de leur territoire, qui offre
partout des. points de résistance, et le manque de
grandes routes semblent avoir servi à confirmer
et à assurer leurs libertés locales , comme à empêcher
la concentration permanente de la puissance
impériale. C’est ainsi que ce peuple à pu durer
jusqu’à ce jour, car la centralisation du pouvoir
d’une nation prépare et facilite son asservissement
ou sa conquête. Les montagnes, les accidents de
terrain, les arbres èt jusqu’aux buissons, tempèrent,
disent les Éthiopiens, l’effort des vents. Ils
disent encore qu’il est aussi injuste et aussi insensé
de vouloir assimiler toutes les parties d’un
empire, que d’exiger des serviteurs d une même
maison qu’ils se dépouillent de leur physionomie
et de leur caractère personnel, pour prendre une
physionomie et une maniéré dêtre uniformes, ils
prétendeîit que le- maître est alors moins bien servi,
et ils traitent de renégat la communauté ou le serviteur
qui se prête à ces assimilations despotiques.
Faisant la part des restrictions résultant de cet état
de choses, suivons le pourtour de l’ancien Empire
d’Éthiopie, en partant de la mer Rouge et marchant
du nord vers les contrées du sud, de Badour ou Ha-
kike, petit port au S. de Saouakin, jusqu’à Zoulla,
près l’antique Adoulis ; la côte est peuplée par les Tigrés,
qui, sous le nom de Natabs, Hababs, Kacys, etc.,
forment diverses tribus de Sémites, dont la très-
grande majorité a adopté l’Islamisme. Ces peuplades,
devenues indépendantes au fur et à mesure de ^ la
décadence de l’Empire, forment entre elles une espèce