Au moyen de forts enkassês, espècè d’ëpiêùx, on U
déchaussa à grand’ peine, sa partie enfouie étant la
plus longue et la plus grosse ; on la fit basculer sür
un lit de bois sec, on l’entoura encore de combüstible,
et après qu’eiie eut été maintenue longtemps encore
dans un immense brasier, elle finit par se fendiller
de toutes, parts. On la brisa; et, jaloux de compléter
l’oeuvre de destruction, on combla sa large alvéole et
l’on dispërsà aü loin les fragments de ce monüment
d’idolâtrie.
Mais les préoccupations du Prince et des chefs
étaient déjà tournées d’un autre côté; on apercevait
à l’horizon des bandes noires glissant dans la direction
de notre camp. Pendant les quelques heures que nous
venions de passer au même endroit, les Gallas, qui, ie
matin, n’avaient fait qu’apparaître à distance par petits
pelotons, rassemblaient leur cavalerie pour intercepter
notre retour.
Excepté sur quelques points, le terrain à parcourir
était plat; nos neuf cents cavaliers ne redoutaient pour
eux-mêmes aucune rencontre, mais nos gens à pied
allaient entraver leurs évolutions. Lorsque le Dedjaz-
piatch ne prenait pour escorte que de ia cavalerie, il
arrivait ordinairement que, malgré ses ordres, des
fantassins, dans l’espoir d’avoir à se signaler sous ses
yeux, suivaient à leurs risques et périls les mouvc-
ments rapides de l’escorte; de plus, pour ménager
leurs chevaux de combat, beaucoup de cavaliers les
faisaient conduire à la main par leurs palefreniers ou
leurs servants d’armes à pied; ce qui fit qu’en cette
circonstance, étant partis le matin, imparfaitement
renseignés, et croyant n’avoir a faire qu’une petite
Course avant le déjeuner, nous nous trouvions à plü=-
sieurs lieues de notre camp, avec plus de quatre cents
fantassins a protéger en plaine contre la cavalerie
ennemie.
On s’étâit bien aperçu du danger qui grandissait
autour de nous, mais en véritable soldat chacun avait
dissimulé cette préoccupation : les chefs se plaisantaient
sur leur gaucherie à manier l’enkassé ou à faire
du bois; les soldats se, livraient à mille espiègleries,
On avait ri et joué comme des enfants, Notre besogne
terminée, 1e silence se fit subitement, Le Prince excepté,
chacun quitta sa toge, s’alestit, s’assura de ses armes,
du harnais de son cheval, et nous partîmes : deux
cents cavaliers environ eiî avant-garde, les piétons,
nos trente fusiliers et lès hommes à mule au centre;
le Prince à l’arrière-garde; chaque corps étant à environ
cent mètres l’un de l’autre. Nos. fantassins prirent
lexpas gymnastique, et bientôt les 'cavaliers ennemis,
qu’on estima à plus de deux mille, nous enveloppèrent
en fer à cheval. Je fus frappé de l’entente avec laquelle
nos gens, sans ordres donnés, répondirent à cette manoeuvre,
Nos. trois corps serrèrent les. distances; éclaireurs,
flanqueurs, escarmoucheurs, relais., se. détachèrent
simultanément et prirent l’offensive sur tous
les points, Les Gallas essayèrent d’arrêter l’avant-
garde, et la décision qu’ils mirent à la charger nous
donna lieu un instant d’appréhender que la mêlée ne
s’engageât. Mais des contre-attaques habilement faites
par nos flanqueurs maintinrent le combat d’escarmouches;
et sans dévier de notre route, nous continuâmes
à avancer rapidement, combattant toujours
de façon à refuser le combat sur place* • Le Prince,
sachant combien les Gallas redoutent les armes a feu,
mais s’enhardissent après une décharge inefficace, dér
fendit aux fusiliers de tirer sans son ordre. Il est à
eroire que la présence de ces fusiliers préserva notre