tification consistent à achever grossièrement de rendre
défensibles les monts-forts, que, grâce à l’habitude
géologique du pays, on trouve dans la plupart des
provinces. Les chefs de corps déterminent l’assiette
d un camp d’après des considérations plutôt politiques
que militaires, et ils ne songent jamais à le fortifier
de retranchements. Ils ont bien entendu parler de
travaux analogues, mais ils n’en font aucun cas pour
eux-mêmes. Quant à la tactique, les bandes étant organisées
sur des bases plutôt civiles qüe militaires,
et ne contenant aucune de ces unités divisionnaires
qui forment comme des articulations nécessaires aux
manoeuvres, leurs mouvements sont réduits à peu
près aux évolutions que nous avons citées plus haut.
Le Polémarque est ordinairement instruit par ses
espions de l’ordre de bataille projeté par l’ennemi; de
concert avec ses principaux officiers, il arrête le sien
en conséquence, et ordinairement les soldats suppléent
aux lacunes par des décisions qu’ils se communiquent
au moyen de passe-paroles. La disposition
la plus commune consiste à mettre en première ligne
les fusiliers et les escarmoucheurs rondeliers entremêlés
de pelotons de cavalerie; ces troupes engagées,
on fait avancer, successivement ou a la fois, des masses
d’infanterie de plusieurs rangs de profondeur et disposées
en Lojs corps de bataille, pendant que la
cavalerie essaie de tourner l’ennemi. En général, le
Polémarque se tient au centre, derrière ses timbaliers
qui battent la charge, et contre lesquels se dirige
le principal effort de l’ennemi; derrière le centre,
on place ordinairement des troupes de réserve, prêtes
à renforcer les lignes qui fléchissent. Quelquefois le
Polémarque laisse ses timbales au centre, pour y
figurer sa présence, et il prend la conduite de cette
réserve dont la direction décide souvent de la victoire.
Quelques Polémarques, désireux d’accomplir
des prouesses personnelles, donnent la conduite des
différents corps à leurs principaux officiers, et, accompagnés
seulement de leurs comités ou commensaux
intimes, vont combattre à une des ailes. Mais,
durant la bataille, bien qu’il leur soit impossible,
quelque poste qu’ils occupent, d’opposer aux urgences
accidentelles une manoeuvre improvisée
de quelque importance, chefs et soldats désapprouvent
une ardeur, qui, tout en témoignant de
l’intrépidité de leur chef, met en péril sa sûreté.
La bataille une fois bien engagée, les différents corps
échappent complètement à la direction des chefs, qui
ne combattent plus que pour leur compte personnel.
Sans confiance dans la cohésion de leurs rangs, les
bandes se désordonnent promptement, et leurs
mouvements ne dépendent plus que de ces vertiges
qui sillonnent les amas d’homme^. Aussi les
paniques éclatent-elles fréquemment au milieu de ces
collisions chaotiques, d’où la victoire surgit presque
toujours d’une' façon imprévue.
Deux bandes s’acharneront quelquefois l’une contre
l’autre dans une mêlée persistante, mais en général
les batailles sont d’autant moins longues et
sanglantes que les combattants sont plus nombreux.
Quant aux combats entre petites troupes, ils sont
quelquefois fort opiniâtres. Pendant- notre séjour à
Goudara, deux bandes de rondeliers, l’une de
163 hommes et l’autre de 206, en vinrent aux
mains en Metcha sur une question de préséance
insignifiante. La plus nombreuse fut battue : il n’en
survécut que 38 hommes dont plusieurs blessés;
des vainqueurs, il n’en resta que 76, dont plus de la