Dedjadj Guoscho lui envoya un message des plus
sévères, et la torture d’Ilma cessa- Quelques jours
après mon arrivée, Birro porta de nouveau son camp
auprès de Tchilga pour dévaster le koualla qui l’entoure,
enlever ainsi des ressources aux assiégés et
ravitailler ses soldats. Nous revînmes chargés de vivres
au camp de Kobla.
Peu après, des chefs de partisans qui tenaient
isolément l'a campagne, se concertèrent pour surprendre
notre camp : c’était après minuit; nous dormions
tous, jusqu’aux fusiliers qui étaient de garde
devant la tente du Dedjazmatch. Réveillé par les
cris, j’entendis Birro qui maugréait en s’armant à
la hâte ; il s’élança hors de sa tente en faisant retentir
sur son passage le refrain bien connu de son
thème de guerre, Le camp, attaqué de deux Côtés
opposés, était dans une confusion inexprimable. Birro
courut au camp de droite, où l’attaque était la plus
vive ; des soldats mirent le feu à quelques huttes et
de rougeâtres lueurs éclairèrent la scène. Les assaillants,
au nombre d’environ 700, avaient fait, une
large irruption, et s’avançaient de plus en plus au
milieu de nos huttes en combattant avec fureur ;
mais nos gens affluaient, et, encouragés par la voix
de Birro, se jetaient tête baissée dans la mêlée;
Birro lui-même en fit autant. Pendant trois ou quatre
minutes, les cris cessèrent; on n’entendit que le fer
et les coups. Une clameur victorieuse s’éleva parmi
les nôtres : le brave Guolemdatch et une poignée
de rondeliers faisaient une trouée dans les rangs de
l’ennemi, qui recula en désordre et disparut dans
l’obscurité, laissant quelques morts et une trentaine
de prisonniers. Des cavaliers, déjà en selle, poursuivirent
les fuyards, mais sans oser les entamer.
Nos timballiers battaient a tout hasard la charge au
centre du camp. La crainte d’avoir le Dedjazmatch
sur les bras décontenança l’attaque faite contre
notre camp de gauche; où les assaillants étaient
pourtant en plus grand nombre; ils se retirèrent
précipitamment sans grande perte. Nous eûmes une
vingtaine d’hommes tués et un nombre moindre de
blessés ; on nous tua aussi deux femmes et on nous
en blessa une trentaine.
Au point du jour, Birro fit couper le poignet
droit à quelques-uns des prisonniers, et ordonna
aux autres d’emmener les mutilés afin qu’ils servissent
d’exemple aux rebelles; et, le même jour,
nous quittâmes le terrain incommode où nous campions
pour aller nous établir un peu plus loirn Au
moment de monter a cheval, Birro me fit cadeau
de sa belle pèlerine blanche que depuis quelques
jours ses principaux seigneurs lui demandaient à
l’envi. Peu après, manquant encore de vivres, le
Dedjazmatch fit publier un ban engageant les habitants
de certains districts à mettre à couvert leurs
personnes, leur bétail et leurs objets précieux, afin
qu’il envoyât ses soldats se ravitailler sur leurs
terres; il leur accordait en même temps l’exemption
d’une année d’impôts. Les habitants se prémunirent
en conséquence; mais ils s’apostèrent, laissèrent
s’effectuer le pillage, et attaquèrent nos gens sur
plusieurs points à la fois, lorsqu ils revenaient en
désordre chargés de vivres. Notre arrière-garde eut
fort à faire pour les dégager : nous y laissâmes une
soixantaine de morts; nous fîmes prisonniers une
trentainé d’hommes et plus de 200 femmes.
Birro ayant perdu dans cette affaire un parent
douteux, ou, pour le moins, très-éloigné, saisit ce