
une machine, en travaillant quatre heures de fuite ^ 1
& faifant dix-huit cent toifes de chemin par heure ; I
il va fouvent plus v ite , mais c’eft fur ce pied que
ce moulin a été calculé ; il refte donc quarante-fix
livres deux tiers pour vaincre la réfiftance des frot-
temens : il s’en faut beaucoup qu’ils aillent à cela
dans cette machine ; on peut même dire qu’ils
font moindres que dans tout autre moulin de cette
efpèce. Un cheval peut d’autant mieux rélifter à ce
travail, qu’à chaque pilage, qui dure cinq ou lix
minutes , il en a deux ou trois de repos pendant
qu’on vide les auges & qu’on les regarnit.
Le moulin de Corbeilles n’a jamais pilé que deux •
cents livres de racines par jour, parce que-l’étuve
n’a jamais fourni à une plus grande exploitation ;
mais la durée 'de ce travail fait juger qu’il pileroit
aifément quatre cents quatre-vingt & même cinq
cents livres s’il étoit fourni.
T amifâge de la poudre de garance.
La garance étant pilée , on la paffe auflitôt au
tamis, jufqu’à ce qu’elle foit à peu près comme de
la fciure de bois.
On la met enfuite dans des barils qui doivent être
bien fermés, & qu’on a grand foin de tenir dans
un lieu fec.
• Les tamis à paffer la garance, ont un pied de
hauteur, fur deux pieds &. demi de diamètre; ils
ont la forme d’une caîffe de tambour ; ils font recouverts
de peau par deffus & par deffous, pour empêcher
la diflipation de la poudre fine ; la toile qut
eft au milieu de ces tamis eft de crin; il y en a de plus
ou moins fines, fuivant la qualité qu’on veut donner
à la garance.
La garance grappée ou pilée, fe diftingue en deux
efpèces ; favoir, en garance robèe, & en garance
non robée.
La garance non robée ; eft la racinè qui n’a été que
Simplement pilée , & qui eft encore mêlée avec
l’épiderme qui recouvroit la racine.
La garance robée, qui eft la plus précieufe, eft '
celle dont on a enlevé l’épiderme après qu’elle a
été pilée. .
Voici comme on s’y prend pour l’obtenir : on
retire la garance de deffous les pilons, lorfqu’elle
n’a encore reçu que quelques coups ; on fa tamife
groflièrement pour enlever l’épiderme , & on la
remet enfuite de nouveau au moulin pour achever
de l’y pulvé'rifer.
Toute la poudre de la garance n’eft pas d’un prix
égal ; on peut évaluer la robée, à 45 ou 50 livres le
cent ; la non robée, à 30 ou 3 2 livres ; la fine grappée,
à 62 ou 63 livres ; & le [on, à 10 livres.
Les étrangers vendent des garances fous le nom
de Villon de garance, qui bien fouvent n’eft que de
la terre rougeâtre, mêlée avec quelque pouflière
de la garance, ou de la grappe de celle qui a déjà
été employée dans leur pays ; ce qui eft une fraude
des plus grandes, d’autant que cette pou dre fophift'iquée
donne une mauvaife couleur, & ne fert qu’l
rougir la laine des étoffes où la terre s’attache.
Avantages de la culture de la garance.-
La culture de la garance offre beaucoup d’avantages
: elle n’épuife point la terre ; & les labours
que cette plante exige, difpofent cette terre à produire
en abondance toutes fortes de grains.
Dans les pays où elle fe cultive , les terres portent
une année du feigle ou de l’épeautre ; l’autre
année , de l’orge ou de l’avoine ; la troifième, elles
reftent en jachère.
Dans le même efpace de trois ans, on peut faire
une récolte de garance & une de grain.
Ainfi, on peut efpérer de la culture de la garance
plufieurs avantages fenfibles :
i°. Un profit honnête par la vente de la racine.
20. Une amélioration confidèrable des terres médiocres.
30. La fatisfa&ion de pouvoir occuper par ce
moyen, & donner à vivre à beaucoup de femmes
& d’enfans.
Ên fuivant la méthode de M. d’Ambourney ,
l’avantage fera encore plus confidèrable, puifqu’on
pourra le paffer d’étuver, en employant les racines
toutes vertes poiir la teinture.
Enfin, un arrêt du confeil d’état du ro i, du 24
février 1756, doit engager à cette culture en France.
En voici les difpofitions.
« Le roi étant informé que plufieurs terrains en
marais & inondés feroient propres à produire de la
garance, que l’on eft obligé de tirer des pays étrangers,
& que quelques personnes s’offriroient à faire-
les frais néceffaires pour cultiver cette plante, &
deffécher lefdits marais , s’il lui plaifoit les faire
jouir de quelques exemptions & privilèges , & notamment
de ceux qui font attribués par. l’édit de
1641, & autres réglemens fubféquens à ceux qui
font le defféchement des marais, jufqu’alors incultes.
A quoi voulant pourvoir, ouï le rapport dû fieur
Moreau de Sechelles, conseiller d’état ordinaire, &
au confeil royal, contrôleur général des finances;
le ro i, étant en fon confeil, a ordonné & ordonne
que ceux qui voudroient entreprendre de cultiver:
des plantations de garance dans des marais & autres
lieux de pareille nature, qui ne font point cultivés
ne pourront pendant vingt années , à compter dir
jour que les defféchemens & défrichemens auront:
été commencés, être impofés à la taille, eux ni-
ceux qui feront employés à ladite exploitation ,
pour raifon de la propriété ou du profit à faire fur-
l’exploitation defdits marais & terres cultivées en
garance. Voulant fa majefté qu’en cas qu’ils n’aient-
point été impofés jufqu’alors, & qu’ils ne feront-
point dans le cas de l’être dans les paroiffes où lefdits
biens feront fitués , pour leurs autres biens >
facultés & exploitations , ils ne puiffent être compris
dans les rôles des tailles , oc qu’au cas où ils
feroient d’ailleurs impofables , ils foient taxes d’office
par le fieur intendant & commiffaire départi
Ordonne fa majefté qu’en outre, ils jouiront de tous
les privilèges portés par l’édit de 1607, & la déclaration
de 16 41, en faveur des entrepreneurs des
defféchemens ; comme aufli qu’il leur foit permis
de tenir, tant à Paris que dans les autres villes &
'-lieux du royaume, des magafins de la garance provenant
de leurs exploitations, & de les vendre,
tant en gros qu’en détail, fans qu’ils puiffent y être
troublés ni inquiétés.
V O C A B U L A I R i
jA l zàlA ; efpèce de garance qui croît aux environs
de Smyrne, & qui donne de belles teintures
incarnates.
Billon ; c’eft Je nom que l’on donne aux petites
racines de garance nettoyées de la terre & d’une
partie de l’épiderme. On rejette en France le billon
comme inutile, quoiqu’on l’emploie en Hollande à
des teintures communes.
C h a t ; efpèce de garance qui croît fiir la- côte
de Coromandel.
C ouchis ; on appelle ainfi les nouvelles pouffes
de garance qu’on couche 4e côté & d’autre en
terre.
C outeaux ; ce font des lames de fer qui font au
deffous des pilons de bois pour réduire la garance
en poudre.
Étuve ; c’eft une pièce échauffée par un fourneau
, par un four ou par un poêle , dans laquelle
on fait fécher des plantes, des graines , &c. Il y en
a de formes différentes, fuivant leur ufage.
F ine ; ( garance) c’eft la racine de la garance qui
a été hien pulvérifée.
G a r a n c e ; plante dont il y a plufieurs efpèces,
qui toutes fourniffent plus ou moins de teinture
en rouge.
La petite garance, eft une garance fauvage, &
commune fur les côtes de la Méditerrannée..
La garance grappée , eft celle qui fe débite fous la
forme d’une poudre rougeâtre, d’une odeur un peu
forte, & qui eft graffe & onâueufe.
Droits fur la garance1
La garance p a y e , pour droits d’entrée, feize fous
fix deniers;du centpefant, & vingt -fix fous pour
droits de fortie,'conformément au tarif de 1664.
Quant aux procédés de la teinture par la garance,
ils regardent néceffairement l’art du teinturier, qui
fe trouvera décrit dans l’autre divifion du Diétion--
naire des Arts & Métiers.
de P A n de la Garance.
Grabelage; c’eft l’aâion de brifer & demettre
en pouflière.
G rappe de Hollande ; c’eft la poudre de la
garance de Zélande, qui eft très-recherchée dans le
commerce.
Grapper la racine de garance ; c’eft la
réduire en poudre.
On dit que la racine fe grappe , lorfqu’elle eft
affez defféchée pour être pulvérifée par les pilons
ou par la meule d’un moulin.
Izari ; efpèce dé garance des environs de Smyrne y
qui fournit de belles teintures incarnates.
Mule ; fgarance) on appelle ainfi dans certains-
cantons de la Hollande, la poudre la plus groffière.
de la garance qui a été pilée.
Robelage ; c’eft l’aâion de roberla garance;
R ober la garance ; c’eft enlever l’épiderme
qui recouvre fes racines.
La garance robée , eft celle dont on a enlevé l’épiderme
après qu’elle a été pilée.
La garance non robée, eft celle dont la racine n’a
été que Amplement pilée, & qui eft encore mêlée.-
avec l’épiderme qui la recouvre.
Rouge d ’A ndrinople ; c’eft un rouge v if incarnat
fur le coton, que procure Yaçala ou la garance
de Smyrne.
Un et d eu x ; on appelle ainfi en Hollande le:
mélange de deux efpèces de poudres de racines.ds:
garance.