
d’un bâton !$ armé à Ton - extrémité d’un plateau
rond , fig' 1 o » divife le caillé en ‘grumeaux plus
menus, de manière quen cet état de divifion , le
■ caillé fe trouve précipité entièrement au fond de
la chaudière après une heure & demie d'e repOs,&
.que tout le petit-lait fumage ; on puife alors environ
une brente.de petit-lait quon tire de.la chaudière
& qu’on met a part. ' ,
; Quand: toutes ces opérations font 'terminées ‘ on
isremet la chaudière fur le fourneau ; l aide-, { fouf-
icafier') avec le ; bâton dont j’ai parlé; remue’ continuellement
le caillé , en s’attachant à divifer la pâte
de plus en plus, jufqu a ce que chacun des grumeaux
foit bien cuit. On ne peut fàifir ce point
précis de cuiffonque par une grande habitude ; mais
une autre opération >auffi importante, & qui efl
particulière au fromage de -Lodi, coniifte a mêler
à propos une once & demie de fafran à la pâte du
fromage avant qu’elle ioit cuite ^entièrement, afin
qu’elle en puiffe prendre le goû t, & fur- tout la
couleur. -
Quand on reconnoît à (des marques certaines &
infaillibles que la pâte divifée en petits grumeaux
eft cuite fuffifamment, on retire la chaudière de
defius le fourneau, & les petits grumeaux fe précipitent
très - promptement au fond. Comme nous
avons parlé, à l’article du Gruyères,des marques auxquelles
on reconnaît le degte de’ cuiffon fùffifàrite,
nous ne les rappeilerons pas ici. Le fo-ufcdJUr-, qui
■ eft bien inftruit de ces marques, prend une fer-
pillière de toile de chanvre, groffe & claire, &
la plongeant jufqu’au fond de la chaudière , il raf-
fémble avec cette toile g en- une malle , tous-les
grumeaux, de pâte difperïés• & flottans au-milieu
du petit-lait; puis il foulève le tout jufqu’à la fur-
face de la liqueur qui le foutient. Au même mitant
un autre aide verfe dans la chaudière la mefure de
petit-lait qu’i l en avoit ôtée, quelque temps auparavant
, ce qui facilite l’extra&ion de la toile, chargée
de tous les grumeaux de la pâte du fromage : on
dépote: cette toile dans un grand feau-, & on en
laide égoutter le petit-lait pendant environ un
quart - d’heure; e’eft alors qu’on met la pâte du
fromage bien cuite, & enveloppée delà toile, dan?
une forme ,fig. y; enfuite on ferre & on affujettit
cette forme bien fortement par le moyen d’une
corde, & l’on charge le tout d une pierre qui couvre
exactement le fromage & la forme , & qui pèfe
environ 70 à 80 livres ; on laiffe le tout en cette
limâtibn cinq ou fix heures.
Au bout de ce temps, on ôte la pierre ; on retourne
le moule & le fromage, qu’on charge enfuite de la
même pierre , & lorlqu’on a ainfi retourné le fromage
trois ou quatre fois , on le tranfporte dans la
c a fibre, & on le met fur des planches trouées pour
qu’il achève de s’efforer.- , . ■>
On ne commence à faler les fromages qu apres
qu’ils ont demeuré cinq, ou fix jours darisda cafièrë :
on répand du fiel fur la furface fupérieure des fromages
, le lendemain ondes retourne , & on en
répand fur te furface qui a ::étê retournée. On continue
à les faler en les retournant à chaque fois ; & ,
quoiqu’on n’y mette plus de fiel, on a foin de les
retourner pendant trente-cinq jours , pour qu’ils le
prennent bien' également.
Dans l’hiver, comme les vaches donnent moins
de lait, on eft obligé de réunir les traites de deux
jours pour faire un fromage qui ait le poids ordinaire.
En cette faifon, cm ménage moins le feu dans
le fourneau , poiir donner au lait lé degré de chaleur
qui convient, afin que la prèfure fe diftribue
également dans la liqueur , & produife fon eft et
dans toute là maffe ; malgré ces attentions , les fromages
fabriqués en hiver , font moins eftimés que
I ceux qu'on fait en été. On fait en général que la
! bonté des herbages, & par cohfêquènt la qualité du
lait & des fromages , dépendent aes'fàifons.
Dans la plupart des villages du Lcdefan & du
Parmefan, on fait des formes comme dans les domaines,
où l’on a raffemblé le nombre de Vaches
dont nous avons parlé ci-deffus ; mais voici l’arrangement
qui préfide à Cetté fabrication. Il eft convenu
entre tous les habitans d’une communauté,
que chaque particulier qui n’a que le lait d’une ou
de deux vaches, le portera dans une laiterie com-
mune , aux travàux dé laquelle le Seigneur, protecteur
de cetté’ convention, à prépofç un ouvrier
ou cafter-, payé:par la communauté;' Oèt ouvrier
reçoit le lait de tous les habitans , & fait avec ces
portions réunies de grandes formes de 60 a 70 liv.
Au moyen de cet arrangement, à la fin de l’é té ,
chaque habitant reçoit, fuivant la quantité de lait
qu’il a fournie', tin certain nombre de formes qu’il
peut vendre àtiffitôt ; parce qu’elles font d’un bph
débit , vu qu’elles peuvent circuler au loin , &
même fe porter dans les pays étrangers. Au lieu
que borné à la petite quantité de lait que fe? vaches
lui donnoient chaque jour, il n’auroit pu fabriquer
que de petits fromages qui fe confomment fur les
lieux , & f e vendent à un prix médiocre lorfqu’on
parvient à s’en défaire. .
On voit aifémerit en fuivant les procédés de la
préparation du fromage de Parmefan , que nous
venons de préfenter très-fuccintement, & en les
comparant avec ceux du fromage de Gruyères,
que ces deux fortes de fromages* font fabriques fur
les mêmes principes ; c’eft pour cetté raifon que
nous plaçons ce que nous avons dit de la fabrication
du Parmefan , à la fuite de la defcription
de la méthode qu’On fuit pour faire le fromage de
Gruyères : comme cette defcription eft beaucoup
plus étendue que la dernière, que les inftrumens
& les procédés y font prétentés fort en detail, on
pourra fuppléer à ce qui peut manquer aux opérations
nécefraires pour faire le Parmefan, parles
manipulations plus circonftanciées'qui conviennent
au Gruyères. : * ,
Effectivement, l’une & l ’autre méthode s accordent
dans les principaux points. Le Parmefan lé
Gruyères font des fromages coffipofés de lait caille
h ^ordinaire ; mais qu’on divife enfuite en très-
petits grumeaux , & qu’on fait cuire darts le petit-
lait après l’avoir ainfi divifé ; puis on les rapproche
dans un moule pour en former des maffes folides ,
qui ont l’avantage de pouvoir être tranfportées &
vendues dans les pays étrangers, & de fe conferver
plus long-temps que les fromages qui ne font pas
cuits ou qui le , font moins.
Ces deux fortes de fromages, malgré cette grande
reffemblance dans les principaux procédés de leur
fabrication, diffèrent cependant par quelques points
affez effentiels. La pâte du Gruyères eft plus compare
& plus ferrée ; celle du Parmefan a plus de
grain , ce que je crois devoir attribuer au plus
grand degré de cuiffon qu’on donne aux grumeaux
de cette dernière pâte , & qui la rend plus ferme
& plus propre à être râpée Sç réduite en poudre
lorlqu’oii veut s’en tervir dans la plus grande partie
des mets où ces rapures entrent comme affaifonne-
ment prefque général.
Le Parmefan diffère outre cela du Gruyères par
yne teinte d’un jaune plus foncé , qu’on lui communique
en y mêlant une certaine quantité de
fafran.
II eft inutile d’avertir que les différens uftenfiles
qui fervent dans la préparation de l’un & l’autre
fromage , font parfaitement femblables quant à
lçurs formes & à leurs ufages.
S E C T I O N I I I .
fromages fa it s avec le lait de brebis & de
chèvres, & non cuits.
A r t i c l e p r e m i e r .
Fromages de Roquefort.
Le fromage de Roquefort eft.de tous ceux qui fe
font en France , celui qui a le plus de réputation
par la dèlicateffe de fon goût, 1a fermeté de fa
pâte, & le perfillage qui fe forme dans certaines
parties de fa maffe. Pour faire connoître tout ce qui
concerne ce fromage, j’expoferai d’abord , comme
je l’ai fait à l’égard du fromage d’Auvergne, la
manière d’élever & de nourrir les beftiaux qui en
fourniffent le lait ; je décrirai la méthode de le
faire ; 30. je parlerai des caves dans lefquelles on le
dépofe pour le faler & le préparer; 40. enfin, je
m’occuperai de fon commerce,
§ . I. Manière d'élever & de nourrir les troupeaux
qui fournirent le lait dont on fait les fromages
de Roquefort.
Le fromage de Roquefort fe fait de lait de brebis ;
quelques particuliers y mêlent du lait dç chèvre,
oc ce mélange contribue à le rendre encore plus
délicat. Les brebis qui fourniffent ce la it, paiffent
fur le Larzac & dans quelques lieux voifins, comme
font le canton de Cauffe-Neigre dans le Gévaudan ,
& quelques parties du diocèfe de Lodçve ; ce?
Ans 6* Métiers, Tome JJI. Partie I.
pâturages occupent une fuperfide élevée d’environ,
nuit lieues d® longueur, fur autant de largeur. L’air
qui règne fur le Larzac eft froid & fubtil : on y
terne malgré cela plusieurs efpèces de grains, après
la récolte defquels il croît en abondance de l’herbe
qui fert à la nourriture d’un grand nombre do
beftiaux qu’on y entretient : on compte tous les ans
fur le Larzac, plus de cent cinquante mille bêtes
à laine , parmi lefquelles on eftime qu’il y a le tiers
de brebis/
Les plantes que produifent les pâturages de ces
cantons, n’ont pas la même vigueur & la même
abondance de fucs qu’on trouve dans celles des
terrains gras & humides, mais ayant plus de fineffe
& de faveur, elles en font bien plus propres pour
la nourriture des brebis. Il eft fur-tout des paroiffes
où les herbes font plus fucculentes & plus odoriférantes
que dans d’autres ; aufti le lait des brebis
qui y paiffent eft-il meilleur, & le fromage qui
en eft fait plus délicat. Pendant toute l’année , on
traite ces troupeaux avec de grandes attentions 1
pendant l’hiver , ils ne fortent que le jour, & même
quelques heures après le lever du foleil. On les
tient renfermés exactement tout le1 temps que la
terre eft couverte de neige ou de frimats. On leur
donne auflx de temps en temps un peu de tel ; mais
depuis le mois d’aÿril jufqu’à la fin de novembre,
les brebis font expofées au grand air le jour & la
nuit, excepté dans les temps de pluie ; les bergers
les renferment alors dans des bergeries , où elles
n’ont d’autre nourriture que de la paille : on le*
mène boire une fois tous les jours pendant l’été ,
ou au moins de deux jours l’un * fi l’eau eft éloignée t
quelques heures avant de les mener boire , on leur
donne du tel ; c’eft fur-tout lorfqu’elles font expofées
continuellement à l’air, qu’on leur en donne plus
fouvent St en plus grande dote : on n’y manque pas
lorfqu’il règne des brouillards , & particulièrement
dans les mois de juillet St d’août. Qn diftribue çonif
munément ftx livres de fel par mois à qn troupeau
de cent brebis-: l’expérience a prouvé que les brebis
qui font ufage de fe l, font plus belles, plus fécondes,
produifent plus de lait ? & font mpins fujettes aux
maladies ordinaires,
La quantité de lait que donnent les brebis du
Larzac, quoique variable fuivant les années & les
faifons , eft eftimée à trois quarts de livre chaque
jour, par tête , depuis le? premiers jours de mai
jufqu’à la mi - juillet ; elle diminue pendant les
autres mois, ou lorfqu’il règne des pluies abondantes
, ou des vents froids ; car alors les brebis ne
prennent pas autant de nourriture que dans le beau
temps ; enfin, après la tonte de la laine , qui fe
fait en juillet, on éprouve une diininution de lait
jfenfible,
§. II. Méthode quon fuit pour fabriquer û fromage
de Roquefort.
Depuis lés premiers jours de mai jufqu’à la fin de
feptembre, on travaille au ffbmage de Roquefort ?