
à Nicolas Rigault , connu par divers ouvrages
eftimes. La bibliothèque royale s’enrichit peu fous
le règne de Louis XIII ; elle ne fit d’acquifitions
un peu confidérables, que les manufcrits de Philippe
Hurauld , évêque de Chartres, au nombre
d environ, 418yvolumes, 8c 110 beaux manufcrits
fyriaques , arabes , turcs 8c perfans , achetés,
aufii bien que des caraélères fyriaques, arabes 8c
perfans , avec les matrices toutes frappées, des
heritiers de M. de Brèves, qui avoit été ambaf-
fadeur à Confiantinople. Ce ne fut que fous le
régné de Louis XIII, que la bibliothèque royale
fut retirée des Cordeliers , pour être mife dans
une grande maifon de la rue de la Harpe , appartenante
à ces religieux.
François de Thou ayant été décapité en 1642,
l’illuftre Jérôme Bignon , dont le nom feul fait
l’éloge, lui fuccéda dans la charge de maître de
la librairie. Il obtint en 16 51, pour fon fils aîné,
nomme Jerome comme lui, la furvivance de cette
charge. Quelques années après, M. Colbert, qui
méditoit déjà fes grands projets, fit donner à fon
frere , Nicolas Colbert, la place de garde de la
librairie , vacante par la mort de Jacques Dupuy.
Celui-ci légua fa bibliothèque au roi. Louis XÏV
1 accepta par lettres patentes , regiftrées au parlement
le 16 avril 1657.
Hippolyte, comte de Béthune , fit préfent au
roi, à peu près dans le même temps, d’une col-
leâion fort curieufe de manufcrits modernes, au
nombre de 1923 volumes, dontplus.de 950 font
remplis de lettres 8c de pièces originales fur l’hif-
toire de France.
A un zèle également v if pour le progrès des
fciences 8c pour la gloire de ion maître, M. Colbert
joignoit une paflion extraordinaire pour les
livres : il commençoit alors à fonder cette célèbre
bibliothèque, jufqu’à ces derniers temps la rivale
de la bibliothèque du roi : mais l’attention qu’il
eut aux intérêts de l’une, ne l’empêcha pas de
veiller aux intérêts de l’autre. La bibliothèque du
roi eft redevable à ce miniftre des acquifitions
les plus importantes. Nous n’entrerons point ici
dans le détail de ces divérfes acquifitions : ceux
qui voudront les connoître dans toute leur étendue
, pourront lire le mémoire hiftorique fur la
bibliothèque du roi de France, à la tête du catalogue
, pag. 26 8c fuiv. Une des plus précieufes
efi celle des manufcrits de Brienne ; c’eft un recueil
de pièces concernant les affaires de l’état,
qu’Antoine de Lomenie, fecrétaire^ d’état , avoit
raffemblées avec beaucoup de foin en 340 v o lumes.
M. Colbert trouvant que la bibliothèque du
roi étoit devenue trop nombreufe pour reffer commodément
dans la maifon de la rue de la Harpe,
la fit transporter en 1666 dans deux maifons de
la rue Vivien ne; qui lui appartenoient. L’année
fuivante le cabinet des médailles, dans lequel étoit
le grand recueil des effampes de l’abbé de Ma- '
rolles, 8c autres raretés, fut retiré du Louvre 8c
réuni à la bibliothèque du ro i, dont ils font encore
aujourd’hui une des plus brillantes parties.
Après la difgrace de M. Fouquet, fa bibliothèque,
ainfi que fes autres effets, fut faifie 8c vendue.
Le roi en- fit acheter un peu plus de 1300 volumes,
outre le recueil de l’hiftoire d’Italie.
Il n’étoit pas poflible que tant de livres imprimés
joints aux anciens, avec les deux exemplaires
des livres'de privilège que fourniffoient les Libraires
, ne donnaffent beaucoup de doubles : ce
fonds feroit devenu aufli embarraffant qu’inutile,
fi on n’avoit fongé à s’en défaire par des échanges.
Ce fut par ce moyen qu’on fit en 1668 l’acquifi-
tion de tous les manufcrits , 8c d’un grand nombre
de livrés imprimés qui étoient dans la bibliothèque
du cardinal Mazarin. Dans le nombre de ces manufcrits,
qui étoit de 2156, il "y en avoit 102 en
langue hébraïque, 343 en arabe, famaritain, per-
fan, turc , 8c autres langues orientales ; le refte
étoit en langue grecque, latine, italienne, fran-
çoife, efpagnole, 8cc. Les livres imprimés étoient
au nombre de 3678. La bibliothèque du roi s’enrichit
encore peu après par l’acquifition que l’on
fit à Leyde d’une partie des livres du favant Jacques
Golius , 8c par celle de plus de 1200 volumes manufcrits
ou imprimés de la bibliothèque de M
Gilbert Gaumin , doyen des maîtres des requêtes,
qui s’étoit particulièrement appliqué à Fétude 8c à
la recherche des livres orientaux.
Ce n’étoit pas feulement à Paris que M. Colbert
faifoit faire des achats de livres pour le roi; il
fit rechercher dans le Levant les meilleurs manufcrits
anciens en grec , en arabe , en perfan , 8c
autres langues orientales. Il établit dans les différentes
cours de l’Europe des çorrefpondances, au
moyen defquelles ce miniftre vigilant procura à
la bibliothèque du roi des tréfors de toute efpèce.
L’année 1670 vit établir dans la bibliothèque
royale un fonds nouveau, bien capable de la décorer
8c d’éternilèr la magnificence de Louis XÏV:
ce font les belles effampes que Sa Majeffé fit graver
, 8c qui fervent encore aujourd’hui aux pré-
fens d’effampes que le roi fait aux princes , aux
miniffres étrangers , 8c aux perfonnes de di-ftinc-
tion qu’il lui plaît d’en gratifier. La bibliothèque
du roi perdit M, Colbert en 1683. M. de Louvois
comme furintendant des bâtimens , y exerça la
même autorité que fon prédéceffeur, 8c acheta de
M. Bignon, confeiller d’état, la charge de maître
de la librairie, à laquelle fut réunie celle de garde
de la librairie , dont s’étoient démis volontairement
MM. Colbert. Les provifions de ces deux
charges réunies furent expédiées en 1684, en faveur
de Camille le Tellier, qu’on a appelé l'Abbé
de Louvois.
M. de Louvois f i t , pour procurer à la bibliothèque
du roi de nouvelles richeffes , ce qu’a voit
fait M. Colbert. Il y employa les miniffres dans
les cours étrangères; 8c en effet on en reçut dans
les années 1685, 1686, 1687, pour des fommes
confidérables. Le père Mabillon , qui voyageoit
en Italie , fut chargé par le roi d’y raffembler tout
ce qu’il pourroit de livres ; il s’acquitta de fa com-
niiflïon avec tant zèle 8c d’exaélitude, qu’en moins
de deux ans il procura à la bibliothèque royale
près de 4000 volumes imprimés.
La mort de M. de Louvois arrivée en 1691 ,
apporta quelque changement à la bibliothèque du
roi. La charge de maître de la librairie avoit été
exercée jufqu’alors fous l’autorité 8c la dire&ion
du furintendant des bâtimens : mais le roi fit un
réglement en juillet 1691 , par lequel il ordonna
que M. l’abbé de Louvois en jouiroit 8c feroit les
fondions de. maître de la librairie , intendant 8c
garde du cabinet des livres, manufcrits, médailles
, 8cc. 8c garde de la bibliothèque royale, fous
l’autorité de Sa Majeffé feulement.
En 1697, le P. Bouvet, Jéfuite - Millionnaire,
apporta 49 volumes Chinois, que l’empereur de
la Chine envoyoit en préfent au roi de Franpe.
C ’eft ce petit nombre de volumes qui a donné
lieu au peu de littérature chirioife que l’on a cultivée
en France : mais il s’eff depuis confidérable-
ment multiplié. Nous ne finirions pas fi nous voulions
entrer dans le détail de toutes les acquifitions
de la bibliothèque royale , 8c des préfens fans
nombre qui lui ont été faits. A l’avénement de
Louis XIV à la couronne , fa bibliothèque étoit
tout au plus de 5000 volumes; 8c à fa mort, il
s’y en trouva plus de 70,000 , fans compter le
fond des planches gravées 8c des effampes : ac-
croiffement immenfe 8c qui étonneroit fi l’on n’avoit
vu depuis la même bibliothèque recevoir à
proportion des augmentations plus confidérables.
L’heureufe inclination de Louis XV à protéger
• les lettres 8c les fciences , à l’exemple de fon bi-
faïeul ; Fempreffement des miniffres à fe conformer
aux vues de Sa Majeffé ; l’attention du bibliothécaire
8c de ceux qui font fous fes ordres à
profiter des circonftances, en ne laiffant 7 autant
qu’il eft en eux, échapper aucune occafion d’acquérir
; enfin , la longue durée de la paix, tout
femble avoir confpiré dans le cours du dernier
règne à accumuler richeffes fur richeffes dans un
tréfor, qui déjà du temps de Loius XIV n’avoit
rien qui lui fût comparable.
Parmi les livres du cabinet de Gafton d’Orléans,
légués au roi en 1660, il s’étoit trouvé quelques
volumes de plantes 8c d’animaux que ce prince
avoit fait peindre en miniature fur des feuilles détachées
de vélin par Nicolas Robert , dont per-
fonne n’a égalé le pinceau pour ces fortes de fu-
jets : ce travail a été continué fous M. Colbert, 8c
jufqu’en 1728 , temps auquel on a ceffé d’augmenter
ce magnifique recueil. Depuis quelques
années il a été repris avec beaucoup de fuccès ,
8c forme aujourd’hui une fuite de plus de deux
mille cinq cents feuilles, repréfentant des fleurs,
des oifeaux, des animaux, 8c des papillons^
La bibliothèque du roi perdit en 1718 M. l’abbé
de Louvois , & M. l’abbé Bignon lui fuccéda.
Les fciences 8c les lettrés ne virent pas fans ef-
pérance un homme qu’elles regardoient comme
leur proteâeur, élevé à un pofte fi brillant. M.
l’abbé Bignon prefqu’auflitôt après fa nomination ,
fe défit de fa bibliothèque particuliere pour ne s’occuper
plus que de celle du roi , à laquelle il
donna une colle&ion affez ample 8c fort curieufe
de livres chinois, tartares 8c indiens qu’il avoit. Il
fignala fon zele pour la bibliothèque du roi dès
les premiers jours de fon exercice , par l’acqui-
fition des manufcrits de M. de la Marre 8c de ceux
de M. Balufe, au nombre de plus de mille. Le
grand nombre de livres dont fe trouvoit compofée
la bibliothèque du roi,'rendoit comme impoffible
l’ordre qu’on auroit voulu leur donner dans les
deux maifons de la rue Vivienne : M. l’abbé de
Louvois l’avoit repréfenté plufieurs fois ; 8c dès
le commencement de la régence il avoit été arrêté
de mettre la bibliothèque dans la grande galerie
du Louvre : mais l’arrivée de l’infante dérangea
ce projet, parce qu’elle devoit occuper le
Louvre.
M. l’abbé Bignon en 1721 profita de la décadence
de ce qu’on appelloit alors le fyftême, pour
engager M. le Régent à ordonner que la bibliothèque
du roi fût placée à l’hôtel de Nevers rue
de Richelieu , où avoit été la banque. Sur les
ordres du prince, on y tranfporta fans délai tout
ce que l’on put de livres : mais les différentes
difficultés qui fe préfenterent, furent caufe qu’on
ne put obtenir qu’en 1724 des Lettres-Patentes,’
par lefquelles Sa Majeffé affeéla à perpétuité cet
hôtel au logement de fa bibliothèque. Perfonne
n’ignore la magnificence avec laquelle ont été décorés
les vaftes appartemens qu’occupent aujourd’hui
les livres du roi : c’eft le fpeétacle le plus
noble 8c le plus brillant que l’Europe offre en ce
genre. M. l’abbé Sallier, profeffeur royal en langue
hébraïque, de l’académie des inferiptions 8c belles-
lettres de Paris , l’un des quarante de l’académie
fra’nçoife, 8c nommé en 1726 commis à la garde
des livres manufcrits, ainfi que M. M elot, auflï
membre de l’académie des belles-lettres , font de
tous les hommes de lettres attachés à la bibliothèque
du roi , ceux qui lui ont rendu les plus
grands fervices. La magnificence des bâtimens eft
due , pour la plus grande partie , à leurs folli-
citations : le bel ordre que l’on admire dans l’arrangement
des livres , ainfi que dans l’excellent
catalogue.qui en a été fait, eft dû à leurs con-
noiffances : les accroiffemens prodigieux qu’elle a
reçus depuis 25 ans , à leur zèle ; l’utile facilité
de puifer dans ce tréfor littéraire , à leur amour
pour les lettres , 8c à l’eftime particulière qu’ils
portent à tous ceux qui les cultivent. C ’eft du
Mémoire hijlorique que ces deux favans hommes
ont mis à la tête du catalogue de la bibliothèque
du ro i, que nous avons extrait tout ce qui la