
que la lime à égayer, art. 3 1 ; mais dont la différence
eft telle que la lime à égayer eft par-tout
de même épaiffeur, ayant feulement fes bords arrondis
, comme la repréfente fa coupe tranfverfale
a b , au lieu que la lime à reformer diminue d’é-
pailfeur depuis le milieu de fa largeur jufques à
fes bords , qui font prefque tranchans , comme les
repréfente fa coupe tranyerfale d f i De plus, la
lime à reformer eft taillée comme une lime très-
douce , au 1 eu que l’autre ne l’eftpas du tout. On
fait courir la chaîne quatre, cinq ou fix fois légèrement
de chaque côté fur le tranchant de cette
lime. On fe fert indifféremment de cette lime, ou
du tranchant A B , fig. 2 7 , d’un burin ordinaire.
Neuvième opération. Tremper la chaînette.
36. Maintenant la chaînette eft faite , il ne s’agit
plus que de la tremper, la revenir & la polir. Pour
la tremper, on la roule en fpirale autour d’un chalumeau,
comme on le voit fig. 28. On la fait gliffer ainfi
roulée jufqu’au petit bout A du chalumeau, pour
l’en fortir & la mettre en cet état dans un creux
pratiqué dans un gros charbon noir de fapin ; en-
fuite , avec le chalumeau, on fouffle la flamme
d’une chandelle dans ce creux, qui fait rougir la
chaînette jufqu’au degré que les ouvriers appellent
couleur de cerife ; alors , on la jette dans un vafe
contenant une affez grande quantité d’huile d’olive,
pour qu’elle fumage fur la chaînette : on retire en-
fuite cette chaînette toujours enveloppée fur elle-
même , on la fufpend en cet état dans la flamme
de la chandelle qui allume l'huile dont elle eft couverte
, & c’eft ce que les ouvriers appellent revenir
la chaînette ; l’ayant laiffê brûler un moment,
on la rejette dans l’huile. Cette opération eft délicate
; car, félon que la chaînette fera trop ou trop
peu revenue, elle fera trop molle ou trop dure
pour l’ufage.
Dixième opération. Polir ta chaînette.
37. On fort la chaînette de l’huile ; & , fans l’ef-
fu y e r , on l’étend fur le bois à limer, art. 32, &.
fig- 23 ; & , au lieu de pafler une lime fur les deux
faces > comme l’on a fait dans cet article, on y pafle
dans le même fens , avec de l’huile , une pierre à
aiguifer du Levant, qui font de ces pierres douces,
dures & tranfparentes, dont tous les graveurs fe
fervent pour aiguifer leurs burins.
38. O n attache enfui te à l’étau, fig. 29, un morceau
de bois A B , que l’on taille à-peu-près de la
forme d’un burin, & fur le tranchant duquel l’on
étend un mélange d’huile d’olive & de poudre de
Ja fufdite pierre broyée très-fine 3 on met un peu
d’huile pure le long de la chaînette , & on la fait
courir fur le lieu de ce tranchant que l’on a couvert
de cette compofition ; on ia fait courir, d is - je ,
par les deux côtés.
3,9. On la fait encore courir par fes deux côtés
fur un autre femblable b ois , ou fur un lieu différent
du même bois, avec de la potée d’étain j mêlée
d’huile d’olive , pour achever de la polir.
40. Enfin, on la fait encore courir lur un lieu-
propre & net de ce bois avec de l’huile pure, &
c’eft-là la dernière opération.
41. Le bois dont il s’agit ici doit être doux &
d’un certain degré de dureté ; on prend pour cela
celui qu’on nomme vulgairement bois quarré, parce
qu’il a fur fon écorce quatre fils ou éminences dirigées
longitudinalement, & qu’il porte un fruit
rouge en Forme de bonnet de prêtre. C ’eft celui
dont les horlogers font des pointes pour nettoyer
les trous des pivots ^ & duquel certains deflina-
teurs font leur fufain.
Addition à l'article 11. Les crochets qui terminent
la chaînette fe font fouvent l’un & l’autre de la même
forme qu’ils font repréfentés dans les fig. 2 , 4 , 9
& 12 ; mais fouvent auffi on donne à celui qui s’accroche
au barillet de- la montre la figure qu’il a ,
fig '3° > où A B exprime une portion de la coupe
circulaire du barillet, le crochet é entre par un trou
dans le barillet, & il a un talon ou éperon an qui-
s’appuie immédiatement contre lafurface extérieure
& circulaire de ce barillet. Dans la fig. 91 , D G
exprime une portion de la circonférence de la fufée,
dans le maflif de laquelle on fait un creux, & dans
le mil .eu de ce creux on y fixe un petit cylindre
a que le bout du crochet embrafle. ( PL & article
de M. Soubeyran de Genève. )
M a c h i n e a f e n d r e .
La machine à fendre eft un outil à l’aidé duquel
les horlogers divifent & fendent les dents des roues
des pendules, montrés, &c. en tels nombres de
parties que l’exigent les machinés auxquelles ils
emploient ces roues.
Il y a peu de machines à l’ufage des arts qui foit
plus néceflaire, & dont la juftefle foit auffi eflen-
tielle que celle de la machine à fendre. C ’eft de-là
que dépend la perfe&ion des machines qui fervent
à mefurer le temps, comme pendules , montres ,
& c ; car , quel que foit le principe du régulateur,
fi les dents des roues & des pignons font inégales ,
le mouvement imperceptible des aiguilles ne peut
être uniforme , ni la puiffance de la force motrice
fur le régulateur égale, fi les roues elles-mêmes ne
le font ; par conféquent, il eft lui-même accéléré.
ou retardé, fuivant ces inégalités.
Mais je ne dois pas m’arrêter à prouver fon utilité
( elle eft connue ) : la décrire , faire connoître
fes différens ufages, donner les moyens, pu faire
obferver les foins d’exécution qu’elle exige ; voilà
quel doit être mon objet.
Je ferais très-embar-rafle de nommer l’auteur de
cette belle machine ; il nous eft inconnu, ainfi que
font prefque toujours été ceux qui ont fait des découvertes
utiles à l’E tat, tandis que l’on fait les
noms de plufieurs inventeurs d’inutilités.
Tout ce que j’ai donc pu apprendre, c’eft qu’elle
vient d’Angleterre , & que le premier qui en ait
fait ic i, a été M. Taillemard , très-bon machinifte,
mort il y a environ vingt ans. Telle eft l’idée
que m’en a fournie M. Camus de l’académie des
lciences.
Le premier moyen dont fe foient fervis les anciens
ouvriers qui eurent des roues à fendre, fut de
les divifer avec le compas, au nombre de parties .
dont ils avoient befoin, & de les fendre enfuite
avec des limes ; il n’y a pas long-temps que cela
fe pratiquoit encore : o r , quel tems n’exigeoient
pas de telles opérations , & quelle juftefle peut-on
attendre de ce moyen ? Mais quelque ouvrier intelligent
ne laiffa pas long-temps cette partie en
cet état ; il vit un meilleur moyen, qui fut de former
fur une grande plaque de cuivre différens cercles
concentriques, qu’il divifa en des nombres de
parties dont il faifoit ufage dans les machines qu’il
exécutoit ; de forte que cela une fois fait, il.n’é-
toit plus befoin que de faire convenir le centre de
la roue à divifer avec celui de la plaque qui fer-
voit de divifeur, & moyennant une règle ou alidade
, qui fe mouvoit au centre du divifeur , qu’on
pofoit alternativement fur tous les points de divisions
d’un même cercle, on traçoit fur la roue les
.mêmes divifions ; ainfi elle fe trouvoit par-là di-
vifée exa&ement au même nombre de parties que
le cercle du divifeur , enforte qu’il ne reftoit plus
qu’à former les dents avec des limes convenables :
enfin, il y eut des artiftes qui furent profiter du
point où fe trouvoit cette machine fimple, pour la
mener à celui de tailler des dents en même temps
qu’elle les divifoit ; ce fut de fubftituer, à l’effet
de fendre les roues avec des limes , & à la main,
une lime qui fe mouvoit en ligne droite dans une
couliffe que portoit un châflîs , fur lequel fe mouvoit
le divifeur & la roue à fendre : enfuite ce fut
une lime circulaire ( on l’appelle fraifie ) qu’on fit
tourner , par le moyen d’un archet, fur une pièce
que portoit le châflis ( qûi étoit de bois ) : ce châflis
contenoit en même temps la grande plaque 0.1 divifeur
, qui tournoit dans ce châflis , ainfi que la
roue-à fendre ; celle-ci étoit fixée fur l’arbre qui
portoit le divifeur : il n’étoit plus queftion , pour
divifer & former les dents , que de fixer la grande
plaque ou divifeur, & de déterminer le mouvement
qu’il devoit faire, pour former la diftance d’une
dent à l’autre: c’étoit-là l’effet d’une.pièce nommée
alidade, fixée fur le châflis , laquelle portoit
line pointe qui alloit preffer le divifeur dans un
des points de divifion de tel cercle , & empêchoit
par ce moyen le divifeur de tourner , tandis qu’avec
la fraife, au moyen de l’archet, on formoit
une dent , on faifoit une fente ; enfuite , levant la
pointe de l’alidadé, qui empêchoit le divifeur de
tourner , & faifant pafler ce divifeur jufqu’au premier
point, 011 laiffoit pofer la pointe de l’alidade
dans le trou de divifion ; & fixant de nouveau 1e
divifeur, on faifoit une fécondé fente à la roue,
& ainfi de fuite, jufqu’à ce que le divifeur eût
achevé fa révolution, & que par conféquent il y
eût autant de dents fendues à la roue, que de points
de divifion dans le cercle qu’on aurait pris.
Telle a été l’origine de la machine à fendre : on
peut voir à-peu-près fon mécanifme par l’idée que
je viens d’ en donner ; mais les figures & la defcrip*
tion en feront beaucoup mieux comprendre la compofition
: on trouvera dans les planches X L I, XL1I ,
X L U I , XL1V , X L V , X L V l, X L V I I , Tome I I I
des gravures , & dans leur explication ci-après3
les figures & la defcription des différentes machines
inventées à cet égard.
Machine à finir la denture.
Après les machines ingénieufes employées pour
partager les roues , il faut que le finiffeur adouciflfe
les inégalités que la lime a laiffées ; c’eft lui qui
doit donner à la denture le poli qui y eft indif-
penfablement néceflaire ; c’eft encore lui qui eft
obligé de donner à chaque dent de la roue une
courbure parfaitement égale au bout de fa pointe,
telle qu’elle eft prefcrite par l’horloger relativement
à l’engrénage.
Pour épargner cet ouvrage au finiffeur, & pour
l’exécuter même avec plus de viteffe & de préci-
fion , M. Vincent de Montpetit , peintre habile , &
machinifte très - induftrieux, a imagine une machine
qui finit parfaitement toutes les roues , de
telle grandeur qu’elles puiffent être , fôrtant des
mains de la fendeufe ; elle polit les divifions des
dents , & leur donne la plus parfaite égalité, ainfi
que telle courbure que le maître horloger puiffe
exiger pour le bien de fa montre.
Cette machine fait, dans une heure, autant d’ouvrage
que trois finifléurs en peuvent faire dans im
jour entier. A cette diligence , à laquelle elle joint
la plus grande perfection poflible, elle ajoute encore
le mérite de pouvoir être manoeuvrée par
un enfant, même aveugle.
Dès que le maître horloger a placé fa roue -, il
n’y a qu’à tourner une manivelle. Quand l’ouvrage
eft fini, la machine s’arrête par Je moyen d’un
tout-ou-rien, qui-fuit les roues à travailler, dans
leurs mouvemens les plus imperceptibles.
Lorfqu’une dent fe préfente à être finie , fi elle
n’eft pas exactement dans fa vraie place, ou qu’elle
ait déjà été travaillée , la machine s’arrête d’elle-
même , & demeure immobile , quelque puiffante
que foit la force motrice, fans qu’il y ait rien à
craindre de fon arrêt. De cettè manière , on tra-
- vaille avec fureté & hardiment fur de petites parties
qui exigent ordinairement de la main & de
l’oeil d’un bon finiffeur une fcrupuleufe & fatigante
attention, foutenue pendant plufieurs heures.
Beaucoup d’horlogers de Paris en ont fait ufage ;
& ils avouent que jamais la main des hommes ne
pourrait donner à la denture cette extrême juftefle
que la machine leur donne avec la plus grande
promptitude, & à peu de frais. ^ ^ ^
Le modèle de cette machine fut préfenté à l’académie
des fciences de Paris au mois de janvier