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FLOTTAGE EN TRAINS DE BOIS.
( Art du )
L ’ A R T du flottage en trains de bois n’eft pas
ancien, quoiqu’il foit aufft{impie qu’avantageux. ^
La conftruâion d’un train de bois fut inventée
par Jean Rouvet en 1 549 ; mais bien différente de
ce qu’elle eft aujourd’hui.
^11 n’y a pas plus de cent ans, qu’à Clamecy on
inventa les nages pour conduire & guider les trains.
Avant ce temps - là , ceux qui les çonduifoient
avoient des plaftrons de peaux rembourrés, & ils
guidoient les trains par la feule force de leurs corps.
Ce qui prouve qu’on ne flottoit point en trains
avant 15499 c’eft que, par arrêt rendu au Parlement
de Paris le dernier juillet 152 1 , la Cour ordonna à
tous marchands de faire charroyer en diligence aux
ports de Paris, tous les bois qu’ils avoient découpés
, à peine de 500 liv. d’amende.
Mais quoiqu’en 1527 on ne flottât point encore
en trains , on amenoit dès ce temps , du bas de la
rivière d’Yonne fur les ports de Clamecy, Col-
lange & Château - Cenfoy , des bois qu’on chargeait
fur des bateaux. ' ' ;
Coquille , en fon Hiftoire du Nivernois , fait
mention, en parlant de Clamecy, que la rivière
d’Yonne portoit bateau jufqu’èn cette ville ; & elle
n’a ceffé de porter bateau, que lorfque le flottage
en trains a été inventé : on ne peut pas dire précifé-
ment l’année. Dès-lors on amena à bois perdu, des
bois du haut de la rivière d’Yonne, de celle de Beu-
v ron , & de Fozay : depuis on a même remonté
plus haut, & l’on a pratiqué, à la faveur des étangs,
de petits ruiffeaux qui portent bois & affluent dans
les rivières.
On entend par train une maffe de bois à brûler,
dont les bûches font tellement liées enfemble, qu’on
la fait flotter fur l’eau pour l’amener à Paris ou ailleurs.
Les trains ont 36 toifes de longueur fur 14 ou
15 pieds de large.
D ’abord, le flotteur commence à pofer trois
bûches diftantes l’une de l’autre de 9 à 10 pouces,
fur lesquelles il difpofe neuf collier es ; ce font des
chantiers ou perches qui fervent de fondement aux
trains, & dont le gros bout eft environné d’une
coche tout autour.
Dans cette coche on met une couplière qui tient
dans fon anneau un morceau de bois d’un pied de
long , planté dans terre pour contenir les trois
bûches & les neuf collières.
Tl prend enfuite deux chantiers cochés par le gros
bout, qu’il met de travers fur les collières ; & il
arrange du bois deffus de 15 à 16 pouces de hauteur
, & d’un pied & demi de largeur.
Il faut entendre par chantiers, des bûches ou perches
Arts & Métiers. Tome III, Partie I .
auxquelles le conftruâeur de trains a pratiqué des
hoches, dans lefquelles paflent les rouettes ou liens
de bois, qui attachent enfemble un certain nombre
d’autres bûches contenues entre elles. Ces hoches
font pratiquées fur le bout des chantiers; elles em-
pêchent les rouettes de s’échapper de deffus elles.;
elles empêchent aufli les différentes parties du train
de fe diffoudre.
Après donc avoir fait mettre des couplieres dans
chaque coche des chantiers de deffous, le flotteur
prend deux autres chantiers cochés comme les premiers,
les met dans les couplières à un demi-pied
de chaque bout de bûche, & lie les chantiers de
déffotis & de deffus avec une rouette à flotter ; ce
qui réfulte de cette première opération, s’appelle
la tète du train ou première mife.
Comme le flotteur ne peut continuer fa fécondé
mife fans relever les deux chantiers de deffus , il a
deux petites bûches fourchues appelées chambrières,
qu’il plante en terre pour élever ces chantiers , & fe
donner la facilité de mettre le bois au milieu. J
Quand il a fait fept mifes de cette manière, il
pofe à leurs extrémités trois ou quatre bûches en
rondins l’une fur l’autre , qu’il affure avec deux
rouettes à flotter, les tournant à deux fois fur le
chantier de deffous : cette opération s’appelle acco-
lure.
Il n’eft guère pofiible de fi bien lier & affembler
le bois de ces mifes, qu’il n’y ait toujours quelques
vides.
Pour les remplir, un ouvrier appelé pour cet
effet garnijfepr , choiftt“des bûches droites & de
groffeur convenable.
Il prépare la place d’abord avec une bûche ap-
platie par un bout, nommée dejferroir, & y enfonce
enfuite fes bûches à force de bras , avec une
pidance ou gros maillet.
Cette première branche ainfi conftruite de fept
mifes, une ouvrière nommée tordeufe parce qu’elle
tord les rouettes, prend un chantier qu’elle attache
avec deux rouettes paffées dans les anneaux des
deux couplières de la tête de cette branche, &
accole leldites rouettes autour du chantier où elle
les lie.
Enfuite elle met deux couplières , l’une à la tête
& l’autre à la queue , au chantier de deffus du .côté
de la rivière ; & le flotteur ayant piqué deux pieux
à ces mêmes extrémités, à environ deux pieds de
fon atelier fur le cô té , il attache à ces pieux deux
prues par un bout, & par l ’autre aux deux couplières
des chantiers de deffus, lefquelles prues il
arrête avec un morceau de bois aiguifé & nommé
fufeau.
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