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charbon & les débris qui fe font dans le choix
du gros charbon.
Lorfque la charbonnière eft couverte jufqu’au
fommet, l’ouvrier jette dans l’ouverture quelques
charbons allumés, & achève d’en remplir la capacité
avec d’autres charbons ; quand il juge que le
feu a pris & que la charbonnière commence à fumer
, il en recouvre le fommet & conduit l’opération
comme celle du charbon de bois, ayant
foin d’empêcher que le feu ne paffe par aucun
endroit, pour que le charbon ne fe confume pas
& ainfi du refte jufqu’à ce qu’il ne fume plus ou
du moins que la fumée en foit claire , figue confiant
de la fin du dejfoufrage.
Une telle charbonnière tient le feu quatre jours,
&. plufieurs heures de moins fi on a recouvert avec
de la paille & de la terre.
Lorfqu’il ne fume plus, on recouvre le tout
avec la poufiière pour étouffer le feu, & on le
laide ainfi pendant douze ou quinze heures. Après
■ ce temps on retire les coaks partie par partie,à
l ’aide de rateaux de fer , en féparant le menu
qui fert à couvrir d’autres charbonnières.
Lorfque les coaks font refroidis, on les ferme
dans un magafin bien fec ; s’il s’y trouve quelques
morceaux qui ne foient pas bien deffoufrés ,
on les met à part pour les faire paffer dans une
nouvelle charbonnière.
. Trois ouvriers ayant un emplacement allez grand
peuvent préparer dans une femaine trois cens cinquante
, & jufqu’à quatre cens quintaux de coaks.
Il eft effentiel, comme on l’a déjà dit, de
tien dépouiller le charbon minéral de la roche
& des pierres qui peuvent y être mêlées.
Par le décompte détaillé des charbons de terre
des mines de Rive, de Gier, mis en deffouffage
à Saint-Bel, depuis le 20 janvier 1769 , jufqu’au
ïo mars fuivant, il efi conftaté que ces charbons
perdent ou déchetent dans cette opération de trente-
cinq pour cent ; c’eft-à-dire, que cent livres de
charbon crud font réduites à foixante-cinq livres
de coaks. »
M. Jars rend compte enfuite d’une fonte de
comparaifon de laquelle il réfulte qu’avec une quantité
de coaks coûtant 726 liv., on a retiré' en 251
heures de 672 quintaux de minerai, 114 quintaux
de matte ; & que d’un fourneau garni de
charbon de bois dont la dépenfe fut 742 liv. 12 f.
on retira dans le même elpace de temps de 510
quintaux de minerai, 89 quintaux de matte; que
par conféquent le coaks procure une épargne de
temps 8c de dépenfe (le prix du coaks étant dans
le lieu de l’expérience 2 liv. 4 f. la voie , & celui du
charbon de bois 2 liv. 7 f. )
Il réfulte anfii d’une autre expérience de M.
Jars, que l’ufage du coàks efi très-bon pour l’affinage
des mattes. Mais il a obfetvé que le fourneau
où l’on a fondu avec les coaks a^été plus
endommagé que l’autre, c’efl-à-dire, l ’ouvrage;
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8c qu’il s’y eft formé dans l’intérieur des cavités
plus grandes.
Ce petit inconvénient qui réfulte de la plus
grande a&ivité de ce feu, n’eft rien, felpn M. Jars,
en comparaifon des avantages qui rèfultent de
l’ufage de cette matière.
Toutefois, pour le prévenir en partie, on peut
mêler les coaks à moitié ou au tiers avec le charbon
de bois.
On trouve de l’avantage à l’ufage des coaks pour
l’affinage des mattes, oc ils ont leur utilité pour
tous les ouvrages qui fe jettent en fonte.
Tout le procédé dont on vient de donner le détail
ne peut fervir que pour les houilles ou charbons
foffiles principalement fulfureux ; ceux qui
font fulfureux 8c principalement bitumineux, doivent
être purifiés & dégagés du bitume par une
forte de diftillation. Tandis que le foufre eft vo-
latilifé par en haut, le bitume qui eft fixe doit s’écouler
par en bas.
Pour cela il faut avoir recours aux fourneaux
mis en oeuvre par le prince de Naffau-Saarbruck,
décrits par M. Genfane.
Voici le précis de fon mémoire.
MM. Macquer & de Montigny, nommés com-
miffaires par l’Académie royale des fciences, pour
lui rendre compte d’un mémoire qui lui avoit été
préfenté fur ce fujet par M. de Genfane, un de
les correfpondans, déclarèrent, dans leur rapport du
23 juillet 1768, qu’on avoit déjà tenté plufieurs
fois , mais fans fuccès , d’étouffer le charbon de
terre à la manière du charbon de bois , pour lui
procurer les qualités de ce dernier , mais qu’on
n’y avoit pas réuffi, parce que, pour peu qu’on
laiffât l’air s’introduire dans la maffe de ce charbon
embrafé, tout fe confumoit & fe réduifoit en cendres,
& que tout s’éteignoit lorfqu’on interceptoit
la communication avec l’air intérieur ; que l’art
d’extraire le bitume & le foufre furabondans du
charbon de terre, fans détruire ce compofé ni fon
principe inflammable, confiftoit à le dégager des
matières bitumineufes & fulfureufes qui lé rendent
trop gras & trop aéfcif, lorfqu’on l’emploie dans
fon état naturel à la fonte des matières métalliques
dans les fourneaux à manche, ce qui faifoit que
les fontes étoient pâteufes ; que le métal fe brû-
loit, & qu’il ne fe féparoit point des feories, parce
qu’elles ne fe liquénoient pas affez pour couler
hors du fourneau; qu’après bien des expériences
& des dépenfes confidérables pour procurer au
charbon de terre toutes les qualités du charbon
de bois , M. le prince de Naffau-Saarbruck avoit
enfin réuffi à trouver le meilleur moyen, i°. d’en
extraire le bitume par une distillation per defeenfum ;
20. d’en féparer le foufre par une évaporation ; &
que ces deux opérations fe faifoient toutes les
deux à la fois, au moyen d’une efpèce de four,
dont l’effet eft à peu près le même que celui d’une
cornue. •
Pour cet effet, continuent les mêmes Académi-
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ciens, on conftruit un four d’une pâte ou mortier
très-réfraélaire, qu’on ferme exactement lorfqu’il eft rempli de charbon de terre ; au bas de la capacité
de ce four, on forme une rigole , & on
y laiffe une feule ouverture ronde , garnie d’un
long tuyau de cuivre incliné ; ce tuyau va s’emboucher
dans une marmite de fer fondu , qui fert
de récipient pour le bitume qui découle du charbon.
Il y a un autre tuyau de cuivre qui monte
perpendiculairement, qui eft implanté fur le tuyau
defeendant, & qui fert à l’évaporation des vapeurs .
du foufre.
Cette efpèce de four enveloppé par une voûte
qui lui fert de fourneau, a une grille, un cendrier
& une cheminée qui débouche dans une chambre
conftruite au deffus , où circule la fumée du charbon
qu’on brûle pour chauffer le four ; on mêle
le charbon avec du bois pour l’allumer ; on rougit
le four, & on le tient médiocrement rouge, afin
que le degré d’une chaleur modérée faffe couler
le bitume dans la marmite de fe r , qui eft à moitié
enterrée, 8c que le foufre s’évapore par le tuyau
de cuivre, qui eft pofé verticalement.
Chaque fois qu’on charge le four, on y met
deux milliers pefant de charbon crud, qui perdent,
pendant cette opération, un huitième de leur poids;
8c pour obtenir la cuiffon parfaite, on y emploie
neuf cens pefant du même charbon qui fe trouve
être de rebut. Cette opération, qui dure pendant
trois fois vingt-quatre heures, eft cenfée finie lorfqu’on
n’en voit plus fortir de vapeurs de foufre.
Ce charbon, étant ainfi cuit, n’exhale pas la
moindre odeur en brûlant ; il eft même préférable
au charbon de bois, en ce qu’il dure au moins
le double au feu ; qu’on peut l’employer à toutes
fortes d’ufages, fans craindre le moindre inconvénient
; que l’huile & le bitume qu’on en retire
défraient à peu près de la dépenfe.
Quoique cette huile foit moins inflammable que
celle de pétrole, on peut s’en fervir dans les lampes
des payfans ; & le bitume qu’on en retire eft fi
gras, qu’on peut le fubftituer au meilleur cambouis
pour graiffer les roues des voitures. La fuie qu’on
trouve dans la chambre où débouche la cheminée,
peut être employée très-utilement à la place du noir
d’ivoire, pour faire l’encre d'imprimerie , & fervir
à faire un bleu qui ne le cède en rien au plus beau
bleu de Pruffe.
Lorfque, dans les forges à fe r , on ne veut point
fe fervir d’autre charbon que de celui dont nous
venons de parler, on conftruit plufieurs fourneaux
attenans les uns aux autres, & placés dans un
hangard fur un même alignement. La moitié de
ces fourneaux eft toujours allumée,tandis que l’autre
moitié fe refroidit.
Lorfqùè le charbon eft à moitié cuit dans les
premiers fourneaux, on met le feu aux autres ; &
comme la cuiffon dure , ainfi que nous l’avons dit,
pendant trois fois vingt-quate heures, il y a toujours
neuf fourneaux en travail pour l’entretien
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d’une forge ; afin que chaque jour on retire le
charbon de trois fourneaux, & qu’on en charge
trois autres , pendant qu’on fait cuire le charbon
dans les trois derniers.
Une femblable découverte doit être regardée
non-feulement comme curieufe 8c nouvelle, mais
encore comme étant de la dernière importance
dans les pays oii les bois & les charbons commencent
à devenir rares.
C’eft ce qui a engagé le gouvernement à favorifer
l’établiffement à Paris d’une compagnie qui s’annonce
pour vendre de la houille deffoufrée : en-
forte que partie des habitans de cette grande ville
où il fe fait une confommation fi énorme de matières
combuftibles, pourra économifer fur la quantité
& fur le prix de leiir chauffage , en faifant
ufage d’un charbon de terre épuré , foit par les
procédés qu’on vient d’indiquer, foit par d’autres,
de ce que la furabondance du foufre lui donnoit
de défagréable à l’odorat, & de nuifible à là fanté.
Enfin, nous confidérerons la houille dans fa patrie
en quelque forte ; & nous achèverons de faire
connoître ce charbon foffile, en ajoutant ici ce
que M. Pvlorand, médecin 8c favant académicien,
dit dans fon excellent traité.
Des houilles du pays de Liège en. particulier.
Tout ce qui eft compris dans une mine que
l’on exploite , eft appelé en patois de Liège, hoie,
vulgairement houille.
Ce mot néanmoins s’entend ordinairement de
la houille pure, c’eft-à-dire, de celle qui fuccède
dans la veine à un charbon bien conditionné, laquelle
patoît formée de grains très-fins arrangés
vifiblement par couches, & que les houilleurs pa-
j roiffent diftinguer du charbon proprement dit : car,
lorfqu’ils veulent parler d’une veine riche 8c abondante
, ils difent, cette vpine houille bien ; entendant
par-là qu’elle eft plus abondante en houille qu’en
charbon ; en patois, quelle eft plus kauchteufe. En
conféquence , le prix courant de l’une & de l’autre
eft différent.
Dans l’idée commune du pays , la houille eft
tout ce qui fe maintient en maffes volumineufes,
d’une confiftance approchante d’une pierre tendre ,
& que l’on appelle ailleurs charbon de pierre, qui
s’allume plus difficilement, quoique gras.
Le refte, qui n’eft ni fi dur , ni fi compafte ,
qui ne peut s’enlever de la houillère en gros quartiers
, que l’on nomme autrement charbon de terre,
s’allumant plus aifément, parce qu’il eft plus tendre
, eft ce qu'ils appellent charbon.
, Des ouvriers accoutumés à ne juger que par
l’extérieur & au premier coup-d’oeil, n’ont pas dû
diftinguer autrement ce foffile; mais, à cette di-
vifion fort vague & fort générale, la première
fans doute qui ait pu fe préfenter à leur idé e, a
fuccédé une divifion mieux raifonnée, qui porte
fur la propriété réelle du charbon , non pas de
s’allumer aifément, comme fait le charbon de terre
©u la houille, ni de s’allumer plus difficilement,