
vurcnt de caractères grecs & firent de belles éditions
en cette langue.
JofJ} Badius , né à Afcha, petite ville dans le
Brabant Autrichien en 146a, fut un des hommes
les plus favants de fon temps. Il commença par
faire l’office de correcteur des manufcrits & des
imprimés , à L y on , chez Jean Trefchel. Après la
mort de cet imprimeur dont il époufa la fille, Badius
vint s’établir à Paris. Il fut reçu profeffeur
en grec dans cette ville, & ne tarda point à lever
une imprimerie fous le nom de prcelum afcenfia-
num. Il fit grand nombre d’éditions très-eftimées par
leur correction & par les préfaces favantes dont
il les enrichit. On a de lui plufieurs auteurs claf-
fiques imprimés en lettres rondes; il mourut à
Paris en 1535. Robert Etienne, Michel Vafcofan,
Jean de Roigny , ètoient fes gendres.
Il faut compter parmi les premiers & les plus
célèbres imprimeurs qui s’établirent à Paris vers
1480 , A ntoine V é r a r d , dont on a un grand
nombre de belles éditions. Il a publié plus de eent
volumes de romans fur v élin , & ornés de très-
belles miniatures, qui imitent parfaitement les
beaux manufcrits d’après lefquels ils font imprimas*
On a auffi de cet habile imprimeur, les Politiques
& les Ethiques (PAriJlote , traduites & commentées
par Orefme, in-fol. en 1486& 1488. Il
a imprimé l’Horloge de fapience, in-fol. 1493 j les
Grandes Chroniques de France, 3 vol. in-fol. 1493 j
le Boccace des nobles & célèbres femmes ; le Roman
de la Rofe, in-fol. ; Pfalterium Davidicum en lettres
gothiques , rouges & noires ; l’Ordinaire des Chrétiens
, in-fol. 1494,* le Boéce de la confolatïon, en
françois , in-fol. 1494; Lancelot du Lac de la table
ronde , 3 vol. in-fol. 1494 ; la Bible hifioriée, 2 vol.
in-fol. le Miroir hiftorial de Vincent de Beauvais ,
2 vol, in-fol. 1496 ; les Prophéties de Merlin, infol.
1498 ; le Rational des divins offices de Guillaume
Durand, in-fol. 1504, traduit de l’ordre de
Charles V , roi de France, par Jean Holain, provincial
des Carmes ; YHiJloire de Jofeph, traduite
en françois, & dédiée à Charles V I I I , &c.
Michel Lenoir , Parifien, imprima le Chevalier
délibéré en la mort du duc de Bourgogne,
i/z-40. 1489; le triomphe des neufs Preux , ou
hiftoire de Bertrand du Guefclin , in-fol. 1507 ; le
Roman de la Rofe, in-40. 1 5 1 5 , &c. Ses impref-
fions font eftimées : il mourut le 29 feptembre
152°.
Les Etienne , imprimeurs, font renommés tant
pour l’érudition, que pour les éditions grecques
6c hébraïques. On nomme huit Etiennes qui fe
font illuftrés dans leur carrière ; mais Robert Etienne
, & Henri II fon fils , fe font immortalifés par
leur goût pour leur a r t, & par leur favoir. Ils
tiennent l’un & l’autre un rang fupérieur dans
la république des lettres.
Le célèbre Robert Etienne, ihftruit dans l’art de
l’imprimerie par Simon de Colines fon beau-père,
avoit aufii acquis une connoiflance éminente des
langues & des humanités. Il s’appliqua particulièrement
à mettre au jour de magnifiques éditions
des bibles hébraïque & latine. I l eft le premier
qui les ait diftinguées par verfets, &. par des chiffres
arabes; ce qui a été obfervé depuis par les
autres imprimeurs. François I prenoit un plaifir
fingulier à le voir travailler à l’imprimerie. Un jour
que ce roi vint comme Robert Etienne corrigeoit
une épreuve, il- ne voulut pas l’interrompre , &
attendit qu’il l ’eût achevée. Ce roi lui donna fon
imprimerie. Claude Garamond & Guillaume le
Bé en fondirent les caractères ; mais les traverfes
injurieufes que Robert Etienne effuya dans la fuite,
l’obligèrent de quitter fa pattie vers l’an 1551 ,
6c de fe retirer à Genève, pour y profeffer fa
réligion en liberté. L à , il continua d’enrichir le
monde des plus beaux ouvrages littéraires.
Les éditions données par cet homme célèbreg
font celles de toute l’Europe où l’on voit le moins
de fautes d’impreflion. Mill affure que dans fon
Nouveau-Teftament grec, des éditions de 1546 ,
1549 & 15 5 1 , ainfi que dans l’édition de 1549»
in-fei^e, appellée 6 mirificam, il ne s’y trouve pas
une feule faute typographique, & qu’ il n’y en a
qu’une dans la préface latine, favoir , pulres pour
plures. On fait par quel moyen il parvint à cette
exactitude : il expofoit à fa boutique & affichoit
fes dernières épreuves à la porte des collèges, en
promettant un fou aux écoliers pour chaque faute
qu’ils découvriroient, & il leur tenoit exactement
parole.
Il mourut à Genève le 7 feptembre 15 59 , âgé
de 56 ans, après s’être comblé de gloire. Je dis,
comblé de gloire, parce que nous devons peut-être
autant à fon induftrie feule qu’à tous les autres
favans & artiftes qui ont paru en France depuis
François I jufqu’à nos jours.
Son beau Tréfor de la langue latine-a immorta-
lifé fon nom, quoiqu’il ait été fecouru dans ce
travail par Budé , Tufan, Baïf, Jean-Thirry de
Beauvoifis , & autres. La première édition eft de
Paris, 1536 , la fécondé de 1542 , la troifième
à Lyon en 1573 , & la dernière à Londres en
1734 , en quatre volumes in-folio.
Son défintéreffement & fon zèle pour le bien public
, peignent le caraCtère d’un digne citoyen. On
ne lui doit point d’éloges à cet égard; mais du
moins ne falloit-il pas le calomnier, jufqu’à l’ac-
cufer d’avoir volé les caractères de l’imprimerie
du roi en fe retirant, & d’avoir été brûlé en effigie
pour ce fujet.
Il entretenoit chez lui dix à douze favans de di-
verfes nations ; & comme ils ne poiivoient s’entendre
les uns les autres qu’en parlant latin, cette
langue devint fi familière dans cette maifon, que
fes correcteurs , fa femme, fes enfans , & les anciens
domeftiques , vinrent à la parler avec facilité.
Il laiffa un frère 6c deux fils dont il convient de
parler.
Charles Etienne , frère de Robert I , après
s’être fait recevoir doCteur en médecine dans la
faculté de Paris, eut l’imprimerie du roi, & la
foutint honorablement. Les anatomiftes lui doivent
trois livres de diffieElione partium corporis humant,
qui ne font point tombés dans l’oubli. Cet ouvrage
parut en 1545 , in fol. avec figures, & l’année
fuivante en françois chez Colines. Charles Etienne
a le premier prouvé contre Galien , que l’cefophage
fe divifoit féparément de la trachée-artère , & que
la membrane charnue étoit adipeufe. Il mourut
en 1568 , ne laiffant qu’une fille nommée Nicole,
auteur de quelques ouvrages en profe & en vers.
Elle fut recherchée par Jacques Grévin , médecin
& poète; & c’eft pour elle qu’il compofa fes.
Amours d'Olympe ; mais elle époufa Jean Liébaud ,
médecin.
Etienne ( Robert I I ) ne voulut pas fuivre fon
père à Genève, & fut confervé conjointement
avec fon oncle Charles dans la direction de l’imprimerie
royale, où il fit imprimer, depuis l’année
1560 , divers ouvrages utiles, mais dont les éditions
n’égalent pas celles de fon père.
Etienne , ( Henri I I ) fils de Robert I , & frère
de Robert I I , eut la réputation d’un des plus favans
hommes de fon fiècle, & des plus érudits
dans les langues greque & latine. Il publia le premier
, tout jeune encore, les poéfies d’Anacréon ,
qu’il traduifit en latin. Il compofa l’Apologie pour
Hérodote , efpèce de fatyre contre les moines,
qui lui en firent un procès criminel, dont il échappa
par la fuite ; mais il s’eft immortalifér par fon T réfor
de la langue grecque, en quatre tomes in-fol.
qui parurent en 1572. Il mourut à Lyon en 1598
âgé de 70 ans, laiffant des fils, & une fille qu’I-
faac Cafaubon ne dédaigna pas d'époufer.
Michel VASCO SAN s’eff diftingué par fes éditions
recommandables par le choix & la beauté des caractères,
par la bonté du papier, l’exa&itude des
corrections, & l’ampleur de la marge. Henri I I ,
reconnoiffant le mérite de cet imprimeur, lui
donna un privilège général pour dix ans. Vafcofan
étoit d’Amiens ; il" avoit fon imprimerie dans la
me S. Jacques, à i’enfeigne de la Fontaine; il
imprimoit encore en 1372. Le doCte imprimeur
6c interprète du roi Frédéric Morel étoit fon gendre
, avec qui il eft enterré fous le charnier de
la paroiffe de S. Benoît, dans le tombeau de Joffe
Bade fon beau-père.
L’imprimerie de Claude Chevalon fut une des
premières & des plus eftimées de Paris : c’eft une
louange qu’on lui doit d’avoir fait avec foin , intelligence
Sc exaétitude les plus forts ouvrages de
l ’a rt, qui ont coûté le plus de travail & le plus
de dépenfe. Les livres de droit civil imprimés rouge
& noir , avec les commentaires en quatre ou cinq
volumes in-fol. le Saint-Jérôme en cinq , le Saint
Chryfoftôme en cinq , le Saint Auguftin en huit,
font des entreprifes fupérieures à ce qui avoit été
fait jufqu’àce courageux imprimeur.il avoit époufé
la veuve de Rembolt, l’affociè d Ulric Gering, &
demeura dans fa maifon au foleil d’or rue Saint-
Jacques, depuis l’année 1520.
Simon de C olines , en latin Colintzus, né au
village de Gentilly, près de Paris, dans le X V P
fiècle , commença à fe diftinguer dans l’impri-
raerie en 1519. Ayant époufé la veuve de Henri
Etienne l’aîné , il employa d’abord les caractères
d’Etienne, mais dans la fuite il en fondit lui-même
de beaucoup plus beaux. Il introduifit en France
l’ufage du caraCtère italique, avec lequel il imprima
des ouvrages entiers ; & fon italique eft préférable
à celui d’Alde Manuce , qui en fut l’inventeur.
Les éditions des livres grecs données par
de Colines, font d’une beauté & d’une correction
admirable. Il y a de lui une édition du Teftament
g re c , où le fameux paffage de l’épître de Saint
Jean des trois témoins , manque. Colines mourut,
à ce qu’on croit, vers l’an 1350 ; c’eft du moins
ce qu’on peut augurer de la lettre 76 de Jean-
Gènes Sepulveda à Vafcofan.
Il faut donner place parmi les imprimeurs
renommés par la corveCtion de leurs éditions, à
Charlotte GuiLLARD, qui s’eft fignalée par un
nombre confidérable d’impreffions eftimées & recherchées
dans les bibliothèques. Elle avoit été
inftruite par l’affocié de Gering, Bertholde Rembolt
fon premier mari, avec qui elle demeura 16
ans jufqu’en 1518. Chevalon l’époufa en 1520 ,
& la laiffa veuve en 1542. Elle écrit en 1352,
qu’elle foutenoit les fatigues & les grandes dépen-
fes de l’imprimerie depuis cinquante ans. Ses beaux
ouvrages font ceux qu’elle fit feule étant veuve
pour la fécondé fois. Telle eft la Sainte-Bible en
latin, avec les notes du doCteur Jean BenediCti. Elle
commença l’impreflion des ouvrages des Saints-
Pères , par le Saint-Gregoire en 2 volumes fi
correéte , que l’errata n’eft que de trois fautes.
Sébajlien G r y ph iu s , né à Reutlingen, ville de
Souabe, fur la fin du XVe fiècle , vir infignis ac
fitteratus, dit Majorage , s’établit à L y o n , où
il s’acquit un honneur fingulier, par la beauté
& l'exaCtitude de fes impreffions. On eftime beaucoup
fes éditions de la bible en hébreu , & même
tout ce qu’il a donné dans cette langue. On
ne fait pas moins de cas de la Bible latine
qu’il publia en 1330 , en 2 vol. in-fol. Il fe fervit
pour cette édition latine du plus gros caraCtère
qu’on eût vu jufqu’alors. Elle ne cède pour la
beauté qu’à la feule Bible imprimée au Louvre en
1642, en 9 vol. in-fol.
Son Tréfor delà langue fainte de Pagnin , qu’il
mit aü jour en 1329, eft un chef-d’oeuvre. Ii avoit
de très-habües correcteurs ; l ’errata des Commentaires
fur la langue latine d’Etienne Dolet, n’eft
que de huit fautes, quoique cet ouvrage forme 2 vol.
iîl-fol. Gryphius mourut en 1356, à l'âge de 63
ans ; mais fon fils Antoine Gryphius continua de