
Pour faire des' creufets, on fe fert- de moules de
bois , qui doivent avoir la grandeur & la figure de
l ’ouvrage même. Ces moules fe tiennent par une
,q.ueue ou manche aiüfi de bois. On les. feupoudre
d’un peu de fable ; on les couvre d une quantité
convenable de terre bien corroyée, qu on arrondit
enfuite tout autour, & qu’on applatit par deffous
avec la palette. .
On fait cuire les creufets dans le même four que
les fourneaux.
Les qualités eflentielles d’un bon, creufet, font
de réfifter au plus grand feu> fans fe caffer & fans
fe fondre. Il ne-doit rien fournir aux matières qu’on
.traite dedans ; il ne .doit pas fe laiffer pénétrer par
;ces matières , ni. les laiffer échapper à travers les
pores ou à travers les trous qu’elles tendent à pratiquer
dans les parois & dans le fond du creufet.
La matière la plus propre à former des creufets,
qui réunifient dans le plus grand nombre de cas ,
les trois conditions que l’on vient d’afligner, eft
une, excellente terre glaife purifiée de toute terre
calcaire & mêlée d’un peu de fable.
Cette matière, étant bien préparée & cuite avec
foin, prend une dureté confidérable, & fes parties
fe lient par une forte de demi-vitrification.
La terre cuite réduite en p o u d re c e lle des frag-
jnens des vieux- creufets , par exemple , mêlée avec
dè bonne argile, fournit un mélange très-propre à
donner de bons creufets.
Le grand défaut des creufets ordinaires efi d’être
fufceptibles defe laiffer entamer, pénétrer & percer
par certaines fubftances entre lesquelles le falpêtre,
falkali fixe, le verre de plomb, font les plus connues;
enforte que tenir long-temps ces fubftances
en fonte dans un creufet, e’eft lui faire fubir l’épreuve
la plus, propre à bien faire juger de fa bonté.
Les petits pots de grès dans lefquels on apporte -
à Paris le beurre dè Bretagne, & les creufets d’Allemagne
, à trois cornes , ont été reconnus pour être
les meilleurs de tous les creufets. Ils contiennent
le verre de plomb en fonte pendant un peu de
temps fans le laiffer échapper ^travers leurs .pores.
Les creufets des fournaliftes de Paris font généralement
bons pour toutes les opérations ordinaires ;
mais ils ne tiennent pas- long-temps les fels & les
verres de plomb , épreuve que les .creufets d’A llemagne
ne-foutiennent pas- non plus.
Quelques chimiftes ont employé des creufets
doubles , c’ffft-à- dire , un creufet emboîté jufte
dans un autre creufet „pour expofer àun feu.longtemps
continué des mélanges difficiles à contenir.
Lingoti'ere.
On fait quelquefois des lingotières en terre cuite ;
forte de vafe creux & long, pour recevoir la matière
en fùfion, ce qui forme le lingot.
Il y. a des lingotières de différentes grandeurs",
avec des pieds ou fans pieds.
Il faut qu’elles foicnt un peu plus larges du haut
que du bas, pour que le lingot pùiffe fortir en la
renverfont; Quand on voit que la matière eft bientôt
prête à jeter, l’on fait chauffer la lingotière affez
pour que le fuif fonde promptement. Quand on en
met pour la grailler , l’on n’en laift'e que ce qui eft
refté après l’avoir retournée, enfuite l’on jette.
Il y a des lingotières oii l’on met une petite élévation
pour poîer le creufet, afin de faciliter celui
qui jette.
MoujfU.
On entend par pioufle , une efpèce de petit four
mobile, dont le fol & la voûte font ordinairement
d’une feule pièce. Sa forme eft communément celle
d’un demi-cylindre creux, clos par l’un de fes bouts
& ouvert par l’autre ; elle eft fermée par une table
très-mince de terre cuite, deftinée à être chauffée
par le dehors , c’eft-à-dire , à concevoir la chaleur
qu’on veut exciter dans fon fein par l’application
d’une foible chaleur extérieure.
La porte de ce petit four, qui eft confidérable par
rapport à fa capacité , & qui n’efl autre chofe que
le bout entièrement ouvert du demi-cylindre, s’ajufte
exactement à. une porte de pareille grandeur ou à
peu près , pratiquée à ce deffein dans la face antè-
tieure du fourneau d’effai.
On trouvedans la première partie du Schlutter
■ de M. Hellot, les confédérations fuivantes fur la
qualité, la conftru&ion & l’emploi des moufles.
» Les mouffles doivent être de la meilleure terre
qu’on puiffe trouver, & qui réfifte le mieux au feu.
Au Hartz , on fe fert de celles qui fe font dans le
pays de Heffe ; elles font excellentes & durent très
long-temps ; on les fait de la même terre que le
creufet qu’on emploie aux effais des mines de plomb,
de cuivre, même de fer.
Les fournaliftes de Paris en font aufli de très-
bonnes. Ils les forment de trois parties de terre glaife
des environs d’Arcueil & d’Iffi, dont ils ont ote
exactement les pyrites , & qu’ils ont mêlée avec
deux parties de pot à beurre de Normandie , réduit
en poudre modérément fine.
Schlutter ehoifit pour les faire’ une bonne terre
glaife ; il la mêle avec du fable & du verre pilé ,
parce que cette terre fe fendroit fi on l’employoit
feule... : . , ' i- t
Il prend deux tiers de cette terre bien triée &
nettoyée : il y ajoute un fixième de verre pilé &
un fixième de bon fable pur ; il fait pétrir le tout
pendant plufieurs heures , afin que le mélange foit
par-tout le plus égal qu’il- eft poffible..
Il préfère cependant les creufets de Heffe réduits
en poudre , au,verre; & au fable.
La capacité d’une monffle.fe règle fur la grandeur
du fourneau ; elle doit avoir de long, huit de fes
parties , fur cinq de large, & trois & demie de
hauteur.
Borrichius & plufieurs effayeurs d’Allemagne;
les demandent de deux pièces ; Tune eft une efpèce
de voûte repréfentant à peu près la coupe d’un
demi-cylindre creux fermé à fon fond ; les côtés &
le fond font percés de plufieurs trous pour donner |
paffagé à quelques jets de flamme ; le bas de ces
côtés doit'être un peu recourbé pour recevoir une
planchette de terre bien cuite, compofée comme
celle de la voûte.- Cette planchette mobile eft le fol
ou tablette fur laquëlle on place les. coupelles.
Que -ces moufles foient d’une feule ou de deux
pièces; il faut que les trous des côtés & du-fond
foient percés très-près de là tablette , & fort, petits,
fans quoi le charbon qui pétille, Fait a-llër jufques
fur les coupelles, de petits éclats qui retardent les
effais, en reffufcitant le plomb à mefure qu’il fe convertit
en litharge.
Cependant dans quelques endroits, de l’A lle magne
, on eft dans rufagé de Faire ces trous dés
côtés & dû fond de la moufflè , beaucoup plus
grands & en arc ; mais alors on eft oblige de. gouverner
le feu ou la chaleur du dedans de la. mouffle
par de petites pièces de terre cuite que l’on nomme
inf rumens; ce qui devient une difficulté pour ceux
qui ne font pas dans l’habitude de s’en fërvir. Ainfi
on doit préférer une mouffie percée de petits trous
d’une ligne ou d’une ligne & demie de diamètre’.
Les effais y paffent aifément ; & au cas que la chaleur
n’y foit pas affez forte pour quelques épreuves,
comme pour rafiner un bouton de cuivre noir en
cuivre rofette, on y remédie en mettant du charbon
allumé dans l’intérieur de cette mouffie. » ■
Oùtil-s du fournalifle.
‘ Les outils ordinaires pour la fabrique des ouvragés
du fournalifte, font en petit nombre ; un maillet bu
maffe de bois à long manche , dont la tête-eft armée
-de clous, fort à battre.le ciment; un petit rabtit auffi
de bois, ou plus fimplement, une palette faite d’une
douve , fert à le corroyer & le mêler avec la terre
glaifei i- ;
- Il y -a de grandes'& de petites palettes, de carrées,
de longues & en triangle. Ces dernières font tm-peu
•tranchantes , fervent comme- de- couteaux pour
enlever ce qu’i îy a de trop de matière réduire
l’ouvrage à fa jufte épaiffeur. On les appelle palettes ,
parce qu’en effet les plus grandes - reffemblent à
celles dont les enfans fe fervent dans quelques-uns
de leurs, jeux.
Des bâtons , longs & pointus , • de diverfes longueurs
& de différens diamètresfoit-en bois-foit
.en terre cuite , fervent ouvrir.dans les fourneaux
les trous , qu’eri termes de l’art on appelle, des
»regiflres. On les' laiffe aux fourneaux, pour * en les
.bouchant ou les ouvrant , y entretenir le degré
de feu convenable.
Ces bâtons., à caufe de leur figure ,, fe nçunment
'des fufeâux. '
Communauté des FournaVifes. / .
Les fournaliftes ne font point du corps dès potiers
de terre. Ils forment à Paris une très-petite communauté,
qui a été 'créée en corps de maîtrife &
jurande, & foumife à la jurifdi&ion de la cour des
monnoies , par édit dû mois d’avril 1701. En exér
cution de,cet édit , la cour des. monnoies fit, le,3.1
mars fuivant,. des.ftatuts, par lefquels le nOmbré
des maîtres eft fixé à dix., celui des jures a deux,
qui. doivent être élus au parquet en préfence'-du
procureur général de la cour,Ces jures doivent foire
les vifitesfo jours §C heures non-prévus, & .peuvent
requérir , lorfqu’ils le jugent à propos , l’afliftance
des huifliers de'la -cour.
L’appréntiffage eft de cinq ans, & le fervice: chez,
les -maîtres apres l’apprentiffage, eft de trois ..autres
années. Les brevets doiventêtre ênregiftrés au greffe
de la cour des. monnoies & fur le régiftre de la
communauté. Les apprentis , compagnons, fils de
maîtres, ne peuvent aller travailler chez les potiers
de terre où chez d’autres maîtres que ceux de leur
communauté.
Les fils de maîtres ne doivent que la fimple expérience
, & l’apprenti étranger le chef-d’oeuvre ;
l’une'&. l’autre leur eft donne a la cour des mon-
noies , où l’afpirant eft reçu à la-maîtrife.
Les veuves jouîffent des privilèges de la maîtrife
de leurs maris ; elles ne peuvent cependant obliger
de nouveau un, apprenti, mais feulement finir le
temps de celui qui a commencé,. Elles peuvent tra-
vailler, par elles-mêmes ou faire travailler des co^_
pagnons. .
• Les-maîtres doivent tfvbir deux marques infeul-
pées fur une tablé de cuivre au greffe de la cour-
dés -monnoies'pour en marquer leurs ou vrages. Les.
maîtres ou les veuves, ne peuvent affermer leur
privilège -à peine de déchéance, & de deux cents,
livrés d’amende.
Il-eft défendu aux maîtres de vendre des fourneaux
& des creufets propres aux fontes de métaux*
&.aùx;diftiüations, ftnon. à des perfonnes qui ont le
droit de faire ces fortes d’ouvrages , ou avec per*
million obtenue par écrit des magiftrats de laicour
des monnoies ; mais cette formalité ne s’obferve
] pas.
’ Outre les fourneaux de toute efpèce, les maîtres.
: fournaliftes ont feul.s le droit., à l’exclufion des
potiers de terre , de faire toutes fortes de creufets -9
mouffles ,' aludëls, cKapés , contre - coeurs , che-.
. min aux, alambics, .coupelleslin gotières, capful-es v
cornues, & autres üfterifiles fervant pour Tufage
; des .orfèvres , fondeurs , apothicaires , diftillateurs,'
i cfiimiftes , & autres periohnes qui ont droit de s’en
- fervir.
Ces ftatuts ont été confirmés par lettres-patentes
du mois d’août 1701, regiftrées à la cour dés'moci-
noies le 1 y du même mois*