
118 F ü M
céder à celui qui eft forti par la cheminée, pour ■1
lors la fumée n’étant plus preftee, fe répand nécef-
fairement dans la chambre , où elle trouve bien
moins de réfiftance que du côté du tuyau, à rai-
fon de la preffion de l’air fupérieur ,. & de la ra-
réfa&ion du peu qui en refte dans la chambre.
Voilà donc la caufe la plus générale de la fumée,
qui provient de ce qu’il n’entre pas d’air dans
la chambre à mefure & và proportion qu’il en fort
par la cheminée.
Ceft fur cette découverte, qu’on a trouvé un
moyen, pour ainfi dire , infaillible , d’empêcher
de fumer toutes fortes de cheminées : que les chambres
foient grandes ou petites , voûtées ou lambrif-
fées , on a cru que , puifqu’il fbrtoit une partie de
l ’air de la chambre avec la fumée, & par l’attraction
du feu , il falloit nécessairement y en faire entrer
de nouveau par quelque endroit, pour fup-
plèer à celui qui s’échappoit continuellement, &
pour preffer toujours également la fumée, afin de
la faire monter; pour cela, on s’é'toit avifé de pratiquer
une ouverture à la fenêtre , en ôtant un
carreau de v itre , que l ’on adaptoit par un cadre
à une petite couliffe , au moyen de quoi on pouvoir
l’ouvrir & le fermer au point que l’on vouloir
; mais ©n s’eft bientôt apperçu qu’en voulant
fe délivrer de l’incommodité de la fumée, on en
eontra&ôit une autre également fâcheufe , je veux
dire le vent & le froid qui entroient dans la chambre
par çette ouverture.
D’ ailleurs, on n’ètoit pas toujours délivré de la
fumée par .ce moyen ; elle y rentroit même quelquefois
avec plus de force , lorfque, par exemple ,
le vent venoit du côté oppofé à celui de la fenêtre -,
parce qu’alors Vaîr de la chambre fortoit par cette
ouverture, & donnoit moyen à la fumée de rentrer
dans la chambre où elle fe trouvoit moins preffée
que dehors.,
Dans la fuite quelques-uns ont cru mieux faire ,
en mettant horizontalement deflous & le long du
manteau de la cheminée , un tuyau percé en tous
fen s , d’une infinité de trous dans toute fa longueur
, q u i, ayant communication avec l’air extérieur,
en reftituoit à la chambre par ces petits
trous.
A la vérité , cette invention eft meilleure que
la précédente ; mais elle efl encore imparfaite, parce
que ce tuyau étant percé en tous fens , & place
an defious du manteau de la cheminée, il en ré-
fulte les mêmes inconvenieris par le froid qui fort
des trous qui font du côté de la chambre, & par
où le vent fouffie dire&ement en face de ceux
qui font affis devant le feu. De plus , l’air for-
ta/it en tous fens de ce tuyau, fe difiîpe trop &
n’a plus allez de force pour pouffer la fumée , outre
la difformité que ce tuyau , ainfi expofé à la v u e ,
caufe à la cheminée,
Ilfalloit donc corriger cçttê invention , de façon
qu elle eût tout l’avantage qu’on en attendoit, fans
»voir aucune des incommodités ci-deffus. Com-
F D M
me toute difficulté cède à l’induftrie humaine, fécondée
des connoiffances phyfico-mathématiques ,
elle efl enfin parvenue à perfectionner ce même
expédient, comme on le verra par l’explication fui-
vante. »
Avant toute chofe, il faut remplir en maçonnerie
les deux coins de la cheminée, ( fig. 12, PI.
du fumijîe ) jufqu’à la hauteur de la tablette, ou
des bras du canal dont nous allons parler, de façon
qu’ils prefentent une plate face au lieu d’un
angle, fic’efi dans une grande cheminée , ou bien
une portion de cercle, fi c’eft dans une petite ; où
pour l’expliquer plus clairement, on donnera, félon
la méthode de M. Gauger, aux jambages de
la cheminée, une difpofition parabolique.
Enfuite il faut tâcher de tirer de dehors affez
d’air pour chaffer la fumée fans le fecours de l’air
intérieur de la chambre , qui lui efl abfolument né-
ceffaire : pour cela on fera deux ouvertures, A æ,
chacune d’un demi - pied en carré, une à chaque
côté du contre - coeur de la cheminée , vis-à-
vis & à la hauteur de la tablette, B: ou s’il y a
un appartement derrière la cheminée, on fera ces
ouvertures au mur qui communiquera à l’air extérieur
, foit de la rue ou d’une cour , ou de quelque
autre endroit fembiable , mais qui portera l’air
toujours à la hauteur ae la tablette, autant que
faire fe pourra.
Vis-à-vis de chaque ouverture , A a , 8 c tout le
long du mur collatéral de chaque côté de la cheminée
, on conftruira en ligne droite & horizontale
, un tuyau de brique , Oc , ou de tuiles plates,
liées & cimentées avec du plâtre ; & la partie
fupérieure de chaque tuyau , dont le diamètre
fera par-tout un peu plus large que l’ouverture ,
fe terminera dans toute fon étendue , en efpèce
d’auvent, appuyé au mur collatéral de la cheminée.
Enfuite on fera en dedans de la cheminée, un
canal qui régnera horizontalement de droit à gauche
, tout le long de la tablette, mais fans toucher
le mur, à l’extrémité duquel viendront aboutir
de part & d’autre, en lignes parallèles, les deux
tuyaux, pour y porter l’air qu’ils reçoivent de dehors
par les ouvertures..
Ce canal doit être fait auffi de tuiles plates , liées
& cimentées avec du plâtre , mais difpofées en
parpin, & placées en ligne droite & perpendiculaire
de forte que la partie fupérieure de ce canal
fe termine infenfiblement & aboutiffe au manteau
de la cheminée , en paroiffant ne faire qu’un
même corps.
La partie inférieure de ce canal portera dans toute
fa longueur, fur une bande de ter large de deux
pouces & demi , fur quatre ou cinq lignes d’é-
paiffeur, & affez longue pour entrer de part &
d’autre dans les murs collatéraux fur lefquels elle
portera. .
Cette bande de fer , auffi bien que la partie inférieure
du canal qui porte deffus , doit être ifo-
lé e , de façon qu’elle foit éloignée de deux ou trois
F U M
pouces de la grande pierre qui forme la tablette
de la cheminée , & élevée* de trois ou quatre pouces
plus que cette même pierre.
Il eft vrai que ce canal paroît bien étroit, puif-
que, fuivant ce qu’on a d it, il n’aura guère plus
de deux bons pouces de large : mais en revanche
on le fera affez haut pour contenir, à peu près,
le même volume d’air qui y entre par les deux
bras ou tuyaux qui doivent être fupportés chacun
par une petite planche large de huit pouces environ
, & affez- longue pour porter par ün bout
fur la bande de fer ; & par l’autre , fur le mur dans
l'ouverture, a A.
Sa partie de deffous fera cachée par la maçonnerie
qui formera la conftruéüon parabolique des
jambages de la cheminée, laquelle fe terminera à
çette /planche.
La bande de fer doit être éloignée du manteau
de la cheminée de deux ou trois pouces , afin que
la partie inférieure du canal qui porte deffus ait
deux faces.
A celle qui regarde le manteau de la cheminée ,
ori fera des trous d’un pouce de diamètre, à la
diftance de huit ou dix pouces l’un de l’autre , par
où doit fortir l’air qui viendra dans le canal, lequel
fe réfléchira enfuite fur une bande de tôle que
l’on mettra fur champ à la diftance de deux pouces
environ de ces trous ; elle fera de la même
mefure que la largeur de la cheminée ; & comme
il feroit difficile, à raifon de fa fituation, de la
faire porter fur les murs collatéraux , elle fera fup-
portée à chaque bout par une ,patte de fer , fourchue
ou fendue, & elle fera affez large pour qu’elle
joigne exa&ement par fa partie fupérieure la grande
pierre de la cheminée, dont tout le long de la
jointure fera enduit de plâtre, & pour q u e , par
fa partie inférieure, qui doit être légèrement pliée ,
ou plutôt tournée vers le feu , en s’éloignant de
la perpendiculaire en façon de plan incliné, elle
delcende-de deux ou trois pouces au deffous de
la bande de fer H , I , K , fans pour cela quelle pa-
roiffe beaucoup dans la chambre, s’il eft poflible.
On pourroit faire ce canal, de tôle ou de fer
blanc , au lieu de tuiles plates il feroit même
plus tôt fait; mais il feroit à craindre qu’étant plus
facile à échauffer que l’autre, l’air ne s’y raréfiât
trop , de forte qu’il ne fortiroit plus avec la même
force, & ne repoufferoit pas fi bien la fumée.
Nous avons dit que le canal D , E , F , G , fig. 12,
devoit eompenfer par fa hauteur le peu de largeur
qu’il auroit, étant fupporté par une bande de fer
qui n’auroit guère que deux pouces de large : cependant
il femble que, quoiqu’il n’eût pas la même
capacité pour contenir ün volume d’air tout-à-fait
égal à celui qui fait effort pour entrer par les tuyaux
C , c , l’effet n’en paroîtroit que plus aflùré pour
chaffer la fumée ; 1 °. parce que l’air renfermé dans
le canal, étant'en moindre quantité que celui qui
preffe dans les tuyaux, il aura moins de force pour
réfifter à fon a&ion, & pour le repouffer ; a0, parce.
F U M 119
qu’étant pouffé- par une force fupérieure à fa ré-
fiftance , il fortîrà avec plus de rapidité par lés
trous pratiqués dans la partie inférieure du canal,
& agira par conféquent avec plus de force vers
la' flamme pour chaffer la fumée.
Si la cheminée étoit fituée de telle façon qu’on
ne pût pas prendre facilement de l’air par derrière
ou par les côtés, on pourroit en faire entrer par
le haut du tuyau de la cheminée , en pratiquant
intérieurement deux petits tuyaux qui defcendroient
au niveau de la tablette , d’où l’air iroit dans les
bras du canal ; . mais il faudroit que, ce fût en
bâtiffant la cheminée, autrement il y auroit beaucoup
plus de difficulté.
On pourroit auffi , en cas de befoin , tirer de
l ’air par ert bas , en pratiquant des foupiraux qui
viendroient aboutir aux deux coins de la cheminée
, & qui monteroient le long & derrière la conf-
tru&ion parabolique des jambages, pour communiquer
l’air extérieur aux bras du canal.
Il eft facile de s’appercevoir par tout ce détail ;
que cet expédient a tous les avantages qu’on déliré;
i°. par rapport à la conftru&ion parabolique
des jambages , propre pour empêcher de fumer.
20. Par le moyen du canal pratiqué derrière la tablette
, il vient autant d’air qu’il en faut pour l’eiv
tretien du feu & de la flamme, & pour preffer la
fumée; de forte que l’air de la chambre n’étant
point attiré, ni diflipé, elle s’en trouve toujours
pleine , ce qui eft déjà un garant contre la fumée.'
30. La bande de tôle , qui eft placée devant les
trous du canal, fert non-feulement à faire réfléchir
l’air qui en fort vers le contre-coeur de la cheminée
, & à l’empêcher qu’il, ne communique un
air froid à la chambre, mais encore à réunir fes
forces , de forte qu’il ne peut pas s’échapper ert
tout fens'; la partie inférieure de cette bande
étant un peu repliée, donne à l’air réfléchi une
dire&ion qui fe fait prefque dé bas en haut, telle
qu’il la faut pour pouffer la fumée avec plus de
force : ainfi il n’en entre point du tout dans la.
chambre.
Malgré tous les avantages qu’on a pu remarquer
dans cet expédient, on voit quelquefois qu’un vent
d’oueft très-violent, qui enfile la longueur de l’ouverture
du tuyau de la cheminée, ou un vent de
nord, à raifon de fa direâion de haut en bas, font
capables de faire fumer les meilleures cheminées r
pour prévenir cet inconvénient, il eft à'propos
de couvrir le haut du tuyau de la cheminée, d’une
des façons que nous avons marquées ci-deffus , &
qui lui fera la plus convenable, eu égard à fa fituation;
ayant attention de laiffer affez d’ouverture
pour le paffage de la fumée.
Avec ces précautions, on aura la fatisfaâion de
faire du feu dans toutes fortes de chambres, fans-
craindre la fumée dans aucune faifon, en quelque
climat que l’on foit, & quelque vent qui fouffie. Enfin
j. une heureufe expérience prouvera mieux que