
faut tenir quelques minutés i’orifice du vaiffeau
bouché avec le bout du doigt ou autrement, pour
donner à la liqueur le temps de s'échauffer un peu,
& avec la flamme d’une bougie, on allumera le
jet lorfqu’il partira.
Il eft encore un moyen de fe procurer, à peu de
frais & fans fe fervir de fontaines, un jet de feu ,
petit à la vérité, mais dont l’effet eft furprehànt.
.On fait fouffler, par un éniailleur, une boule creufe
un peu plus groffe qu’un oeuf de poule, qui ait
d’un côté une queue fcellée par le bout, & de l’autre
un bec recourbé en haut dont l’orifice foit capillaire.
Oh plonge, pendant quelques fécondés, toute
la boule dans une cafetière remplie d’eau bouillante
, ayant foin que l’orifice du bec foit en dehors.
On la retire & l’on trempe fur lé champ le
bout du bec dans un verre à boire , qui contienne
de l’efprit-de-vin. Quand il en fera entré dans la
boule autant que le poids de l’atmofphère y en
peut porter, vous la replongerez de nouveau dans
l ’eau bouillante ; & vous allumerez le jet en tenant
la bougie à un pouce près du bec : c’eft une efpèce
d’éolipile, & tous les éolipyles peuvent faire l’effet
des fontaines artificielles.
Fontaine intermittente. !
La fontaine intermittente, (que les empiriques
femblent faire obéir à leur commandement, & dont
ils fe fervent pour en impofer au peuple, peut être
regardée comme un inftrument de phyfique propre
à prouver la réfiftance, & conféquemment la folidité
de 1 air. On donne à cette fontaine telle figure que
l’on juge à propos. Suppofbns un vafe de fer-blanc
de 4 pouces de diamètre & de 5 pouces de hauteur,
■ fermé vers le haut : c’eft le réfervoir qui contient
l’eau. On fait fouder vers le fond un tuyau de dix
pouces de long & demi pouce de diamètre, ouvert
par fes deux extrémités. Ce tuyau, qui n’eft
deftiné qu’à fervir de paflage à l’air & non à l’écoulement
de l’eau , doit traverfer le réfervoir & toucher
prefqu’au fommet ; c’ëff-à-dire, à trois ou quatre lignes
près. Au fond du vafe on fait-ajufter cinq àfix petits
tuyaux par où l’eau, renfermée dans le vafe, puiffe
s’écouler lentement ; on donne à ces oiivertures une
. ligne & demie de diamètre ; ce vafe doit être fou-
tenu par des fùpports au deffus d’une coquille de
fer-blanc, de manière que l’ouverture du long
tuyau foit à trois ou quatre lignes du fond de cette
-cuvette , percée en fon milieu d’un trou de deux à
trois lignes de diamètre par lequel l’eau s’écoule.
Voici maintenant l’explication phyfique de la
fontaine intermittente dont on vient de donner la
defcription. La preflion intérieure de l’air qui paffe
par le canal de la fontaine intermittente lorfqu’il eft
ouvert, fait fon effet fur la furface de l’eau du réfervoir
: or, comme cette preflion jointe au poids de
l’eau eft plus forte que la preflion que l’air extérieur
exerce fur l’orifice des petits canaux, celui-ci eft
obligé ffe céder à une force Supérieure, & l’eau
s’écoule par les petits canaux. Mais comme la quantité
d’eau que les petits canaux fourniflent dans la
cuvette èft plus grande que celle qui peut en fortir,
elle s’élève & bouche l’ouverture inférieure du long
tuyau qui fert de paflage à l’air intérieur. Alors
l’air extérieur qui preffe avec avantage contre les
orifices des petits canaux, empêche l’écoulement
qui rie recommence que quand l’eau de la cùvette
s’éfi écoulée: l’air extérieur peut s’introduire le long
du tyau , & aller de nouveau preffef l’eâù du réfer-
voir. Ainfi lorfque le bout inférieur du grand canal
par où paffe l’air dans l’intérieur fe trouve bouché
, l’air extérieur exerce toute fa force & réfifte
à l’écoulement de l’eau par les orifices des petits
canaux ; cet obftacle ceffe toutes les fois que la cuvette
fe vide, & renaît chaque fois que l’eau remplit
l’ouverture inférieure du grand canal. C ’eft ce
qui caufe l’iriterrriittence.
Comme il eft facile de conrioître , par l’élévation
de l’eau qui fe trouve dans la cuvette , l’inftant où
les petits tuyaux doivent ceffer de couler, & celui
auquel l’eau doit s’échapper de nouveau, on peut
fuppofer que cette fontaine coule oh s’arrête au
commandement & à la volonté de celui qui fait
cette récréation. L’habitude d’ailleurs fait connoître
le temps qui s’écoule entre ces deux différens effets.
Quant aux fontaines domejliques , il y en a de
fimples, & d’aütres qui font fablées ; il y en a en
cuivre, en plomb, ërt grès, &c. Nous avons déjà
parlé des fontaines en cuivre fimples & fàbléës
dans ce dictionnaire à l’art du chaudronnier. Nous
parlerons des fontaines en plomb à l’article du plombier
, & de celles en grès ou terre, en décrivant l’art
du potier de terre.
Fontaines publiques.
C ’eft fur-tout dans les fontaines publiques que l’art
du fontàinier devroit s’exercer , par les avantages
qu’elles procurent aux habitans des villes. Nous
ne pouvons mieux faire à cet égard que de rapporter
ici prefqu’èn entier les qbfervations excellentes
que nous trouvons dans lé grand & utile dictionnaire
des fciences morale. économique, &e.
de M. Robinet, cenfeür royal. .
Les fontaines publiques font des eaiix de foürce
ou de rivière que l’on conduit naturellement, du
qu’on élève par le moyen des machines, ou que
l’on amène dans une villê, foit par des tuyaux, foit
par un aqueduc , & que l’on diftribue en différens
quartiers pour fournir aux befoins des citoyens. Il
n’eft perfonné qui ne reconnoiffe l’utilité, & pour
ainfi dire la néceflité des fontaines publiques dans
une grande ville.
Mais comme il arrive fouvent que les difficultés
de ces fortes d’entreprifes deviennent un obftacle à
l’exécution, on va donner les détails les plus effen-
tiels & les plus propres pour les vaincre.
* Jaugeage des fources.
Un fontàinier expérimenté dans l’hydraulique l
qui eft confulté par une grande ville pour lui pro:.
curer l'agrément & l’utilité de fontaines publiques ;
doit commencer par vifiter & jauger toutes les
fources qui fe trouvent aux environs, & qui par
la fup'ériorité de leur pofition peuvent être amenées
dans les quartiers même les plus élevés de
cette ville.
On ne détaillera pas ici les différentes méthodes
de jauger les fources, c’eft-à-dire, d’en eftimer le
produit ; c’eft une opération fimple & affez généralement
connue, qui fe fait parle moyen d’un tuyau
percé de plufieurs trous, dont les orifices de diffé—
rentes grandeurs fervent à apprécier le volume d’eau
qu’une fource fournit : on doit obferver que pour être
en état de compter fur le moindre volume, il eft à
propos que cette opération foit faite dans la faifon
des eaux les plus baffes, & qu’elle fe faffe aufli
dans les temps des crues d’eau pour déterminer le
diamètre de la conduite, de façon à fe procurer
la plus grande abondance, lorfque cela fera pof-
fible.
Lorfqu’on a reconnu le volume d’eau que l’on
peut efpérer d’une fource ou de4 la réunion de
plufieurs fources , & que l’on s’eft affuré que leur
produit dans toutes les faifons fera en état de
fournir conftamment & abondamment aux befoins
de la ville , ou fi au défaut des fources on eft obligé
d’élever l’eau d’une rivière par la mécanique, il
faut procéder à l’examen de la qualité de l’eau.
Examen de la qualité de Veau.
On n’a pas befoin de dire combien il eft inté-
reffant de conftater la falubrité d’une eau, avant
que d’en faire préfent à une ville.4 Après l’air que
nous refpirons , l’eau eft le fluide le plus néceffaire
k la vie. C ’eft le breuvage que nous tenons de la
nature ; elle nous fert à tempérer ou à compofer
nos autres boiffons ; elle entre dans la plupart de
nos alimens ; on en fait le bouillon ; on en pétrit
le pain, &c. fa qualité influe donc effentiellement
fur la fanté.
Il y a plufieurs façons d’éprouver la qualité des
eaux. La chymie nous préfente à cet effet des
moyens nombreux, fûrs & infaillibles. Elle nous
découvre par l’analyfe les parties étrangères , dont
ce fluide eft imprégné ; elle juge par la nature de
ces parties fi elles font innocentes ou fi elles renferment
quelque vice capable de porter atteinte à
la fanté, fans même implorer le feçours de l’art.
On pourra s’affurer que l’eau des fources qu’on fe
propofe de conduire dans une ville eft d’une qualité
falutaire, fi la diffolution du favon s’y fait aifé-
ment, fi les légumes y cuifent promptement, & fi
en jettant dans un verre plein de cette eau quelques
gouttes d’huile de tartre par défaillance, il
ne fe forme au fond de ce verre aucun fédiment
qui foit d’une nature fufpefte.
Nous ne prétendons pas induire delà qu’on ne doit
admettre qu’une eau qui foit abfolument exempte
de parties hétérogènes ; il n’en eft point dans la nature.
Mais il faut que ces parties étrangères, ter-
reufes , falines , minérales . ou végétales , foient
plus falubres que nuifibles. ^
Il y a des phyficiens qui prétendent pouvoir
juger de la qualité d’une eau par fa pefanteur, comparée
avec celle d’une autre eau reconnue pour
bonne de fa nature & par l ’ufage. Mais n’eft-ce
pas un abus ? c a r , outre que la différence entre le
poids de toutes les eaux douces eft prefque infen-
fible , c’eft qu’il peut arriver qu’une eau paroiffe
fpécifiquement plus légère qu’une autre à l’aréomètre
ou à la balance, quoique cependant elle
contienne plus de parties étrangères. Cela paroît
un paradoxe , cependant c’eft une vérité dont voici
la preuve. Des parties féléniteufes, terreufes, mu-
cilagineufes, &c. dont une eau eft chargée, font
elles-mêmes imprégnées de parties aériennes ; ces
globules d’air occupent un efpace qui feroit occupé
par des parties d’eau ; or le poids de l’air eft
840 fois moindre que celui de l’eau ; d’où il réfulte
qu’une eau peut être trouvée plus légère , non
parce qu’elle contient moins de parties étrangères ,
mais.parce que dans un nombre égal, & même
dans un plus grand nombre de ces parties, elle
contient plus de particules d’air que n’en contient
l’eau avec laquelle elle eft comparée.
Une eau réunit toutes les qualités requifes, fi
outre la propriété qu’elle a d’être légère à l ’efto-
mac, elle eft claire & limpide, fans goût, fans
odeur, douce au t a â , propre à la diflolution du
favon, aux opérations de la teinture, à la cuiffon
des légumes, en un mot, à tous les befoins & à
toùs les ufages civils, domeftiques & alimentaires.
De la quantité d'eau quon doit procurer à une ville•
Il ne fuffit pas de s’affurer de la falubrité de
l’eau que l’on Veut procurer à la v ille , il faut en
faire venir une quantité proportionnée au nombre
de fes habitans & mefurée fur leurs befoins ; il
faut même que cette quantité d’eau foit fupérieure
aux befoins aduels des citoyens , parce que la population
peut augmenter.
Lorfqu’on veut donner Amplement le néceffaire
c’eft-à-dire, la quantité d’eau ftriélement proportionnée
au nombre a&üel des habitans d’une ville ,
il faut compter fur un pouce d’eau pour chaque millier
d’habitans.
On fait que le produit d’un pouce d'eau eft 2.8
livres d’eau par minute, ou 3 muids par heure,
pefant chacun 560 liv re s , c’eft-à-dire, que pour
une ville de 30 mille habitans, il convient de ne
pas donner moins de trente pouces d’eau.
Quand on eft obligé d’avoir recours à des machines
pour l’élévation des eaux que l’on doit procurer
à une v ille , on eft excufable alors de ne fournir
que le volume d’eau abfolument néceffaire ; mais
lorfque pour abreuver une v ille , la nature préfente
des fources à fa proximité & à la hauteur convenable
, & que ces lpurces font abondantes, on feroit