
»près qu’il a été étendu par le paffage du rouleau ",
il a pris à la vérité un peu plus de confiftance , mais
il eft encore rouge : s’il demeuroit dant cet état,
expofé au contaél de l’air, il fe calcineroit, c’eft-
à - dire , que fes parties ne pouvant paffer allez
promptement à l’état de contraction auquel les
Sollicite un refroidiffement fubit & précipité , il
s’enfuiVroit une réparation, un déchirement de ces
mêmes parties, & on ne conferveroit aucune glace
entière. On ne peut prévenir cet accident, qu’en
conduifant les glaces par degrés, de l’état d’incan-
defcence à un parfait refroidiffement. C ’eft dans
cette vue qu’on les fait paffer, auffitôt qu’elles font
coulées, fur le pavé d’un four qu’on a fait rougir
auparavant.
Lorfqu’on a placé dans le four de recuiffon les
huit glaces qui forment une coulée, on bouche hermétiquement
tous les orifices de ce four 3 en y
appliquant des ferraffes ou feuilles de tô le , dont
on garnit le tour avec du mortier d’argile ; c’eft ce
qu’on appelle marger. On débouche ou on démarge
enfuite peu à peu : on commence , environ vingt-
quatre heures après qu’on a coulé, à détacher d’une
des ferraffes partie du mortier ; on continue de
même avec le plus grand ménagement & par intervalle
, jufqu’à ce que non-feulement on ait détaché
tout le mortier, mais encore qu’on foit parvenu à
ouvrir le four en entier, en enlevant fucceflivement
toutes les ferraffes. On mefure l’exa&itude des précautions
à l’état de l’atmofphère, & le démargement
doit être plus foigné & moins prompt pendant les
temps rigoureux de l’h iver, que lorfqu’une faifon
-plus chaude rend le contaél de l’air moins dangereux.
La recuiffon efî indifpenfable pour tous les ouvrages
de verrerie ; les fours qui y font employés
font généralement dèfignés fous le nom de fours
à recuire , ou fours de recuiffon , ceux dans lefquels
on recuit les glaces coulées , font fpécialement
appelés car quai fes.
La carquaife dans laquelle on place des glaces,
doit être rouge ; mais fi elle eft exceflivement
chaude, le fabricateur éprouve des accidens produits
par cette caufe. Le verre fe ramollit, au lieu
de prendre la confiftance convenable, ou il fe con-
ferve trop mou; il prend trop profondément l’im-
prefiion du pavé fur lequel il repofe ; quelquefois
il y adhère, en s’infinuant dans les joints de quelques
briques ; enfin , il ne peut fupporter, fans fe
plier ou fans s’étendre , l ’a&ion de IV grec ck de la
grande pelle avec lefquels on pouffe -& l’on tire
les glaces pour les arranger dans la carquaife.
On diftingue une bonne recuiffon, i° . à la parfaite
confervation des glaces recuites ; 2°. à leur
folidité qui fe manifefte fur-tout par l’impreflion
que le trait du diamant fait fur elles. Une glace
bien recuite fe coupe aifément, le trait eft brillant,
& paroît pénétrer l’épaiffeur du verre : les coups
de marteau le font ouvrir uniformément fans précipitation
, & avec une forte de régularité. La glace
mal recuité au, contraire, femble nette qu’écorchée ■
à fa furface par le trait du diamant. Si l’épaiffeur
en eft pénétrée, elle l’eft irrégulièrement ; des parties
le font en entier ; dans d’autres à peine le paffage
du diamant a-t-il fait une légère impreflion : les
coups de marteau font ouvrir le trait avec beaucoup
de difficulté ; la glace éclate quelquefois en plufieurs
morceaux. Il arrive fouvent, au contraire, que le
trait du diamant s’ouvre avec une étonnante rapidité
, & le morceau de la glace fe détache avec tant
de reffort, qu’il repouffe avec force la main qui le
tenoit. En un mot, les effets de la mauvaife recuiffon
font fingulièrement variés, & paroiffent,
dans diverfes circonftances, abfolument contraires.
Il feroit difficile de rendre raifon,de cette irrégularité
apparente , à moins que l’on ne confidère
les parties de la glace mal recuite , comme fubi-
tement contractées par lé contaét d’un air trop
froid , & femblables dans cet état à une multitude
de petits refforts tendus. Le trait du diamant ou les
efforts qu’on fait pour l’ouvrir , caffent les extrémités
de ces refforts, & en les détendant, mettent
en jeu toute leur violence. L’effet de leur aétion eft
différent, fuivant leur différente pofition & leur
diverfe direétion. La température dans laquelle étoit
la glace lorfqu’elle a reçu un coup d’air, celle qui
affe&oit l’atmofphère dans le même temps , font
encore des conditions qui doivent naturellement
occafionner beaucoup d’irrégularité dans les phénomènes
d’une mauvaife recuiffon.
La pl. X X X lI préfente le développement d’une
carquaife dans toutes fes dimenfions & dans toutes
fes parties. Le pavé en eft élevé fur un maffif, à la
même hauteur que la table , afin que la furface de
celle-dTfe-trouvant de niveau avec le pavé , on
puiffe faire paffer aifément les glaces de l’une fur
l’autre.
Le nombre & la grandeur des glaces qu’on fabrique
, déterminent l’étendue du pavé qui doit les
recevoir. Il fuffiroit de lui donner environ vingt-
quatre pieds de long , fur douze de large , pour
une couléé de huit glaces ; mais comme la carquaife
eft échauffée par deux tifars fitués aux deux
extrémités, on eft obligé de dbnner à ce four , au
moins trente pieds de longueur totale intérieure,
de a en b , fig. /. '
Le pavé doit toujours être très-droit : autrement,
il gauchiroit les glaces qu’on y dépoferoit ; auffi
a-t-on conftamment l’attention de lui conferver cette
qualité. On le conftruit fans mortier, fimplement
en briques pofées de champ, dont on a frotté auparavant
les îurfaces les unes contre les autres, pour
qu’elles fe joignent plus exa&ement : on garnit les
joints des briques avec du fable bien fec , dont on
forme même une très - légère couche fur le pavé.
Voici l’avantage de cette conftru&ion.
L’aâion du feu tend à tourmenter le pavé : fi les
matériaux étoient folidement arrêtés avec du mortier
, la chaleur altéreroit aifément le niveau de la
furface du pavé ; & au contraire, dans notre manière
ni ère de conftruire , les briques étant, pour ainfi
dire, indépendantes les unes dès autres, tout l’effet
du feu fe rédiiit à en élever quelques-unes, ce qui
eft très-promptement& très-facilement réparé.
A l’une des extrémités de la carquaife eft fa
gueule D , fig. /, pl. X X X I I , par laquelle on introduit
les glaces ; en lui donnant fept pieds d’ouverture
, on peut fabriquer des glaces au moins de
fix pieds de large.
La gueule de la carquaife préfente , dans fon
élévation, une voûte très-furbaiffée, fig. 3 & 4 ,.
pl. X X X I I , qui prend naiffance fur le pavé, &
s’élève dans fon milieu à un pied : on donne environ
douze pouces à l ’épaiffeur ƒ 1 de cette maçonnerie
, fig. 1. Au deffus de la guqule , fig. 4 , on
pratique ùn trou carré dé trois ou quatre pouces ,
qui donne un plus libre paffage aux fumées pendant
le commencement de la chauffe.
A côté de la gueule de la carquaife, on conftruit
un tifar C , fig. 3 & 4 , dont l’ouverture a
douze ou quinze pouces de largeur, & eft voûtée
à une femblable élévation. La longueur de ce tifar
jufqu’en 8, fig.. 1, eft auffi de quinze pouces.
Le tifar eft placé contre le mur 3 y , fig. /, de la
carquaife, & l’on forme de 3 en 5 unrelai d’environ
trois pouces ', qui donne la facilité de fermer le
tifar avec une porte de tôléfoutenue fur des gonds.
Le tifar avance d’environ quatre pieds & demi dans
la carquaife, depuis le devant de ce four. Après
fon entrée, on lui donne environ dix-huit pouces
de largeur , & l’on place les barreaux qui doivent
foutenir le bois, à huit pouces au deffous du pavé,
pour que les cendres & les braifes s’y répandent le
moins qu’il eft poflible.
La maçonnerie qui fépare le tifar de la gueule
a trois pieds & demi d’épaiffeur en 2 .1 , fig. 1 ;
elle avance de trois pieds de 2 en 9 , & depuis f
on forme un pan coupé, tel que x f — deux pieds
& demi. Les voûtes, tant de la gueule que du tifar ,
trouvent un point d’appui folide fur cette maçonnerie.
Au deffous du tifar, on conftruit un cendrier qui
règne fur toute fa longueur, & auquel on donne
environ cinq pieds de profondeur, c’eft - à - dire ,
qu’il fe plonge d’environ trois pieds au deffous de
l’aire de la halle : on voit dans la fig. 3 , l’ouverture
& la forme de ce cendrier.
L ’extrémité de la carquaife que nous venons de
décrire, eft celle qui donne dans la halle, & que,
pour cette raifon , on appelle devant de la carquaife.
L ’extrémité oppofée, qu’on nomme le derrière, eft
auffi garnie dun tifar femblable, par la forme, à
celui du devant, avec la différence cependant qu’il
eft placé au milieu de la largeur du four. On lui
donne environ cinq pieds de long , & , pour qu’il
ne prenne rien fur la longueur du pavé , on le
conftruit dans l’épaiffeur du mur de la carquaife ;
mais, comme ce mur n’a que deux pieds & demi,
le tifar reffort de deux pieds & demi de la face du
four de recuiffon. On peut, fans inconvénient,
Arts & Métiers, Tome III. Partie I,
donner au tifar de derrière un peu plus de largeur
qu’à celui de devant, & le faire de dix-huit pouces.
L<* maçonnerie qui contient ce tifar, a deux pieds
d’épaiffeur de chaque côté.
La voûte du tifar de derrière, s’êvafe a meiure
qü’elle approche de l’intérieur de la carquaife ,
c’eft-à-dire , que fa hauteur étant à 1 entrée d environ
18 pouces, elle va prefque fe réunir à la voûte
de la carquaife, fig-2 , difpofition très-propre à
déployer la flamme dans le four.
Aux deux côtés du tifar de derrière, font deux
ouvertures d’environ un pied trois pouces , appelées
lunettes ou gueulettes. Leur deftination eft
de donner paffage à quelques outils pour redreffer
les glaces , lorfqu’en les pouffant.au fond de la
carquaife, elles fe dérangent dans leur direélion.
On place les gueulettes au milieu de lefpace
qui refte de la largeur de la carquaife, à chaque
côté du tifar. Ces ouvertures font conftruites dans
l’épaiffeur du mur de la carquaife, & on leur donne
un tel évafement, qu’elles ont trois pieds de large
en atteignant îe pavé. _ t
Leur voûte a quinze pouces d’élévation a 1 entree
& va , comme celle du tifar , fe réunir prefque à
celle de la carquaife.
La voûte du four de recuiffon eft élevee a chaque
extrémité de trois pieds au deffus du pavé, & dans
le milieu, fa hauteur eft de quatre pieds ; ce qui
lui donne, dans la coupe longitudinale de la carquaife
, la forme qu’on remarque, fig. a. Dans la
coupe latitudinale, fig. 4 & 6 , la voûte reprefente
une efpèce d’anfe de panier, & elle prend fa naiffance
prefqu’immédiatement fur le pavé.
Les murs de côté d’une carquaife, fig. /, doivent
être très-épais, non-feulement pour établir
la voûte fur un appui folide, mais encore pour empêcher
que ce four de. recuiffon ne foit rechauffe
jufqu’à un certain point ,r-Iorfqu’on chauffe celui
qui en eft le plus voifin. On peut voir dans la
planche I , comme les carquaifes font difpofées fur
chaque face de la halle. .
On élève le mur du devant des carquaifes à une
hauteur convenable, pour qu’il puiffe foutenir la
charpente de la halle, fig. /, pl. I l i mais comme
ces fours ont quelquefois beloin de réparation ,
on renferme chaque carquaife dans un arceau de
pierre de taille, fig. 2, pl. II. Ces arceaux foute-
nant l’exhauffement du mur & le poids de la charpente
, laiffent la liberté de démolir les carquaifes.
lorfquè le befoin l’exige, fans expofer la folidité de
l’atelier.
Au deffus des voûtes des carquaifes, on forme
en maflif un terreplain qui fournit un magafin très-
vafte , lequel , attendu la température qu’y fait
régner continuellement la chauffe fuccefîive de ces
fourneaux , peut être employé avec avantage à
conferver des pots fecs, ou toute autre matière
qu’on a intérêt de tenir à l’abri de l’humidité.
1 Nous avons cru inutile de prévenir que la conf*
Bb