
Comme les principes de, la machine font firtipl.es
elle réuffi- du premier coup.
En voici la defcription. A , eft un établi ; & B ,
C , font deux morceaux de bois, de 18 ou 24
pouces de long, fur lefquels font attachées deux
plaques de plomb, ce qui m’a fait nommer la machine,
les grands plombs. D , eft un taffeaù contre
lequel on fait appuyer les bois B & C , & les tenir
en refpeét & parallèlement l’un avec l’autre. E, eft
un crochet attaché par fon extrémité oppôfée au
taffeau D , par une broché à tête plate b : le bout
courbé du crochet eft fur une autre broche a. Sur
le morceau de bois C , il y a un étrier de fer F ,
attaché avec des vis à bois : dans l’établi il y a un
trou quarré pour y mettre .& attacher un autre
étrier de fer de figure différente G ; dans l’étrier
F , paffele levier H , qui y.eft fortement attaché.
Entre ce leviez H & 1 etrier G , il y a un coin de
bois I , qui a plufieurs trous pour y mettre une
goupille qui empêche le coin de fe retirer: Au bout
du levier H , eft un poids L ; M , eft une broche ;
N , eft un autre étrier en crochet, dans lequel paffe
le levier ou manche 0 , 0.
xl v y
Pour travailler avec cette machine, il faut décrocher
le plomb fupérieur C, pour mettre de l'huile
& de l’émeri fur le plomb inférieur B ; après cela
on remet le plomb fupérieur C ; & on le frotte
fcontre l’autre pour pouflèr l’émeri de tous côtés;
on remet enfuite le crochet E fur la broche a , le
coin I fous l’étrier G , & la goupille dans un des
trous du coin I , après quoi il faut mettre le poids
L , fur le levier H , plus ou moins vers le bout, fui-
yant la charge que l’on veut donner.
X L V I L
Les plombs étant également bien chargés d’huile
& d’émeri, il faut prendre un reffort par le bout
qui doit refter fort, & le mettre dans les tenailles,
comme {fig. 2 , p l.I I I ) .
Il faut enfuite que la main gauche appuie fur le
manche o , o , ce qui fait ouvrir les plombs comme
une mâchoire ; & avec l’autre main qui tient les
tenailles , on donne un coup de fouet à fon reffort
-pour le mettre dans la place où il pince le mieux/
après quoi on ôte la main gauche de deffus le
levier 0 , o , & on la joint à l’autre main fur le
manche de la tenaille P {fig. 2).
On tire alors des deux mains, & en ao coups
ou environ , le reffort fe trouve de la diminution
graduelle qui lui eft néceffaire,-
x l v 11 r.
Le leéleuf ayant fenti îa manière dont fe fait
cette opération de tirer les refforts aux grands
plombs, il eft bon que je lui rende compte, cornment
il devient plus mince par un bout que par
l’autre.
Il faut faire attention que les plombs font parallèles
& qu’ils fe touchent dans toute leur Ion- *
gueur ; ainfi quand le reffort eft dans les plombs ,
il eft preffé depuis un bout jufqu’à l’autre ; & par
cette raifon , lorfque l’ouvrier aura tiré le premier
pouce hors des plombs , il aura reçu un pouce de
frottement ; le fécond pouce étant aufli dehors, il en
aura reçu deux ; le troifième pouce en aura reçu
trois, le quatrième de même ; & ainft chaque di-
vifion fur la longueur du reffort, aura reçu autant
de frottemens qu’il aura été plus de tems à paffer
dans les plombs ; de forte que fi la lame a 24 pouces,
le dernier pouce qui eft forti, a reçu 24 fois plus de
pcliffage que le pouce qui eft du côté de la tenaille.
L ’on fent que cette manière de donner la forme
au reffort, portp une idée de correâion avec elle ;
& l’expérience fait voir que l’on peut fe procurer
cette perfeâion en deux minutes, quand l’ouvrier
a bien préparé fa lame : mais comme cette manière
de polir avec du gros émeri dans les grands plombs ,
amincit vite les lames, les ouvriers ordinaires en
profitent aux dépens de la correâion de leurs ouvrages
; ils changent fouvent les bouts dans les
tenailles , & ils ôtent par-là la bonne forme que
doit avoir un reffort, & qu’on lui donne en fort
peu de tems par le moyen que je viens d’indiquer.
X L I X.
Comme les bons ouvriers tirent leurs refforts
dans les limes avant que d’être trempés, il fe trouve
une longueur de deux ou trots pouces à chaque
^bout, plus épaiffe quelèrefte; ce qui, par l ’êvé-
| nément, devient fort avantageux au reflb.rt, parce
que l'on peut le faifir par le bout mince, le paffer
5 à 6 fois dans les grands plombs fans en trop
amincir le gros bout, & par ce moyen lui ôter
: les traits de lime & le blanchir ; on reffaifit enfuite
le reffort par le gros bout, & on le paffe dans- les
plombs, jufqu’à ce qu’il ait acquis la forme qu’il
doit avoir. "
L.
Le reflortéfant figuré comme il doit être, il
faut mettre une couliffe faite comme la (Jig. 3 9.
pi. I I I ) , dans l’étau.
On place .le reffort dans cette couliffe „ on- le
tient de la main gauche, & dans la droite oh a
une lime douce que l’on tire de long fur les bords
pour les arrondir ; on voit la pofition de la lime,
fur le reffort dans la couliffe {fig. 4 , pl. I I I ) ' &
on fe fert de cette occafion pour diminuer la largeur
du bout mince, en diminuant depuis deux
pouces ou deux pouces & demi de ion extrémité.
L L
Aprè s cette opération, il faut prendre le reffort
pour le monter fur le châffis ([fig. 20, pi. / ) ,
comme pour le tirer fur les bords entre les limes.
Il faut prendre enfuite le bois ( fig. 6, pl. I I I ) fur
lequel la pierre à huile d eft montée en dînent
d’orfévre, & le mettre fur la barre b, b , du châffis
{Jig. 20 , pl. I )►
On met le bord inférieur du reffort dans une
des codifies de cette pierre, & on le bande avec
les vis des tenailles , après quoi l’on prend l’autre
bois {fig. ƒ , pl. M ) qui a aufli une pierre à huile
c , où il y a de pareilles couliffes, dans l’une def-
quelles on met le bord fupérieur du reffort & de
Fhuile fur cë reffort. 5
, Ces pierres étant bien à plomb l’une fur 1 autre,
l ’on prend des deux mains les extrémités de ces
bois ; en les preffant légèrement & en les faifant
aller d’une tenaille à l’autre, on parvient en peu.
de tems à les bien polir.
Avant l’invention du châflis {fig. 20 pl-*) i operation
de faire les bords avec la pierre à l’huile, etoit
très-longue & pénible, parce que l’on fe fervoit
alors d’une couliffe de bois pour fou tenir le reffort
pendant qu’on le paffoit à la pierre à huile. Quand
le bord fupérieur étoit fini, il ralloit répéter la meme
opération fur le bord oppofé, pendant laquelle le
bord poli qui étcit dans la couliffe perdoit un peu
de fon poli, par la craffe qui fe trouvoit dans cette
couliffe.
L U .
Les bords des refforts étant polis, il faut tourner
les tenailles pour leur faire tenir le reffort à plat
au lieu de champ , le remettre fur le chaflis & le
bander , comme fig. 19 , pl. !• H faut prendre
enfuite le petit plomb { fig. 8 , pl. II I ) & le mettre
fur la barfe du châflis : On met, fur ce plomb,
de l’huile & de l’émeri fin; enfuite on place le
petit plomb, {fig. 7 , pl. I I I ) fur le reffort; on
les prend des deux mains par. leurs manches^, en
les ferrant bien fort pour les pouffer ainfi d une
tenaille à l’alitre alternativement; on a foin de
remettre de l’huile & de l’émeri de temps en temps
jufqu’à ce que le reffort foit poli. ^
Cette manière de polir a l ’avantage dufer également
le reffort, ce qui ne dérange point la forme
qu’on lui a donnée dans les grands plombs, & mer
nage au contraire le bout fort qu’il faut , pour le
crochet à l’angloife , ou pour la barrette a la fran-
çoife dont je parlerai dans fon temps.
l u i .
Les refforts étant polis, il faut les bleuir : pour
cet effet on les effuie avec de la cendre de bois
bien sèche, enfuite on fait du feu dans le fourneau
(fig. p , pl. I I ) fur lequel au lieu delà plaque de
fer a , a , on met de vieilles limes à taille rude :
lorfqu’elles font chaudes , on prend un reffort^ de
la main gauche, on en pofe une longueur d un
pouce fur une de ces limes, & lorfque cette partie
approche de la couleur que l’on veut lui donner ,
on en prend le bout avec une pince plate que 1 on
tient de la main droite ; on avance le reffort fur la
lime avec une efpèce de balancement, pour communiquer
la chaleur également & rendre la couleur
égale ; & à mefure que les parties échauffées
acquièrent de la couleur, on les tire hors de la
lime, par l’extréinité oppofée à celle par laquelle on
a commencé.
On doit préférer des limes à taille rude a une
plaque unie, parce qu’elle faifit moins Vite &
donne le tems à l’ouvrier de laifler avancer fa
couleur uniformément, & plufieurs limes lui four -
niffent la commodité de pouvoir choifir celle dont
la chaleur eft au point néceffaire pour bleuir également
& promptement.
Ce bleu fera plus ou moins éclatant à proportion
du luifant que l’acier aura pris en fe poliffant ;
la peinture ni la teinture n’ont point de couleurs
aufli brillantes que celle que le feu donne à l’acier
poli. • /*•/* •
Avant 1730 l’opération de bleuir febaifoit avec
des fers de plombier, que l’on afliijettiffoit dans
des étaux après les avoir chauffés, & fur lefquëls
on paffoit les refforts : mais outre la grande con-
fommation de charbon qu’occafionnoit un objet fi
mince, il fe perdoit auffi beaucoup de temps à
chauffer & déplacer ces fers ; cependant cette nié- '
thode étoit encore moins difpendieufe que celle
que l’on fuit en Angleterre , où l’on bleuit fur une
lame de cuivre mince, fous laquelle on allume de
l’efprit de grain, que l’on nomme vulgairement
efprit de vin.
* ; L I V .
Après avoir terminé le blèüiffage des refforts, il
faut les examiner avec foin ;& lorfqu’on a reconnu
la face la plus nette, on les caffe de là longueur
dont on veut qu’ils foient, par l’extrémité la plus
mince ; de manière que la petite courbure m f refte
à l’endroit caffè, foit tournée du côté de la face
la moins nette, & fixe ainfi le fens dans lequel
le reffort doit envelopper l’arbre fur lequel on le
montera, parce que la face la plus nette doit fe
trouver en dehors , pour que les craquis , gerçures
ou autres accidens ne s’ouvrent point, autrement
le reffort pourroit caffer en le ’montant.
On cuit enfuite fon extrémité caffée au feu d’une
chandelle, on en fait rougir environ deux ou trois
lignes, plus loin on le fait revenir couleur d’ar-
doife ; trois ou quatre lignes encore plus loin ,
couleur de cuivre rouge ; enfuite quatre, ou cinq
lignes plus avant, couleur de cuivre plus pâle ;
enfin autant de bleu blanc : on doit, en avançant
& en reculant le bout de la lame fur la chandelle 9
fondre imperceptiblement toutes ces nuances les
unes dans les autres, dans la longueur d’un pouce
ou deux, fuivant l’épaiffeur du reffort, en fe fou-
venant que plus le reffort eft fo r t, plus le recuit
du bout doit être long.