Confiruélion mécanique des globes,
Dans la conftru&ion mécanique des globes, rien
n’eft plus effentiel que la préçifion dans la rondeur
& la monture des boules. C ’eft à l’expérience ,
dit M. Robert, jointe à la théorie , que j’ai de ces
inftrumens , que je fuis redevable du détail dans
lequel je vais entrer.
Les outils néceffaires qui entrent dans la main-
d’oeuvre d’un globe, ne font pas en grand nombre.
Il faut avoir premièrement un demi-fufeau ABC
de cuivre ou de fer blanc, proportionné aux boules
que i’on veut conftruire. A , eft la pointe du fu-
feau. B C , fon pied de diamètre; il faut y laifler
environ un pouce & demi de plus que la moitié
de fon grand axe, fig. 1 , pi. IL
2.0. U ne ou plufieurs demi-boules A B C , fig. 2 ,
de bois bien dur, tel que des fouches de racines'
d’orme tortillard , qui aient été long-tems expofées
au foleil, pour ne pas être fujettes à fe fendre.
Ces" demi-boules doivent être portées fur un feul
pied quand elles font petites , 8c fur trois pieds
lorfqu’elles doivent fervir à faire de grofles boules.
A B , eft un trait dans le plan de l’équateur de la
boule , & à fon pôle C eft une pointe.
3°. Un demi-cercle de fer on de cuivre, fig. 3 ,
dont la circonférence intérieure foit en bifeau &
jufte, du diamètre de la boule à conftruire. Il doit
être d’une largeur & d’une épaifleur allez confi-
dérable pour pouvoir réfifter. Vers le milieu de ce
demi-cercle, l’on réferve une_partie plus large
percée de deux trous, pour être montés à vis fur
un morceau de bois épais 8c. oblong , au milieu
duquel fe trouve aufli un trou par lequel l’on fait
palfer une forte v is , pour fixer le tout fur un établi
avec l’écrou que l’on ferre en deflous.
Au demi-cercle font attachées par derrière , aux
points H K , deux équerres viffées aufli dans le
même morceau de bois. EF , G D , font deux petites
broches cylindriques à oreilles , qui font
partie du diamètre du demi - cercle ; elles fe pouf-
lent & fe tirent dans un trou cylindrique; 8c on .
les fixe quand on veut, par le moyen, dès vis F , G.
C ’eft de fexaéfitude de cet outil, que dépend la
précifion des boules que l’on veut faire.
La fig. 4 repréfente des cifeaux montés fur un
morceau de bois taillé en coin, & que l’on vifle
aufli fur l’établi quand on veut s’en fervir. Ils font
deftinés pour couper du carton de telle épaifleur
qu’il foit.
Pour commencer une boule , l’on prend une
feuille de carton de pâte, le plus mince que l’on
trouve : l’on fixe fur cette feuille le fufeau de
cuivre A B C par fon fommet A ; l’on trace avec
un ftilet, douze demi-fufeaux qui fe tiennent tous
par le fommet. Il faut .enfuite enduire de favon
humide la demi-boule de bois ; de forte que. la
couche de favon foit affez épaifle, pour ne pas
être diflbute par l ’humidité du carton que l’on
doit y appliquer, 8c de peur que la calotte que
l’on veut mouler ne s’y attache.
L’on applique cette première couche de fufeaux
bien imbibée d’eau fur la demi-boule, enforte que
la pointe C du moule ,, fig. 2 , paflfe par le trou
commun au fommet des demi-fufeaux.
Ce carton humide, obéiflant au coup qu’on lui
donne avec la main, s’applique exactement. On
retient le tout par une coude que l’on tourne au def-
fous du trait AB qui marque l’équateur de la boule,
& l’on y fait un noeud coulant pour pouvoir la
délier quand on veut.
Il faut tailler enfuite vingt-quatre autres demi-
fufeaux détachés que l’on imbibe aufli d’eau, &
que l’on enduit de bonne colle de farine.
On en applique une nouvelle couche, enforte
que chaque demi-fufeau recouvre d’un tiers les
joints de ceux de la première couche, comme on
le voit par le profil de la fig. ƒ.
Ayant fait de même pour la troifième couche,
l’on enduit le tout de colle; 8c quand ces demi-,
fufeaux paroiflent bien unis, on laiffe lécher le
tout naturellement.
Il eft avantageux d’avoir au moins deux moules
de même calibre pour expédier l’ouvrage ; 8c l’on
doit faire en été une provifion de ces calottes.
Lorfque la calotte eft bien sèche , l’on y trace,
avec un trufquin ouvert de la diftance AD 9 fig. 2 ,
un trait qui termine la moitié jufte de la boule. -
Il faut dénouer la corde qui maintient la première
couche de fufeau , & avec une lame mince
détacher les bords du carton de deflus le moule.
Si l’on a de la peine à enlever la calotte, il faut
frapper deflus par-tout avec un maillet de buis ; &
il eft rare, après cela, que l’on ne l’enlève pas :
autrement, ce feroit un défaut de favonnage, auquel
il faut toujours bien prendre garde.
Ayant deux calottes sèches & enlevées du moule ,
on les rognera au trait marqué par le trufquin avec
les cifeaux deftinés à cette opération, fig. 4.
Ces calottes ainfi rognées, l’on -en râpe la coupe
pour agrandir la furface de la tranche , & pour
donner plus de prife à la colle forte qui. doit les
joindre. Un axe de bois appelé ordinairement os de
mort, à caufe de fa forme déliée vers fon milieu,
& qui a pour longueur le diamètre intérieur de la
boule qu’on veut faire, fert à raflembler -les deux
calottes.
Ses extrémités doivent être un peu fphériques,
& l’on y réferve à chaque une douille qui doit
pafler à travers le pôle de chaque calotte, que l’on
perce avec un emporte - pièce du diamètre de la
douille.
Lorfque les boules font d’une grofleur confidé-
rable, au lieu d’un fimple axe, l’on fe fert d’un autre
fig. 6 , muni de quatre branches perpendiculaires
entre elles, qui font deftinées à foutenir la foudure
des deux calottes.
L’on commence par fixer cet axe, premièrement
dans une des calottes, avec de la colle forte que
l’on met à une de fes extrémités , de même qu’au
pôle de la calotte où il doit être arrêté. Enfuite l’on
attache fur la moitié des extrémités C , D , E , F , !
des quatre autres branches , le bord de la calotte
avec de la colle forte 8c de petites pointes.
Lorfque cet axe eft ainfi fixé dans la première
calotte , l’on fait de même pour la fécondé calotte.
Il faut à cette opération la plus grande promptitude
poflible » pour ne pas donner le temps à la colle
forte de fe prendre avant que l’aflemblage foit
fait.
Lorfque cet âÏÏemblage eft fait, s’il eft refté quelques
endroits de la jointure fans colle, l’on y en
introduit avec une petite fpatule.
La colle étant bien durcie , l’on râpe la foudure
jufqu’à ce qtf elle foit bien unie , 8c l’on y applique
enfuite deux ou trois bandes de gros papier, imbibées
de colle de farine.
Les boulps , ainfi préparées, font d’une grande
folidité ; mais elles feroient encore trop groflières ,
pour pouvoir y appliquer les épreuves imprimées
du globe. C’eft pourquoi il faut procéder à les
gendre encore plus parfaites.
Pour cet effet, l’on fe fervira du demi-cercle de
fer dont on a parlé plus haut ; l’on coupera les deux
bouts excédens des douilles de l’axe qui -traverfé la
boule , jufqu’à ce qu’ils, foient pris juftes dans le
diamètre du demi-cercle.
L’on percera chaque bout d’un trou très-fin pour
recevoir les pètites broches cylindriques du demi-
cercle , qui doivent tenir la boule comme dans un
tour.
S’il arrive que quelque petite éminence du carton
frotte le demi-cercle , il faut les râper, afin que la
• boule n’y touche en aucun endroit. L’on fe fert
enfuite d’une compofition de blanc dont nous parlerons
plus bas, pour enduire la boule jufqu’à ce
qu’elle touche de toutes parts le demi-cercle. L’on
doit obferver de n’en pas trop mettre à chaque
couche, de peur qu’il ne vienne à fe fendre.
La boule, ainfi enduite, tourne dans le demi-
cercle , qui en emporte le trop. On la retire enfuite
pour la faire fécher naturellement. Il faut répéter la
même opération jufqu’à ce qu’on ne voie plus de
jour entre le demi-cercle & la boule.
Lorfqu’elle eft prefque finie , l’on doit éclaircir
le blanc , enforte qu’il ne foit que comme une eau
blanche un peu épaifle : il fert à la polir ; & le maftic
étant bien fec , eft d’une confiftance très-dure.
Voici la manière de préparer ce blanc ou ce maftic.
Il faut prendre du blanc en gros pains, dont fe fervent
les doreurs, l’écrafer avec un rouleau de bois ,
& le pafler au tamis pour l’avoir le plus fin qu’il
eft poflible ; prendre de la colle de Flandre : la plus
blanche eft la meilleure, parce qu’elle ne colore
point la compofition ; une livre pefant de cette
colle eft la dote pour huit pains de blanc.
L’on met tremper dans l’eau cette colle la veille ;
& lorfqu’elle eft bien amollie, on la fait fondre fur
un feu doux ; puis on la pafle par un tamis, pour
n’y point laifler de peaux, qui feroientun mauvais
effet. Lorfqu’elle eft àinfi paflee , l’on met tout le
blanc écr'afé dans une grande terrine propre à aller
fur le feu ; 8c l’on y verfe petit à petit cette colle
fondue, en broyant bien le tout avec les mains »
comme fi l’on pétriffoit une pâte.
Le blanc ou le maftic étant ainfi achevé, peut
être mis tout de fuite fur les boules ;- 8c lorfqu’il eft
refroidi, il faut le faire refondre fur un petit feu ,
& le remuer avec un bâton, de peur qu’il ne vienne
à brûler.
La boule étant entièrement achevée, il eft bon
de s’aflurer fi elle eft abfolument fohérique ; elle en
fervira elle-même de preuve. Il la faut remettre dans
le denfi-cercle ; & pofant un ftilet de cuivre à la
divifion de l’équateur marqué fur cet inftrument,
•l’on tracerà ce cercle fur la boule, en la tournant. Si
l’on divife enfuite ce cercle en quatre parties égales,
8c que les points oppofés foient préfentés aux chevilles
cylindriques du demi-cercle, en tournant*
cette boule, l’on tracera avec le ftilet un cercle qui
fera un des méridiens. Si enfin l’on prend fur ce
dernier cercle deux points diamétralement oppofés
& à une diftance quelconque des pôles de la boule ,
8c qu’on les préfente de même aux chevilles du demi-
cercle , l’on tracera encore un troifième cercle , qui
doit couper les deux autres à leur commune feCiion,
fi la boule eft parfaitement ronde. Telle eftla pré-
cifion à laquelle je fuis parvenu , lorfque j’ai dreflé
un ouvrier pour ces inftrumens.
Il s’agit préfentement de pofer les épreuves imprimées
du globe fur cette boule. Pour y parvenir
avec facilité, il faut divifer cette boule en douze
fufeaux, 8c tracer les parallèles à l’équateur, de
même que l’écliptique, les tropique 8c les cercles
polaires.
Le demi-cercle ou inftrument que l’on a divife
exprès de 10 en 10 degrés , 8c où l’on a marqué
aufli les points des tropiques 8c des cercles polaires,
fervira à tracer ces cercles, en faifant tourner la
boule dedans, 8c appliquant fur chaque divifion le
ftilet.
Quant aux douze fufeaux, l ’on divifera l’équateur
en douze parties égales, 8c le demi - cercle rafant
chacun de ces points, fervira encore de règle pour
tracer ces fufeaux.
Il ne refte plus qu’à appliquer chaque fufeau du
globe imprimé fur chacun des douze de la boule.
Il faut découper féparement ces fufeaux imprimés,
les humeCter d’eau, 8c les imbiberde colle d’amidon ;.
on les appliquera les uns après les autres fur la
boule, en faifant convenir les parallèles de l’épreuve
avec ceux de la boule ; 8c l’on fera prêter l’épreuve
autant qu’il le faudra , en la frottant avec un bru-
nifloir, jufqu’à ce que le papier remplifle exactement
fa place.
L’on encollera enfuite la boule ainfi avec la même
colle d’amidon un peu plus claire, en faifant tourner
la boule dans les mains.
L’on aura foin que l’encollage foit bien fait par