
Rien dans le monde n’eft fupérieur à l’édition
grecque de S. Jean-Chryfoftôme, en 8 vol in-fol.
de l’imprimerie de Norton , achevée en 1613 dans
le collège royal d’Eaton (Ecorne) , préside Windfor,
par les foins du dofte Henri Savile.
Mais la beauté des cara&ères qu’emploient les
imprimeurs Anglois, le choix de leur papier, la
grandeur des marges , le petit nombre d’exemplaires
qu’ils tirent, & l’exa&itude de la correction
qu’ils mettent dans les livres importans , ne
font pas les feuls avantages qui peuvent attirer à
l’imprimerie de la Grande-Bretagne une attention
toute particulière.
Les magnifiques éditions des auteurs anciens ,
par les F oulis de Glafcow, fur - tout par les
Baskerville de Birmingham , recherchées tant
pour la blancheur du papier , que pour la beauté
des caractères, l’exaftitude & l’éclat de l’impreffion ;
ces chefs-d’oeuvre de typographie ne fuffiroient-ils
pas feuls pour afligner un rang diftingué à ces
imprimeurs anglois ?
Imprimeurs françois.
L’art de l’imprimerie paffa de l’Allemagne à Paris,
par les foins de la fociété de Sorbonne, en 147a.
Ulric Gering , de la ville de Confiance, &
fes deux aflociés Martin Crants & Michel
Friburger, de la ville de Colmar, fe rendirent
aux follicitations de Guillaume Fichet & de Jean
de la Pierredo&eurs & fa vans qui les reçurent
dans'la maifon de Sorbonne.
Les premiers livres qui fortirent des prefles de
ces imprimeurs , en 1470 , 1471 & 1472 , &
que l’on garde dans la bibliothèque de Sorbonne,.
font :
1. » GafpariniPergamenfisEpifiolar. liber, in-4.
2. » Lucii Annæi Flori de totâ Hifioriâ Titi
yy Livii Epitome,. in quatuor libros divifa, in-40.
3.. » Caii Crifpi Salluftii de Lucii Catilinæ
7> conjuratione liber.— Ejufdem Salluftii liber de
a> bello Jugurthæ contra populum Romanum ,
a in-40. fur vèliji-
4. » Guillelmi Ficheti Alnetani Rhetorîcorum
» libri très , in-40. fur vélin.
5. » Gafparini Pergamenfis ortographiæ pars pri-
v ma & fecunda. Item Guarini Veronenfis libellus
» de Diphtongis , in-/f.
6. » Epiftolæ cynicæ, hoc eft Phalaridis Epiftolæ
» à Fran. Aretino è græco latinè redditæ. Marci.
» Bruti Epiftolæ , cum Mithridatis ad eas ref-
» cripto à. Raimitio in latinum tranftatæ. Cratis
» cynici Epiftolæ latinæ è græcis faâæ ab Atha-
» nafio Conftantinopolitano Archienfi abbate. in-40..
7 . r> Roderici Zamorencis Epifcopi fpeculum hu-
» rnanæ vitæ in duos libros divifum. in-folio.
8. n Beftarionis Cardinalis epiftola ad Guiliel-
» mum Fichetum S. Theologlæ profeftorem in col-
v legio- Sorbonæ. Ejufdem altéra epift. ad Italiæ-
î? p incipes. Ejufdem tertia epift. ad Beftarionem
n Monachum & A bbatein, Ejufdem. ©ratio ad Ita-
» los de periculis imininentibus. Ejufdem oratio
» de difcordiis fedandis & bello in Turcam decer-
» nendo. Ejufdem perfuafio ad Italiæ principes ex
» au&oritate Demofthenis in oratione proferenda
» ope Olynthiis adverfus Philippum regem Mace-
» donum ». C’efi 1'Olynthiaca I de Démofihe.’ie que
, Bejfarion traduit en latin, avec de petites notes qu il
fait pour exciter les princes chrétiens a prendre les
armes contre les Turcs. Un vol. in-40.
9. » Guillelmi Ficheti Do,doris Theolog. Parif.
» Epiftolæ, I ad Beftarionem Cardinalem, II ad Six-
» tum IV Pontificem Max. ÏII. ad Renatum regem
» Siciliæ, IV ad Joannem Rolinum Epifc. Edüen-
» fem & Cardinalem fub titulô S. Stephani in Ce-
» lio monte,V ad GuillelmumQuadrigarium Pari-
» fienf. Epifcopum , avec trois autres lettres qui ne
n font que manufcrïtes.
» La première. Illuftrifl'. Principi Carolo Aquitano
» Duci, Caroli V I I Francorum Regis filio. La fc-
» conde. Sereniff. PrincipiFrancifco Duci Britanniæ.
» La traifTeme. Serenifl*. ac magnificentiff. Principi-
» Carolo Cenomaniæ Comiti. Le fujet de toutes ces
» lettres à dé f i grands feigneurs , efi le préfent qu'il
» leur fait de fes trais livres de rhétorique. Un voL
in-40.
10. » Laurentii Vallæ elegantiarum linguæ la*
» tinæ libri fex. Ejufdem tradatus de reciprocatione
» fui & fuus. Ejufdem liber in errores Antonii Ru-
» denfis. Cum præfatione Pétri Pauli. Senilis Regis
» Francorum fecretarii ad Joannem de Lapide , &
» gratulato-ria epiftola Joarmis de Lapide ad P.Pau-
» lum Senilem de Laurentio Valla ad ipfo recog-
» nito. Un vol. in-folio-
11. Jacobi Magni, ordinis Eremitarum S. Auguf-
tini Sophologium. Un vol. in-f olio. Ce livre eft dans
la bibliothèque du collège de Navarre-^
Tous ces livres font imprimés de mêmes lettres
fondues dans les memes matrices.- C ’eft un caractère
rond de gros-romain.
Comme l’imprefiîon ne faifoit que de naître à
Paris, & que ces premiers livres font comme des
eflais de l’a r t i l fe trouve en quelques - uns des
lettres, à demi formées, & des mots à moitié imprimés
qu’on a achevés avec la main.
Il y a même quelques épîtr.es imprimées, dont
l’infcriptionn’eR que manufcrite. Il n’y a point de
lettres capitales. Les premières lettres des livres &.
des chapitres font omifes \ on y a laiffé de là place
pour y peindre une première lettre en or ou en
azur. Il’ y a plufieurs mots abrégés : toutes les anciennes
impreftions ont ce défaut.
Le papier .n’eft. pas bien blanc mais il eft fort
& bien collé. L’encre eft d’un beau noir.
Ces premières éditions offrent quelques lignes
en lettres rouges, & fur vélin. Il y a de ces ouvrages
qui .commencent par le folio verfo comme le
Florus.
Ils font tous dans titre , fans chiffre, & fans
fignature. Ces anciens imprimeurs ne commencèrent
à mettre des fignatures, c’eft-à-dire , des
lettres alphabétiques au bas des feuillets , qu en
l’année 1476, au Platea de ufuris.
Antoine Zarot, imprimeur à Milan, avoit commencé
à bien placer les fignatures au deffous de
la dernière ligne ; mais il voulut enfuite changer
cette bonne manière , en les mettant mal-à-propos
au bout de cette même ligne, pour les faire fervir
de dernier mot, comme il paroît par fon édition
du Jean Simoneta de geflis Francifci Sfortiæ Ducis
Mediol. de l’année i486.1
On mit des titres & des chiffres, en 14 7 7,aux
Sermons de Léonard de Udine. Ces chiffres furent
alors placés au haut des pages, & non point au
bas , comme s’avifa de le faire Thomas Anshelme ,
libraire d’Haguenau , dans l’édition qu’il donna in-
folio , l’année 1 5 1 4 , du Diftionnaire grec d’H e-
fychius.
Il n’y a point de réclames dans ces premières
éditions. Les imprimeurs de Paris ne les ont employées
que fort tard , vers l’année 15 20.
L’Italie avoit commencé avant ce temps de les
mettre en ufage, puifqu’on en voit dans le Corneille
1 en ces termes, Vale : Parifiis apud Sorbonaih if3° >
7nenfe Februario ; & met ces autres mots à la fin du
vo\\Avn.Q'.Imprirni curabat Gerardus Morrhius campenfis
apud côllegium Sorbonæ, anno 1530.
Tacite , imprimé in - fo lio , à Venife , par
Jean de Spire , vers l’an 1468 , & dans le L'ilium
Medicina de Bernard de Gordonio, imprimé in-
folio, à Ferrare, l’année i486.
Le Regifirum Chartarum trouvé pour la commodité
des relieurs , n’étoit pas encore en ufage dans
ces anciens livres. Il fut inventé en Italie j on le
voit dans la Somme d’Alexandre de Aies, imprimée
à Venife en 1475 > Par ^ean Cologne,
v Gering l’a employé enfuite en France dans
quelques éditions , comme dans les Sermons de
S. Auguftin , dans le Beda fur S. Paul de 1499 >
& dans les volumes de droit.
Voici comment à cet égard on s 'y prenoit autrefois.
On raflémbloit à la fin du volume les lettres
alphabétiques qui fervent de fignature , & les premiers
mots des quatre premiers feuillets compris
fous chaque lettre.
Cependant, comme cela rempliffoit une page
d’impreflion , on l’abrégea, comme fit Gering, qui
le mit en deux ou trois lignes , marquant feulement
toutes les fignatures ou lettres alphabétiques,
& combien chacune étoit multipliée de fois, en
cette façon : Omnes funt terniones ou quaterniones.
Le Regifirum eft préfentement lupprimé dans les
imprimeries ; & on a affez pourvu à la facilite de
la reliure par Paffemblage de trois chofes , de la
fignature au bas des pages , des chiffres en haut
de chaque feuillet, & des réclames, auxquelles
les relieurs doivent avoir recours, & particulièrement
ceux qui collationnent les livres, s’ils veulent
ne point les avoir défeâueux.
Ce fut dans le même endroit du collège de Sorbonne
, où nos trois premiers imprimeurs avoient
travaillé , que Gérard Morrhy , Allemand , établit
fon imprimerie, & dreffa des prefles foixante ans
après. Il y imprima parfaitement bien un Lexicon
grec-latin , in-folio. Il en date la préface au Lecteur,
U y imprima encore , l’année fuivante , le commentaire
d'Agathius Guidacerius fur le Cantique des
. Cantiques, in-40 » & un autre volume encore in-40 î
c'eft le commentaire de Galien fur le traite d Hippocrate
de falubri diæta \ on lit fur ces deux volumes.
Parifiis, in pfficind Gerardi Morrhïi campenfis, apud
côllegium Sorbonæ, 1331- On garde toutes ces éditions
en Sorbonne. , ,
Les plus anciens imprimeurs qui fe font établis
à Paris après Ulric Géring & fes aflociés , font
Pierre Cæfaris & Jean Stol. Ils étoient tous deux
Allemands, étudians dans l’univerfité, & Cæfaris y
avoit pris le degré de maître—es—arts. Ils furent
inftruits par Géring dans l’art de l’imprimerie.
Le Manipulas curatorum in-folio , de Guy de
Montrocher, eft un de leurs premiers ouvrages ;
il fut imprimé l ’année 1473* ^ paroît que Géring
imprima le même livre dans la meme annee.
L'Amant rendu cordelier en l'obferyance d'amour fi
roman en rimes , cité par du Verdier , dans fa Bibliothèque
françoife , fut aufli imprimé à Paris en
1473.
Cæfaris & Stol imprimèrent encore le Spéculum
vîtes humants de Zamora, in-folio. Ce livre etoit
autrefois dans la bibliothèque des Celeftins, ainfi
qu’un Recueil in-40 çle plufieurs petits op«fcule?.
comme TraElatus de origine nobélium. Epijlola Pog-
gii Florent, de infelicitate Principum. Æneas Syl-
vius de miferiis curialium. Seneia de remediis fonuitorum.
. - - o n j
Le Cafus brèves Joarmis Andrea, m-4 , elt dans
la bibliothèque de Sorbonne.
Kt Pou voit dans la bibliothèque des Bénédictins
de S. Germain-des-Prés , les Epîtres de Sénèque
in-40 > imprimées en 1475.
Le Vàlère Maxime in-folio , qui eft dans la bibliothèque
du collège de Navarre , porte la même
date de 1475. . . .
Tous ces livres font de la même imprimerie, &
de même caraSère. Ceux qui n’ont point de date,
peuvent être de l’année 1474.
- C’eft aufli de ces prefles qu’eft fortie la belle
édition du Dialogue dlOcham, de lannee 1476»
que l’on voit dans la bibliothèque de Sorbonne en
2 vol. in-folio.
Tous ces livres ne font point gothiques ; ils font
en lettres romaines , mais beaucoup moins belles
que celles des premières éditions d’Ulric Géring.
Cependant, les deux doéleurs , amis de ces premiers
imprimeurs , quittèrent Paris -, après avoir
procuré à cette capitale l’établiflemenî de l’impri-
merie.
Fichet fe rendit à Rome , appelé par Sixte IV ;
& La Pierre mèditoit fon retour en Allemagne,
lorfqu’Ulric Géring & fes aflociés retirèrent leurs
I prefles du collège de Sorbonne , & les allèrent
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