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dans le tuyau, dont la maçonnerie n’eft pas encore
sèche ; cet air fe trouvant trop humide & condenfé,
la fumée ne peut le divifer & le pénétrer facilement,
jufqu’à ce que la chaleur du feu en ait dif-
fipé toute l'humidité.
• On pourrôit dire la même chofe d’une cheminée
où l’on commence à allumer du feu; comme
il • eft foible au commencement, il n’a pas encore
la force de vaincre l’air épais" & condenfé qui occupe
la capacité du tuyau de la cheminée : il n’eft
donc pas furprenant pour lors que la cheminée
fume.
On éprouve aufli .cet inconvénient lorfqu’on
laide prefque éteindre le feu , lequel fe trouvant
au même degré de foiblefle qu’au commencement,
ne fournit plus allez de chaleur pour élever la fumée
qui retombe alors néceflairement.
Voilà les principales catifes qui occafionnent le
refoulement de la fumée dans la chambré. Chacun
en découvrira d’autres peut-être, par rapport
au« différentes fituations des cheminées, en fai-
fant des obfervations & des expériences particulières
, & en quelque forte locales.
Des moyens de corriger les cheminées fumeufes. ’
Après avoir indiqué les principales caufes qui
rendent les cheminées fumeufes, il faut donner
des moyens de les corriger.
On convient que fouvent il ne faut que très-
peu de chofe pour y réuffir; quelquefois une porte
fermée fuffit; d’autres fois un foupirail fait à propos
au haut du tuyau de la cheminée, eft absolument
néceflaire pour l’iflùe de la fumée ; dans
d’autres, une petite ouverture pratiquée au coin
de la cheminée, fera capable de reftituer à la chambre
l’air néceflaire pour élever la fumée.
Mais comme les moyens les plus fimples ne
font pas fuffifans pour garantir toutes fortes de
cheminées, fur-tout celles qui font mal Situées,
pour lors il faut avoir recours à ceux que nous allons
indiquer; ils ont déjà été mis en ufage avec
Succès, par ceux qui en font les auteurs.
Des dimenjions des cheminées, nécejj,aires pour les
empêcher de fumer.
Il eft furprenant qu’on ait aflujetti à la mode
& au changement, les anciennes cheminées, fans
trop examiner fi l’utilité s’y trouveroit aufli bien
que la nouveauté; mais tant s’en faut qu’elle s’y
trouve ; on a remarqué au contraire, que parmi
le petit nombre de cheminées anciennes qui ont
échappé au caprice, il n’y en a prefque point qui
fument, au lieu qu’on peut dire hardiment que la
plupart des nouvelles cheminées font fumeufes.
On a donc préféré, ou plutôt acheté l’agrément
& le coup-d’oeil des nouvelles cheminées,
aux dépens de la commodité, & a u préjudice des
yeux & des meubles.
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Ce changement confifte principalement dans la
fuppreflion. de la hotte qui avoit été pratiquée &
recommandée comme très-néceflfaire par Alberti,
pour empêcher de fumer, enfuite par Delorme.
Savot pafle pour le premier qui l’a diminuée
confidérablemertt en,la redreflant,» afin,' dit-il,
» qu’étant plus droite-, elle renvoie plus droit la
» fumée qui pourroit battre contre dans le -tuyau.
M. Gauger qui avoit adopté ce fentiment , a
aj'outé quelques autres raifons qui ne font pas plus
folides que celles de Savot, & dont il eft facile,
avec un peu de raifonnement, de découvrir toute
la foiblefle.
C ar, i°. iUfemble que la preflion ou l’a&ion de
l’air de la chambre qui agit fur la fumée, doit être
plus forte à proportion du volume d’air-qui entre
par le bas dans la cheminée ; or, par le moyen de
la hotte, il entre dans la cheminée un plus grand
volume à’air : il s’enfuit donc qu’il a plus de force
pour preffer la fumée dans le tuyau de la cheminée,
& la pouffer en haut. Ainfi bien loin que la
hotte diminue la force de l’air , comme le prétend
M. Gauger, elle ne fait que l’accroître en augmentant
fon volume.
20. Il eft vrai que l’efpace de la hotte venant à
s’échauffer, l’air raréfié qui y refte né prefle pins
la fumée avec autant de force, qu’avant la raré-
faâion : aufli n’eft-ce pas à cet air ainfi raréfié,
qu’on attribue toute la force néceflaire pour chaf-
fer la fumée; mais à l’air qui entre continuellement
dans la chambre, & qui chaffe non-feulement
la fumée, mais aufli une bonne partie de
cet air raréfié dont il prend la place ; & il eft
chaffé à fon tour par le nouvel air qui vient le
remplacer à mefure que la fumée fort par le
tuyau, & ainfi fucceflivement.
On voit par là que la fumée qui va battre contre
le talus de la hotte ne doit pas s’y réfléchir,
ni rentrer dans la chambre, mais couler avec plus
de rapidité le long de ce talus, dans le tuyau de
la cheminée, à peu prés comme l’eau d’une rivière
qui pafferoit fous un pont entre des piles
difpofées en talus, comme la hotte dont il s’agit
ic i, qui par conféquent femble beaucoup plus fa-
vorifer la fortie de la fumée par la cheminée, que
fa rentrée dans la chambre , fur-tout fi on fuppofo';
comme on doit le faire, qu’il entre toujours de
' nouvel air dans la chambre, à mefure qu’il fort
de la fumée accompagnée d’air raréfié par le tuyau
de la cheminée.
C ’eft à quoi il femble que MM. Savot & Gauger
n’aient pas/ fait affez d’attention, quand ils fuppo-
fent que la fumée allant frapper la furface de la
hotte, s’étend de tous côtés : ce qui n’eft vrai que
de la fumée comme de tout autre liquide ou fluide
abandonné à fon propre mouvement, mais non
d’un fluide preflfé par une force fùpérieure à celle
de l’aâion de ce même fluide, comme il paroît
par l’exemple qu’on vient de rapporter d’une eau
qui coule entre les piles d’un pont*
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. C’eft fur des raifons aufli faibles, qu’on a dans
la fuite totalement fupprimé la hotte, fans faire
attention combien futilité de e.etté hotte eft préférable
aux ornemens des cheminées modernes,
& favorable à l’expulfion de la fumée, ifs. En ce
qu’elle fert, comme de réfervoir pour contenir la
fumée, lorfqu’elle eft en trop grande quantité pour
monter & fortir tout à la fois. ■ ,
.2®. Elle eft , par' fa.configuration, plus propre
à‘ recevoir les parties de fuméoequi s’écartent le
plus de la flamme.
| Comme un canal dont l’orifice, en forme
d’entonnoir, eft plus propre à recevoir toutes fortes
de fluides ; dé même la. hotte, ayant une
figure affez femblable , eft très-propre pour intro-^
.flaire plus facilement la *umée dans le tiiyau CS
la ' cheminée.’
Quant à la réfraâion de l’air qui ramène , félon
M. Gauger., la fumée dans ' la chambre, :c’eft
une obfervation d’autant moins fondée§ que la ré-
fraâion feroit plus grande s’il n’y avoit point de
hotte : car , plus l ’embouchure qui reçoit l’air eft
év afée, moins les réfra&ions font violentes. Enfin
il: feroit difficile à M. Gauger de démontrer
qu’un fluide ne pafle point par le petit tuyau d’un
entonnoir, parce qu’il trouve au commencement
un orifice trop évafé.
4°. Le volume d’air qui répond à la hotte, eft
plus grand que celui qui répond à la partie fupév
rieure du tuyau de la cheminée ; il a par confé-
qiient plus de force par foi, pour chaffer la fumée,
que la colonne d’air qui incombe en dehors fur
la cheminée, n’en a pour la refouler ôc la faire
rentrer dans la chambre.
Voilà le fentiment qui paroît le plus vraifem-
blable ; au moins il a deux fameux archite&es pour
garans, Alberti & Delorme. Par conféquent fi on
a retranché la hotte , c’eft pour des raifons étrangères
à la fumée.
Ce premier changement en a entraîné, neceflai-
remeht un fécond; car la hotte étant toute droite ,
on s’eft bientôt apperçu quelle ne làiffoit plus à
la fumée la liberté ni l’efpace affez large pour s’échapper,
de forte qu’il a fallu néceflairement baif-
fer confidérablement le manteau de la cheminée ,
pour oppofer une barrière à la fumée.
On a ajouté pour prétexte que c’éroit pour ne
pas expofer les yeux à l’ardeur du feu qui leur eft
très^contraire.
Serlio, archite&e qui étoit dans le goût de conduire
le manteau de fes cheminées très-bas, en
avoit donné la même raifon long - temps avant
Savot.
Mais il fe trouve qu’on n’a guères mieux réuni
à l’un qu’à l’autre : car l’expérience nous apprend
que ces fortes de cheminées, nonfleulement fument
très-fouvent, mais éncore que les y eu x , au
lieu d’être à l’abri du feu , y font plus expofés
que jamais.
En e f fe t , le feu étant plus renfermé par la lar-
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gêùr des pieds-droits d’une cheminée extrêmement
baffe, les. corpufcules ignées fe diflipent
moins & ne peuvent fe répandre fort loin ; par
conféquent ils agiflent avec plus de force fur les
corps environnans. D’ailleurs, pour profiter de l’avantage
qu’on s’étoit promis en baiflant le manteau
des.cheminées , il faudrait interdire les fiéges
&Ys’y chauffer debout, c’eft ce qu’oh ne fait pas:
ainfi les yeux font plus expofés' que jamais;à ref-
fentir toute l’aéfion du feu.
Enfin, puifqu’il fautfe conformer au temps, &
que les cheminées modernes font par-tout en ufage
, nous ferons enforte que le publie ne foit pas
tout-à-fait la dupe de la mode, en lui faifant part
de, ce que l’induftrie humaine peut fuggérer pour
obvier à l’incommodité j de la fumée , & des
moyens qui ont éfté mis. en ufage pour corriger
les cheminées fumeufes.
Il ne s’àgit pas ici de la longueur ni de la'Iar-
geur de l’Ouverture , ni même de la grandeur des
cheminées, qui doivent toujours être proportionnées
aux chambres dans lefquelles elles font conf-
truites ; de même nous renvoyons aux nouveaux
traités d’architedhire, ceux qui voudront apprendre
le goût, moderne, & les ornemens des mainte
aux des cheminées, comme, aufli la place qui
leur eft la plus convenable dans une chambre. Il
s’agit ici feulement' de ce qui peut contribuer à faire
exhaler librement la fumée.
Pour y réuffir , il faut, fuivant Alberti , que le
foyer foit au milieu & non au coin de la cheminée,
ni trop près d’une porte ou d’une fenêtre, à caufe
des tourbillons de vents qui attireroient infailliblement
la fumée.
De plus; il eft effentiel de donner au foyer une
profondeur convenable, qui doit être au moins de
dix-huit pouces, & au plus de 2,4. Car en lui en
donnant moins, la cheminée feroit fujette à fumer,
& en lui en donnant davantage, la chaleur
fortiroit prefque totalement par le tuyau.
, Le contre-coeur doit être conduit bien à plomb
jufqu’à l’extrémité du tuyau, qui, doit être fuffi-
famment élevé pour qu’il ne foit pas -dominé, afin
de prévenir par là l’accident du feu & le refoulement
de la fumée.
Delorme ajoute à cela qu’il a reconnu par expérience
, que les bonnes cheminées doivent avoir
l’ouverture d’en haut aufli longue qu’elle l’eft en
bas, au defîùs de la hotte, fans les rétrécir par les
côtés, qui doivent être bien perpendiculaires.
Quant à.la largeur, les moindres cheminées doivent
avoir 9 pouces dans oeuvre, & les plus grandes,
un pied : car fi elles étoient plus larges, elles
fumeroient.
La fermeture de l ’extrémité du tuyau, fe fait
en portion de cercle par dedans, & on donne à,
cette fermeture 5 ou 6 pouces de large pour le
paflage de;la fumée; M. Bullet ne donne point
.d’autres dimenfions que celles-là.
Delorme a expérimenté qu’il y a certains lieux;