
pourvoit être aufli employée utilement. M. de Ra-
feau ajoute qu’entre toutes les matières tirées du
règne animal ou végétal, celles qui ont une qualité
vifqueufe ou mucilagineufe, lui paroiflent au
moins très-propres à aider l’art dans cet objet. ■
Il réfulte de ces différentes opinions , que l’on ne
fait pas encore quel eft le véritable précipitant de
la matière colorante de l’indigo. Les procédés le
plus généralement reçus , font, comme on Fa dit,
la fermentation & le battage ; ce qui exige des bâ-
timens , des vaiffeaux, des uftenfiles 8c des prépa-
li fs , que nous allons faire connoître.
Dïfpojîtions d’une Indigo te rie.
On appelle indigoterie le terrain où l’on cultive
l’indigo, avec les bâtimens, vaiffeaux, nègres &
liftenfiles propres à fa fabrique ; mais on entend
plus particulièrement par ce nom , les cuves de
maçonnerie deffinées au travail de l’indigo.
Chaque indigoterie eft ordinairement compofée
de trois vaiffeaux attenans l’un à l’autre , & fe
joignant par des murs mitoyens. Ces trois vaiffeaux
font difpofés par degrés , de manière que l’eau
verfée dans le premier, tombe, par des robinets,
dans le fécond; du fécond,-dans le troifième; &
du troifième , au dehors.
Le premier de ces vaiffeaux fe nomme trempoire
ou pourriture ; c’eft dans cette cuve qu’on met
l ’herbe , qu’on y laiffe macérer & fermenter.
Le fécond vaiffeau fe nomme batterie ; c’eft dans
celui-ci qu’on fait paffer l’extrait qui a fubi la fermentation
, afin de le battre & de le traiter de la
-manière qu’il convient. .
Le troifième vaiffeau ne forme qu’une efpèce
d’enclos , & s’appelle repofoir; le fond de ce vaiffeau
a , vers un de fes côtés , un petit baflin
nommé bajjlnot ou diablotin.
Le diablotin ou balfinot, creufé dans, le plan
du repofoir , eft deftiné à recevoir la fécule formant
de la batterie. Ce petit vaiffeau doit être pratiqué
au deffous du niveau.du fond., de manière
à toucher le mur de la battérie. Il eft muni d’un
petit rebord , afin d’empêcher l’eau du fond du
repofoir d’y refluer.
Le fond de ces trois grands vaiffeaux eft plat,
avec une pente d’environ deux ou trois pouces ,
pour faciliter l’écoulement des uns yers les autres.
Le fond du diablotin préfente une figure concave,
dont le contour eft rond ou, ovale. Il doit
fe trouver dans le fond même du diablotin, une
autre petite foffette ou forme ronde , reffemblante
à celle d’un chapeau ; c’eft là qu’on achève de
puifer avec un côté de la calbaffe, le refte de la
fécule qui y defeend naturellement.
Le premier Vaiffeau doit avoir une bonde avec
fon robinet ou daleau , de trois pouces de diamètre^
le tout fuivant la grandeurde la cuve.
- Le fécond vaiffeau a une bonde perpendiculaire
aubaifinot, avec trois robinets ou daleaux, d’environ
trois pouces de diamètre. Ces robinets font
élevés de quatre pouces les uns au deffus des
autres : les deux premiers fervent à écouler, en
deux reprifes, l ’eau qui fumage la fécule après le
battage.
Le troifième daleau , qui eft néceffairement perpendiculaire
au diablotin , eft deftiné à l’écoulement
de la fécule dépofée au fond de la batterie,
au niveau duquel il doit être, & même tant foit
peu plus bas. -
Le plan du fond du troifième grand vaiffeau ,
au lieu de bonde, a une ouverture au bas du mur,
d’environ fix pouces en carré, toujours libre , qui
répond au canal de décharge, nommé la vide.
Le diablotin & la petite forme qui fe trouvent
enclavés dans le troifième vaiffeau, n’ont befoin
d’aucune iffue, puifqu’on en retire toute la fécule
jufqu’au fe c , par leur ouverture.
Les bondes doivent être de bois incorruptible,
écarries & placées dans le courant de la maçonnerie,
à l’endroit de l’écoulement de chaque vaiffeau.
Ces bondes font percées félon leur longueur,
pour former les daleaux. La hauteur 8c la largeur
• de chaque pièce font proportionnées à'la quantité
& à la largeur des trous qu’on y fait, & leur longueur
fe mefure fur l’épaiûéur du mur où elle
elle eft placée, obfervant que les deux bouts fe
trouvent de niveau aux deux côtés- du mur. Les
chevilles avec lefquelles on bouche les daleaux,
font rondes & de même bois que les bondes.
Les habitations où l’on fabrique l’indigo, ont,
fuivant leur étendue , plufieurs corps de maçon-
connerie femblables ,k proches ou éloignés les uns
des autres, pour la commodité de l’exploitation.
Alors on les défigne quelquefois par le terme de
pourriture ou d'équipage.
Lorfqu’on a deffein de conftruire une indigoterie
, on doit examiner avant toutes chofes, s’il
eft poffible d’y amener l’eau de quelqué'rivière,
de quelque ravine ou d’un puits , pour remplir
les cuves.
On établit les indigoteries fur quelque butte ou
élévation naturelle Ou artificielle, fumfante à un
écoulement qui ne foit fujet à aucun reflux.
On les place aufli quelquefois- dans un fond,
pour être à portée de profiter des eaux d’une rivière
ou d’un ruiffeau, pour remplir la tremperie.
Mais il fatit toujours que la batterie ait un débouché
au deffus du niveau des eaux voifines, ob-
fervé dans la faifon des pluies, afin que l’écoulement
en foit toujours affuré.
On donne au premier vaiffeau la forme d’un
carré parfait, ou celle d’un carré un peu oblong :
ainfi, quand fa longueur eft de dix pieds , on peut
lui donner neuf pieds de largeur fur trois pieds
de profondeur , y compris un petit talus haut
d’environ fix pouces , dont la pente toute intérieure
forme comme une efpèce de rebord à la
cuve.
Il eft dangereux de faire ces vaiffeaux trop
grands , parce que la fermentation ne peut y etrè I
fi prompte ni fi égale , que dans ceux qui font
d’une médiocre étendue ; 8c que le produit d une
grande cuve , eft de beaucoup inferieur a celui
de deux autres qui contiendroient enfemble la
même quantité d’herbe. ■ v
Dans la conftruâion du ftcond vaiffeau ou doit
fe faire le battage, il faut obferver le niveau du
fond de la trempoire, qu’on eft quelquefois, obligé
de tenir fort bas, pour en faciliter le rempiiffage.
Il eft bon aufli d’examiner fi à trois pieds ou
à trois pieds & demi plus bas que le niveau du
fond de la trempoire, on peut placer le fond de
la batterie de manière qu'elle ait un écoulement
de fix pouces au deffus du plan du repofoir, &
que le repofoir ait une décharge convenable dans
quelque foffe ou marre voifine. Alors on peut déterminer
l’étendue de la batterie, qui doit toujours
être plus longue d’un , deux ou trois pieds dans
un fens que dans l’autre ; cette étendue fe règle
d’après le calcul de la quantité de pieds cubes d’eau
que doit contenir la trempoire lorfqu’elle eft remplie
d’herbe, & que l’eau eft à fix pouces de fes
bords.
On élève fur les murs du baflin de la batterie,
une maçonnerie de deux pieds de haut pour fer-
vir de rebord à ce -vaiffeau ; ce qui doit donner
en tout cinq à cinq pieds & demi de hauteur,
fur-tout quand on fe fert de nègres & de buquets
pour battre la cuve : car il faut diminuer les bords
de fix pouces, lorfqu’on fait mouvoir les buquets
par un moulin.
On fait enforte que le côté le plus étroit de la
batterie fe trouve en face de la trempoire , à
moins qu’on ne foit dans le cas de faire battre
plufieurs vaiffeaux à-la-fois, par des moulins à eau
ou à mulets ; ce qui néceflite une direéfion toute
oppofée.
Les bords de la trempoire forment, comme on'
l’a dit, une pente intérieure au quart d’équerre,
d’environ fix pouces. Les bords du fécond vaiffeau
ont aufli une petite pente, mais elle eft moins
forte vers le dedans : ceux du repofoir font plats.
Ce troifième vaiffeau n’a pas une étendue déterminée;
néanmoins, le mur qui lui eft mitoyen
avec la batterie , fert ordinairement de mefure à
fa longueur pour ce côté-là & celui qui le regarde
en face. Six ou fept pieds fuffifent pour chacun
des deux autres côtés de fa largeur. -
Le.diablotin ou le bafjînot un peu échancré du
côté qu’il touche au mur de la batterie , eft profond
de deux pieds, y compris la forme ou foffette
, & large de deux pieds & demi & meme
plus , fuivant la grandeur des premiers vaiffeaux.
La foffette peut porter cinq à fix pouces de diamètre
& autant de creux.
La hauteur des murs contournans du troifième
vaiffeau , qui vont fe réunir au mur mitoyen de
la batterie , eft d’environ trois pieds & demi à
quatre pieds, en comptant le fond du repofoir, à
fix pouces au deffous du dernier robinet de la batterie.
On pratique vers un des coins du repofoir,
8c du côté du mur mitoyen de la batterie qui lut
fert d’appui, un petit efeaiier pour y defeendre oc
en fortir à volonté.
La maçonnerie de ces vaiffeaux 81 fur-tout du
premier, doit être faite avec précaution,& folidite ,
afin de pouvoir être parfaitement étanchés, & en
état de réfifter aux violens efforts de la fermentation.
On en prépare les fondemens par un maflif
de roches sèches , bien garnies & pilonnées, avant
d’en maçonner le fond & les murs qui lui fervent
de revêtement. ' .
On donne au mur de ce premier vaiffeau 15 »
20 & même 24 pouces d’épaiffeur , fur-toutlorf-
qu’il a 20 pieds carrés : 12 à 15 pouces futhient
à l’épaiffeur des autres vaiffeaux..
Le fond,' & tout ce qui eft caché fous terre,
doit être travaillé avec grande attention, de crainte
•que les fcurces voifines , ou que les eaux qui proviennent
de l’égoût des terres, ne s’y infinuent.
On rfemploie d’ordinaire à la liaifon de ces
foi tes d’ouvrages , qu’un mortier de fable & de
chaux : on fe fert aufli avec fuccés de terre graffe
pour les ouvrages expofés en plein air ; mais on
recrépit toujours l’extérieur avec de bon mortier
à chaux & à fable, 8c l’intérieur avec du ciment
fait de la manière‘fuivante.
Lorfque toute la maçonnerie eft bien seche ,
on fait un ciment compofé de chaux. & de briques
pilées & paffées au tamis , dont on enduit exactement
tout l’intérieur & les bords des vaiffeaux;
on a foin de polir l’ouvrage à mefure qu il seche,
avec des truelles fines, enfuite avec des cacones
dont l’écorce eft très-dure & très-polie , ou avec
des galets de i;ivière ; ce qui demande le travail
de plufieurs nègres enfemble, pour preffer le ciment
à mefure qu’il sèche, & l’empêcher de gercer.
Auflhôt qu’on s’apperçoit d’une fente à la cuve,
: on pile des coquilles de mer & on les réduit en
poudre, qu’on paffe au tamis. On prend enfuite
de la chaux-vive pulvérifée : on mêle ces poudres
enfemble, & on en fait un mortier dont on bouche
la fente de la cuve ; eé qui arrête l’écoulement.
Dïautres , pour boucher une fente , commencent
par l’élargir intérieurement en forme de rigole
évafée, de la profondeur de fept à huit pouces ,
depuis le haut jufqu’en bas; & on en remplit le
vide avec un ciment compofé de parties égalés de
chaux - vive , de brique pilée & tamifée , 8c de
mâche-fer réduit en poudre; le tout délayé dans
une petite quantité d’eau.
On compofé à l’Ifle de France un maftic avec la
poudre des coquilles, qu’on fait diffoudre dans du
jus de citron, dont on tire le réfidu qu’on mêle
avec dçs blapcs d’oeufs.
Le ciment de la Chine, nomme farangoufli, fe
fait avec du br.ai fe c , de l’huile de cocos , & de
la chaux-vive tamifée. On compofé de ces trois
parties une pâte que l’on bat fur un billot à coups
M m m m ij