
roencement du printemps, foit en automne, font
d’une qualité inférieure. L’on préfère , outre.cela,
ceux des montagnes hautes à ceux des montagnes
baffes ou côteaux, comme étant d’une pâté plus
folide & d’une meilleure confervation.
Les vacheries compofées de 50 à 60 vaches,
fourniffent les meilleurs fromages , parce que le
lait dont on les forme eft caillé plus à propos , vu la
grande quantité qu’on eii. obtient à chaque traite.
Si l’on n’a qu’une trentaine de vache s , on eft obligé
d’attendre le lait de deux traites ; ce qui expofe
le premier tiré à s’aigrir avant qu’il ait pu être mis
en préfure, fur-tout lorfque les chaleurs font vives.
Le beurre & le fromage forment une branche de
commerce qui a plufteurs centres. Aurillac, Murat
& Mauriac font les centres de ce commerce dans la
haute Auvergne. Ardres, Arlant, Beffe, Rochefort
& Iffoire, font les Centres de ce commerce pour
le Cezallier, les Monts-Dor & les environs.
Xes marchands vendent les fromages à des voituriers
du Languedoc , de laGuienne, de l’Agenois
& du Limoufin , qui viennent les acheter dans les
caves, & les tranfportent à dos de mulet. Quelquefois
ces marchands ont des affociés à Totiloufe >
à A lb y , à Montauban, à Bordeaux, qui les débitent
à mefure qu’ils les leur font paffer. Dans ces
deux cas, ces marchands courent des rifques; car
ils font obligés d’expédier , pendant l’été -, ces
fromages , qui fe gâtent fouvent par la chaleur,
malgré la précaution que l’on prend dé ne faire les
tranfports que la nuit.
Le fromage étant la denrée dont le débit eft le
plus affuré en Auvergne , & par conféquent la
fource la plus confiante des rïcheffes, il eft bien
étonnant qu’on ne fe foit pas plus occupe a la
recherche de la meilleure méthode de le faire , &
des moyens de le conferver plus long-temps.
fume en Auvergne, en imitant avec foîn les’procédés
Un des motifs qui doit réveiller l’attention des
propriétaires d’Auvergne fur ce point important de
leur induftrie, eft la concurrence des Hollandois,
qui viennent vendre dans nos ports, & fur ^ tout a
Bordeaux & à la Rochelle , des fromages qui m’ont
toujours paru avoir un plus grand débit que ceux -
de l’Auvergne * parce qu’ils fe conservent beaucoup
plus long-temps ; Car pour la qualité, les fromages
de Hollande n’ont aucune réputation de fupériorité
bien établie.
Dans cette pofttion , ne conviendroit-il pas aux
propriétaires des pacages d’Auvergne de tenter la
fabrication du fromage de Gruyères , qui n’auroit
aucun des inconvéniens dont j’ai parlé, & qu’on
réufliroit à faire aufti bien qu’en Lorraine & en
Franche-Comté ; fi l’on fui voit exactement les pro-
1 cédés tels que je les ai obfervés dans les Vofges ? On
fait que ces fromages fe transportent fans aucun
rifque ; ainft la circulation de la denrée du fromage ,
fous cette , forme, ne feroit plus gêneg , ni fujette
aux mêmes rifques que les marchands courent
annuellement. . ' S
Je propoferoisiaufti de re&lfier la méthode aéluelle
des Hollandois , qui ont d’ailleurs affez d’analogie
avec cette méthode : nous infifterons fur ces
différens points de réforme , qui nous paroiffenÇ
devoir être terités avec avantage en Auvergne, dès
que nous aurons donné une defeription fucciiue de
ces procédés.
A rt. IL Fromage de Hollande.
En 17685 je v.ifttai une laiterie fititée a l extrémité
du beau village Üe Broock, fur le chemin d’Amf-
terdam à Edam, & j’y obfervai les principaux procédés
de la méthode qu’on y fuivoit pour faire les
fromages connus en France fous le 110m de fromages
de Hollande. Ce font ces manipulations que je vais
décrite ic i, comme ayant la plus grande analogie
^avec celles d’Auvergne, dont on a vu le detail dan^
l’article précédent. ,
On commence par tirer le lait & le couler à
l’ordinaire. Le couloir dont on fait ufage eft un plat
creux, percé par le fond, & garni d’un tamis de
crin : on. dépofe enfuite le lait dans une grande
tinette ; puis on y met la préfure, préparée comme
nous l’avons dit ailleurs, & on le laiffe, prendre.
Lorfqu’il eft bien caillé , on ;le raffemole en une
feule maffe, & on en dégage le. petit-lait le plus
qu’il eft poflible ;. c’eft cette maffe de caillé réunie
qu’on emploie aufîitôt à faire le fromage.
On prend une certaine quantité de caillé qu’on
met dans une écuelle percée de trous-.comme une
paffoire ; on la pétrit en la preflant .fortement,
l’on èn exprime ce qui peut refter de petit.- lait :
en même temps une certaine quantité de crème ,
entraînée par le petit - lait , .s’échappe à travers
les trous de I’écuelle. Cette crème eft tellement
abondante dans le caillé, que lorfqu’on, le rompt,
on en voit plufteurs filets qui en découlent; &
quoique la pâte ait été pétrie avec foin , on apper-
çoit encore la crème diftribuée par veines blanchâtres
au milieu des, fromages lorfqu’ils ont reçu
toutes ces préparations : .c’eft une marque non
équivoque que le lait dont ils .ont été faits etoit fort
gras. . ' ■. - ... ^ .j • ..--.jï •*..-? • ; p;v.y
A mefure qu’on pétrit ainft le caillé , & qu’on le
réduit en grumeaux fort fins ,, on lè met dans les
formes. Ce font des cylindres creux, dont le fond
eft concave & percé dé quatre trous. Sitôt que les
formes font remplies exaétement de caillé bien pétri
& bien taffé, on les recouvre avec un couvercle
cylindrique taillé de manière qu’il peut entrer
'dans Fouvérture fupérieure de la forme , dés qu’il
éprouve le plus petit effort de la .preffe. Voyez
fig. 14, B , la forme,placée fur une table avec une
rigolé qui eft ereufée tout autour ; elle eft comprimée
par une planche portée fur trois monta ns ,
& chargée de pierres. La crème & le petit-lait, continuant
à s’échapper par les trous du .fond, de..la
forme , coulent fur latabie r & vont fe rendre dans
un vafe deftiné à les recevoir. . : •
Le pain de caillé ayant pris, dans la forme & fous
l’effort de la preffe une certaine confiftance *, on le
tire de la forme; on le retourne, & l’on continue
de tenir le tout fous la préffe de la manière dont
nous l’avons expliqué ci-deffus. Dans cette fitua-
tion , le petit-lait & la crème furabondante, fe
dégagent toujours par petits filets, du pain de caillé
dont les grumeaux fe rapprochent & fe ferrent de
plus en plus ; ce qii’on rééonnbît aifément par la
diminution des yeux ; & lôrfqu itè font* diminués ,
à un certain point, on retire le pain de la forme,
& on l’enveloppe dans une toile fort' claire, qu’on
a eu foin de faire fécher bien exa&ement.
On étend la toile fui* une table , fig. 15 , & après
avoir retiré le fromage de la forme, on roule la.
toile par le milieu tôiit âutoiîr- de .là furface cylm7.
drique du fromage^ puis on rapproche les parties
d’une lifièr'e en lès pliant fur la bàfe arrondie par
le cul de fa forme , on remet le fromage ainft enveloppé
dans une forme, & on finit par en recouvrir
la bafe fupérieure avec l’autre extrémité de la
toile , dont une groffe épingle affujettit les derniers
plis.
C ’eft alors qu’on porte cet équipage fous la preffe
la plus pefante , & qu’on achève de comprimer le
fromage de manière que la crème & le petit-lait
fe -dégagent le plus qu’il eft poftible, & que les yeux
difparoiffent entièrement ; mais pour obtenir tous
ces effets , les fromages reftent en cet état huit ou
dix heures.
Je dois faire remarquer ici qu’on met d’abord
les fromages fous de très - petites preffes , par le
moyen defquelles on peut ménager la compreflion
du pain de caillé, ainft que la fortie de la crème
& du petit-lait ; ou bien fi l’on emploie de grandes
preffes, on diminue les poids dont on les charge ,
& on ne les augmente enfuite que par degrés : on
a les mêmes attentions lorfqu’on a mis l’enveloppe
de toile au fromage.
laquelle on met tremper les fromages, comme nous
venons de le dire.
On retourne le fromage , & l ° ni<;0J1lvrf 1 autre
bafe d’une couche de fel blanc femblable a la Première
Les fromages étant bien égouttés Sc bien preffes,
on les retire de la forme & de la toile , & on les ‘
met tremper dans une eau falée foiblement. Cette '
efpèce de bain communique au fromage une première
pointe de fel qui pénètre dans toute la maffe,
à la faveur d’un refte d’humidité qu’elle conferve
encore; outre cela, la pâte y contraire une confiftance
& une folidité qui contribuent à la confervation des
fromages. '
Après qu’ils ont trempé quelques heures dans
l’eau falée, on les met dans de nouvelles formes
plus petites que les premières, & percées feulement
d’un trou rond au milieu du fond concave : on
répand enfuite fur leur bafe fupérieure une couche
légère de fel blanc bien pur, qui pénètre dans la
pâte à mefure qu’il fond. Le furplus , coulant dans
l’intervalle, qu’il y a entre le fromagè &. les parois
intérieures de la forme , humeéte légèrement la
furface cylindrique du fromage ; & ce qui parvient
au fond ,. s’échappe par le trou de. la forme dont
nous avons parlé , & parvient par les rigoles de la
table dans des baquets, C ’eft cette eau falée dans j
, on le laiffe en cet état jufqu’à ce que le iel
! foit'bien'fondu, & que la partie furabondante loit
; écoulée de même que la première.
Lorfque par ces manipulations les fromages ont
pris fuffifamment le fe l, on les met tremj»r de non-
veau dans des baquets qu’on remplit de 1 eau des
canaux intérieurs, & qui n’eft que fotJplement fau-
mâtre. Cette eau , non-feulement dtffout la partie
dé; fel qui peut être furabondante a la furface du
fromage, mais encore enlève une matière butireuie
qui y. forme une croûte blanchâtre. Au bout de lix
à fept heures , on retire de l’eàu les fromages ; on
les lave avec du petit-lait, & en les raclant, on
parvient à les dépouiller entièrement de la croûte
blanchâtre. ' . „
Après toutes ces manoeuvres multipliées, o£. qui
s’exécutent avec le plus grand foin, on met en depot
les fromages, fur des.planches , dans un endroit
frais , où on les retourne fouvent. Ils y acquièrent ■
une couleur d’un beau jaune ; c’eft pour lors qu on
les porte à Purmerand ou à Edam , ou us rie vendent
encore frais, quatre fols la livre ; c eft de ces
magafins qu’ils font tranfportés en France ou dans
les ports de la mer Baltique.
La crème qu’on exprime du caillé, par le moyen
des preffes, fe met en dépôt dans des baquets en
forme de petits tonneaux de deux pieds de hauteur ,
fur un pied & demi de diamètre , figure 6. Outre
cela, le petit-lait qu’on a retiré du caillé, fe dépofe
dans de femblables baquets , & après un certain
temps de repos , la liqueur fe couvre d une couche
de crème légère qu’on enlève , & qu on met dans
les premières tinettes à la crème dont nous avons
fait mention. Lorfquon a obtenu une certaine quantité
de crème par ces différens moyens , on la met
dans une barate ordinaire, fig. 19 , & on en tire le
beurre en la battant un certain temps.
Telle eft la fuite des procédés qui .font en ufage
dans la Nort - Hollande, & dans les autres Pro-
vinces-Unies où il y a des pâturages & des beftiaux.
Il eft aife de voir qu’ils ont beaucoup d’analogie
avec les differentes manipulations de l’Auvergne
que nous avons-dècrites dans l’article 1 . Cependant
comme les réfultats de la méthode hollandoïfe font
plus parfaits , circulent plus aifement &. fq^CÇïn-
fervent plus long-temps que les produits des^.manipulations
fuivies en Auvergne, il me p.iroft important
de faifir & de diftinguer les procédés q ui,
dans la méthode liollandoife, peuvent influer fur
ces bons effets ; afin de les indiquer aux propriétaires
des pacages d’Auvergne , comme des reffources
efficaces contre les jnconvéniens qu’ils éprouvent
chaque jour , foit dans la préparation, foit dans la
vente de leurs fromages.
J’ai cru voir, i°. que les Hollandois ne laiffoiem
pas fermenter les gâteaux de caillé aufti long-temps
L ij,