
il a enfin compris que le principal mérite d’une I
imprefïion étoit une exaétè correétion , & c’eft
encore ce qui rend fi précieufes (es éditions des
auteurs claffiques latins & françois. Au refte, fon
zèle infatigable a excité celui des autres maîtres,
fes confrères, & bientôt l’imprimerie françoife fera
reconnue comme la plus célèbre & la plùs parfaite
de l’univers.
IL Des différentes parties de ^imprimerie.
Une imprimerie eft compofée de car altères &
de preffes , avec les uftenfiles qui leur conviennent^
Il faut d’abord connoître les différens caractères
qui font en ufage pour l’impreffion. Nous, en avons
déjà parlé dans le premier volume de ce Dictionnaire
, en traitant de la gravure des poinçons &
de la fonderie des caraétères. Il fuffit de rappeler
ici qu’on les diftingue en général en vingt corps,
qui fe fuivent en montant par degrés du plus petit
au plus fort.
Les plus petits caraétères font la perle , la féda-
noife ou la parijîenne, la nompareille & la mignone.
Ces caraétères font employés rarement à caufe de
leur fineffe fatiguante à la vue..
Les autres caraétères qui acquièrent fucceffive-
ment plus de force, fe nomment petit-texte., gaillarde
y petit-romain , philofophie , cicéro , faint-
auguftin, gro.s-texte, gros-romain. Ce font les caraétères
les plus ufités dans l’impreflion, foit du
-texte, foit des notes.
Ceux qui viennent après ne font guères employés
que pour des- titres, des infcriptions ou des
placards ; on les appelle petit-parangon ,. gros-parangon
, paleftine , petit-canon , trifmégifte , gros-'
canon % double - canon, triple - canon , grojfe-nompa-
teille*.
On nomme lettres, fans acception de corps ou
de grandeur * chaque pièce mobile ou féparée
dont font affortis les. différens caraétères. Il y a
quatre fortes de lettres dans chaque corps de
caraétères ; favoir , les capitales , petites capitales
ou majufcules & minufcules , les lettres du bas
de caffe, & les lettres doubles, telles que 1Q f i ,
le f i y le double JJi , le double ffi , & quelques
autres.
Il y a outre ces corps & grandeurs, un nombre
de lettres pour les impreffions des affiches & placards,
que l’on nomme, à cautè de leur grandeur
& de leur ufage, groffes & moyennes. Elles font de
fonte ou de bois : ces corps n’ont point de petites
capitales ni des lettres du bas de caffe.
Chaque corps de caraétères eft afforti de lettres
romaines ou de lettres rondes, 8c de lettres italiques
qui font plus penchées que les rondes.
Il y a aufïi pour chaque corps de caraétères, des
cpdrats qui font des pièces de fontes plus baffes
de; quatre lignes que la lettre : on les fait de diffé.-
rentes, grandeurs pour la. juftiiLcation des, lignes.
Ces cadrats rempüffent les lignés, dont les mots n’ea
contiennent qu’une partie, & dont le reffant pa-
roît vide à l’impreflion. Ils forment de même les.
alinéa, le blanc des titres', & les^blancs qn’occa-
fionnent affez fréquemment les ouvrages en vers.
Outre les cadrats on a des cadratins., pièces
de fonte également plus baffes de quatre lignes
que les lettres. Les cadratins font exaéfement carrés
& d’ufage au commencement d’un article après
un alinéa. On s’en fort très-fréquemment, fur-tout
dans les ouvrages où les chiffres dominent, comme
ceux d’algèbre & d’arithmétique. Le cadratin eft
régulier, dans fon épaiffeur- Deux chiffres enfemble
font celle d’un cadratin. Il y a encore des derni-
cadratins de l’épaiffeur d’un chiffre, pour la plus
grande commodité de l’art..
De plus, chaque corps eft afforti de. réglets en
fonte qui marquent des -lignes droites for le papier
: on s’en fort à. la tête des chapitres & quelquefois
après les titres courants des pages. L oeil
du réglet eft triple , double ou {impie. On en
forme quelquefois des cadres pour entourer les
pages entières. "
On doit être pareillement pourvu d'efpaces qui
font de petits morceaux de fonte proportionnés au
corps du caraétère pour lequel ils font fondus ,.
& qui, étant plus- bas que la lettre r forment le.
■ vide ou le blanc qu’on voit dans l’impreffion entre:
chaque mot. Les efpaces font de différentes èpaif-
feurs ; il y en a de fortes., de minces & de moyennes
, pour donner au compofiteur la facilité de
juftifïer..
On ne peut fè paffèr également de réglettes
minces de fontes ou de bois, qu’on met entre
chaque ligne de caraétère pour les éloigner un peu
les unes des autres, & laiffer par-là, du blanc entre
elles ce qui fe faitprihcipalement pour la poéfie.
Il y a des fontes qui portent leur blanc;. ce qui
arrive lorfqu’un caraétère eft fondu fur un corps
plus fort qu’il n’a coutume d’être ,. comme lorf-
qu’on fond le caraétère de petit-romain fur le corps
de cicéro. Cet oeil de petit-romain fe trouvant fur
un corps au deffus du ften propre , laiffe entre
les lignes plus de blanc que s’il étoit fondu fur
fon corps naturel.. Cela évite d’ajouter des réglettes
pour écarter les lignes ; ôrles intervalles ont alors
un blanc plus propre & plus régulier.
Les vignettes font de. petits ornemens mobiles de
fonte , qui doivent aufïi s’affortir avec chaque
corps de caraétères.
Il faut entendre par Y oeil de la lettre, T'étendue
ou plutôt l’épaiffeur d’un caraétère.. On diftingue
ces différens degrés d’épaiffeur par les termes, de
petit oeil, oeil ordinaire , oeil moyen, gros oeil. On
appelle auffi corps cette épaiffeur jufte oL déterminée
relative à chaque caraétère en particulier..
C ’eft cette épaiffeur ou ce corps qui fait la dif*
tance des lignes.,
M. Fournier le jeune,,habile fondeur dë caractères,^
eft. parvenu à déterminer les forces relatives.
<le tous cés corps, comme nous l’avons rapporté
dans l’article des Caractères d'imprimerie.
V o ic i, fous ÿn autre point de v u e , la lifte des
caraétères qui font le plus en ufage, avec des
chiffres qui marquent la graduation des corps :
La Nompareille. .
La Mignone. . .
Le Petit-Texte. .
La Gaillarde. .
Le Petit-Romain. .
La Philofophie. .
Le Cicéro. . . .
Le Saint-Auguftin.
Le Gros-Romain.
Le Petit-Parangon.
Le Gros-Parangon.
Le Petit-Canon. .
Le Gros-Canon. .
Les corps fuivans font prefque inufités.
La P e r l e . ............................ 4
La Parifienne ou Sédanoifo. . . . 5
Le Gros-Texte. . . i . . . . 16
La Paleftine. 24
Le Trifmégifte. .............. ....................... 3^
Le Double-Canon. . . . . • • 5 6-
Dans cette lifte, on n’a confidéré les caraétères
que fous une foule dimenfion, c’eft-à-dire , félon
leur corps foui ; & le chiffre qui les accompagne
indique fuffifamment que deux corps de nompareille
équivalent à un corps de cicéro, parce que deux
fois 6 équivalent à i a , &c.
Ori peut encore considérer les caraétères fous
leurs deux dimenfions fujettes à variation, c’eft-
à-dire ÿ folpn leur corps & leur épaiffeur pris enfemble.
Ainfi, foit leur correfpondance nd quee
fa r les chiffres ci-après :
La Nompareille. .
La Mignone. . .
Le Petit-Texte. .
La Gaillarde. . .
Le Petk-Romain. .
La Philofophie.
Le Cicéro. . . .
Le Saint-Auguftin.
Le Gros-Romain.
Le Petit-Parangon.
Le Gros-Parangon.
pins courte, ft un certain nombre de lignes ne
fait pas jufte la longueur deftrée pour la page.
Secondement, les corps ne font pas exactement
de même force dans toutes les imprimeries ; le
corps de cicéro, par exemple, dune imprimerie,
eft ou plus fort ou plus foible que le corps de
cicéro d’une autre imprimerie. Troifiemement, les
fondeurs donnent à chaque lettre plus ou moins
^d’épaiffeur, félon qu’il leur plaît ; de forte que
de deux fontes de cicéro, par^ exemple, forties
des mains du même fondeur, l’une portera^ 43 1
dans une juftification donnée, tandis que 1 autre
n’en portera que 40. Quatrièmement, les mots
font fouvent, & même néceffairement plus efpa-
cés dans une compofition que dans 1 autre. Ainfi,
ces diverfes caufes peuvent occafionner une différence
On voit par ce tableau , que le petit-romain
eft au S. Auguftin comme 40 eft à 20; c’eft-à-
dire , que la matière d’une feuille compofée en
petit-romain foroit environ deux feuilles fi on la
compofoit en S. Auguftin, & quatre feuilles en
petit-parangon, &c. Nous difons environ, parce que,
quoique nous fuppofions qu’on emploie la même
juftification , c’eft-à-dire , la même longueur de
ligne, on n’a pas toujours la liberté de donner la
même longueur aux pages, par la raifon qu’on
ne peut divifor un corps de caraétère, & que la
page doit être néceffairement ou plus longue,/ou
affez confidérabie dans la -correfpondance
que nous avons cherché à établir. (Article extrait
du Dictionnaire des Arts & Métiers ).
Quoi qu’il en fo it, par le moyen d une table
de proportion, un imprimeur doit voir ce quua
caraétère augmente ou diminue de pages fur un
autre caraétère. Il peut favoir combien il faut de
lignes de petit-romain , par exemple, pour faire
la page in-12 de cicéro ou de 5. Auguftin ; & combien
, par ce moyen , on gagnera ou perdra de
pages fur une feuille , par confoquent ce qu un
volume aura de plus ou de moins de feuilles en
l’imprimant de tel ou tel caraétère.
Les proportions des caraétères entre eux, bien
établies & bien connues, rendent aufli à un compofiteur
le mécanifme de la compofition plus
fur & plus prompt. En effet, celui qui fait la
portée de fes caraétères ,' peut remplir exaétement
tous les efpaces vides, fans addition ni fraétion ,
foit dans la compofition des vignettes ^de fonte ,
foit dans d’autres parties difficiles. S il a , par
exemple, pour un refte de page un vide de fix
lignes de nompareille à remplir, il faura qu il peut
y fubftituer ou quatre lignes de cadrats de gaillarde
, ou trois de cicéro, ou deux de gros-romain ,
ou une feule de trifmégifte .* alors -il remplit fon
blanc avec autant de promptitude que de facilite.
Quand un imprimeur veut s’affortir d une forte
de caraétères, il demande à fon fondeur une fonte
‘de cicéro, une fonte de petit- romain, &c. c eft-
à-dire, des caraétères fondus fur les corps, foit de
cicéro , foit de petit-romain.
Il commande ces fontes par cent pefant, ou
par feuilles. Quand il demande une fonte de cinq
cens, il veut que cette fonte, bien affortie de
toutes fos lettres, pèfe cinq cens. S’il la demande
de dix fouilles, il entend qu’avec cette fonte on
puiffe compofer au moins dix feuilles ou vingt
formes, fans être obligé de diftribuer.
La détermination des rapports en nombre qu’il
faut mettre dans les différentes fortes de caraéïères ,
s’appelle police. Cette police peut varier beaucoup
d’une langue à une autre ; maïs elle eft à peu près
la même pour toutes fortes de caraétère semployés Qqq n