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Un long uCage a fait remarquer à MM. de Berne
que les bâtimens de graduation à une feule colonne
de fafeines étoient fujets à perdre des portions de fel,
en ce que quand il y a beaucoup d’agitation dans
l ’air, les particules d’eau faléc dérivent delà perpendiculaire
3 & font emportées lors de leurs divifîons.
P-our remédier à cet inconvénient, ils^ ont fait
conftruire un bâtiment auquel ils ont donne 2 j pieds
de largeur aulieu de 18 qu’avoient feulement les
anciens, & ils ont mis double colonne de fa'cines >
qui n’ont que l ’ancienne largeur par le haut, mais
qui s’accroiffànt par le bas, prennent la forme d une
pyramide tronquée.
Le méchanifme de la graduation paroît très- (impie,
& quand on l’a vu pendant 24 heures, on croit le
Lavoir & lepofféder à fond;'cependant il y a une infinité
de particularités intéreffantes qui ne fe prefen-
tentque fucceflîvement ; & fans tou res ces connoif-
fances réunies, on court rifque de tomber dans des
erreurs qui coûtent cher.
Lzfaline àe Bexvicux & celle à'Aigle font fitué' S
vis à-vis S. Maurice , à l’entrée de la gorge du Valais,
à deux iieues l’une de l ’autre.
Il n’y a qu’une fource à la faline de Bexvieux\ elle
fort d’une montagne appellée le fondement. On 1 a
découverte en 1664, & fon pénétra fort avant dans
le roc pour en rafllmblef les filets; mais on n eft
parvenu à la maintenir dans un haut degre de falure
qu’en y creufant de temps en temps ; par la raifon
que les terres quelle parcourt ne contenant félon
toute apparence, que des portions & des rameaux
de fr i, ces rameaux s’épuiftnt par le mouvement
continuel des eaux, qui ne reprennent une-haute
falure qu’en leur frayant une route nouvelle^ en-
forte que cette fource eft adueliement plus baffe
de 150 pieds que le niveau du terrein ou on la
trouvée originairemant, ce qui a obl’ge de faire
des galeries à différentes hauteurs pour en procu-
ter l’écoulement.
Mais comme en approfondiffant la fource, le
travail des galeries fe multipiioit, & que la depenfe
croffoit à proportion, MM* de Berne prévoyant
que cette entreprife deviendrait a la fin infoute-
nable, s’ils ne rencontraient quelque moyen plus
fioepie, faifoient ccnfulter par-tout les ingénieurs
„ les plus habiles, niais inutilement, jufqu'a ce que
M. le baron de Boëux, gentilhomme faxon, leur
iiifpira un va fie deffein, pour lequel il eut fept
mille louis de récompenfe, & quinze cens pour
fon voyage lur les lieux.
Ce deffein confîfle à introduire un gros ruiffeau
dans l ’intérieur de la montagne, par la c*mé du
rocher , pour faire mouvoir plufieuts corps de pom
©es, au moyen d’une grande roue de 36 prds de
diamètre, pofée à plus de 800 pieds de hauteur
perpendiculaire de l’entrée du ruiffeau dans le rocher
3 & ce rocher eft en partie de marbre, en
s a h
partie d’albâre, & de pierre dure, un mineur n’eitf
emportoit guère plus d’un pied cube en huit jours;
cependant cette montagne eft traverfée a jour dans
plusieurs endroits, & il y a cinq autres galeries,
de 3 pieds de large, & de 6 pieds de haut, qui
font en tout plus de 3000 toifes de lo n g u e u r&
de 7 millions 28000 pieds cubes.
La nature de ce travail, le temps, la dépende,
& la grandeur de l’entrépiife, font autant de fu-
jcts d’étonnement pour le voyageur, & au:aut de
preuves du cas que l’état de Berne fait de fon tre-
for, & du defîr qu’il a-de fe paffer de l ’étranger.
Le degré de la fource eft vaiiable : -quand elle
eft à fa plus grande richelfe, .elle porte juff;u a
20. ou 22 parties, épreuve du f u , ce qui fer oit
près de 28 à l'épreuve du tube; fon plus bas a
été à 8 degrés ou à 10' ; elle produit ordinaire -
1 ment 500 livres pelant d’eau par quart d'heure; ces
eaux font conduites de la fource, par fa pente naturelle,
à la faline'àt Bexvicux, par des tuyaux
| de bois de fap n, dans une diOance de | de lieue,
\ où elle eft reçue dans des réfervoirs, & de la re-
| p'ife par un mouvement de pompes que l’eau fait
agir,, pour la porter dans de grail les gaioi s ap-
pellées bâtiment de graduation , qui peuvent la for*
lifier jufqu’à 27 degrés ; de là elle pâlie par fa pente
- naturelle dans les bernes ou bâtimens de cuite.
La meme montagne fournit encore une autre
fource, foibie, qu’en fépare de la précédente, &
qui s’étend par des canaux de fs pin, jufqu’à l’Aigle,
lieu diftant de-là de deux lieues.
Cette fource eft fort chargée de fonfie & de
’ bitume; l’odeur en eft forte, & l’on en voit for-
tir l’exhalaifon en tourbi Ion de fumée , même
pendanr l ’été, à l’ifîue des galeries qui donnent
entrée dans la montagne.
Les lampes des mineurs enflamoient que’quefo:s
cette matière, fur-tout dans les galeries en eui-de-
fac , où il n’y a point d’air paffant, alors.elle chaf-
foit avec impétuofiié tout ce qui lui réfîftoit, bru-
lo it , pénétrait les corps ; il y avoit des ouvriers
b'eflés & étouffés de la forte; pour éviter cet inconvénient,
on établit de diflancè en diffançe de
gros foufffers de forge, que l ’on ag'toii fans ceffe
pour chaffer -cette vapeur. C'eft ainfî qu’on en
ufoit îorfque M. Dupin vifîta ces travaux ; cependant
le fel de ce te fource eft beau, bon, lain,
cryftallin, & blanc comme la neige ; le foufre contribue
à lui donner cette blancheur^, fans lui la if-
fer fon odeur.
On affocie à cette derniere fource, celle^de la
mon agne de Panet, & leurs eaux vont mêlées,
dans ifs réservoirs ou bâtimens de graduations,
prendre, de foibles qu’elks font, jufqu’à 2y à 27
degrés de falure ; on pourroit les pouffer plus loin,
mais l ’eau trop chargée de fel devient gluante,
' pâteufe, & ne coule plu,s aifénjent par les petits
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ïobinets deflinés à la répandre en forme de pluie,
fur diftérens étages de fafeines qu’elle doit traverfer
pour arriver à (on baffin; elle s’y attache, fe fige, .
empêche l’effet de l’air, & par conféquent de l ’é- j
vaporation ; quand le temps eft convenable, c’eft- ;
à-dire gai & fec; on pouffe la graduation depuis
un degré & demi jufqu’à dix, en 24 heures.
Avant certe découverte il falloit 6 cordes &• demie
de bois, pour fournir 25 quintaux; mainte- ,
nant 3 cordes & demie en donnent 89.'
Il eft inutile d’infifter fur l ’importance d’écono-
mifer le bois. _
Comme ce n’eft point ici un fyftême nouveau
dont l’événemert-foit équivoque, ni de ces ima- .
ginations philosophiques, ta t de fois propofées, ■
fouvent effayies , mais dont I’effai en- grand a tou- !
jours trompé la promeffe ; que c’eft au contraire j
une expérience confirmée par un grand nombre
d’années, à la faline de Slutz en Alface , dans les '
d’-ùx falines de Suiffe, & dans celle de Savoie,
c’eft rtfufer un avantage certain que de ne : pas
.ufer d’une telle découverte.
Il y a des bâtimens ' d~ graduation à la faline i
de Mouttérs en Tarentaife ;’ ce fönt même les fculs :
dont nous feions mention, les autres ne différant :
de, ceux de nos faline s , non plus que le r.fte de
la manoeuvre, que par la différence des lieux.
Le roi de Sardaigne> ayant appris, les (èrvices
que M. le baron de Boëux avoit rendus au canton
de Berne, Tappella à là' faline de Moutiers , où il
fit conftruire des bâtimens de graduation au nombre
de- cinq, dont deux ont 440 pas communs
■ de longueur, & les troi’s autres 320 pas chacun.
Ils ont tous 18 pieds de large, fur 25 de haut,
à prendre du rez de chauffée jufques fous 'a fàblière.
La raaffe d’épines par où les eaqx, fe filtrent, a
'6 pieds de large, occupe toute la longueur du'Bâtiment
, & la hauteur depuis,le baffin ou cuve baffe,
: jufqu’à' la fabliè; e ; ces cuves baffes font fournies
par le grand réfervoir, dont, les eaux font relevées
dans les auges de filtration autant de fois qu’il
eft néceffàire , par pluffeurs-corps de pompes qui
jouent continuellement j auxquel es l’Izere donne
le mouvement; les eaux fout pouffées par la graduation
depuis 2 degrés, qui eft leur état naturel,
jufqu’à 25 & 27.
Le degré s’eftime par la livre fur le cent; ainff
la falure eft à 20 degrés fi l’évaporation étant faite
fur 100 livres, il en refte 20.
Saline de* Dieuze.
Il y auroic'beaucoup à gagner, à perfedionner
; les fourneaux ; voici comme on pourroit s’y prendre.
L ’ouverture fuperficielle jfèroit la même qu’aux anciens
, c’eft-à-dire de 28 pieds fur les cotés en
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talud, dont la ligne de pente feroit le côté d’un
triangle pqu latéral; la diftance de l’aire à la poêle,
illégale, (avoir de quatre pieds à l’embouchure,
finiffant à deux au plus, à l’endro:t de la fortie;
il n’y auroit qu’une ouverture de 2 pieds de large,
& de 4 pieds de haut, pour jetter le bois; cette
ouverture, avec un chaflîs ou huifferie de fer, à
laquelle (émit fufpendue une porte brifée de même
matière, que l ’on ouvriroit ou fermeroit félon le
befoin; on pratiqueroit aux côtés deux fenêtres,
peur juger de l ’état des feux de la poêle, tout fon
quarré feroit exadement fermé pour concentrer la
chaleur; l’ouverture du derrière, ou la cheminée
auroit 2 pieds de haut, fur 8 pieds de large ; ayant
remarqué que la chaleur qui fort par cette ouverture
étoit fort confîdérable, on continuerait le fourneau
de 9 à 10 pieds de large, fur 12 de long,
finiffant à 7 pieds ; l’on appliquerait defliis un poêlon
de même dimenfîon ; l’ouve;ture ou cheminée
de ce fécond poêlon, donnant encore beaucoup de
chaleur, on en ajouterait un troifîème, à fept pieds
de bafe, finiffant à 4 , fur 7 à 8 pieds de long,
enfoite que l ’un & l’autre de ces deux poêlons,
i reffembleroit à des cônes tronqués, l ’ouverture du
dernier poêlon, deftiné pour laiffer échapper l ’air
& la fumée, n’auroit qu’un',pied de haut, fur 18
pouces de large, & pourrait fe fermer par un re-
.gitre.
Dans les bâtimens qui auraient affez de profondeur,
on pourroit multiplier les poêlons , pourvu
qu’on proportionnât à leur nombre les pentes du
fourneau.
. Ce fourneau n’anroît pas les mouvemens des autres,
le feu y ferait moins concentré, il agirait
avec plus de force, il fè répandrait moins au-de-
hors, i l Teroit, moins diminué au-dedans par l ’accès
de l’air froid,
On a exécuté ces idées à Dieuze, & c’eft tout
ce qu’il y a de remarquable; du refte, Je fel s’y
fabrique comme à Moyenvic & à Châteaufal-n.
Saline de Rozière: particularité des po'èlts de
Rosière.
Derrière les poêles il y a des poêlons qui ont
21 pieds de long (ur y de large, & derrière ces
poêlons une table de plomb,, a peu près de même
longueur & largeur, (ur laquelle font établies plu-
fieurs lames de plomb pofe-es de champ, de hauteur
de 4 pouces, qui forment plufîeurs circonvallations.
Toute cette machine s’appelle exhalatoire; la
deftination de l’exhalatoire eft d’évaporer quelques
parties de l’eau douce, en profitant de la chaleur
qui fort par les tranchées ou cheminées de la grande
poêle, & de dégourdir l’eau avant qu’elle jombe
dans la grande chaudière.