Lorfqüe leurs fonds ont été faits avec foin ,
ils fupportent l'aftion du feu la plus forte fans
s'altérer, & le temps de leur durée peut aller à
'tin fîècife. Elles prennent telle forme & telle contenance
qu’on veut leur donner. La maçonnerie
qui les foùtient, garnie en plomb ou en cuivre
loudés à leurs bords , forme avec elles le laboratoire
du fourneau , & ce laboratoire préfente
-a'ors au vefou la plus grande propreté.
Le cuivrera , en tout temps, en tout lien, une
valeur intrinsèque bien déterminée on n’a donc,
perdu , dans l’emploi , lorlqu’il ne peut plus fer-
v i r , que la valeur arbitraire. Nos colonies feules
en ont banni lufage depuis cinquante ans : les
Anglois .mieux éclairés l ’ont conlèrvé.
Les chaudières, dites de fe r , employées pour
le travail du vefou, font faites avec une forte de
fonte dé fer, qu’on coule en une feule piece de
forme elliptique. Cette fonte qui eft très-impure,
contient encore une très-grande portion d’oxide
de fer. Elle eft beaucoup moins conducteur de la
chaleur que le fer pur, qui lui-même l ’eft beaucoup
moins que le cuivre. Les chaudières de fer font donc,
par cette double raifon, moins propres que celles de
cuivre, à tranfmetrre l’aétion de la chaleur dans
le t avail du vefou.
Le fer peu Condu&’eur de la chaleur , confèrve
celle dont il fe charge, à un degré prefque tou
jours trop fort, pour que les fùb fiances végétales
& animales puifient en fupporter l’aftion fans fe
décompofèr. Cet inconvénient & fa mal-propreté
l’ont fait bannir des ufages économiques & de
prefque tous lés arts.
La fonte de fer eft très-arraquâble à la rouille,
& elle en eft toujours couverte. Jamais' elle ne
prend le brillant métallique ; elle a toujours une
couleur noire & terne. La rouille qui couvre fa
furface eft très-tenace ; elle fe détache avec ptine,
mais elle fe détache, toujours : aufti quelque foin
qu’on apporte à laver ces chaudières , jamais la
dernière eau du lavage n’eft pure ; elle porte toujours
une teinte noire affez forte 3 & cette teinte
paiïe dans le vefou.
Les chaudières de fer font très-fragiles, & elles
caftent en changeant trop fubitement de température;
.quelque bonnes qu’elles foient, elles n’échappent
jamais à la fraéture.
La contenance des plus grandes eft de deux milliers
au olus, & cette contenance eft infuftifante
pour le TOvaii du -vefou : on eft obligé de l’augmenter
de beaucoup par de la maçonnerie qui ,
étant infiniment moins folide encore que les chaudières
, eft beaucoup plus mal propre ; car fa fur-
face ne peut être garnie ni en plomb , ni en cuivre
, la foudure n’ayant pas de prife fur le fer.
La fonte de fer n’a abfolument aucune valeur
intrinsèque, & une chaudière caftee, ne vaut pas
un fol, quelque pefante qu’elle foit.
La conftruâion des fourneaux portant chaudières
de cuivre, eft très-foli le. La maçonnerie s'élève
, prefqu’à-plomb , dans toute l’étendue du
foyer. Elle n’a, fur une hauteur de trois pieds fix
pouces, qu’une courbe de quatre à cinq pouces au
plus à décrire, pour venir fai tir le fond de la
chaudière. Les voûtes qui rempliftent l’efpace que
laifte chaque chaudière entr’eUes, n’ont tout au.
plus que quatre pieds ; elles font faices en briques,
& on pourroît les faire en bafalte > alors elles fe-
roient d’une fbüctité telle, qu’elles dureroient autant
que les autres parties du fourneau.
La bafalte eft une efpèce de pierre, qui paroît
être un produit volcanique, tres-abondante à la
Martinique ; on en trouve aufti dans pluûeurs endroits
à Saint-Domingue ; elle fupporte parfaitement
bien l’aétion du feu : on doit préférer celle
qui eft d’un gris - blanc,
La maçonnerie des fourneaux portant chaudières
de fe r , eft peu fo ide ; elle s’élève en retraite
fuivant leur développement, pour laifler entr’elle
& ces mêmes chaudières à-peu-près le même efpace;
puis elle fe recourbe pour venir les faifir à-peu-
pr.ès à quatre pouces de Ièur bord. La courbe qu’elle
décrit, fur la hauteur de huit à dix pouces, a
douze à quinze pouces.
Les voûtes qui partagent chaque chaudière, ont
à-peu-près fix pieds de portée. La néceflité de
remplacer les châudièr s caftees , par d’autres
chaudières dont le diamètre eft quelquefois ou
plus petit, ou plus grand, a empêché qu’011 fe
: fervît de baLIte pour faire ces voûtes , parce qu’il
j faudroit en retailler les pièces, ou en employer
de nouvelles ; ce qui demanderoit un temps trop
long, pour des réparations de cette efpèce qui le-
répètent fi fbuvent.
Les glacis qui furmontent le« chaudières, pour
augmenter leur contenance, font faits èn briques
inclinées à plat & très-étroitement ferrées ; l ’effet
confiant de la chaleur & l ’adion du vefou fur la
chaux- du ciment qui unit ces brigues, les déran-
; gent prefqu’à chaque inftanl, & exigent des répara,
tions continuelles.
Les chaudières de fer plongent tout entières
dans le foyer , moins trois à quatre pouces fur Ieft
quels porte la maçonnerie qui les tient feellées
dans tout leur pourtour. Quoiqu’elles préfentent
une très-grande furface au feu , néanmoins l ’ébui-
lirion du vefou n’eft pas très-forte, parce qu’elles
s’oppofmt par leur nature & par leur forme , à
l'adion de. la chaleur qui ne les pénètre qu’au point
où la maçonnerie les faifit.
La chaleur , dont la tendance eft de bas en
haut , agit toujours en fuivant la perpendiculaire ;
tombant obliquement fur la convexité de là chaudière
qui la réfléchit, elle fe porte dans la partie
fupérieure du foyer où elle eft alors forcée de la
È Ê È tÈ Ê Ë Ê Ê Ê
pénétrer, la maçonnerie lui oppofant une plus
grande réftftance encore. La batterie feule, étant
l'ur le foyer proprement dit- r où le feu eft toujours
très-ardent, eft pénétrée de par-tout.
La convexité'que préfentent les fonds des chaudières
de cuivre , n’eft que de quatre pouces au
plus, fur cinq pieds de diamètre ; l ’obliqu:té qu’elle
donne à la chaleur qui les frappe , eft prefque
nulle, & le cuivre étant très-perméable , oppofe
peu de réfîftance à l ’a&ion de ce fluide qui pénètre
ces fonds de toutes parts avec la plus grande
facilité.
Dans un laboratoire de cuivre, formé de trois
chaudières dont lés fonds ne préfentoient au foyer
que trente-deux pieds de furface chacun, j’ai déféqué
, évaporé & cuit une quantité de fiic exprimé
âflez conftdérable, pour obtenir cent-quarante
formes de fucre, en vingt-quatre heure!.
Dans ce même laboratoire , j’ai également déféqué,
évaporé & cuit une fomme de fuc exprimé,
dont le produit a rempli onze cailles contenant
chacune quinze pieds cubes ; ce qui fait cent-
foixante-cinq pieds ; ( le pied cube répond à une
forme ). Or il n’eft jamais arrivé qu’on ait obtenu
un pareil produit dans les équipages à chaudières
de fer.
L’évaporation & la cuite fe faifant donc plus
rapidement dans les chaudières de cuivre que dans
celles de fe r , tant par rapport au métal qui, par
fâ nature , eft plus per/rtéable à la chaleur, que
par la forme de la chaudière qui eft plu« propre
à en recevoir l’adion ; il en réfulte nécefiaire-
ment économie de temps , de chauffage & avantage
dans la fabrication ; car l ’expérience prouve
que l’ évaporation & la cuite ne peuvent jamais
fe faire trop rapidement.
: L’ufage des chaudières de cuivre a non-feulement
tous les avantages qu’on peut défirer, pour
le fuccès du travail du vefou, mats encore il eft
beaucoup plus économique que celui des chaudières
de fer.
Autres avantages de la rouvel/e méthode comparée
a l ’ancienne.
Nous entendons par cette expreflion ancienne
méthode, la difpofition des moyens employés aduel-
leraent, & la manière de fe lcrvir de ces moyens
dans les diverfes opérations qu’on fait généralement
dans nos colonies, fur le fuc exprimé de
la canne fucrée, pour en extraire le fel effentiel
brut & terré.
'Cette méthode demande, jour & n u it, une
affiduité rigoureufe de la part du raffineur blanc,
tant que dure la roulaifon , & un travail confiant
de la part des nègres, pendant les vingt - quatre
heures qu’ils relient à la fucrerie.
Si dans la méthode que nous avons établie, l e
travail n’eft pas interrompu , toujours eft il v r a i
qu’il eft moitié moins confîdérable pendant la nuit,,
puifqu’il ne s’agit que d’écumer & de tranfvafer le
vefou d’une chaudière dans l’autre , à mefure qu’il
s’évapore; travail qui n’exige point la préfence
du raffineur blanc.
Les bajjins a filtrer G* à décanter, fans augmenter
la main-d’oeuvre , rendent le raffineur mai-,
tre de toutes fes/opérations , il n’a plus befbin
d’employer qtie la quantité de chaux néceflaire à
feparer les fécules 3 6c la balance que nous avons
indiquée, devient un moyen sûr pour fixer cette
quantité. Il peut fuivre fur chaque charge de vefou
, en la paffant d’une chaudière dans l’autre ,
tous les figues qui lui fervent de guide dans l’emploi
des aikalis. Il peut encore diriger la marche
de l’évaporation à fbn gré, au moyen de l’aréomètre.
Enfin , il eft alluré que , par les filtres &
le ! epos, il enlèvera complettement toutes les
matières infolubles , & portera le vefou au plus
haut d:gré de pureté, malgré la négligence des
nègres.
Les bijjins à décanter donnent encore au raffi-
ncur l’avantage inappréciable , de ne cuire le vefou
que pendant le jour. Ainfî, après s’être re-^
pofé pendant la nuit, il peut veiller fans peine
à toutes les opérations qui accompagnent & fuivent
la cuite. Il peut recônnoître les fautes qui ont été
faites dans l’emploi des aikalis & y remédier. Il
peut par divers moyens dont il eft maître de faire
ufàge, ajouter à la pureté & à la beauté du vefou-
firop qu’il va cuire. Il a l’avantage de le cuire en
fomme & de continuer la cuite fans interruption,
par l’accès de nouveau refou. Enfin , il trouve
dans le the-rmomètre un moyen sûr & infaillible
de fuivre les divers degrés de l ’adion de la chaleur
, & de fixer le terme de la cuite. Il peut
éteindre le feu & vuider la chaudière à cuire, fans
décompofèr une molécule de fucre.
Le raffineur jouit, dans ce travail, du plaifir
du fuccès dont il eft sûr, & ii a la douce fatis-
fa&ion de n’avoir janviis à punir les nègres que
pour des fautes . qu’il leur étoit facile de ne pas
commettre; ( fautes qu’il peut fouvent pardonner,
fans inconvénient, attendu que les bajjins a décanter
les réparent toutes.
L a marche défor donnée qu’exigent les chaudières
de fer; fe refufe totalement à tous ces avantages,
& préfente tous les vices oppofés.
Le raffineur(ne peut, par aucun moyen , fixer
la quantité de leffive qu’il tft ob igé d’employer,
puifqu’il ne la règle pas fur la quantité de fécules
à fépàrer, mais bien fur la confiftance mouffeufe
qu’il eft forcé de leur donner par un excès d’al-
kali, pour qu’elles fe foutiennent fur l’écumoire,
afin qu’on puÜTe les enlever.
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