
pas comment les diftillateurs ^eaux-fortes pou voient
vendre ce meme cryftal treize fols la livre. On les
a p uheurs fois acculés d’y mêler.de l’alun; mais
1 accu fat ion tombe d’e'le-même; l’alun fe gonfle
e 1 fondant ; il eut d’ailleuTs décompofé une partie
da nitre. Le procédé des diftillateurs' eft beaucoup
plus Ample.
Ils mettent dans la marmite de Tr fcellée à-de-
încure, du nitre à dix fols. En chauffant la mar-
mre j le nitre fe -fond, poulie une écume allez
.laie , dont une portion fe dcfsèche quelquefois au
poi-1 de faire fufer le nitre. Lcrf^uT.s voient leur
nitre dune belle fonte & bien claire, ils le
puifnt dans l ’en droit ou il n’y-di point d écume,
& le vcrfnt prr portions dans de petites poêles de
^mblab es aux poë'es à frire, bien sèches &
■ meme chauffées : on a g ie la poêle pour donner
une épaiffur éga’e à là matière qui ne tarde pas
à fe refroid.r; elle fe détache de la poë'e, on la
depofe fur un papi r , & l’on continue ainfi jufqu’à
ce-qu’on ait épuifé la marmite.
La précaution de chauler les bafïins de cuivre ou
les poêles de fer, eft trèc - canféqüente ; la. plus
légère humidité f it éparpiller au loin le nitre fondu
qui brûle, & blelfe dangereufemer.t. On a vu longtemps
dans Paris un par; iculier qui avoit perdu un,
oeil pour avoir négligé ce foin important.
H bon d’avertir auffi que, (î le cryftal mi-
nérai préparé*de cette man ère eft très-blanc, il
n’eft pas pur j les la'etés font con'umées, mais le
fèl marin y eft tout entier ; or le nitre de première
cuite en tient beaucoup; auifi un pareil c y fiai
minéral s’humede-t-il à l'air, & eft-ii ialé,-au lieu
d'être frais fur la langue,
. Les diftil'atêurs fondent de cette manière le nitre
qu’ils retrouvent dans la leflive de leur, ciment,
pour le blanchir ; ils eu font des pains d’à-peu-près
trois pouces .d’épais, ce qui leur facilite de le con.-
ferver en tas jufqu’à ce qu’ ils en aient befofii dans
leur commerce. Ils en obtiennent du nfire purifié
& en belles aigu lies. Ils font réloudre un de ces
pains, par exemple, dans ce qu’il lui faut d’eau
froide; après avoir filtré & légérermnt. évaporé,-
ils placent les terrines dans l’étuve, où le nitre fe
forme feul en beaux cryftaux, parce que le fel
marin n’a pas eu occafîon de cryftailifer dans un
liquide auffi peu rapproché.
Peut être parviendroit - on auffi à obtenir du
nitre très-pur en changeant quelque chofe dans
l’appareil de la fufîon du nitre. Toutes choies
égales, le f il marin eft plus lourd que 1 n/tre.
Da s l’état de fufîon, chaque fel jouiflant de
fa pefanteur; le fel marin doit Te féparer &'
fe précipiter ; il ne s’agit que de rendre cette séparation
plus tenfîble; Subftituons à la marmite un
creuset plus profond que large, tenant long-temps
le nitre «1 fufîon & le lnifiant refroidir dans le
creufet ; on verra fî le fel 'marin n’ëft pas dans le
fond de ce creufet. Quelques e fiais faits en petit
femblent autorifer à indiquer avec confiance cette
manipulation.
Fabrique de l'alcali fixe.
La meilleure potafle eft celle de Norvège ; elle
doit être sèche d’un blanc bleuâtre , & que fur-tout
e'ie n’ait pas l’apparence d’être vitrifiée.»Quand on
doute qu’elle foit bien recuite, on la met paffer
la nu't dans une galère qui a travaillé le jour précédent,
en i’y arrangeant comme on fait l’argilie pour
l’y fécher. Cette chaleur fuffit pouV achever de
détruire les matières qui ne font pas aifez brûlées,
& pour développer plus d’alk^li.
. On la concàfïe enfuite groffièremenr,. on en
charge des tonneaux défoncés & mis debout, & on
jette de l’eau pour en faire la'leffive , comme on l’a
fait pour le cfment. On fait paffer cette ltffive dans
un autre tonneau où eft de la potaffe delïalée^ mêlée
: à un peu de chaux.
Par la première, manipulation, on dépouille la
pot aile de fon. fel : par Jà .fécondé on en dégraifle
& on clarifie la .leflive qu’on fait évaporer dans
la marmite de fer du fourneau à marmite.
Lorfque la matière commence a (epécher, on
diminue Faélivité du feu , on remue incelîamment
'& on écrafe la ma (Te faline avec une efpèce de
pilon de bois, dont la tête eft garnie d’une plaque
de tôle. Sitôt que le tout eft bien fc c , on mette
Tel dans des cruches exactement égouttées & fe-
chées , on lés bouche avec foin , & on les\ enma-
gafîne dans un Heu bien fee-, Te l eft ce qu’on
appelle dans le commerce le fe l fixe de tartre»
Quand la potafle eft de bonne qualité, elle en
fournit de foixante & dix à foix.ante & quinze
livres par^quintal, qui coûte le plus cinquante-
cinq livres'; le quart de déchet mis pour équivaloir
aux fiais, un pareil fel fixe ne revient jamais
aux .fabriquans à plus de feize fols la livre.
Mais ce fel n’a point de prix fixe ; il dépend du
nom de la plant-: dont on le fait porteur : ainfî le
f l fixé de plantain le vend plus cher que celui
d abfînthef celui de gentiane plus que le Tel de
cent'îùréc, quoiqu’ils foient tous pris dans la même
cruche.
Cette manufacture n’exîfte point à Paris; c ’eft
dans la Champagne, & fur-tout à Saint-Dizier,
qu’elle eft en pleine vigueur. J’ai eu occafîon, dit
M, de Machy, d’examiner une caiffe adrefTée
de cet e ville à un de nos droguiftes de Paris; elle
coî tenoit dix-huit bouteilles de fels fixes, étiquetées
chacune diverfement. Je ne fus pas médiocrement
furpris de leur trouver un air de famille,
*> que je confirmai par des elfais exaéts, & je fiis
"convaincu que ces- dix huit fels fixes étolent fils
d’une même mèie, portant feulement un nom &
des p. ix différens.
Tl s’en faut, outre cela , de beaucoup que le fel
fixe préparé en Champagne feitun fe! pur. Plus la ‘
potaffe eft ancienne , plus elle tient de tartre v itriolé
; la plus nouvelle en tient une aifez notable
quantité'; ou ne fe donne pas la. peine dé le retirer:
âu contraire, on'le confirvè & où le mêle foigneu-
fement au Tel fixe en faifant les • leflive s, avec de
l'eau bouillante, qui diffout efficacement l’un &
l ’autre fel.
Ceux qui veulent purifier un pareil fel alkali,
font obligés- de le difibudre à froid dans 1: moins
d’eau poüib'e, de laiffer plufîeurs. jours la folution
dans un endroit frais ; à la longue , le tartre vitriolé
qui va quelquefois jufqu’à faire le tiers du total, fe
çryftaliife, & l ’on fait deffécher la leflive reliante,
qui eft un pur alkali.
Le fel fixe des Champenois a encore un autre
défaut; il eftfouvent cauftique au point de paroître
une vraie pierrre à cautère,. Cet accident vient
de ce qu’en travaillant en grand, ils négligent
de modérer le feu vers la fin de l ’exfîccation ; la
matière s’attache aux parois de la marmite , & s’y
décompofé au point qu’en diffolvant & filtrant un
pareil fe l , on trouve fur le filtre beaucoup de terre
grifâtre, qui, combinée avec l ’alkali', lui donnoit
l'a caufticiié ; joignez à cela l’ufage où ils font de
purifier leur leflive fur de là chaux ou de la craie.
Les diftillateurs de Paris préparent un alkali fixe
du tartre de la manière fuivante.
Ils mettent dans des cornets de papier. de la
trême de tartre concaffée,à ladofede deux on'ces au
plus ; on établit dans Te fourneau de réverbère ,
dont on a oté la grille > un premier lit de charbon,
un lit de ces cornets, &on l’emplit de cette manière
jufqü’à cé que le fourneau foit comblé. On met le
feu par le haut du fourneau. Si on i’aliumoit par le
bas, la totalité du charbon s’allumant à la fois .
non-feulement la calcination du tartre., mais ta vitrification
en partie de l ’aikali formé , auioit liai.
Il m’eft arrivé, dit M. de Machy, d’avoir une
fois toute une mafTe de crème de tartre vitrifiée au
point de ne plus fournir d’alkali. Pour éviter cet
inconvénient, quand une fois le charbon eft bien
allumé, on bouche la porte du cendrier.
On r. trouve après l ’opération les cornets convertis
en une mafle fpongieufe d’un blanc verdâtre,
qu’il ne s’agit plus que.de leffiver, filtrer & faire
évaporer à fîccité.
L<a crème de tartre fournit depuis trente jufqu’à
trente-trois livres d’alkali fixe au quintal, ce qui
fait piès du tiers ; & on veut envahi faire accroire
que cette quantité d’alkali eft toute dans la crème
de ta'tre ; enforte que ce ne feroit qu’un fel neutre
avec forabondance d’un tiers d’acide.
Lé fel de tartre préparé de cette maniéré eft dès
la première cxficcation fuffifamment blanc, ce qui
n’arrive pas toujours avec le tartre : voilà pourquoi
nos diftillateurs préfèrent Ja crème de tartre ; ils
évitent la peine de calciner leur produit une fécondé
fois. Qu’on compare maintenant les deux opérations
, celle de Champagne & celle de Paris : le
fe! préparé par les diftillateurs.de Paris leur revient
toujours au moins à deux livres la livre.
Il fe prépare auffi à Grenoble de vrai fel de
tartre. Le Dauphiné abonde en vins qui fe tran£
portent rarement, & qui font très-tartaàoux. Cette
derniere matière y étant prefque fuperflùe, met le
fabriquant à portée de livrer fon fel de tartre à un
prix aifez modique ; mais foit qu’il le calcine trop ,
comme font les Champenois , foit que l’ù.age où il
eft de filtrer fes Ieflives fur de la craie pour les dé-
graifler, y combine une partie de cette terre , le
fel de tartre de Grenoble a l’excès de caufticité de
celui de Champagne , &• depofe beaucoup de terre
-lôrfqu’on veut le purifier.
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