
On fait que les fëls font d’autant plus purs &
plus parfaits que la forme fous laquelle iis fe pre-
ientent, approche dav antage de celle que la nature
leur a afllgnée. Le fucre candi eft donc dans l’état
le plus parfait qu’on puifle defrrer, & les moyens
qu’il convient d’employer , pour extraire' le fel
eflentiel de la canne, doivent donc être fondés fur ce
principe de chÿmie, cryjlaüifer à g ra nde eau. , établi
pour tous les fels- qui cryftàllifent par refroidifle-
menf.
C’eft d’après ce principe qu’il convient d’établir
la cuite du vefou-firop & des drops, & qu’on doit
donner aux vafes , dans lefquels on met le fel
eflentiel à cryftallifer, la forme & la'contenance
les plus favorables pour la cryftailifation & la purgation
de ce fel.
Nous parlerons d’abord des, purgeries & de leur
difpofîtion interne , pour l ’extraéHon du lel eflentiel
par la nouvelle méthode.
Des purgeries.
Les'purgeries, dans-la nouvelle méthode, fervent
à mettre le fel eflentiel à cryflallifer & à purger.
Ces bâtimens doivent être trèsdarges& co.nftruits
fur la même ligne, afin qu’on ait moins d’étendue
à parcourir pour le iervice & ‘qu’on puifle v oir ,
d’un coup d’oe il, tout ce qui s’y p'alfe. Ils pré Testent
intérieurement plufieur files de cryfiallifoirs établis
fur des gouttières ; qui fe terminent à des baflins.
Les cryfiallifoirs doivent avoir tons la même
forme & la même contenance. Une certaine quantité
efl déterminée à recevoir le vefou-firop cuit
dans la fucrerie ; & les.- gouttières fur 'lefquelles
ils font établis, ont leur baflîn particulier.
D’autres cryfiallifoirs font deftinés à recevoir
les premiers firops de vefou cuits, leurs gouttières
doivent avoir' un baflîn particulier.
Les féconds, troifièmes & quatrièmes firops cuits,
doivent aufli avoir leurs cryfiallifoirs & leurs b,af-
■ fins ; afin que les produits en fucre & les firops
ne fe confondent point, & qu’011 puilfe les traiter
féparément.
L’expérience nous a démontré que la fomme de
matière qui réunifient le plus grand nombre de
circonftances favorables pour Ja cryftailifation du
fel eflentiel de la canne-rfucrée, étoit de quinze à feize pieds cubes ; .& c’eft d’après cette connoif-
fânee que nous nous fommes arrêtés à la forme &
aux dimenfions .de la caille que nous allons dé*
•crire. ' -
Nous avons encore imaginé de donner au fond
de cette caifle diverfes difoefitions , dont l’effet efl
•moins fur & moins commode que celle a laquelle
bous nous fommés fixés';
Le cryjldllifôir- caijfe doit avoir cinq pieds de
long fur trois de. large. Son fond efl Conformé de
deux plans inclinés de fix pouces, dont la réunion
forme une gouttière qui répond à la ligne centrale
de la plus grande dimenfîon. Il y a , dans cette
gouttière , douze à quinze trous d’un pouce de
diamètre, pour l’écoulement des .firops. Sa .profondeur
eft de neuf pouces fur les côtés, elle va
en augmentant vers ,1a gouttière , ou elle a quinze
pouces. Le cryftallifoir-caifle doit être fait avec
des planches d’un pouce d’épaiifeur, & doublé en
plomb laminé très-mince.
Il convient, avant que de doubler .la caifle,
de percer les trous de la gouttière, & de brûler
; intérieurement, avec une boule de fer roùgje, le
pourtour o’e ces trouç ; de manière qu’il prefente
une légère concavité au milieu de laquelle fo trouve
le trou. Par cette difpofîtion il ne refle pas une
goutte de fîrop dans la caifle après la purgation.
Les.trous font 'girnis avec, des viroles de cuivre
étamées ou de fer-blanc foudées intérieurement
au doublage, repliées extérieurement, & clouées
fur le fond. Les cailles , ainfî faites & doublées
avec foin , préfentent tous les ayantages poflibles,
quant à la cryftailifation Sc purgation du fucre,
& quant à la folidité.
Ces caifles font établies'fur des traverfes fixes,
foutenues par des potelets , à huit à dix-ponceâ
au-deflus du fol-. Les traverfes font faites avec des
planches de deux pouces d’épaifleur , fciées en
long j fur une largeur de trois pouces* Elles font
clouées & fixées fur les potelets, à dix pouces de
la ligne centrale de la.gouttière,Adont elles fuivent
parallèlement la direction.
Les gouttières fur lesquelles font établies les
caifles , font faites, en maçonnerie & inclinées vers
le baffin- qui reç ût les firops. Elles doiveut être
enduites en ciment-& doublées ■ en plomb laminé.
Quoiqu’elles foient inclinéesnéanmoins les tra-
! vtrfos font fur un plan horifontal, & gardent le
niveau êntr’elles. I
Les baflins à fîrop-, fîtués à l’extrémité des goût-
> tières, font creufés à plufîeurs pieds de profondeur,
le plus près poflible de la rafinerie; ils .font faits
en maçonnerie & doublés en plomb. Leur contenance
doit être à-peu-près de la moitié de la
fomme des! caifles , dont ils reçoivent les firops1.
; Ils font ft couverts en madriers à fleur de terre,
& préfontem une ^ouverture, en forme de trappe ,
[ dans le bout qui répond à la rafljperie,
Onfixje la cube du vefou-firop au thermomètre;
le degré qui conviait pour ofrenir, dans la plus
grande proportion , le fel eflentiel- cryftallifé en
caifles , fous la forme la plus belle & la plus régulière
, eft quatre-vingt fept Sc- demi à quatre-
vingt huit. Lorsqu'on s’eft afluré du degré de cuite
convenable , ; on éteint le feu , en fntroduifant dans
le fo.yer dèux ou trois piquets de têtes de cannés*,
ou de bagafles vertes ; alors-Y fans courir aucun
rifque de brûler le fucre', on vuîde le produit de
la chaudière a cuire, dans le r,ifraichiiToir qui fait
partie du laboratoire. De-là, on le porte tout de
fuite dans une caifle dont on a eu foin de boucher
les trous avec des chëviiles de bois garnies de
paille de maïs.
Il faut encore avoir l’attention de rftett- e autour
•de cc$ chevillés, dont la pointe-.s’élève intérieurement
de trois ou quatre pouces, une petite quantité
de fucre fur lequel on verfe un peu. de vefou-firop
cuit, qui, en fe refroi H fiant ‘ promptement, fait
corps avec le fucre , s’attache à la cheville & la
retient.
Les caifles font fondion de fécond rafraîchifloir;
011 les remplit dé deux cuites qu’on mêle bien
enfcmble , au moment où on les réunir.
La matière, ainfî .dépofée dans-Ûa caifle fe r:-
froicit lentement , après vingt-quatre heures ,
Ja crydal.ifation s’étant établie à ia furface , aux
parois & au fond du cryftallifoir , il convient d’imprimer
alors à toute là mafie, fluide encore, un
léger mouvement avec un. mpùve on , en ayant
foin d’élever vêts la furface le fel eflentiel qui s’eft
déjà dépofé au fond. Après cette op'ration, la cryf-
tallifotion fe fait fîmuifanément dans toute I’éten lue
de la caifle ; & fi le mouvement a été imprimé à
tems & bien entendu , la cryftailifation, en cinq
ou fix, heur.s ; devient générale & égale , depuis
le fond jufqu’à la furface.,
On fait qu’il y a une infinité de confîdérations
à avoir dans le mouvement qu’on applique à-la
matière en cryftailifation, par rapport à fa qualité,
au degré de cuite qu’elle a reçue, au degré de re-
froidiflemont où elle'fe trouve, & à l’ état dans
lequel on peut obtenir le fel eflentiel. .
Après quatre à cinq jours la mafie tot-fle étant
refroidie , il convient de tirer lts chevilles; alors
la purgation fe fait très-promptement, & après fix
à huit jours, elle eft abfolume >t complette.
Le fel eflentiel bien purgé de fon fîrop eft ié-
gerem-.nt humide} ma:s , pour peu qu’il foit expofé
a i’air , il devient parfaitement fec. Dans cét état,
il doit être mis en., barrique , où il convient de
le piler fortement comme les fucres terrés.
En; euifant le vefou-firop à quatre-vingt huit
degrés , on obtient .moitié & ii ême plus de la
quantité de fel eflen iel qu’il parte ; & fi la défécation
& la cryftalïifotion ont été bien entendues,
'ce fefoeft alors dans le plus haut degré de pureté
& de beauté qu’il puifle acquérir en brut.
Si, on ^ veut terrer le fd effenciel provenant du
vefou-firop putifié de la manière que nous venons
d’expofer ; on fe fert- .alors pour le mettre à cryf-
tallirer, ou dés caifles que nous venons de décrire,
ou de formes.
Lorfou’on fe fert de caifles, il faut augmentfer
le degré de cuite, & le porter de quatre-vingt-
huit, a quatre-vinge-dix : il faut aufli veiller avec
plus de foin à toutes les circonftances qui doivent
accompagner lé mouvement qu’on eft obligé d'appliquer
à la matière en cryftaliifation.
Lorfqii’on emploie des formes , il convient d«
difpdfer. une partie de la purgerie ,.en cabanes pour
les recevoir : comme nous avons vu dans la difpofîtion
interne des purgeries de l ’ancienne mér
thode.
On établit dans la fucrerie ou dans la purgerie
un fécond rafraîchiffoir de cuivre , de la contenance
de deux à trois miniers , dans lequel on
réunit trois ou quatre cuites, don: on remplit les
formes rangées pour cet effet, foit dans la fucrerie,
fort dans la p’irgefe , & on procède pour le relie
du travail de la manière que nous avens déjà dér
crite.
Les formes ne peuvent être employées que
lorfque le vefou-fîrop eft de bonne qualité, attendu
le d gré de cuite que leur contenan e & leur forme
conique exigent ; degré qu’il faut porter de quatre-
vingt- d x à quatre-v.ngt-douze, & que les vefou-
fîrops dé médiocre & de mauvaife qualité ne peuvent
fopporter. Dans ce cas , il faut néc .flairement avoir
recours aux caifles, ainfî qu3 pour la-cryftailifation
du fel eflentiel qu’on veut extraire de toutes fortes
de fîrops-vefou.
On procède dans la pu'gation des pains de Iel
eflentiel, dans l i préparation qu’il convient de
leur.donner pour le terrage, & dans cet e dernière
opération de la manière que nous avons décrite.
On doit obferver ici que le vefou ayant été
complètement dépouillé de toute matière folide, il
ne fe préfente dans la cryftailifation , la purgation ,
le terrage & l'étuvage du fel eflentiel aucunes
difficultés , Si qu’a près avoir fubi fes diverfes opérations
, ce fel eft parfaitement pur & aufli blanc
qufon puilfe le défîrer.
Nous avons fait conftruire, dit M. Dutrône ,
pour étuver ie fel eflentiel extrait & terré fuivant
la nouvelle méthode , une étuve d’une conftruc-
tion femblab e à-peu-près aux ferres chaudes de
ce pays-ci." Le fel eflentiel y r.çoit l’adion du
'foieil ; ce qui difpenfè de le mettre fur ie glacis.
Cette étuve eft échauffée pendant le-jour car le
foleil ; pendant la nuit un très petit feu fuffit pour
la foutenir à la température convenable, qui eft
de 36 à 40 degrés. Cette manière d'étuver eft
préférable en ce qu’elle eft plus expéditive, moins
difpendiéufo . & qu’elie donne au fel eflentiel un
oeil plus brillant & plus blanc.
Comme le local ne nous a pas permis de donner
à celle que nous avons fait conftruire ia meMeure
difpofîtion poflible , nojjs n’en offrons point de