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S O U D E-
( Art de récolter la )
O , appelle fonde le fel lixiviel ou les cendres
de plufieurs plantes qui contiennent du fel marin
& qui çroiffent pour ia plupart fur les côt. s maritimes
des pays chauds , quoiqu’on en tfcouye quelques
unes au milieu dès terres.
Les botaniftes n’ont éclairé jufqu à prêtent qu’im-
- parfaitement cet-e partie, 8t l’on trouve fi peu
d ’ordre & de clarté dans les noms & descriptions
qu’ils donnent des plantes dont on a coutume de
tirer la foude, que l ’on n’ofe en préfenter un ta
bièau complet. Ces. plantes ont refié prefque toutes
confondues fous le nom de kali , tandis que
plufieurs font de différens genres.
La foude - kali eft, fiiivant Tournefort", un génré
de plante à fleur en rofe, compofée de plu (leurs
pétales difpofées en rond. Le piftil fort du milieu
de cette fleur , & devient dans la fuite un fruit
prefque rond & membraneux, qui renferme un fruit
d’une forme fingulière ; car il efi contourné comme
un limaçon , & le plus fouvent enveloppé par les
pétales de la fleur.
Au refte, voici les fentimens des auteurs les
plus accrédités.
Soude ou-Ka/ï d’Alicante•
Kali à?Alicante ou d’Efpagne. Sa defeription
faite exactement par M. de Juffïeu dans les mémoires
de l’académie des fciences 1717 nous in-
téreffe , parce, que c’eft de cette efpèce de kali
qu’on tire la meilleure foude , fi recherchée dans
la verrerie , la. fàvonnerie, la blanchifferie, arts
Utiles & nécéfïaires.
M; de Juflieu cara&êrife cette plante Kali Hif-
panicum . fupinum , annuum y fidi foliis brevzbus :
Kali d’Efpagne , annuel, couché fnr terre, à feuilles
courtes fèmblables à/celles du Sedum.
Sa racine efi annuelle, longue de quelques pouces,
un peu oblique, blanchâtre, arfondie, li-
gneufe & garnie de peu de fibres.
De fon collet fortent quatre à cinq branches couchées
fur terre , fubdivifées dans leur longueur en
plufieurs petits rameaux alternes étendus çà & là ,
les uns droits, les autres inclinés. Les plus longues
de fes branches n’ont pas demi-pied, & leur diamètre
n’excède pas une ligne. Ces branches & ces
rameaux font arrondis, d’un vert pâle, & quelquefois
teints légèrement d’un peu de-pourpre, fur-
tout dans leur maturité.
Les feuilles dont ils font chargés font difpofées
par paquets, alternes, plus ou moin's écartés ,Suivant
l’âge de là plante ; elles font cylindriques &
fucculemes , comme celle de la Triple-Madame,
ou Sedum minus teretifolium, longue d’environ un
quart de pouce, fur une demi ligne d’épaiffeur ,
d’un verdpâle-, prefque tranfparentes ? liffes, fuis
poils , émouffées à leur extrémité & d’un goûtfalé.
Chaque paquet efl: formé de deux , trois, quatre
8c quelquefois de cinq feuilles, de l’alffelle def*
quelles naît la fleur.
Elle efi compofée de cinq étamines blanchâtres,
à fommets jaunâtres & d’un pareil nombre de petits
pétais, étroits & blanchâtres. Le jeune fruit qui
en occupe le centre efi terminé par uu ftilet blanc
& fourchu. .
Cette fleur n’a point d’odeur, 8e fes pétales qut
enveloppait plus étroitement le fruit à mefure qu’il
groflît, d’étroits 8e cachés qu’ils étoient dans le paquet
de feuilles- qui leur fert de calice, deviennent
plus amples , plus épanouis , plus fecs, membraneux,
arrondis dans leur contour, un peu plif*
lés 8e prefque gaudionnés.
Souvent deux de ces pétales s'unifient demantèie
qu’ils ne paroiffent en faire qu’un , 8c pour lors la
fleur femble être de quatre pièces feulement.
La fleur dure long-temps fans fe faner, 8e plu?
elle vieillit > plus le jaunt clair dont elle efi teinte
devient roufiâtre. Son plus grand diamètre efi a i i
viron de deux lignes..
Le fruit mur efi de la groiïeur d’un grain de
millet, arrondi , membraneux ^ renfermant une
feule petite temence brune 8ç roulée en fpiraîe. Il
efi fi enveloppé des pérales de la fleur , qu’il tombe
en même-temps qu’elle.
Quoique l’efpèce de kalL qu’on vient de décrire
croîffe fur les côtes maritimes de Valence , de
Murcie, d’Aimer le 8c de Grenade elle peut néanmoins
porter le nom de Kali d’Alicante , parce
qu’il n’y.' a point de lieu fur la côte orientale d’E f pagne
où il en naiffe une aufii grande quantité qu’aux
environs de cette ville.
soi> O O U
La foude qu’on en tire fuie un© partie Confidé-
ra'ole de commerce ; les marchands 8c étrangers la
préfèrent à celle que l ’on tire d’autres plantes ; &
les habitans du pays font fi perfu? dés que cette
efpèce ne peut prospérer ailleurs, qu’ils fe la regardent
comme propre.
Cette plante croît d’elle même: néanmoins pour
la multiplier, on la fèmé dans les .campagnes le
long du bord de la mer. On en voit même dans
des terres à blé auquel-elle ne peut nuire , parce
que dans le temps de la moifïbn , elle iie commence
prefque qu’à pouffer 8c qu’elle n’eft dans fa
parfaite maturité qu’eu automne.
La récolte du kali d’Alicante ce fe fait pas rout-
â-la-fois. 8c fans précaution, comme c.fel;e des autres
plantes dont on tire de la foude. On arrache
fucceflîvement de celui-ci les rejetions les plus
mûrs avec ceux qui le font moins, On les étend
fur une aire pour les faire fccher au foleil, 8c en
ramaffer le fruit qui tombé de lui-même.
Comme l ’abondance 8c la pureté de la foude
qu’il fournit fait fon mérite reconnu par les marchands,
ils font fort circoiifpeâs à prendre garde
que celle d’Alicante , qu’ils choififent pour l’employer
à des ouvrages exquis. , 11’ait été altérée en
brûlant le kali d’où elle provient, par le mélange
•d’auTes plantes qui donnent auffi de la foude ., ma:s
beaucoup inférieure en qualité à celle-ci.
. Ler ouvriers qui brûlent le plante kali , là nom-
m nt la Marie. '. o;i la _ coupe & on la fane eomme
le foin : lorfqu’elle efi lèche, l ’on en remplit de
grands trous faits exprès, dans la ter.e, 8c bouchés
enforte qu’il n’y entre que peu d’air. On y met
le feu, on la couvre; 8c quand elle efi réduite en
cendres , il s’en forme "après quelque temps une
pierre fi dure qu’on efi obligé de la cafîer avec des
maillets. C ’eft cette efpèce de pierre que nous appelions
Soude.
Soude de Languedoc,
La plante kali étoit autrefois très - èüitivée en
Languedoc, ou on 1 appelloi: Vi traire Cartel en parie
dans fes mémoires (îe l’hiftoi-re de cette province.
« L ’on retire aufïî, dit-il, un notable profit dans
».le pays d’ur.e herbe qu’on a coutume de fémer
»;& cultiver au bord de la mer, laquelle étant
M. venue à fàpeifeéUon , on la coupe, 8c après on la
'°*3 brûle dans un creux qu’on faic"dans ia 'te r re ,
” comme dans un fourneau, couvrant ce creux
»•de terre par-deflus., afin que le feu ne puiffe
» prendre air 8c afpirer. Cette he be étant brûlée ,
».Ion découvre ce creux'.qu’on trouve plein de
Û certaine matière dure qu’on appelle dans le pays
» Sait,cor, qui reffemble au fel en roche , 8c de
» laquelle on fait les verres ».
Il fe fabrique une fi grande
le Languedoc, qu’outre
quantité de ce falicor
la manufacture des
m ,
g1 aces de Venite qui s’en fourniffoit, ou en en*-
voyoit encore, dans d’autres pays de l’Europe. .
Aujourd’hui cette culture ne fubfifle plus , 8c les
diredeurs de la manufacture des glaces de Saint-
Gobin en France, tirent uniquement d'Efpagna
toute la foude dont ils ont befoin.
Soude de Varech.
L e Varech ëft une plante maritime nommée r, r
T o u r n e f o r t maruimus veficulas habens. Ce
herbe fe nomme en Bretagne Gonémon, fui
côtes du pays d’Aunis Sar^ 8c fur les côtes de
Normandie Varech.
Le Varech poufle plufieurs petices^tigesplates*
étroites", mais qui s’êlargiftent peu-à-peu en croite
fànt, 8c qui fe divifent en petits rameaux, portant
des feuilles larges -, oblongues, ayant quelque
réfTcmblairce à celles du chêne, cependant plus petites
, attachées avec leurs tiges par une fubfianca
tenace , pliante , membraneute, ordinairement lifW
fes , quelquefois velues ou couvertes d’un poil hiancj
c’eft peut-être la fleur de la plante qui efi fume
de graines' rondes ; il s’y élève aufîi des tubercule«
vides en forme' de yefires, tantôt oblongues, tantôt
rondes , tantôt plus grofles, tantôt;plus petites.
Cette plante efi fouvent baffe ôe quelquefois ëllè
croît jufqu’à la hauteur d'un pied 8c demi \
pendant qu’elle efi récemment cueillie, elle a unè
vilaine couleur jaune-verdâtre j mais fi on la fait
fécher elle devient noire, prineipalement celle qu’o*
à tirée des rivages fabfpnneux de la mer.
Pour faire la foudé , les pêcheurs,.ramaffent tout
le varech de flot 8c de rapport qui vient à l ’autre.
Quand ils ont une certaine quantité de ces herbes,
ils les fèchent &. les brûlent enfuite dans des
trous ou efpcces de fourneaux qu’ils font au pie£
des falaifes.
Voici la manière de brûler le varech telle qu’ell*
fe pratique dans le reffort de l'amirauté de Cher-#"
bourg.
On confiruit une fbfTe longue de 7 à 8 pieds
large de q à 4 , Sc profonde au-defîous de l’âtre d«
18 à io pouces. ■
On fépare cette foffe en trois ou quatre, au
moyen de deux pierres plates qui en trayfrfent it
largeur : au fond' font des pierres brutes Si plates,
|comme" dé gros carreaux ,- 8c que les riveraius trou--
vent aifément le long de ce rte ccfe.
Quand les foffes font faites, on les remplft de
Varech fec ; on y met le feu , 8c l’on fournit des.
plantes toujours jufqu’ à ce que les cendres aient
rempli une partie des folles dont on coffe Ltlouâf
qui s’y efi formée pour l’en retirer.
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