
retirée fe - defléché , perd fa confîftance , fur-tout
après les petites marées ; & le voyageur qui s’ébranle
s’y trouve enfermé & eft précipité avec ce
terrein mobile dans un courant fouterrain.
Quelques - uns regardent ces fables mouvans
comme des efpcces de puits que le flux de la mer
remplit de fable & que le reflux laifle à découvert»
Un courant foutertein en emporte l’aflife , & le
feul poids le fait aftàifler & engloutit le voyageur.
L e fables âe terre qui forme une bande compofée
de couches plus ou moirs horizontales annonce
un dépôt qui s’eft fait lors du féjour de la mer ou
d'un grand fleuve en cet endroit.
A l’égard des fable colorés , beaucoup ne réfle-
chifîènt pas les nuances qu’on cro t y v oir : c’eft
ee qu’on obfcrve notamment lorfqu’on fe promène
fur je fable de la colline de Bolbec dans le
psys de Caux y tout ce qui approche de ce fable
qui eft verd-gris paroît rouge. Les hommes, leurs
habits , leurs cheveux , femblent y prendre une
teinte el.rlre de lacque, ou parodient comme fi on
les voyoit à travers un verre de couleur rouge ou
pourpre.
Différentes efpèces de tangues de mer.
La tangue de mer eft une forte de fable marin :
ce fable que les riverains des côtes maritimes de la
Baffe -Normandie ramaffent fur les terres baffes
de. la mer pour ta . culture & l’engrais de leurs
terres, ou pour en former le fel au feu, eft une
efpèce de terre fabloncufe , beaucoup plus légère
que les fables communs des fonds., de la mer &
du bord des côtes» Ces derniers font ordinairement
blancs, roufsâtres, jaunes, & d'autres nuances, fui-
vant la nature de ces f.-ndsi. ils font a'tfli lourds ,
denfes & pierreux ; la tangue an contraire eft irès-
légère & approche plus de-la qualité de la terre:
C ’eft aufli par cette raifôn qu’elle fe charge plus
aifément du fel de l ’eau de la mer.
La marée rapporte journellement la targue le
long des côtes des amirautés de Granvffie, Cou
tances , Port-Bail & Carteret , Cherbourg & d’Ifi-
gny. Les r‘.vera:ns voifîns de ces côtes & même les ‘
laboureurs éloignés de pîufieurs. lieues dç la mer
.viennent la chercher,
Les uns répandent la tangue telle qu’ils l ’apportent
du rivage : les autres en font des tas qu’ils
nomment tombes Stforieresy qu'ils forment de cette
targue & de bonne terres qu’ils mêlent çnfemble ;
& quand ce mélangea refté quelque temps en maffe,
où il fe mûrit, les laboureurs le répandent fur
les terres qu’ ils veulent enfemencer,
Lçs laboureurs & les faulniers connoilient quatre
efpèces de tangue, ils boniment la première la
tangue légère, elle eft de couleur de grif-blanc ou
cendré clair, & la vivacité du foleil en fend
fuperficie toute blanche : il y a la tangue iifée que
cés ouvriers rejettent après qu’ils en ont deux ou
trois fois retiré le fel.
La tangue légère eft celle que l ’on ramaffè fur la
fuperficie des marais falans & fur les terres voi-
fînesdes embouchures des rivières oh la marrée l’apporte
facilement à caufe de fa légéreté.
Cette efpèce de fable eft fort imprégnée de la
qualité du fel marin ; on le ramalfe avec un râteau
formé du chantèau du fond d’un tonneau ;
plus le foleil eft v if , plus cette tangue a de qualité,
parce qu’elle eft plus chargée de fel.
Ceux qui la ramalfent n’en enlèvent fouvent
que l’épaiflèur au plus âe deux lignes.
C ’eft: cette efpèce de fable que les faulniers
recueillent pour la forma'ion du fel au feu, &
celle que prennent les laboureurs élognés du bord
delà met pour.échauffer leurs terres; cette tangue
étant par fa légéreté plus facile à tranfpor.er.*On
la trouve quelquefois à plufîeurs lieues de la
côte.
On ramalfe la tangue ordinairement en hiver,
temps où l’on n’eft point occupé à la culture des
terres, ni à leurs récoltes, & où les faulniers la
négligent. I
La deuxième efpèce de tangue fe nomme par
les riverams tangue forte. Elle eft poulfée, de
même que la première, par la marée, vers la côte
où elle fe repofe, & fouvent s’augmente de manière
qu’il s’y en trouve de l ’épaiffèur de i j à 18
pouces; cette tangue le pourrit en quelque manière;
elle devient alors d’une couleur d’ardoifej
elle n’eft d’aucun ufage pour les faulneries, elle
ne fert qu’aux riverains bordiers, Yoifi»s de la
mer.
Elle eft trop lourde pour être emportée loin
comme la tangue légère ; elle n’a pas au(Ti tant
de qualité, mais on y fupplée par la quantité
qu’on en met fur fes teires; les laboureurs la font
ramaffer en tout temps. On la tire avec la bêche
comme on fait la terre forte , St ceux qui en ont
befoin ( l’enlèvent avec des charrois ou fur des
chevaux.
La troifîème efpèce de tangue eft celle qui
provient des tangues légères qui ont déjà fèrvi à
l'ufage des faulniers , & dont ils font pendant les
chaleurs de l’été des amas ou meulons autour de
leurs faulneries; & lors qu’ils en ont t ir é , autant
qu’il eft poflible, le fe l, ils le tanfporteiit, (lu*5
rant les chaleurs fur le fond de leurs marais falans
qu’ils labourent ; ils y paffent enfuite la herfe,
& unifient cette terre fabloneufe avec un.infiru-
ment qu’ils nomment haveau y ce qu ils font peu
Ide temps avant les pleines mers des grandes mutées
qui couvrent alors leurs marais.
Cette culture échauffé le fo l , & rend cette
tangue plus propre à s’imbiber de nouveau du fel
marin. Les faulniers ramalfent enfuite la tangue,
l ’ardeur du foleil la fait blanchit ; & ils la
raportent autour de leur faulnerie pour en faire
un nouvel ufage.
La derniere efpèce de tangué eft la tangue ufée ;
c’eft celle que les faulniers avoient ^ ramaflee fur
le terrain de leurs faillies qu’ils avoient cultivé ,
& dont ils ont tiré une fécondé fois le fel.
Ces ouvriers, après ce fécond ufage, rebutent
ordinairement cette tangue, comme njoins propre
à reprendre de nouveau la qualité du fel.
Les riverains la viennent enlever comme on
fait la tangue forte, & s’en fervent de même pour
la culture de leurs terres : il refte à cette dernière
affez de qualité pour l ’ufage des labours ; &
d’ailleurs elle eft beaucoup moins lourde que la
tangue forte, fe peut enlever plus loin.
Il ne fe fait aucun commerce de la tangue,
parce que ce font ceux qui en ont befoin qui la
viennent eux mêmes enlever pour la tranfporter
fur les terres ; cette forte d’engrais eft libre comme
le fable marin , & le varech de flot , que la
inarée rejette journellerrïenfe à la ucô;e , & qui
appartient aux premiers qui le ramalfent, foit
qu’ils foient du territoire où ces engrais fe prennent,
ou des paroiffes éloignées , qui n’ont pas droit de
faire la coupe & la récolte du varech v if t croilTant
fur les côtes des paroiffes maritimes , aux habitans
defquels ces herbes appartiennent exclufîvement.
Quelquefois cependant les riverains , pour
s’exempter la peine de ramaffer la tangue ,
achètent cellé que les faulniers ont recueillie, afin
d’avancer leur travail, & ne point perdre leur tems
à recueillir la tangue dont ils ont befoin pour la
culture de leurs terres^
( Di61. de fhymie, â'HiJl. nat. G* de l'Encyclopédie,
)