
eft toujouts plus agréable au talon que vers la
pointe.
La compofîtion des lames de damas leur fait
foutenir une trempe beaucoup plus sèche que celle
des autres lames ; cette trempe eft même néceffaire
pour donner un peu d’élafticité & de dureté à leur
étoffe.
Au refte, je ne penfe pas qu’on doive craindre
pour ces fortes de lames, les accidens occafîonnés
ordinairement par la trempe, tels que des travers,
des gerçures, &c.
J’en ai fait tremper plufieurs, chauffées à un
degré fort au-deffus de celui indiqué pour les lames
ordinaires, & dans une eau très-fraîche, il n’en eft
réfulté à ces lames aucune caffure.
On polit les lames a l’éguiferie hors du trait de
meule avant de les faucer pour faire paroître-le
damas , & celles que l ’on veut dorer & mettre
au bleu, doivent aufli être gravées avant cette
opéra :ion.
Compofition de la fauce du damas.
On prend trois à quatre onces- de verd de gris &
quatre à cinq onces de vitiiol ; on pile le tout
dans un m orner, & on le jette dans un pot de
terre contenant environ quatre bouteilles d’eau ; an
met le pot furie f -u , où ce mélange doit bouillir
pendant une demi-rheure environ.
La qualité du verd-de-gris & celle du vitriol faî-
fànt celle du mélange , il arrive quelquefois que
les dofes c'-deffu1''font trop fortes, c’eft pourquoi
il eft bon d'eflayer la fauce encore chaude, mais
lorfqu’elle a ceffé de bouillir , en y plongeant la
lame qu lques inftans; & fi on l’en retire teinte
d’une couleur rougeâtre, on remet cette fauce fur
le feu en y jettant quelques morceaux de fer pour
lui faire employer fur e métal l ’excès de fon
aâivité > on i’effa;e dé nouveau jufqu’à ce qu’elle
procure à la- lame une couleur d’un noir cendré.
On laiffe enfuite rep fer le tout pour précipiter
les parties de veri-de-gris & de vitriol qui n’ont
point été mifes en diffolution; on décante, & la
liqueur qu’on en retiré eft ce qu’on nomme fauce
du damas.
On peut encore tirer parti du réfidu après la
décantation , en le faifant fécher au foleil & le
pilant enfuite dans un mortier ; on en fait une
nouvelle fmee en y ajourant du verd-.de-gris ou du
vitriol, ou bien il fertà revivifier l’ancienne l'orl-
qu’elle commence à s’affoiblir , ce qui arrive J.orf-
qu’on s-’ en eft fervi trois ou quatre fois au plus.
Il eft bon d’dbferver qu’une fauce qui a déjà
fervi procure une plus belle couleur au damas.
La manière de faucer les lames eft des plus
fimples. On fait d’abord chauffer la fâuce dans un
pot de terre ou autre , on la mer enfuite fur un
•feu de charbon avec les lames dans un vafe capable
de les contenir , de manière qu’elles foient
fubmergées par le fluide.
Les. vâfes ronds d’un petit diamètre j & dont la.
hauteur eft au moins ég-de à Ja longueur des lames
qu’on veut faucer, font fort commodes pour cet
objet ; il faut "qu’ils ne foient point dé matières
attaquables par l ’ac de de la fauce : ceux de terre
ou de - cuivre ont la propriété de réfifter a cet
acide.
Le plus bu le moins de profondeur qu’on veut
donner au damaffé des lames , détermine la longueur
du temps qu’on doit les 1 -ifler dans la fauce :
une heure au plus fuffit avec une fauce d’une
aâivité ordinaire , mais il eft. toujours plus, fur de
retirer de temps en temps la lame & de s’arrêter
au point que l’on cîefîre, car i! eft dangereux de-
vou'dir trop, approfondir le damas, fut-tout- s’il
eft un peu fin ; il fe.picotte, perd une partie du
deflïn de fes fleurs, & ne préfente plus qu’un mélange
confus de gravures fans ordre.
Les lames étant damaffées au point que l’on;
defire , on les.nétoxe en les frottant avec- du fable.
: très-fin & de l’eau, ou mieux encore avec des bâti
ures de fer pilées aufli très-fin ; & fi on ne veut
pas ‘ faire polir fur le damas , on achevé de les
luftrer à fec en fe fervant de tripoli ou de blanc
d’Elpagne.
Moyen de procurer plus de corps 3 & un meilleur
tranchant aux lames de Damas.
Ce moyen , qui confîfte à mettre une lame d’acier
fin entre deux étoffes de damas ; fe trouve indiqué
dans le mémoire fur l ’acier déjà cité ; mais
ayant fuivi avec exaâitude là marché des procédés
preferits par l’auteur de ce mémoire j il én eft
réfu’..té il eft vrai les deux avantages qu’on devoit
en attendre, tels qu’un meilleur tranchant &
plus de réfiftance dans la lame ; mais le damas ne
préfentoit plus qu’un faif eau-de fibres longitudinales,
& perdoit conféquerrent toute Ja valeur d’agrément.
Ayant donc recherché les caufes de cette diffor-r
mité , j’y ai remédié avec fuccès 1 en fuivant le
procédé ci-après. ,
J’ai indiqué ces caufes à l’article des précautions
à prendre pour la fabrication des lames de
Damas ; mais le foudage de la mife d’acier rend
leur effet bffn plus confîdérable.
J’ai dit plus haut que pour former le barreau
de Damas , on aflembloit d’abord horifoncaiement
cinq ou fix tringles tournées en v is , & qu’on les
recouvroit de deux rangées femblaffes , & exaâe-.
ment fuperpofées ; fi à Ja place dé la rangée du
milieu, on met une lame d’un très bon acier de '
deux ligne' d’épaiffeur environ & de là meme largeur
& longueur que chaque t’a gée de tr ngles,
qu’enfuite on fonde le tout avec les précautions
indiquées ci-deffu-s, on aura un barreau qui joindra
à la beauté du damas, l’avantage de procurer
une lame moins- füjette à être fauiiante & dont ie
traiichant fera uniforme.
Cette méthode eft pour les lames à deux
tranchans ; mais pour les lames à dos, & lors, qu on
veut que le dos montre aufli le damas, on fera la
lame d’acier fin un peu moins large & on mettra
dam côté trois tringles d’épaiffeur dans le barreau ,
en ayant foin de défigner ce côté au forgeur,
comme devant former le dos de la lame.
On peut donner aux lames faites d’après ces
procédés beaucoup de. dureté à la trempe, fans
craindré les travers même au tranchant, pareeque
l ’enveloppe'de damas dont celui-ci fe trouve encore
couvert avant l ’éguifage, le garantit & le conferve;
on enleve enfuite à l ’eguiferie tout le damas du
tranchant, ce qui peut fe fairé par un éguifeur
adroit, de manière à donner à ces lames un agrément
de plus. Quant à leur fupériorité furies autres,
elle eft je crois bien démontrée.
Lorfque ces fortes de lames doivent être étampées,
leur fabrication demande beaucoup d’attention,
tant ^ la forge pour la répartition de la matière i
qu’à l’êguifage, fi on veut les avoir légerès ; car
alors on court le rifque de découvrir l ’acier
fin du centre & alors plus de damas lorfqu-’on
fauce la lame.
L ’éguifeur n’ayant aucun moyen pour apper-
çevôir le terme où il doit s’arrêter, ne peut être
refponfable de cet accident. Au furplus une
lame étampée dont le poids feroit indifferent, ou
bien une lame platte ne préferitent point cette
difficulté.
Recherches fur le damas fait. dans le creufct.
Les différents damaffés des lames de vrai damas
que je me fuis procurées, m’avoient induit à croire
avec M. Perret, que plufieurs d’elles éioient d’un
métal fabriqué dans le creufec ; j’étois entraîné
dans cette opinion par la figuré de leur damaffé,
qui ne montroit dans les unes qu’un affemblagede
petits points très-multipiés , & de'différentes formés
qu’on n’appercevoit même parfaitement qu’à l’aide
de" la loupe, dans d’autres une infinité de petits
globules qui ont une foible faillie; dans d’autres
encore des taches ou fleurs plus ou moins diver-
fifiées, variétés qui me faiîbient penfer que cet
amalgame n’avoit pu fe faire qu’au créufet. .
- Fondé' fur cette opinion, j’ai cherché à imiter
ce damas en mettant dans un ci eufet de la groffe
limaille d’acier , §t la chauffant à un feu de
charbon de bois, je l’ai amenée à un état fuffifa-
rnenc pâteux pour en tirer une petite loupe,
capable de foutenir la pereuflion du marteau,
pour la fouder & en forger un barreau.
J’ai fait le même effai avec des copeaux d’acier
provenus du tour : j’ai enfin mêlé de la limaille
& des copeaux, & tous ces- effais m’ont donné des
barreaux , fi remplis de criques qu’il eût été inf-
poflible d’en tirer le moindre parti; je les ai fait
corroyer piufieurs fois pour les fouder parfaitement,
j’ai même placé entre deux morceaux de cet
amalgame, une lame d’acier fin, & après avoir
fait éguifer les barreaux provenus de ces différents
effais, & les avoir fait mettre dans la fauce, ils
ont montré un damaffé relatif à leur amalgame ,
malgré les corroyages multipliés qu’ils avoîent
éprouvés. L ’un d’eux même montroit un damaffé
tout - à - fait femblable à celui d’une lame de
vrai damas , que j’avois pour lors fous les
yeux.
Il feroit poflible, Je penfe., en. réitérant ces
effais, d’obtenir dès refultats plus fatisfaifans ;
mais les cireonftances ne m’ayant pas permis de
le. faire, ceux ci pourront du moins indiquer la
route, à fùivre ; ils paroiffent aufli prouver que les
fleurs du damas ne' font que le réfuitat de l’af-
lèmblage & de la difpofition d’un nombre infini
de foudures ; car ayant pouffé jufqu’à la fufion un
mélange de limaille & de copeaux de fer &
d’acier, j’en ai obtenu un lingot très-difficile à
forger, & qui n’a montré aucun damaffé à fa
furfaeë. quoiqu’il eût été laifîé dans la fauce plus
de 24 heures.
( C e t a r tic le e j î d e M. P r é v o s t ^ c a p ita in e
£ a r t ille r ie .