Cinquièmement, les propriétés des alkalis fixes
femblent à la vérité s’éloigner beaucoup de celles
des acides en général, & par conséquent de l’acide
vitriolique. .
Cependant fi l’on confidère d’une part qu’il entré
dans leur compofition une fi grande quantité de
terre qu’on peut en féparer beaucoup par des diffo-
îutions & calcinations réitérées, & que d’une autre
part, à niefure qu’on dépouilleainfices fubftances
falines de leur principe, terreux, elles deviennent
d’autant moins fixes, & d’autant plus déliquescentes
, en un mot, qu’elles fe rapprochent d’autant
plus de l’acide vitriolique à cet égard, il ne pa-
roîtra pas- hors dé vraifemblance que les alkalis fixes
ne puiffent devoir leurs propriétés falines à un principe
falin de la nature de l’acide vitriolique, mais'.
b'eaucoup déguifé par la quantité de terre & vraisemblablement
de principe inflammable auxquels
il. eft joint dans çes.çombinaifons. .
A l'égard des alkalis volatils, leurs .propriétés .
ainfi que la métamorphofe de l’alkali fixe-, ou de
fes matériaux en alkali volatil dans la pat réfaâîon &
différentes diftillations, femblent prouver fuffifam-
ment'qu’ils font des matières falines efientiellement
de même nature que l’alkali fixe, & qu’ils ne doivent
la volatilité qui les en difiingue qu’à une différente
proportion . & çombinaifon a de leurs principes 1
prochains«-
Outre ces faits principaux, il y en a encore beaucoup
d’autres, dont le nombre eft trop, grand pour
que nous en puiflions faire'mention ic i, même
fommairement ; mais ceux qui foudront-fe donner
la peine de recueillir & de comparer toutes les expériences
relatives à cet objet, doivent être prévenus
qu’ils en trouveront un grand nombre qui ne
font point encore fuffifammept çonftatées , & peut- •
être un plus, grand nombre encore qui n’ont pas été.
pouffées affez loin, & qui ne'font à proprement
parler que commencées*
Il en eft de la fécondé propofîtion fondamentale
'de la théorie des fels , que l ’acide vitrolique eft
un' compofé des feuls principes aqueux & terreux,
pomme de la première ; c’eft-à-dire qu'elle eft appuyée
fur plufieurs faits qui lui donnent un certain
degré de vraifemblance, mais qui ne fuffifent point
pour une démonftration complété : voici ce qu’il y
a de plus favorable à cette proportion«. •
Premièrement, l’expérience démontre conftam-
jnert que les propriétés des corps compofés font toujours
le réfultat de celles des corps compofans, ou
plutôt, que ce font ces dernieres même .modifiées les
unes par les autres,.*comme elles le doivent être
fJivant leur naturé.
Ainfi, fi un corps eft compofé de deux principes,
dont l’un foit fixe & fautre volatil, il • aura moins
de fixité que le premier & moins de volatilité que
Je fécond; s’il eft compofé de deux principes dont
l’un ait'beaucoup de péfanteur fpécifique, dont
l ’autre en ait fort peu, il fera moins péfant que le
premier de ces principes & plus pe faut, que le fécond.:
il en-eff de même de toutes les autres propriétés
effentielles, à l’exception de. celles qui fe
détrüifent l’une l’autre , comme l’eft par exemple
la tendance à la çombinaifon oH l’aélfon diffol-
vante; car ces dernières difparoiflenc d’autant plus
dans les compofés, que les principes qui les ont,
s’unifient plus- fortement & dans’ une plus jufte
proportion. - • , - .
Observons néanmoins qu’il ne s’enfuit pas de ce
que nous venons d’avancer, que les propriétés des
corps compofés foierittoujours exactement moyennes
/entre celles des c6rps<eompofansy car il faudrait _
poui cela que chaque- principe entrât en-quantité
>, égale dàns chaque compofé ; or 'c’eft ce qui m a
dieu que dans un fort petit nombre, peut-être même
dans aucun.
D’ailleurs il. y’ a dans la manière dont les principes
s’uniffent les uns aux aigres, des circonftan-*
ces particulières, qui continuent à altérer. p’u$
ou moi n s , dans le compofé-, le-réfultat de; leurs
•propriétés combinées ; par exemple, l’experience
a fait connoître que quand on unit enfemble plu--
fleurs corps, & particuliérement des métaux dont,
la péfanteur fpécifique eft bien connue-, 1 alliage,
qui çri réfulte n’a pas une péfanteur exactement
telle qu’elie devrait rifulter de la proportion des
métaux alliés; mais que dans certains alliages elle
eft plus grande , tandis qi»e dans d’autres elle eft
moindre. Il ne paroît pas moins certain d’un
autre côté qùe ces différences font toujours trop
peu confidérables' pour qu*on ne puilïè recoqnoître
les propriétés des principe? dans-les.compofés quiis.
forment, fur - toût quand ils ont des propriétés,
fort différences.
Cela pofe, en examinant bien les propriétés efo .
fentielles de l’acide vitriolique; on rçconoîtra fan?*
‘ peine qu’elles participent en effet de celles du prin->
cipe aqueux & du principe terreux.
Premièrement, lorfque cet acide eft dans la plus;
grande pureté où nous, puiflions l’avoir-, il eft,
comme l’eau & la terre vitrifiable les plus pures,
fansaucune couleur ni odeur, & eft de plus abfolii-*.'
ment diaphane.
Secondement, quoique nous ne puiflions avoir l’acide
vitriolique abfoliîment dépouillé de toute eau
furabondante à fon effence faline, & que 1 on n ait
pas pu par cette raifon déterminer exactement fa.
pefanteur fpécifique, on eft affuré néanmoins que
lorfqu’il eft bien concentré, il eft pins que dp flpu-
ble.pefant que l ’eau pure, & néanmoins beaucoup
moins pefant qu’aucune fubftance terreufe,
Troifiémement, cef apide eff beaucoup moins fiyç
qu’aucune terre pure , puifque quelque concentre -
qu’il foit, oii ge.ut toujours le faire paffex en eus.
tievi
tie r , dans la diftillatien ; mais il eft Infiniment
moins volatil que l’eau pure : il faut pour le faire
monter en entier dans la diftillation, un degré de
chaleur infiniment plus fort que celui qui eft né-
ceffaire pour diftiller ou évaporer l ’eau pure.
Quatrièmement, nous ne connoiflons point &
nous ne .pouvons même guere connoître au jufte le
degré de fblidité de l’acide vitriolique, ou l’adhérence
d’agrégation qu’ont entre elles fes parties
intégrantes, parce qu’il faudroit pour cela que nous
puiflions l’avoir dépouillé de toutes parties aqueufes
furabondantes ; mais à en juger par la confiftrmce
de cet acide très-concentré, qui va jufqu’à le ren^-
dre folide, comme' on le voit par l’exemple de
l ’acide vitriolique, qu’on nomme glacial, il paroît
que les parties intégrantes de cet àcide font fit fcc p-
tîbles d’avoir .entre elles une adhérence beaucoup
plus, forte que celle de -Féru pure, mais beaucoup
moins forte que celle de la terre, comme
on ie voit par l’exemple des pierres dures.
Cinquièmement enfin , l ’union que cet acide eft
capable de contrarier avec l’eau & avec les te1 res,
indique auflî que ces, fubftances entrent dans fa
compofition : car on fait qu’en général beaucoup de
compofés ont de. là difp'ofîtion à s’unir par fura-
bondance avec les principes qui les compofé! t.
Toutes ces propriétés de l’acide vitrio’ique qui
participent fi fénfiblemem & beaucoup plus que.celles
de tout antre acide, des propriétés de la terre & de
l ’eau, font bien capables de faire croire qu’il eft en
effet compofé de çes deux feuls principes ; ma;s il
en a une très-marquée que nous ne trouvons, ni
dans J’eau, ni dans la terre pure : c ’eft fa faveur
très-violente & très-corrofîve. Cette propriété ferait
capable de faire naître des doutes très-bien fondés,
s'il n’étoit facile de l’expliquer d’une m-mere qui
paroît affez fcfisfaifànte, d’après des principes qui
nous femblent certains & géré'aux , relativement
à la çombinaifon des corps. Nous allons les rap^
porer ici fommairement.
Nous o&ferverons donc au fujet de la propriété
dont il s’agit, c’ eft-à-dire de la faveur en général
, qu’elk ne peut et e regardée que comme ure
irritation faite fur les organes du goût par les corps
favouieux; or fi l’on y réfléchit attentivement, on
fe; a bientôt convaincu qu’aucune fubftance, lorsqu'elle
n’eft animée d’aucune force impülfive de fa
maffe totale, ne peut irriter ni ébranler nos parties
fenfibles , qu’en vertu de la force particulière de fes
parties intégrantes ou de leur tendance à la com-
binaifon, c’eft à dire de leur ad on diffoivante.
Dans cette idée la faveur- des, corps ou Fimpref-
fton que peut faire fur nos patries -fenfibles leur
tendance à la çombinaifon, leur ariion difiolvane,
ne font qu'une feu'e, & mçme propriété., & nous
voyons en tffet qu’il ri?y a aucun diffolvant qui n’àit
une faveur d’autant plus forte & plus marquée ,
Ans & Métiers. Tom. VU.
qu’il eft lui-même plus ad if : que ceux dont l 3
faveur eft fi violente qu’elle va jufquà l’acreté, à
la eprtofion, & à la caufticité, étanc appliqués fur
des parties fenfib'es de notre corps autres que les
organes dû goût, y excitent de la démangeaifon &
même de là douleur.
Cela pofe, il s’agit de favoir comment il eft
poflible que la terre, à laquelle nou-s n’apercevons
aucune faveur ni adion diffoivante , & l’eau qui n'a
non plus qu’une t ès^fo ble adion diffoivante, &
prefque point, ou même point du tout de faveur
fenfîble, forment par leur ccmbinaifon une fubftance
telle que l’acide vitriolique , qui eft un cor-
rôfîf & un diffolvant des plus puillans.
Pour concevoir cela, confidérons premièrement
qu’il n’y a aucune partie de matière qui n'aic en
elle une force en vertu de laquelle elle Ce combine
ou teqd à fe combiner avec d’autres parties de
matière.
Secondement, que cette force «font nous n’apercevons
les effets dans la chymie que dans les très-
petites molécules ou parties intégrantes & confti-^
tuantes des corps , paroît proporuonnée à la den-
fité ou pefanteur fpécifique de ces mêmes parties.
Troifiémement, que cette même force eft limitée
dans chaque ' molécule intégrante de la matière ;
qu§ fi on 4a confidère comme non fâtisfaite, & par
conféquent comme une'fîmpie tendance à la com-
binaifon^ elle eft la plus grande qu’il foit poflible
dans une molécule intégrante de matière parfaitement
ifolée & ne tenant à rien , & qu’elle devient la
plus pet te poflible ou nulle , lorfqu elle eft fatisfaite
par fa çombinaifon intime avec d’autres parties capables
d’épuifer toute fort rdion ; alors de tendance
qu’elle étoit, elle eft changée en adhéren.e.
Il >uit de là que les pa tie intégrantes du principe
terreux ont efTentiellemenr, & comme toutes les
autres-parties de la ma■ 1ère , une force de t ndance
à l’union, ou de cohérence dans l’union, fuivant
l’état ou elles re trouvent ; que comme ce principe
terreux a.une denfité ou pefanteur fpécifique infiniment
plus confidéràble que tous les autres corps
Amples que nous connoiftions , il v a tout lieu de
préfumer que fes- molécules ptimitivis intégrantes
ont la force de:tendance,à l’union plus confidéràble,
dans la même proportion, que les parties intégrantes
des autres pi incipes ; que par conféqueivt, lorfqu’ellés
for.t cohérentes enne elles, & qu’elle*- forment un
' agrégé, leur agrégation doit être nufli infiniment
pxus forte & plus ferme que celle de tous les autres
corps : auffi voyons-nous que les fubftances terreufes
les plus pures , dont ’es parties foi t unies & forment
de s malles, telles, que font, par exemple , les pierres
qu’on nomme vit ifiables , font les corps1. s plus
durs qu'il y ait dans la nature ; il n'eft pas moins
confiant que comme la tcndan:e des pairies* de la
matière à l’union fe manifefte d’autant moins qu’elle