
7 20
S U I E.
( Arc 8c produits de la )
X jA fuie , dit M. Macquer , eft un amas de fub-
ftances que forme la'matière de la flamme des
corps inflammables , mais qui ont échappé à ta
combuftion , faute d’un contaft fuffifant avec 1 air.
Cette matière qui s’attache dans les cheminées, eft
toujours d’une couleur noire * plus ou moins brune,
à caufe de l ’huile brûlée & demi - charbonneufe
qu’elle contient.
Comme tous les; corps inflammables fubilTent une
'décompofîtion totale par leur inflammation , tout ce
qu’ ils contiennent de principes Volatils*, & même a
l ’aide de çeux-ci, une partie de leurs pr.incipesfix.es
s’élèvent en vapeurs , dont une partie fe brûle avec
flamme, fe diffipe & détruit totalement , & une
autre partie fie fublims 5c- s attache .aux premiers
corps froids qu’elle rencontre.
X a fuie eft, comme nous le difions tout-a-l'Heure,
la portiçn de la flamme:qui fe réduit en fumée noire ,
& qui n’a pu .s’enflammer réellement, faute de con-
tadfuffifanf avec l ’air; car fi i<s vapeurs qui s’-ex-
liaient d’un corps inflammable fortement chauffe ,
étoient affez raréfiées pour que chacune de leurs
parties fulTent bien environnées d’air , elles fe brû-
leroient toutes avec flamme , . & alors on n’auro t
aucune fumée ni fuie ,-ou du moins cette fuie-ne ferait
point noire , & ne contiendrez plus rien d’inflammable.
C ’eft par cette railon que plus , on admet^ dair
entre les corps qui brûlent avec flamme , moins, on
a de fumée & de fuie ; & réciproquement la fuie ,,
quoique provenant des corps de même nature, doit
etre fort différente, fuivant la, manière dont il? ont
trûlé. i ;
En général, il n’y a rien de confiant fur la nature
les principes de la fuie; elle différé non-feulement
par les câufes dont nous venons de parler ,
mais encore par la nature des fubflances inflammables
dont elle p ro v ien t■ on lent bien queues
végétaux , dont on né retire point ou que très-peu
d’alkali volatil, doivent fournir une fuie différente
de celle des matières animales; que celle d’une
huile pure ne doit pas être la même que celle, d’une
plante pourvue de tous fes principes : mais ces
différences n’ont point encore été obfervces, parce
que les chymiftes ne fe font guère occupés de cet
?bjet4
On fait feulement que la fuie ordinaire des chc-1
minées a une faveur âcre , amère & empyreuma-
tique fort défagréable ; qu’elle fournit dans l^au
une matière colorante fauve, dont on ie fert dans
la teinture, ce qui prouve qu’elle contient des parties
falines , huileufes , favonneufes ; qu’elle eft
capable de brûler encore de nouveau très-vivement
& avec beaucoup de flamme, comme on le voit,
quand le feu prend dans les cheminées.
Si l’on diftiile cette fuie à la cornue , on en retire
du phiegme , de l’alkali volatil en partie coijh
oret, tn partie en liqueur, une huile noite eqipy-
reumatique, & il relie dans la cornue une matière
charbonneufe fore abondante, dont on peut retirer
de l'aikaii fixe après i incinéiation.
11 eft très poffible qu’on retire auffi une certaine
quantité d’acide de certaines lûtes ; & ordinaire*
ment en p'ouffai.t ia diitillation à un très-grand feu
fu r la fin , * on fait fubltmer un peu de fel ammo-i
niac.
Comme il n’y a aucune fuie , même provenant
de matières purement végétales, qui ne fourniflè
beaucoup d’alkali volatil , cela prouve que pendant
la combuftion à feu ouvert, les principes des végétaux
éprouvent des changemens qui ont quelque
reffemblancc avec ceux qn’oçcafîonne la putre-»
faétion.
De plus, la quantité de matière charbonneufe
fixe qui refte après la diftillation de la fuie , & qui
fournit de l’alkali fixe avec beaucoup de terre par
l’incinération , démontre qu’une quantité allez con*
fidérable des principes fixes des corps inflammables
eft enlevée & portée même très,- haut par l’effet d$
leur combuftion avec flamme,
Suie-engrais^
On regarde en Angleterre la fuie comme très-'
bonne pour l’engrais des terres. On voit fur-tout
quelle eft très-propre à faire périr les maùyàifes
herbes & les plantes aquatiques, telles que les joncs
& les rofeaux dans les prairies baffes. On affure
que lorfqu’on veut les détruire, on ne fait que les
enlever avec la bêche , & l ’on répand de la fiuq
par-deffus, ce qui les empêche de revenir.
Suie-teinture «
Les teinturiers le fervent de la fuie pour faire
une couleur fauve t qui eft 4fiez belle ; il eft vraS
qu’ellq
qu’elle eft d’une très-mauvsife odeur, ma!s en ré-
compenfe les draps & autres étoffes de laine , contre
cette efpèce de vers , qu’on appelle teigne , qui
les percent & Jes rongent.
Elle' eft auffi plus propre que la racine de noyer
pour faire les feuilles mortes & couleur de poil de
boeuf t fur - tout quand elle eft employée dans un
garançage où il y a du terra mérita.
Les teinturiers en foie , laine & fil) appellent la
fuie bidanet.
Suie - couleur.
Un principe de la fuie qui eft évidemment produit
par les matières combuftibles aélueilement
enflammées, c’eft la matière colorante n o ir e , qui
n’eft autre chofè qu’un charbon très-fubtil volati-
lifé , ou pour mieux dire, entraîné par la mouvement
rapide de la flamme.
Le noir de fumée qui eft la fuie des matières réfi-
neufes qui brûlent avec flamme, ne diffère de cette
matière colorante de la fuie vulgaire, qu’en ce que
la première eft un charbon à-pea-près pur ; & que
dans la dernière, ce charbon eft mêlé à de l’eau
& à des fubfiances buileufes 8c félines.
Autres produits de la fuie.
Les médecins chymiftes ont dès long-temps traité
la fuie par la diftillation à la violence du feu >
pour en retirer des remèdes, favoir, un alkali volatil
& une huile empireumatique , qui font des
produits de cette opération , & qui font connus
dans les chymies médicinales , fous le nom de
fe l volatil de fuie eu (Tefprit de fuie] félon que cet
alkali volatil eft fous forme concrète , ou fous liquide
, & celle d’huile de fuie.
Mais ces produits n’ayant que les qualités très-
génériques des matières de leur genre refpedif,
font à peine employés aujourd’hui, & ne méritent
en effet aucune préférence.
Lémeri & d’autres chymiftes, font auffi mention
d’un fel fixe de fuie , qu’ils eroyent être un alkali
fixe. S’il eft t e l , M. Baron a raifon de dire que
les propriétés médicinales de ce fel lui font com-
muues avec l’alkali fixe ordinaire , qui fe prépare
à beaucoup moins de frais.
Le fe l ammoniac vulgaire eft encore un produit
de la diftillation, à la violence du feu, de la fuie de
cheminée, où l ’on brûle de la boufe de vache.
Arts bf Métiers. Tom. VII. y y y y